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Date : 20210121


Dossier : IMM-441-20

Référence : 2021 CF 72

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 21 janvier 2021

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE :

KULWINDER KAUR HUNDAL, NIMRIT KAUR HUNDAL, SIRTAJ SINGH HUNDAL

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés (SAR) a annulé la décision de la Section de la protection des réfugiés (SPR) selon laquelle les demandeurs étaient des réfugiés au sens de la Convention. La SAR y a substitué ses propres conclusions et a rejeté la demande d’asile des demandeurs pour une raison de crédibilité. Je juge que, ce faisant, la SAR a commis une erreur, car elle n’a pas déterminé s’il était nécessaire de tenir une audience. J’accueillerai donc la présente demande. Avant d’expliquer l’erreur de droit commise par la SAR, voici un bref résumé des faits.

I. Contexte

[2] La demanderesse principale et ses deux enfants (collectivement, les demandeurs) sont des citoyens indiens. Ils craignent d’être victimes de préjudices de la part du mari de la demanderesse principale, qu’elle a épousé en 2001,et prétendent qu’il les aurait soumis à de la violence physique et sexuelle avant qu’ils ne quittent l’Inde.

[3] Les demandeurs ont quitté l’Inde pour se rendre au Royaume‑Uni en 2004. Ils ont vécu avec le frère de la demanderesse principale jusqu’en mars 2009, lorsque les autorités du Royaume‑Uni les ont expulsés en Inde parce qu’ils ne possédaient pas de statut d’immigrant. À leur retour en Inde, la demanderesse principale s’est réconciliée avec son mari, et les demandeurs ont emménagé avec lui et ses parents. Selon la demanderesse principale, peu de temps après leur réconciliation, la maltraitance a recommencé. Elle affirme avoir été forcée d’effectuer des tâches ménagères sans pouvoir se reposer et avoir été agressée sexuellement à maintes reprises. Les demandeurs ont fui au Canada avec l’aide d’un agent, et sont arrivés en septembre 2015 sous de fausses identités. Ils ont déposé une demande d’asile en juin 2017.

[4] Le 18 juillet 2017, le ministre a déposé un avis d’intention de participer en personne à l’audience devant la SPR, sans mentionner de préoccupations particulières. Il a ensuite retiré son avis le 24 août 2017 — la journée de l’audience devant la SPR. Durant l’audience, le commissaire de la SPR a appris que la demanderesse principale avait vécu au Royaume‑Uni de 2004 à 2009 sous une fausse identité. Il a donc reporté l’audience et en a informé le ministre. Le 21 septembre 2017, le ministre a soumis de nouveau son avis d’intention de participer, sans mentionner de raison spécifique. L’audience a repris le 20 juin 2018. Le représentant du ministre a comparu devant la SPR une deuxième fois, mais, comme cela avait été le cas neuf mois plus tôt, il a seulement informé le tribunal que le ministre retirait une fois de plus son intervention.

[5] En juin 2018, la SPR a rendu une décision favorable envers les demandeurs (la décision de la SPR). Elle a jugé que le témoignage de la demanderesse à l’égard de la maltraitance passée et éventuelle était crédible. La SPR a déclaré ce qui suit dans ses motifs de vive voix :

[traduction]

En ce qui concerne la crédibilité, dans l’ensemble, je juge que la demandeure d’asile principale est un témoin crédible et j’estime que ce qu’elle a allégué pour appuyer sa demande d’asile est vrai. Mis à part quelques incohérences mineures, mentionnées plus haut, elle a témoigné de façon directe, et il n’y avait pas d’incohérences importantes dans son témoignage ni de contradictions entre son témoignage et les autres éléments de preuve que j’ai devant moi.

À la lumière de son témoignage fiable, j’estime que la demandeure d’asile a établi que son mari et l’ami de celui‑ci l’ont agressée physiquement et sexuellement à maintes reprises; que son mari l’a menacée de la retrouver et de lui faire subir des préjudices si elle quittait le foyer conjugal; et que sa belle‑famille et les membres de sa propre famille l’ont reniée après son mariage arrangé.

