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Date : 20210304


Dossier : IMM-1596-20

Référence : 2021 CF 203

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 4 mars 2021

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

ISRAEL SOLIS MENDOZA

KARINA SOLIS SOLIS

HIROMY SOLIS SOLIS

LUNA SOLIS SOLIS

BRISA SOLIS SOLIS

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [la CISR] a confirmé une décision de la Section de la protection des réfugiés [la SPR]. La SAR a décidé que les demandeurs n’ont pas qualité de personnes à protéger au sens de l’article 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR] [la décision].

[2] Nonobstant les observations écrites et orales extrêmement habiles de l’avocate des demandeurs, Me Jessica Chandrashekar, j’ai conclu que la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée en raison des contraintes juridiques et du dossier de l’affaire.

II. Faits

[3] Les demandeurs, un époux [le père], une épouse [la mère] et leurs trois enfants mineurs [les enfants] sont citoyens du Mexique. En 2009, après la naissance de la première enfant [la fille], le père a accepté un emploi de travailleur migrant au Canada. Il travaillait au Canada pendant plusieurs mois et retournait au Mexique pour le reste de l’année. Cet arrangement s’est poursuivi jusqu’à la naissance de leurs deux autres filles.

[4] Les demandeurs soutiennent que, le 18 août 2016, trois huachicoleros [voleurs de carburant] se sont rendus chez eux et ont exigé des frais mensuels d’extorsion. Le père était au Canada à ce moment-là et la mère a dit aux voleurs de carburant qu’elle n’avait pas assez d’argent pour les payer. Les voleurs de carburant se sont mis en colère et ont dit qu’ils ne la croyaient pas parce que son mari travaille à l’étranger. Ils ont aussi mentionné qu’ils savaient qu’elle était souvent seule à la maison avec les enfants.

[5] La mère s’est enfuie avec les enfants chez son beau-frère à Mexico. Le lendemain, le beau-frère a reçu un appel téléphonique des voleurs de carburant, qui lui ont dit que les demandeurs devaient retourner chez eux ou qu’ils en subiraient les conséquences. Les demandeurs ont également soutenu qu’un véhicule suspect avait été stationné à l’extérieur du domicile du beau-frère pendant deux jours.

[6] Le 1er septembre 2016, un voisin a appelé la mère pour lui dire que la maison des demandeurs avait été vandalisée. La mère et le père ont décidé qu’ils n’avaient d’autre choix que de retourner chez eux et de payer les frais mensuels d’extorsion de 5 000 pesos, que le père envoyait par virement mensuel. Deux personnes ont commencé à se rendre à la maison des demandeurs chaque mois pour recueillir les fonds.

[7] La mère a utilisé l’argent prévu pour les frais de juillet 2017 pour contribuer aux soins médicaux de sa propre mère quand cette dernière est tombée malade. Elle a demandé aux voleurs de carburant plus de temps pour payer, et ils se sont fâchés. Ils se sont emparés de la fille et ont menacé de l’enlever jusqu’à ce qu’ils reçoivent l’argent. La mère les a suppliés de laisser sa fille tranquille et leur a promis de payer le plus tôt possible. Les voleurs de carburant ont accepté après avoir porté les frais à 8 000 pesos.

[8] Les demandeurs se sont enfuis à Mexico et la mère a laissé ses filles avec sa mère, qui n’était plus malade, dans une autre ville et est venue au Canada pour en apprendre davantage sur le processus d’octroi de l’asile avant de rentrer au Mexique.

[9] Le père a pris des dispositions auprès de son employeur, a été libéré de son contrat de manière anticipée et est retourné au Mexique pour demander des passeports pour les enfants parce que les deux parents doivent être présents au Mexique pour que les enfants obtiennent leur passeport. Les demandeurs ont soutenu qu’ils se cachaient au Mexique et qu’ils n’ont quitté leur domicile que pour obtenir des passeports et faire établir un rapport de police. Après avoir reçu les passeports le 18 août 2017, ils sont venus au Canada le 11 septembre 2017.

[10] À l’audience devant la SPR, les demandeurs ont déclaré qu’ils croyaient que les voleurs de carburant étaient membres d’un cartel inconnu ou qu’ils y étaient associés. Ils ont également fourni des rapports psychiatriques sur la mère et la fille et des documents établissant un lien entre les voleurs de carburant et les cartels.

[11] La SPR a conclu que les demandeurs n’avaient pas établi que les voleurs de carburant étaient liés à une plus grande organisation ayant les moyens de les retrouver dans une autre région du Mexique. La SPR a conclu que la preuve relative à la situation dans le pays démontrait que les voleurs de carburant pouvaient être associés à de plus grandes organisations criminelles ou qu’ils pouvaient être des [traduction] « malfrats locaux ». La SPR a jugé que les demandeurs n’ont pas réussi à établir qu’ils courraient un risque dans l’avenir aux endroits où il pourrait y avoir une possibilité de refuge intérieur [PRI].

[12] La SPR a alors procédé à une analyse de la PRI et a conclu que les demandeurs n’avaient pas établi qu’il serait déraisonnable de leur part de se réinstaller au Mexique. Elle a rejeté leur demande d’asile et a conclu que les demandeurs avaient une PRI viable dans cinq villes du Mexique.

III. Décision visée

[13] Devant la SAR, les demandeurs ont soutenu que la SPR avait commis une erreur en concluant qu’ils avaient une PRI viable. La SAR a conclu que la question déterminante était l’existence d’une PRI au Mexique.

[14] La décision indique que les demandeurs ont reconnu que leurs demandes d’asile n’avaient aucun lien avec des motifs prévus dans la Convention; par conséquent, la SAR a examiné les demandes d’asile uniquement au regard de l’article 97 de la LIPR. Cela n’est pas contesté. La SAR souligne à juste titre dans la décision qu’il incombe aux demandeurs de démontrer qu’ils n’avaient pas de PRI viable.

