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Date : 19990409


Dossier : T-746-98

Entre :

     ALAIN LEPAGE

     Requérant

Et :

     PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

     (Direction des appels)

     Intimé

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE ROULEAU

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire interjetée à l'encontre de la décision rendue le 9 mars 1998 par le Comité d"appel établi par la Commission de la fonction publique du Canada. Le Comité d"appel a décidé que l"exercice du droit d"appel du requérant était devenu périmé puisqu"il n"y avait plus de nomination effective ou imminente.

[2]      Le requérant cherche une déclaration que le Comité a erré en droit, en ayant négligé d"exercer le pouvoir prévu au paragraphe 21(3) de la Loi sur l"emploi dans la fonction publique1, qui permet à la Commission de remédier à une irrégularité qui aurait vicié le processus de sélection.

[3]      En mars 1996, les services du personnel de Santé Canada ont publié une affiche de concours pour une nomination intérimaire à un poste de chimiste, niveau CH-03, à la section des critères. Deux personnes ont répondu à cet avis, dont le requérant.

[4]      Le requérant, qui était en détachement à Santé Canada du 15 juillet 1995 au 31 mars 1996, est retourné à son poste d"attache au ministère des ressources naturelles à Québec.

[5]      Le 10 avril 1996, il a accepté la prime de départ anticipé accordée aux employés déclarés excédentaires. Sa démission devint effective le 9 mai 1996.

[6]      La candidature du requérant pour la nomination intérimaire a été écartée sous prétexte que ce dernier n"était plus, depuis le 9 mai 1996, un employé de la fonction publique du Canada. L"autre candidat a donc obtenu le poste. La nomination a duré du 1 juin 1996 au 31 mars 1997. Le poste a été aboli le 1er août 1997.

[7]      Le requérant n"a jamais reçu de correspondance au sujet de sa participation au concours. Il a donc présenté, le 20 novembre 1996, une demande d"enquête auprès de la Direction des enquêtes, de la médiation et de la conciliation de la Commission de la fonction publique du Canada. Le 16 décembre 1997, sa demande a été rejetée, pour le motif que la Direction n"avait pas compétence pour entendre cet appel. Le 5 janvier 1998, le requérant a interjeté appel auprès de la Direction des appels. La juridiction du Comité d"appel est décrite à l"article 21 de la Loi sur l"emploi dans la fonction publique:


21(1) Dans le cas d'une nomination, effective ou imminente, consécutive à un concours interne, tout candidat non reçu peut, dans le délai fixé par règlement de la Commission, en appeler de la nomination devant un comité chargé par elle de faire une enquête, au cours de laquelle l'appelant et l'administrateur général en cause, ou leurs représentants, ont l'occasion de se faire entendre.

(1.1) Dans le cas d'une nomination, effective ou imminente, consécutive à une sélection interne effectuée autrement que par concours, toute personne qui satisfait aux critères fixés en vertu du paragraphe 13(1) peut, dans le délai fixé par règlement de la Commission, en appeler de la nomination devant un comité chargé par elle de faire une enquête, au cours de laquelle l'appelant et l'administrateur général en cause, ou leurs représentants, ont l'occasion de se faire entendre.

(2) Sous réserve du paragraphe (3), la Commission, après avoir reçu avis de la décision du comité visé aux paragraphes (1) ou (1.1), doit en fonction de celle-ci_:

     a) si la nomination a eu lieu, la confirmer ou la révoquer;

     b) si la nomination n'a pas eu lieu, y procéder ou non.

(2.1) En cas de révocation de la nomination, la Commission peut nommer la personne visée à un poste qu'elle juge en rapport avec ses qualifications.

(3) La Commission peut prendre toute mesure qu'elle juge indiquée pour remédier à toute irrégularité signalée par le comité relativement à la procédure de sélection.

(4) Une nomination, effective ou imminente, consécutive à une mesure visée au paragraphe (3) ne peut faire l'objet d'un appel conformément aux paragraphes (1) ou (1.1) qu'au motif que la mesure prise est contraire au principe de la sélection au mérite.

5) L'article 10 et le droit d'appel prévu au résent article ne s'appliquent pas dans le cas où la nomination est faite en vertu des paragraphes 29(1.1) ou (3), 30(1) ou (2) ou 39(3) ou des règlements d'application de l'alinéa 35(2)a), ou en vertu du paragraphe 11(2.01) de la Loi sur la gestion des finances publiques.

21.(1) Where a person is appointed or is about to be appointed under this Act and the selection of the person for appointment was made by closed competition, every unsuccessful candidate may, within the period provided for by the regulations of the Commission, appeal against the appointment to a board established by the Commission to conduct an inquiry at which the person appealing and the deputy head concerned, or their representatives, shall be given an opportunity to be heard.