Les éléments de preuve sur le pays contenus dans le cartable national de documentation (CND) montrent qu’il y a un fondement objectif aux craintes de la demandeure d’asile d’être persécutée en Inde à titre de victime de violence fondée sur le sexe. Selon une réponse à une demande d’information figurant au point 5.11 du CND, certaines sources affirment que la violence contre les femmes a augmenté en Inde.

(dossier certifié du tribunal [DCT] à la page 126)

[6] La SPR a aussi conclu que les demandeurs n’avaient aucune possibilité de refuge intérieur viable compte tenu des difficultés auxquelles ferait face la demanderesse principale en tant que mère monoparentale en Inde sans soutien familial. Le ministre a interjeté appel de cette décision auprès de la SAR.

II. Décision faisant l’objet du contrôle

[7] Le ministre a soumis de nouveaux éléments de preuve dans le cadre de cet appel auprès de la SAR. Parmi eux se trouvent des documents antérieurs concernant de fausses identités utilisées par les demandeurs lorsqu’ils étaient au Royaume‑Uni et dans leur demande de visa au Canada, ainsi que des éléments de preuve établissant que la demanderesse principale a travaillé comme esthéticienne au Royaume‑Uni sans y être autorisée. Le ministre a soutenu que la SPR aurait dû établir si la demanderesse principale était exclue du Canada en vertu de l’alinéa Fa) de l’article premier de la Convention relative au statut des réfugiés, 28 juillet 1951, 189 RTNU 137 (entrée en vigueur le 22 avril 1954) [la Convention] compte tenu des crimes qu’elle pourrait avoir commis avant son arrivée au Canada. Une telle conclusion aurait exclu les demandeurs en application de l’article 98 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27, du Canada [LIPR].

[8] Le 16 décembre 2019, la SAR a infirmé la décision de la SPR et a conclu que les demandeurs n’avaient ni qualité de réfugié au sens de la Convention ni qualité de personne à protéger (« décision de la SAR »), pour des raisons de crédibilité, une question considérée comme étant déterminante.

[9] Premièrement, elle a soutenu que la SPR a négligé d’étudier les raisons pour lesquelles la demanderesse principale avait pris des années avant de demander l’asile — vivant sous de fausses identités durant cinq ans au Royaume‑Uni, soit de 2004 à 2009, et deux ans au Canada, soit de septembre 2015 à juin 2017, avant de soumettre une demande d’asile. La SAR a jugé que ce retard minait l’affirmation de la demanderesse principale selon laquelle elle est victime de violence, et que la SPR n’en avait pas tenu compte dans sa décision.

[10] Deuxièmement, la SAR a fait remarquer que le formulaire « Fondement de la demande d’asile » de la demanderesse principale ne faisait pas mention des motifs pour lesquels ses enfants demandaient l’asile ni du fait que leur père les avait aussi maltraités. Cette omission a soulevé d’autres préoccupations de la part de la SAR quant à la crédibilité.

[11] Troisièmement, la SAR a tiré une conclusion défavorable envers la demanderesse principale, car celle‑ci ne pouvait expliquer clairement sa situation financière, ni fournir l’identité de la personne qui l’a aidée financièrement afin qu’elle puisse faire voyager sa famille et habiter deux ans au Canada.

[12] La SAR a aussi tiré une conclusion défavorable en raison des nouveaux éléments de preuve soumis par le ministre. Elle a conclu que, même si la demanderesse avait déclaré avoir quitté le Royaume‑Uni dans l’espoir de se réconcilier avec son mari, un courriel établit qu’en réalité, elle avait été frappée d’une mesure de renvoi par les autorités de l’immigration du Royaume‑Uni. De plus, malgré son témoignage devant la SPR selon lequel elle n’avait pas travaillé à l’extérieur du domicile de son frère au Royaume‑Uni, le même courriel atteste que, lorsque la demanderesse principale a été interceptée à l’aéroport international de Heathrow, elle a admis avoir travaillé à titre d’esthéticienne dans le pays.