[15] La SAR a conclu que la preuve n’appuyait pas les allégations des demandeurs selon lesquelles tous les voleurs de carburant sont associés à des cartels. La SAR a noté que même si certains voleurs de carburant sont associés à des cartels, rien n’indique que les personnes qui extorquent de l’argent aux demandeurs sont associées à un cartel, et encore moins à un cartel qui a une influence aux endroits proposés comme PRI. De plus, trois des endroits proposés comme PRI sont loin des principales zones touchées par le vol de carburant.

[16] La SAR a reconnu que la SPR avait commis une erreur en n’examinant pas expressément certains rapports psychiatriques préparés par la Dre Agarwal dans le cadre de l’évaluation des PRI. La SAR a procédé à sa propre évaluation de ces rapports et a conclu qu’il serait raisonnable de la part des demandeurs de vivre aux endroits proposés comme PRI.

[17] Selon la décision, les rapports psychiatriques montrent que la mère et la fille souffrent d’un trouble de stress post-traumatique chronique grave et que, pour guérir, elles doivent se sentir en sécurité à long terme. La décision indique que les rapports ne traitent pas des effets prévisibles advenant [traduction] « un retour au Mexique et une réinstallation dans une ville où elles ne seraient pas susceptibles d’être personnellement exposées à des préjudices graves de la part de leurs agents de persécution ». La SAR a également déclaré que si la Dre Agarwal voulait parler du Mexique dans son ensemble, on s’attendrait à ce que cela soit clairement énoncé et étayé dans son rapport. La SAR a conclu que la preuve des demandeurs ne satisfaisait pas au critère permettant d’établir qu’une PRI est déraisonnable.

IV. Questions

[18] La seule question à trancher en l’espèce est celle de savoir si la décision est raisonnable.

V. Norme de contrôle

[19] Dans l’arrêt Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67 [Postes Canada], le juge Rowe a déclaré que l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] a établi un cadre remanié pour établir la norme de contrôle à appliquer aux décisions administratives. Le point de départ est une présomption d’application de la norme de la décision raisonnable. Cette présomption peut être réfutée dans certaines circonstances, mais aucune n’est présente en l’espèce. Par conséquent, la norme de contrôle applicable en l’espèce est celle de la décision raisonnable.

[20] Dans l’arrêt Postes Canada, le juge Rowe explique ce qui est nécessaire pour conclure qu’une décision est raisonnable, et ce qu’un tribunal doit faire lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable :

[31] La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, par. 85). Par conséquent, lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, « une cour de révision doit d’abord examiner les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [l]a conclusion » (Vavilov, par. 84, citant Dunsmuir, par. 48). Les motifs devraient être interprétés de façon globale et contextuelle afin de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (Vavilov, par. 97, citant Newfoundland Nurses).

[32] La cour de révision devrait se demander si la décision dans son ensemble est raisonnable : « ce qui est raisonnable dans un cas donné dépend toujours des contraintes juridiques et factuelles propres au contexte de la décision particulière sous examen » (Vavilov, par. 90). Elle doit se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle-ci » (Vavilov, par. 99, citant Dunsmuir, par. 47 et 74, et Catalyst Paper Corp. c. North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 R.C.S. 5, par. 13).

[33] Lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, par. 100). La partie qui conteste la décision doit convaincre la cour de justice que « la lacune ou la déficience [invoquée] [...] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] déraisonnable » (Vavilov, par. 100).

[21] La Cour suprême du Canada a affirmé, au paragraphe 86 de l’arrêt Vavilov, qu’« il ne suffit pas que la décision soit justifiable. Dans les cas où des motifs s’imposent, le décideur doit également, au moyen de ceux-ci, justifier sa décision auprès des personnes auxquelles elle s’applique ». La cour de révision doit être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient » :

[104] De même, la logique interne d’une décision peut également être remise en question lorsque les motifs sont entachés d’erreurs manifestes sur le plan rationnel — comme lorsque le décideur a suivi un raisonnement tautologique ou a recouru à de faux dilemmes, à des généralisations non fondées ou à une prémisse absurde. Il ne s’agit pas d’inviter la cour de révision à assujettir les décideurs administratifs à des contraintes formalistes ou aux normes auxquelles sont astreints des logiciens érudits. Toutefois, la cour de révision doit être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient ».

[105] En plus de la nécessité qu’elle soit fondée sur un raisonnement intrinsèquement cohérent, une décision raisonnable doit être justifiée au regard de l’ensemble du droit et des faits pertinents : Dunsmuir, par. 47; Catalyst, par. 13; Nor-Man Regional Health Authority, par. 6. Les éléments du contexte juridique et factuel d’une décision constituent des contraintes qui ont une influence sur le décideur dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont délégués.

[22] De plus, l’arrêt Vavilov précise que la cour de révision ne doit pas apprécier à nouveau la preuve, à moins qu’il n’y ait des « circonstances exceptionnelles » :

[125] Il est acquis que le décideur administratif peut apprécier et évaluer la preuve qui lui est soumise et qu’à moins de circonstances exceptionnelles, les cours de révision ne modifient pas ses conclusions de fait. Les cours de révision doivent également s’abstenir « d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur » : CCDP, par. 55; voir également Khosa, par. 64; Dr Q, par. 41-42. D’ailleurs, bon nombre des mêmes raisons qui justifient la déférence d’une cour d’appel à l’égard des conclusions de fait tirées par une juridiction inférieure, dont la nécessité d’assurer l’efficacité judiciaire, l’importance de préserver la certitude et la confiance du public et la position avantageuse qu’occupe le décideur de première instance, s’appliquent également dans le contexte du contrôle judiciaire : voir Housen, par. 15-18; Dr Q, par. 38; Dunsmuir, par. 53.

[Non souligné dans l’original.]