(1.1) Where a person isi appointed or about to be appointed under this Act and the selection of the person for appointment was made from within the Public Service by a process of personnel selection, other than a competition, any person who, at the time of the selection, meets the criteria established pursuant to subsection 13(1) for the process may, within the period provided for by the regulations of the Commission, appeal against the appointment to a board established by the Commission to conduct an inquiry at which the person appealing and the deputy head concerned, or their representatives, shall be given an opportunity to be heard.

(2) Subject to subsection (3), the Commission, on being notified of the decision of a board established under subsection (1) or (1.1), shall, in accordance with the decision

     (a) if the appointment has been made, confirm or revoke the appointment; or

     (b) if the appointment has not been made, make or not make the appointment.

(2.1) Where the appointment or a person is revoked pursuant to subsection (2), the Commission may appoint that person to a position within the Public Service that in the opinion of the Commission is commensurate with the qualifications of that person.

(3) Where a board established under subsection (1) or (1.1) determines that there was a defect in the process for the selection of a person for appointment under this Act, the Commission may take such measures as it considers necessary to remedy the defect.

(4) Where a person is appointed or is about to be appointed under this Act as a result of measures taken under subsection (3), an appeal may be taken under subsection (1) or (1.1) against that appointment only on the ground that the measures so taken did not result in a selection for appointment according to merit.

(5) Section 10 and the rights of appeal provided by this section do not apply to appointments made under subsection 29(1.1) or (3), 30(1) or (2) or 39(3) of this Act or subsection 11(2.01) of the Financial administration Act or any regulations made under paragraph 35(2)(a) of this Act.


[8]      Le Comité d"appel a rendu sa décision le 19 mars 1998. On a tout d"abord décidé que le ministère avait eu tort de ne pas considérer la candidature du requérant après que celui-ci eut quitté la fonction publique. En effet, tout candidat dans un concours interne peut interjeter appel en vertu de l"article 21 de la Loi sur l"emploi dans la fonction publique et ne perd pas son droit d"appel, ni son droit d"être candidat du fait que son emploi dans la fonction publique a pris fin. Cependant, l"article 21 de la Loi ne permet de contester que le mérite des nominations effectives ou imminentes. Le Comité a donc rejeté l"appel, pour le motif qu"il n"y avait plus d"objet à appel. Cette conclusion est conforme avec le passage suivant écrit par le juge Décary dans l"affaire Noël c. Ministère de l"emploi et de l"immigration, (1991), 136 N.R. 398 (C.A.F.):

     Malgré la sympathie que suscite la situation du requérant, nous ne croyons pas possible, en l"espèce, de dissocier l"enquête que mène le comité d"appel, de la décision qu"il a à rendre. Comme il n"y a plus de nomination, il n"y a plus de confirmation ou de révocation de cette nomination qui soit possible et, partant, la décision du comité d"appel, puis celle, l"entérinant, de la Commission, donc l"appel même, deviennent sans objet. L"article 21 de la Loi ayant cessé, dans les circonstances, d"être le recours approprié, le comité d"appel a eu raison de mettre un terme à son enquête. Il ne nous appartient pas de décider s"il est d"autres recours dont pourrait se prévaloir le requérant.         

[9]      Il est établi que le mécanisme d"appel prévu à l"article 21 de la Loi a pour but restreint de permettre à une personne de contester une nomination effective ou imminente devant le Comité d"appel. La Commission peut révoquer ou confirmer la nomination en fonction de la décision du Comité. Le paragraphe 21(3) donne à la Commission le pouvoir de corriger un vice du processus de sélection. Il n"octroie pas plus de pouvoir à la Commission en ce qui a trait à la nomination; voir Lo c. Comité d'appel de la Commission de la fonction publique et al , (1998), 222 N.R. 393 (C.A.F.) Donc, il faut nécessairement qu"il existe une nomination effective ou imminente à contester car autrement, il n"y a plus d"objet à appel en vertu de l"article 21.

[10]      Le requérant soumet que le Comité d"appel a erré en droit en omettant une étape de son analyse. Après avoir conclu que le ministère avait commis une erreur procédurale, le comité d"appel avait l"obligation de considérer expressément s"il y avait lieu d"exercer sa discrétion prévue au paragraphe 21(3) de la Loi. En d"autres mots, le Comité d"appel aurait dû examiner s"il pouvait remédier à l"irrégularité procédurale dont le requérant avait été victime. Il est admis cependant qu"en l"occurrence aucun recours en vertu du paragraphe 21(3) était réalisable, la nomination contestée étant terminée.

[11]      Je ne puis accepter l"argument du requérant. Tout d"abord, le pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 21(3) appartient à la Commission, et non au Comité d"appel. Par ailleurs, en l"espèce, il n"y a plus de nomination à attaquer. Un tribunal administratif ne commet pas une erreur de droit en négligeant de considérer un élément pratiquement inutile et sans conséquence. L"appel en vertu de l"article 21 était devenu théorique, et c"est à bon droit que le Comité d"appel l"a rejeté.

[12]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

     JUGE

OTTAWA, Ontario

Le 9 avril 1999

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     1 Loi sur l"emploi dans la fonction publique, L.R.C. 1985, c. P-33.

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