[13] Même si la SAR a fait remarquer que ses préoccupations liées à la crédibilité des nouveaux éléments n’étaient pas déterminantes, [traduction] « combinées aux autres problèmes à l’égard de la crédibilité, elles rend[aient] [ses] allégations peu crédibles ». La SAR n’était pas convaincue que ses allégations de mauvais traitement en Inde étaient fondées. Sur ce fait, la SAR a infirmé la décision de la SPR concernant la détermination du statut de réfugié.

[14] Enfin, même si le ministre avait aussi prétendu que la SPR avait commis une erreur en n’effectuant pas d’analyse relative à l’exclusion aux termes de l’alinéa Fb) de l’article premier de la Convention compte tenu des fausses identités et du fait que la demanderesse principale avait fait sortir ses enfants de l’Inde de façon irrégulière, la SAR a jugé que les demandeurs n’étaient pas exclus selon les éléments de preuve fournis.

III. Analyse

[15] Les demandeurs ont soulevé deux questions à trancher importantes dans le cadre de la présente demande. Tout d’abord, ils affirment que la SAR a admis injustement de nouveaux éléments de preuve relatifs à la question de l’exclusion en vertu de la Convention puisque le ministre avait retiré à deux reprises son intention d’intervenir devant la SPR. Cependant, comme la SAR n’a pas jugé qu’il y avait matière à exclusion et qu’elle a plutôt substitué sa décision à celle de la SPR en s’appuyant uniquement sur des motifs de crédibilité, je vais me concentrer sur la deuxième question à trancher soulevée par les demandeurs : la SAR a commis une erreur en admettant de nouveaux éléments de preuve qui soulevaient une grave préoccupation en matière de crédibilité et en n’envisageant pas la possibilité de convoquer une audience en vertu du paragraphe 110(6) de la LIPR. Le ministre réplique que la loi n’exige pas d’audience et que les conclusions de la SAR à l’égard de la crédibilité étaient raisonnables.

[16] Les deux parties s’entendent pour dire, tout comme moi, que le fond d’une décision de la SAR exige l’application de la norme de contrôle de la décision raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 23 [Vavilov]; A.B. c  Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 915 au para 14. En fin de compte, la principale question que je dois trancher, compte tenu de la conclusion défavorable liée à la crédibilité, est de savoir s’il était raisonnable pour la SAR de ne pas exercer son pouvoir discrétionnaire afin de tenir une audience.

[17] La SAR a l’obligation de procéder à sa propre analyse de la demande d’asile dont elle est saisie, tout en focalisant sur les erreurs identifiées par la partie appelante : Fatime c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 594 au para 19 [Fatime]; Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93 au para 103 [Huruglica]. Cela fait en sorte qu’elle doit examiner les décisions de la SPR en appliquant la de la décision correcte (Kreishan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CAF 223 au para 43-44; Huruglica au para 103). En faisant cela, la SAR doit tirer ses propres conclusions et fournir ses propres justifications intrinsèquement cohérentes et rationnelles pour satisfaire au critère de la raisonnabilité (Fatime aux para 19, 21; Vavilov au para 85). La SAR ne satisfait pas à la norme si sa décision ne répond pas aux questions centrales soulevées de manière transparente et intelligible (Gomes c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 506 au para 22).

[18] Dans la plupart des cas, un appel devant la SAR est tenu sans audience et est fondé sur le dossier dont disposait la SPR (LIPR, art. 110(3)). La personne faisant l’objet d’un appel peut seulement soumettre de nouveaux éléments de preuve s’ils surviennent une fois la demande d’asile rejetée ou s’ils n’étaient pas accessibles au moment de l’audience de la SPR, tandis que la SAR peut tenir compte de tous nouveaux éléments de preuve soumis par le ministre (LIPR, art. 110(3)-(5); Huruglica au para 56).

[19] Lorsque des preuves documentaires (i) soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité de la personne en cause, (ii) sont essentiels pour la prise de la décision relative à la demande d’asile, et (iii) à supposer qu’ils soient admis, seraient déterminants dans le cadre de la demande d’asile, la SAR peut exercer son pouvoir discrétionnaire pour tenir une audience (LIPR, art. 110(6)). Cela dit, une audience n’est pas accordée simplement parce que la SAR a admis de nouveaux éléments de preuve (Canada (Citoyenneté et Immigration) c Singh, 2016 CAF 96 au para 71).