[23] Voir aussi Canada (Commission canadienne des droits de la personne) c Canada (Procureur général), 2018 CSC 31 [le juge Gascon], que Vavilov cite au paragraphe 125 que je viens moi-même de citer :

[55] Lorsqu’une cour de révision examine une décision selon la norme de la décision raisonnable, elle doit principalement s’intéresser à « la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel », de même qu’à « l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 47 Newfoundland and Labrador Nurses’ Union c. Terre-Neuve-et-Labrador (Conseil du Trésor), 2011 CSC 62, [2011] 3 R.C.S. 708, par. 14). Lorsqu’elle est appliquée à l’interprétation législative, la norme de la décision raisonnable reconnaît que le décideur, titulaire de pouvoirs délégués, est le mieux placé pour comprendre les considérations de politique générale et le contexte qu’il faut connaître pour résoudre toute ambiguïté dans le texte de loi (McLean, par. 33). Les cours de révision doivent par ailleurs éviter de soupeser et d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur (Khosa, par. 64). Fondamentalement, la norme de la raisonnabilité reconnaît qu’il peut légitimement y avoir de multiples issues possibles, même lorsque celles-ci ne correspondent pas à la solution optimale que la cour de révision aurait elle-même retenue.

[Non souligné dans l’original.]

[24] Voir aussi l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Khosa, 2009 CSC 12 [le juge Binnie] :

[64] En l’espèce, tant les motifs des membres majoritaires de la SAI que ceux de la membre dissidente indiquent clairement les considérations à l’appui de leurs deux points de vue et les raisons de leur désaccord quant à l’issue. Pour ce qui est des faits, la SAI était principalement divisée quant à l’interprétation de l’expression de remords par M. Khosa, comme l’a souligné le juge en chef Lutfy. Selon les membres majoritaires de la SAI :

Le fait que [M. Khosa] continue de nier que c’est sa participation à une « course de rue » qui a eu des conséquences tragiques est une source de complications pour le tribunal. [...] Je garde en même temps à l’esprit que [M. Khosa] a montré quelques remords à l’audience pour son excès de vitesse sur la voie publique et note que le juge de première instance a constaté de même. [...] Cette expression de remords est un facteur favorable à l’exercice du pouvoir discrétionnaire. Toutefois, elle ne ressort pas, à mon sens, comme une caractéristique irrésistible en l’espèce étant donné les admissions mitigées de [M. Khosa] à l’audience. [Je souligne; par. 15.]

Par contre, selon la membre dissidente de la SAI :

... [M. Khosa] a [. . .] accepté très tôt la responsabilité de ses actes. Il était prêt à plaider coupable à une accusation de conduite dangereuse causant la mort ...

J’estime que [M. Khosa] est contrit et éprouve des remords. À l’audience, [M. Khosa] a manifesté son regret, sa voix tremblait et était remplie d’émotions ...

Les commissaires majoritaires ont accordé une grande importance au fait que [M. Khosa] nie avoir pris part à une course alors que les tribunaux pénaux ont établi que tel était le cas. Bien qu’ils aient conclu que cela n’était « pas fatal » au présent appel, ils ont aussi établi que le fait que l’appelant continue de nier qu’il faisait une course « dénote que l’appelant ne saisit pas bien toute la portée de sa conduite » et que ce fait « joue contre l’appelant ». Les commissaires majoritaires concluent que [M. Khosa] éprouve des remords, mais que ces remords ne ressortent pas comme une « caractéristique irrésistible en l’espèce étant donné les admissions mitigées de [M. Khosa] ».

Or, j’estime que les remords de [M. Khosa], même s’il nie avoir participé à une course, sont authentiques et indiquent qu’il sera à l’avenir plus réfléchi et évitera d’agir avec une telle insouciance. [par. 50-51 et 53-54]

Il semble évident qu’un litige factuel de ce genre doit être tranché par la SAI dans l’application de la politique d’immigration et qu’il ne doit pas être réévalué par les tribunaux judiciaires.

[Non souligné dans l’original.]

VI. Analyse

[25] Dans la décision Lawal c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2020 CF 301, j’ai énoncé le critère relatif à une PRI :

D’abord, il est établi en droit que le critère à deux volets à appliquer pour décider s’il existe une PRI provient des décisions Rasaratnam c Canada ([M]inistre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706, et Thirunavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 CF 589. Dans la récente affaire Feboke c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 155, le juge Pamel a décrit ce critère de la façon suivante, au paragraphe 15 :

[traduction]

[15] Les décisions Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706, et Thirunavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 CF 589, ont établi un critère à deux volets à appliquer pour déterminer s’il existe une PRI : (i) il ne doit pas exister de possibilité sérieuse que l’individu soit persécuté dans la région de la PRI (selon la prépondérance des probabilités), et (ii) les conditions de la proposition de PRI sont telles qu’il n’est pas déraisonnable, compte tenu de toutes les circonstances, pour un individu d’y chercher refuge (Reci c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 833, au paragraphe 19; Titcombe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1346 au paragraphe 15). Pour conclure à l’existence d’une PRI, chacun des deux volets doit être établi. Ce critère à deux volets garantit que le Canada se conforme aux normes internationales relatives aux PRI (directives du HCR, aux paragraphes 7 et 24 à 30).

[Non souligné dans l’original.]

[26] Il incombe aux demandeurs de réfuter l’un ou l’autre des deux volets. Voir Ranganathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 CF 164 [le juge Létourneau], au paragraphe 13.

[27] Comme il a été mentionné précédemment, la demande d’asile est examinée uniquement en vertu de l’article 97 de la LIPR parce que les demandeurs n’affirment pas que la demande d’asile a un lien avec les motifs d’octroi de l’asile établis à l’article 96.

[28] Les demandeurs soutiennent que la SAR a commis une erreur dans son évaluation des deux volets de l’analyse de la PRI. J’examinerai chacun de ces volets séparément.

A. Volet 1 : Aucune possibilité sérieuse de persécution à l’endroit où existe une PRI

[29] Dans son évaluation du premier volet du critère relatif à la PRI, la SAR conclut ce qui suit :

[traduction]

[9] Je ne suis pas d’accord avec les appelants pour dire qu’ils devraient vivre dans la clandestinité s’ils devaient se réinstaller à Hermosillo, La Paz ou Cancún. Comme nous venons de le souligner, rien n’indique que les huachicoleros qui ont extorqué de l’argent aux appelants étaient associés à un cartel de la drogue, et encore moins à un cartel ayant une sphère d’influence à Hermosillo, La Paz ou Cancún. La preuve objective en l’espèce indique que, bien que le vol de carburant se soit répandu partout au Mexique, il est principalement centré dans la région du triangle rouge de l’État de Puebla, où plusieurs pipelines se croisent. De plus, la preuve indique que les activités de vol de carburant s’étendent le long de la côte du golfe du Mexique, de la frontière avec les États-Unis jusqu’à l’État de Tabasco, au sud. Les trois villes proposées comme possibilités de refuge intérieur, Hermosillo, La Paz et Cancún, sont bien en dehors de cette région.

[10] Bien que les appelants croient que les huachicoleros qui les extorquaient pourraient les retrouver n’importe où au Mexique, ils ne savaient pas exactement comment ces derniers s’y prendraient [...] la preuve n’établit pas, selon la prépondérance des probabilités (à savoir qu’il est plus probable que le contraire), que les huachicoleros qui ont extorqué les appelants auraient l’intérêt, les moyens et la motivation de les retracer dans l’une des trois villes précitées comme possibilités de refuge intérieur, où ils n’ont aucune influence et qui se trouvent à une distance importante de la principale zone touchée par le vol de carburant au Mexique.

[30] Les demandeurs soutiennent que la SAR a commis une erreur en concluant que la preuve n’établit pas de lien entre les voleurs de carburant et les cartels. Selon eux, cela a donné lieu à l’établissement d’un profil incorrect de l’agent de persécution. Ce profil incorrect aurait mené à deux conclusions erronées supplémentaires, soit que l’agent de persécution n’est pas présent aux endroits proposés comme PRI ou n’y a pas accès, et une sous-estimation grossière des moyens et de la motivation de l’agent de persécution.

[31] À mon avis, les demandeurs ont demandé à la SAR d’inférer que les personnes qui les extorquaient faisaient partie d’un cartel, mais ils l’ont fait sans preuve à l’appui, si ce n’est leur croyance en ce qu’ils alléguaient. Or, en l’absence d’éléments de preuve directs, provenant soit des demandeurs soit de documents sur la situation dans le pays, le point de vue des demandeurs n’est qu’une opinion; ils n’avaient aucune connaissance directe et ne pouvaient pas fournir de preuve que, dans leur pays d’origine, tous les voleurs de carburant font partie d’un cartel, ce qui est essentiellement ce qu’ils ont soutenu. Par conséquent, à cet égard, la SAR a raisonnablement apprécié la preuve et conclu qu’elle ne partageait pas leur point de vue; elle a raisonnablement conclu que les demandeurs émettaient des hypothèses quant à l’existence d’un lien entre les voleurs de carburant et les cartels. J’ai également à l’esprit que, selon l’arrêt Vavilov, Cour doit s’abstenir de soupeser ou d’apprécier à nouveau la preuve, ce que les demandeurs me demandent de faire à cet égard.

[32] Les demandeurs soutiennent en outre que la SAR disposait d’éléments de preuve sur la situation dans le pays, ce qui est exact, selon lesquels le vol de carburant a commencé dans l’État de Puebla avec des groupes locaux et est devenu une industrie monopolisée par les cartels à l’échelle du pays, une industrie d’un milliard de dollars. Parallèlement à cette preuve, la SAR a également cité des éléments de preuve selon lesquels, dans certains cas, le vol de carburant était le fait de criminels locaux agissant de leur propre chef, de sorte que les demandeurs n’avaient pas, selon elle, démontré que les voleurs de carburant en cause étaient associés à un cartel. La preuve indiquait qu’un cartel a complètement pris le contrôle du vol de carburant dans l’État de Puebla, mais les demandeurs ne sont pas de cet État.

[33] Dans sa décision, la SAR renvoie deux fois au cartable national de documentation [CND] sur le Mexique. Le premier renvoi porte sur la signification du terme huachicoleros, et le deuxième, sur l’origine du vol de carburant. Les demandeurs affirment que la SAR aurait également dû se référer à l’exemple fourni dans le CND concernant un cartel fondé principalement sur le vol de carburant. Les demandeurs soutiennent qu’il y avait de nombreux exemples dans le CND montrant des liens entre le vol de carburant et les cartels. Je ne suis pas en désaccord avec eux, mais je ne trouve pas les conclusions de la SAR déraisonnables parce que ces documents n’appuient pas l’affirmation selon laquelle tous les voleurs de carburant ou les voleurs de carburant font partie d’un cartel, seulement qu’ils pourraient en faire partie. Je ne peux pas soupeser ou apprécier à nouveau la preuve; ce travail appartient à la SAR.

[34] Les demandeurs répètent que la preuve démontre un lien étroit entre les cartels et le vol de carburant. Par conséquent, ils affirment qu’il ne relève pas de la conjecture de la part des demandeurs de croire que le groupe qui les a extorqués est lié à un cartel. Ils ajoutent que leurs croyances sont fondées sur la vaste preuve documentaire objective présentée à la SAR. Comme l’indique l’arrêt Vavilov, au paragraphe 126, « une décision raisonnable en est une qui se justifie au regard des faits », ce qui comprend à la fois le dossier de preuve et le tableau factuel général, et « [l]e caractère raisonnable d’une décision peut être compromis si le décideur s’est fondamentalement mépris sur la preuve qui lui a été soumise ou n’en a pas tenu compte ».

[35] Toutefois, pour les motifs susmentionnés, je ne suis pas en mesure de conclure non plus que la preuve a été fondamentalement mal interprétée ou évaluée de façon déraisonnable. Il était raisonnablement loisible à la SAR de conclure comme elle l’a fait.