[20] Je remarque qu’en l’espèce la SAR a admis de nouveaux éléments de preuve fournis par le ministre qui contredisaient directement des conclusions clés tirées par la SPR, y compris la conclusion selon laquelle la demanderesse principale était franche et crédible en ce qui a trait à la violence subie en Inde et son statut au Royaume‑Uni. La demanderesse s’appuie sur l’affaire Zhuo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 911 [Zhuo] pour soutenir son argument selon lequel la SAR a l’obligation de tenir une audience si les critères prévus au paragraphe 110(6) de la LIPR sont respectés, qu’une demande ait été faite ou non.

[21] Dans l’affaire Zhuo, la SPR a rejeté la demande d’asile, une décision que la SAR a confirmée en se fondant sur de nouveaux éléments de preuve fournis par le ministre qui ont eu un effet défavorable sur la crédibilité du demandeur d’asile. Le juge O’Reilly a fait remarquer que, selon lui, « la tenue d’une audience [serait] généralement requise lorsque les critères prévus par la loi sont présents » (au para 9). De plus, il a fait valoir que, même si la SAR a le pouvoir discrétionnaire de tenir une audience en vertu du paragraphe 110(6), elle doit exercer ce pouvoir discrétionnaire de manière raisonnable dans les circonstances (Zhuo au para 11). Ne pas exercer ce pouvoir discrétionnaire simplement parce qu’aucune partie n’a sollicité une audience ne satisfait pas au critère.

[22] Des décisions similaires ont été rendues dans d’autres affaires. Par exemple, dans l’affaire Tchangoue c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 334 [Tchangoue], la SAR a admis de nouveaux éléments de preuve soumis par un demandeur d’asile, mais elle a confirmé les conclusions défavorables rendues par la SPR à l’égard de sa crédibilité sans convoquer d’audience. La SAR a accordé peu d’importance aux éléments de preuve en raison de préoccupations liées à leur authenticité. Dans ses motifs, la SAR n’a pas effectué d’analyse en vertu du paragraphe 110(6) de la LIPR pour évaluer si une audience devait être tenue. La juge Roussel a conclu que la SAR avait négligé, de façon déraisonnable, de tenir une audience pour permettre à l’appelante d’aborder les préoccupations liées à l’authenticité des nouveaux éléments de preuve (Tchangoue au para 17). Elle a qualifié d’erreur sujette à révision le fait que la SAR n’ait pas effectué d’analyse exhaustive en vertu du paragraphe 110(6) (Tchangoue au para 18).

[23] Ainsi, la question clé en l’espèce est de savoir comment la SAR a envisagé et exercé son pouvoir discrétionnaire de tenir une audience, et si sa décision à cet égard était justifiée et transparente, et donc raisonnable (Vavilov aux para 15, 127-128). Comme les nouveaux éléments de preuve fournis par le ministre ont soulevé des préoccupations importantes liées à la crédibilité de la demande d’asile des demandeurs, et que la SAR a complètement laissé de côté le paragraphe 110(6), la décision de celle‑ci manque de justification et de transparence.

[24] Je reconnais que la SAR permet à un appelant et au ministre de solliciter une audience en vertu des Règles de la Section d’appel des réfugiés, DORS/2012-257, une requête qui doit être présentée par écrit, accompagnée d’un mémoire (art. 3(3)d)(ii), 3(3)g), 4(2)e) et 9(2)d); Horvath c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 147 au para 18 [Horvath]). Je remarque aussi que, selon la LIPR, aucune partie n’est tenue de solliciter une audience ou de convaincre la SAR d’en convoquer une, et qu’il incombe à la SAR de s’acquitter du fardeau d’aborder la question du pouvoir discrétionnaire (Horvath au para 18; Zhuo au para 11).

[25] Cependant, dans la présente affaire, le ministre appelant a sollicité une audience et a écrit ceci dans ses observations juridiques adressées à la SAR :

[traduction]

Le ministre demande à la SAR de tenir une audience afin d’aborder les questions concernant son identité, sa crédibilité et son exclusion. Si la SAR décide de ne pas tenir d’audience, elle devrait annuler la décision de la SPR selon laquelle les intimés ont qualité de réfugié au sens de la Convention et renvoyer l’affaire à la Section de la protection des réfugiés aux fins d’un nouvel examen.