[36] Les demandeurs s’appuient également sur la décision Cepeda-Gutierrez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 1 CF 53, [1998] ACF no 1425 [le juge Evans, alors juge à la Cour fédérale] [Cepeda-Gutierrez], qui confirme que les décideurs ne sont pas tenus de citer tous les éléments de preuve contraires à leurs conclusions; toutefois, plus la preuve est importante, plus la cour de révision pourra être encline à inférer que le fait de la passer sous silence signifie que le décideur a tiré une conclusion sans tenir compte de la preuve, de sorte qu’un contrôle judiciaire pourra être accordé :

16 Par ailleurs, les motifs donnés par les organismes administratifs ne doivent pas être examinés à la loupe par le tribunal (Medina c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1990) 12 Imm. L.R. (2d) 33 (C.A.F.)), et il ne faut pas non plus les obliger à faire référence à chaque élément de preuve dont ils sont saisis et qui sont contraires à leurs conclusions de fait, et à expliquer comment ils ont traité ces éléments de preuve (voir, par exemple, Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.)). Imposer une telle obligation aux décideurs administratifs, qui sont peut-être déjà aux prises avec une charge de travail imposante et des ressources inadéquates, constituerait un fardeau beaucoup trop lourd. Une simple déclaration par l’organisme dans ses motifs que, pour en venir à ses conclusions, il a examiné l’ensemble de la preuve dont il était saisi suffit souvent pour assurer aux parties, et au tribunal chargé du contrôle, que l’organisme a analysé l’ensemble de la preuve avant de tirer ses conclusions de fait.

[17] Toutefois, plus la preuve qui n’a pas été mentionnée expressément ni analysée dans les motifs de l’organisme est importante, et plus une cour de justice sera disposée à inférer de ce silence que l’organisme a tiré une conclusion de fait erronée « sans tenir compte des éléments dont il [disposait] » : Bains c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 63 F.T.R. 312 (C.F. 1re inst.). Autrement dit, l’obligation de fournir une explication augmente en fonction de la pertinence de la preuve en question au regard des faits contestés. Ainsi, une déclaration générale affirmant que l’organisme a examiné l’ensemble de la preuve ne suffit pas lorsque les éléments de preuve dont elle n’a pas discuté dans ses motifs semblent carrément contredire sa conclusion. Qui plus est, quand l’organisme fait référence de façon assez détaillée à des éléments de preuve appuyant sa conclusion, mais qu’elle passe sous silence des éléments de preuve qui tendent à prouver le contraire, il peut être plus facile d’inférer que l’organisme n’a pas examiné la preuve contradictoire pour en arriver à sa conclusion de fait.

[Non souligné dans l’original.]

[37] Il est également bien établi qu’un tribunal est présumé avoir tenu compte de tous les éléments de preuve. La décision Cepeda-Gutierrez établit qu’il est possible de déduire le contraire lorsque des éléments de preuve ont été ignorés, ce qui peut être le cas lorsqu’ils contredisent carrément la conclusion du tribunal.

[38] Cette exception a ses limites, comme il est indiqué la décision Cepeda-Gutierrez : « il ne faut pas non plus [...] obliger [les organismes] à faire référence à chaque élément de preuve dont ils sont saisis et qui sont contraires à leurs conclusions de fait, et à expliquer comment ils ont traité ces éléments de preuve (voir, par exemple, Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.) » au para 16.

[39] De plus, notre Cour a récemment statué, dans la décision Simolia c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1336 [le juge Bell] au para 22, que la SAR « n’a pas l’obligation “de passer au peigne fin tous les documents énumérés dans le [CND] dans l’espoir de trouver des passages susceptibles d’appuyer la demande du demandeur et de préciser pourquoi elle n’appuie pas le demandeur” ».

[40] À cet égard, la Cour a conclu ce qui suit dans la décision Kakurova c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 929 [la juge Gleason, alors juge à la Cour fédérale] : « Il serait trop lourd pour la Commission de mentionner chacun des éléments de preuve n’allant pas dans le sens de ses conclusions. Tout ce qu’elle avait l’obligation de faire était d’examiner la preuve et de fonder raisonnablement ses conclusions sur les documents qui lui ont été présentés, et c’est ce qu’elle a fait ». Voir aussi Tsigehana c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 426 [le juge Gascon] aux para 32‐33, et Majlat c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 965 [la juge Gleason, alors juge à la Cour fédérale] au para 32. Le défendeur soutient que cela a été fait et que le désaccord des demandeurs quant à la façon dont la SAR a soupesé la preuve n’est pas une cause défendable. Comme je l’ai indiqué, je conviens que cette jurisprudence s’applique davantage à l’affaire qui nous occupe.

[41] De plus, la juge Gleason (alors juge à la Cour fédérale) a déclaré ce qui suit dans la décision Herrera Andrade c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 1490 :

[10] Plus précisément, vu plusieurs arrêts récents de la Cour suprême du Canada, la cour de révision doit faire preuve de prudence avant de conclure qu’un tribunal administratif n’a pas tenu compte des éléments de preuve dont il disposait parce qu’il a omis de mentionner dans sa décision les éléments de preuve qui la contredisent.

[11] À mon avis, lorsque la cour de révision est saisie d’un argument qui porte sur les conséquences pour le tribunal de ne pas avoir mentionné des éléments de preuve importants, son examen consiste initialement à présumer que le tribunal a pris en compte l’ensemble du dossier (voir Ayala Alvarez c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 703, au paragraphe 10; Guevara c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 242, au paragraphe 41; Junusmin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CF 673, au paragraphe 38). Les parties qui présentent des arguments comme ceux du demandeur en l’espèce doivent se montrer très convaincant[e]s. Deuxièmement, il faut se rappeler que la tâche de la cour de révision consiste à évaluer la raisonnabilité des conclusions de fait du tribunal dont la décision est contestée. Pour ce faire, il faut tenir compte à la fois de l’issue de l’affaire et des motifs fournis par le tribunal, comme la Cour suprême du Canada l’a souligné notamment dans Dunsmuir c Nouveau-Brunswick 2008 CSC 9, [2008] 1 RCS 190, et Newfoundland Nurses, au paragraphe 14. Enfin, et surtout peut-être, la cour de révision doit faire preuve d’une grande déférence à l’égard des conclusions de fait du tribunal particulièrement lorsque, comme en l’espèce, la décision contestée se retrouve au cœur même de l’expertise du tribunal. L’évaluation des risques auxquels sont exposés les demandeurs d’asile de même que de l’existence d’une protection adéquate de l’État étranger se retrouvent au cœur même de la compétence de la SPR et il s’agit de questions que le Parlement a portées à la compétence de la SPR (voir l’alinéa 95(1)b) de la LIPR; Pushpanathan c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1998] 1 RCS 982, [1998] ACS no 46, au paragraphe 47; Saldana Fajardo c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 830, au paragraphe 18; Kellesova c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2011 CF 769, au paragraphe 11).

Comme je l’ai mentionné précédemment, l’arrêt Newfoundland Nurses revêt une importance capitale aux fins de la présente demande. Dans cet arrêt, la Cour a adopté une nouvelle façon d’évaluer le caractère suffisant des motifs d’un tribunal administratif, statuant que l’insuffisance de motifs n’équivaut pas à l’absence d’équité procédurale pourvu que le tribunal fournisse certains motifs. En statuant ainsi, la Cour a annulé une jurisprudence antérieure selon laquelle l’insuffisance de motifs équivaut à l’absence d’équité procédurale. La Cour suprême a aussi tenu compte du caractère suffisant des motifs du tribunal visé pour savoir si sa décision est raisonnable et a souligné que l’insuffisance des motifs ne justifie pas à elle seule de conclure au caractère déraisonnable de la décision. La Cour a plutôt soutenu que le caractère raisonnable d’une décision doit être évalué relativement à l’issue de l’instance et aux motifs fournis. La Cour a aussi rappelé que les cours de révision doivent accorder une grande déférence aux décisions d’un tribunal en vertu de la norme de la raisonnabilité. [...]

[42] Le défendeur soutient que la SAR n’a pas ignoré la preuve dans sa décision. La SAR a noté expressément des éléments de preuve selon lesquels certains cartels se livrent de plus en plus au vol de carburant, mais elle a également trouvé des éléments de preuve indiquant que les voleurs de carburant pourraient simplement être des criminels locaux travaillant de leur propre chef. La SAR a examiné le propre témoignage des demandeurs et a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour démontrer que les voleurs de carburant en question font partie d’un cartel, ou encore d’un cartel ayant des liens avec les endroits proposés comme PRI. Il était également raisonnablement loisible à la SAI de tirer cette conclusion à la lumière du dossier dont elle disposait. Encore une fois, cet aspect du débat équivaut à soupeser ou apprécier à nouveau la preuve, ce qu’une cour de révision ne doit pas faire, sauf dans des circonstances exceptionnelles.

[43] Le défendeur affirme également, à juste titre en droit, que la possibilité que d’autres inférences soient tirées ne rend pas les inférences de la SAR déraisonnables (voir Thanaratnam c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CAF 122 au para 34 [le juge Evans]; Zhou c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 676 au para 21 [la juge Fuhrer]; et Krishnapillai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 563 au para 11 [le juge Barnes].

[44] Compte tenu de l’absence de lien établi par la preuve entre les voleurs de carburant menaçant les demandeurs et un cartel, il était à mon avis raisonnablement loisible à la SAR de conclure comme elle l’a fait, à savoir que la preuve n’établit pas que les voleurs de carburant en question auraient les moyens, l’intérêt ou la motivation de retracer les demandeurs aux endroits proposés comme PRI.

[45] La SAR a également déclaré qu’il ressortait du propre témoignage des demandeurs que les voleurs de carburant ne les ont pas recherchés et que la preuve présentée n’indique pas que ces derniers ont communiqué avec des membres de leur famille. Je sois d’accord pour dire qu’il s’agit d’une déclaration inexacte parce qu’il y avait des éléments de preuve indiquant qu’un beau-frère a été contacté, mais je ne considère pas cette erreur comme étant importante compte tenu du contrôle global exigé dans le cadre d’un contrôle judiciaire. De plus, la SPR a examiné la preuve concernant le beau-frère et a conclu que [traduction] « cela indique, selon la prépondérance des probabilités, que si les huachicoleros cherchaient les demandeurs d’asile, ils ont arrêté de le faire il y a plus d’un an ».

[46] À mon avis, la SAR s’est intéressée directement aux observations des demandeurs et, après évaluation du dossier, elle est arrivée à une conclusion défavorable. À mon humble avis, elle l’a fait dans le cadre de ce que je considère respectueusement comme une analyse raisonnable, c’est-à-dire une analyse qui répond aux critères énoncés dans l’arrêt Vavilov. La SAR a dit :

[traduction]

[8] Je ne suis pas d’accord avec les appelants pour dire que la SPR n’a pas tenu compte de leur témoignage au sujet du profil des huachicoleros et de la capacité de ces derniers de trouver des gens partout au Mexique. En fait, la SPR a expressément traité des éléments de preuve dont elle disposait au sujet des huachicoleros, qui comprenaient des articles de presse présentés par les appelants et les éléments de preuve au sujet des huachicoleros contenus dans le cartable national de documentation (CND) sur le Mexique. Le terme huachicoleros est utilisé pour désigner les voleurs de carburant qui dérobent des produits pétroliers et les vendent sur les autoroutes et ailleurs. Je ne suis pas d’accord avec les appelants pour dire que la preuve objective appuie leur témoignage selon lequel tous les huachicoleros sont associés à de dangereux cartels de la drogue. La preuve indique que les voleurs de carburant peuvent être des criminels locaux qui agissent seuls ou en collaboration avec des cartels de la drogue. De plus, certains cartels de la drogue eux-mêmes s’adonnent de plus en plus au vol de carburant, et ils s’attaquent de plus en plus aux petits exploitants. Même si certains huachicoleros peuvent être associés à des cartels de drogue, les appelants ne savaient pas si les huachicoleros qui les ont extorqués étaient associés à un gang ou à un cartel en particulier. Il n’y a tout simplement pas d’éléments de preuve, mis à part les hypothèses des appelants eux-mêmes, selon lesquels les personnes qui les extorquent sont liées à un cartel de la drogue plus important.

[9] Je ne suis pas d’accord avec les appelants pour dire qu’ils devraient vivre dans la clandestinité s’ils devaient se réinstaller à Hermosillo, La Paz ou Cancún. Comme nous venons de le mentionner, rien n’indique que les huachicoleros qui ont extorqué les appelants étaient associés à un cartel de la drogue, et encore moins à un cartel ayant une sphère d’influence à Hermosillo, La Paz ou Cancún. En outre, ces trois villes se trouvent à une grande distance des principales zones touchées par le vol de carburant par les huachicoleros. La preuve objective en l’espèce indique que, bien que le vol de carburant se soit répandu partout au Mexique, il est principalement centré dans la région du triangle rouge de l’État de Puebla, où plusieurs pipelines se croisent. De plus, la preuve indique que les activités de vol de carburant s’étendent le long de la côte du golfe du Mexique, de la frontière avec les États-Unis jusqu’à l’État de Tabasco, au sud. Les trois villes proposées comme possibilités de refuge intérieur, soit Hermosillo, La Paz et Cancún, ne se trouvent pas dans cette région.