(DCT, p 33)

[26] Malgré cette demande de la part de l’appelant (le ministre), la SAR n’a fait aucune mention du paragraphe 110(6) de la LIPR dans sa décision et n’a pas abordé la question de savoir si elle aurait dû tenir une audience. La seule fois où elle mentionné la tenue d’une audience est lorsqu’elle a précisé que la demanderesse principale n’en avait pas sollicité une (décision de la SAR au para 7). En n’abordant pas l’une des rares dispositions concernant la nature de l’appel au moment d’annuler la décision de la SPR et d’y substituer la sienne, la SAR a occulté le fondement sur lequel la Cour pourrait s’appuyer pour faire preuve de déférence envers la SAR quant à la procédure d’appel choisie. Même si l’interprétation que fait un tribunal de sa loi constitutive entraîne généralement un contrôle selon la norme de la décision raisonnable empreint de déférence (Vavilov au para 25), la déférence n’est pas justifiée dans les affaires où le tribunal n’a pas appliqué la loi lorsqu’il était tenu de le faire.

[27] J’admets que la SAR a mentionné que les incohérences dans les nouveaux éléments de preuve étaient déterminantes non pas en elles‑mêmes, mais seulement lorsqu’elles étaient évaluées conjointement avec d’autres problèmes de crédibilité. Cependant, il ne fait aucun doute que la SAR a accordé un poids considérable aux nouveaux éléments de preuve au moment d’effectuer son analyse. En effet, elle a écrit dans le sous‑titre précédant le paragraphe 27 de sa décision que les nouveaux éléments de preuve [traduction] « minent davantage la crédibilité » de la demanderesse principale.

[28] Si ces motifs ne justifiaient pas la tenue d’une audience, bien que de toute évidence ils le justifiaient, ils exigeaient au moins que la SAR envisage la nécessité de tenir une audience (voir Mofreh c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2019 CF 97 aux para 26-27). Comme le juge O’Reilly l’a conclu dans l’affaire Zhuo, où aucune des parties n’avait sollicité d’audience, « le fardeau incombe à la SAR d’examiner et d’appliquer de manière raisonnable les critères prévus par la loi [au paragraphe 110(6) de la LIPR] » (au para 11). Cela est particulièrement vrai dans de rares cas, comme en l’espèce, où la SAR infirme une conclusion favorable rendue par la SPR quant à la crédibilité. De telles situations exigent un raisonnement méticuleux, ainsi que des justifications claires, deux éléments qui font défaut en l’espèce, particulièrement vu que la demande d’audience par le ministre appelant n’a pas été abordée.

IV. Conclusion

[29] La SAR a commis une erreur en n’abordant pas la demande d’audience du ministre et en n’exerçant pas le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré au paragraphe 110(6) de la LIPR. En conséquence, j’accueille la présente demande de contrôle judiciaire. Les parties n’ont pas proposé de question de portée générale aux fins de certification, et je conviens que la présente affaire n’en soulève aucune.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-441-20

LA COUR STATUE :

  1. La demande est accueillie, et l’affaire est renvoyée à la SAR aux fins d’un nouvel examen.

  2. Aucune question n’a été soumise aux fins de certification, et je conviens que la présente affaire n’en soulève aucune.

  3. Aucuns dépens ne sont adjugés.

« Alan S. Diner »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mélanie Vézina


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-441-20

INTITULÉ :

HUNDAL ET AL c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE le 13 janvier 2021 À TORONTO, EN ONTARIO (LA COUR) ET À VANCOUVER, EN COLOMBIE‑BRITANNIQUE (LES PARTIES)

JUGEMENT et motifs :

le juge DINER

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 21 JANVIER 2021

COMPARUTIONS :

Aman Sandhu

pOUR LES DEMANDEURS

Courtenay Landsiedel

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Sandhu Law Office

Avocats

Surrey (Colombie-Britannique)

pour les demandeurs

Procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

pour lE DÉFENDEUR

 

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