[10] Bien que les appelants croient que les huachicoleros qui les extorquaient pourraient les retrouver n’importe où au Mexique, ils ne savaient pas exactement comment ils s’y prendraient. Mme Solis Solis a déclaré qu’elle avait entendu parler d’un marchand de rue qui refusait de payer les extorqueurs et dont les membres de sa famille avaient été enlevés. Cependant, cela semblait s’être passé dans la ville où ils vivaient. Je conviens avec la SPR que la preuve n’établit pas, selon la prépondérance des probabilités (c’est-à-dire qu’il est plus probable que le contraire) que les huachicoleros qui ont extorqué les appelants auraient les moyens, l’intérêt et la motivation de les retracer dans l’une des trois villes mentionnées ci-dessus comme possibilités de refuge intérieur, où ils n’ont aucune influence et qui se trouvent à une distance importante de la principale région touchée par le vol de carburant au Mexique. Ceci est d’autant plus vrai que les appelants ont déclaré qu’ils ne savaient pas si les huachicoleros qui les avaient extorqués les cherchaient toujours et que ces derniers n’étaient pas allés chercher les appelants chez la mère de Mme Solis Solis. Rien n’indiquait non plus qu’ils avaient communiqué avec d’autres membres de la famille ou qu’ils étaient retournés à la maison où vivaient les appelants, qui appartient à la sœur de M. Solis Mendoza.

[11] Je ne suis pas d’accord avec les appelants pour dire que la SPR a commis une erreur en ne tenant pas compte de la preuve générale relative à la prévalence de la violence des cartels, de l’activité criminelle et des menaces sérieuses qui planent sur la primauté du droit et des violations des droits de la personne au Mexique. Tous ces éléments de preuve témoignent du climat général de criminalité à grande échelle au Mexique. La question à trancher concernant le premier volet du critère relatif à la possibilité de refuge intérieur est de savoir si les appelants ont établi, selon la prépondérance des probabilités, qu’ils seraient personnellement exposés à un ou plusieurs des types de préjudice grave qui feraient d’eux des personnes à protéger aux endroits proposés comme possibilités de refuge intérieur. Lorsque des personnes invoquent un risque de mort ou de peines ou traitements cruels et inusités, comme les appelants l’ont fait en l’espèce, afin d’établir qu’elles sont des personnes ayant besoin de protection à un endroit proposé comme possibilité de refuge intérieur, elles doivent démontrer que le risque de préjudice grave auquel elles seraient exposées ne touche généralement pas les autres personnes à l’intérieur ou à l’extérieur de leur pays. Par conséquent, je ne suis pas d’accord avec les appelants pour dire que le niveau général de criminalité au Mexique ou l’état général des droits de la personne au Mexique font d’eux des personnes à protéger à l’un ou l’autre des endroits proposés comme possibilités de refuge intérieur. Il n’y a pas non plus d’éléments de preuve à l’appui d’un quelconque argument selon lequel les appelants risquent sérieusement d’être persécutés pour un motif prévu par la Convention à l’un ou l’autre des endroits proposés comme possibilités de refuge intérieur.

[Non souligné dans l’original.]

[47] Encore une fois en toute déférence, je ne suis pas en mesure de conclure que la SAR a traité de façon déraisonnable le premier volet du critère relatif à une PRI. Je passerai donc aux observations des demandeurs sur le deuxième volet du critère relatif à la PRI.

B. Volet 2 : La situation à l’endroit où existe une PRI est telle qu’il ne serait pas déraisonnable de s’attendre à ce que les demandeurs y cherchent refuge.

[48] Les demandeurs conviennent que le critère est exigeant et qu’ils doivent étayer leurs arguments d’éléments de preuve réels et concrets, comme il est indiqué dans l’arrêt Ranganathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 CF 164, [2000] ACF no 2118 (CAF) [le juge Létourneau] [Ranganathan] :

15 Selon nous, la décision du juge Linden, pour la Cour d’appel, indique qu’il faille placer la barre très haute lorsqu’il s’agit de déterminer ce qui est déraisonnable. Il ne faut rien de moins que l’existence de conditions qui mettraient en péril la vie et la sécurité d’un revendicateur tentant de se relocaliser temporairement en lieu sûr. De plus, il faut une preuve réelle et concrète de l’existence de telles conditions. L’absence de parents à l’endroit sûr, prise en soi ou conjointement avec d’autres facteurs, ne peut correspondre à une telle condition que si cette absence a pour conséquence que la vie ou la sécurité du revendicateur est mise en cause. Cela est bien différent des épreuves indues que sont la perte d’un emploi ou d’une situation, la diminution de la qualité de vie, le renoncement à des aspirations, la perte d’une personne chère et la frustration des attentes et des espoirs d’une personne.

[49] Les demandeurs soutiennent que depuis l’arrêt Ranganathan, [traduction] « le critère est demeuré exigeant, mais a été élargi pour tenir compte de facteurs comme la discrimination, la santé mentale et la disponibilité de traitements médicaux ».

[50] Les demandeurs ont présenté deux rapports médicaux d’une psychiatre qui, selon eux, fournissent des renseignements importants et pertinents qui auraient dû être pris en considération par la SAR, mais ne l’ont pas été. Dans la décision Karim c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 279 au para 22, le juge de Montigny a conclu qu’une PRI est déraisonnable lorsque l’état émotif du demandeur concernant la PRI n’a pas été pris en compte. Voir également Cartagena c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 289 [le juge Mosley]; pour un autre exemple, voir Olalere c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2017 CF 385 [Olalere], où le juge Russell a souligné l’importance que le tribunal traite des rapports psychologiques dans une analyse de la PRI : « [59] À mon avis, le défaut de la Section d’appel des réfugiés de tenir compte de cet élément de preuve rend la décision déraisonnable. »

[51] À cet égard, la SAR a donné raison aux demandeurs. Elle a conclu que la SPR n’avait pas correctement évalué les rapports psychiatriques concernant la mère et la fille :

[traduction]

[12] Je suis d’accord avec les appelants pour dire que la SPR a commis une erreur en n’examinant pas expressément les rapports médicaux qui ont été admis en preuve pour déterminer s’il serait déraisonnable, compte tenu de l’ensemble des circonstances, de s’attendre à ce que les appelants se réinstallent dans l’une des villes proposées comme possibilités de refuge intérieur. Toutefois, j’estime que les rapports médicaux n’établissent pas qu’il serait déraisonnable de la part des appelants de se réinstaller à Hermosillo, La Paz ou Cancún.

[52] La SAR a reconnu que la mère avait reçu un diagnostic de trouble de stress post‐traumatique [TSPT] et qu’elle avait été victime d’abus durant son enfance. Toutefois, comme l’a fait remarquer la SAR, les deux rapports ne traitaient pas de ce qui arriverait aux demandeurs s’ils devaient aller à un endroit proposé comme PRI. À mon humble avis, et en règle générale, il s’agit d’une lacune importante lorsqu’une PRI est l’enjeu central, comme c’est le cas en l’espèce. Une telle preuve ne devrait pas provenir d’un expert médical, à moins qu’il ne soit un expert de la situation dans le pays en cause.

[53] Les deux rapports font à première vue référence à l’ensemble du Mexique. Le rapport psychiatrique de la mère fournit des éléments de preuve sur son état émotionnel, y compris à l’égard de l’endroit où elle pourrait être renvoyée. À noter les renvois au Mexique :

[traduction]

Facteurs de stress

[...]

Peur d’être rejetée par le Canada et d’avoir à retourner au Mexique, où elle craint que des membres de gangs ne l’enlèvent, avec ses filles, et ne les agressent sexuellement et les tuent.

[...]

Pour qu’elle puisse continuer à guérir de son passé et aller à un endroit où elle pourra accepter une thérapie individuelle axée sur le traumatisme, la première condition préalable est qu’elle puisse se sentir en sécurité à long terme, non seulement pour elle-même, mais aussi pour ses enfants. Son statut incertain au Canada au regard de l’immigration risque d’obliger sa famille et elle-même à retourner au Mexique, où tous les traumatismes qu’elle a subis se sont produits et d’où proviennent tous ses souvenirs traumatisants. L’auteure du présent rapport est d’avis que Karina ne pourra pas profiter pleinement de toute forme de traitement psychologique tant que la menace d’être renvoyée au lieu où a été subi le traumatisme en question n’aura pas été éliminée de façon permanente.

[Non souligné dans l’original.]

[54] Dans le rapport sur la fille, les facteurs de stress comprennent [TRADUCTION] « la peur de devoir retourner au Mexique, où elle craint que les membres du gang l’enlèvent de nouveau ». [Non souligné dans l’original.]

[55] Les demandeurs affirment que la psychiatre a fait référence à un retour « au Mexique » intentionnellement, qu’elle n’a pas renvoyé à une ville en particulier et que le renvoi au Mexique doit être pris au pied de la lettre. À mon humble avis, cette observation n’aide pas les demandeurs. Tout d’abord, la psychiatre n’était pas qualifiée pour témoigner concernant la situation dans le pays. Par conséquent, la preuve provenant de cette source concernant la situation au regard de la criminalité au Mexique dans son ensemble ou même dans une ou plusieurs parties du Mexique n’aurait probablement aucune valeur probante. Je remarque également que si les opinions visaient effectivement l’ensemble du Mexique, l’évaluation implicite de la situation dans le pays par la médecin empêcherait dans les faits la SAR de conclure à l’existence d’une PRI. S’il s’agit du résultat de la façon dont les rapports sont rédigés ou de l’intention recherchée, cette conclusion dépassait le rôle de la médecin et empiétait de façon inacceptable sur la compétence de la SAR pour tirer une telle conclusion, qui constitue la question déterminante en l’espèce.

[56] Je conclus que la preuve psychiatrique s’appliquait à la situation dans laquelle la mère et la fille retourneraient dans une partie ou une ville du Mexique similaire à celle d’où elles se sont enfuies, c.‐à‐d. à un endroit autre que ceux proposés par la SAR comme PRI, où il n’y aurait aucune possibilité sérieuse que la personne soit persécutée (selon la prépondérance des probabilités).

[57] À cet égard, j’ai conclu que l’évaluation des rapports psychiatriques par la SAR est raisonnable. La SAR a déclaré ce qui suit :

[traduction]

[15] Les rapports de la Dre Agarwal ne traitent pas des effets prévus sur Mme Solis Solis et Hiromy si elles retournaient au Mexique et si elles se réinstallaient dans une ville où elles ne seraient pas susceptibles d’être personnellement exposées à des préjudices graves causés par leurs agents de préjudice, les huachicoleros qui les extorquaient à Metepec. Bien que la Dre Agarwal parle de l’endroit où Mme Solis Solis a subi les traumatismes, il n’est pas clair s’il s’agissait du Mexique dans son ensemble ou de la région où les appelants ont été victimes d’extorsion et de menaces. À mon avis, si la Dre Agarwal voulait parler de l’ensemble du Mexique, on se serait attendu à ce que cela soit clairement énoncé et confirmé dans son rapport.

[16] Je remarque en outre que ni Mme Solis Solis ni M. Solis Mendoza n’ont parlé d’une préoccupation quelconque selon laquelle le TSPT vécu par Mme Solis Solis et Hiromy serait déclenché par un retour à l’un ou l’autre des autres endroits proposés par la SPR comme possibilités de refuge intérieur. Lorsque la SPR a demandé à Mme Solis Solis pourquoi elle ne serait pas en sécurité dans les villes proposées par la SPR comme possibilités de refuge intérieur, Mme Solis Solis a répondu que les huachicoleros qui les extorquaient pourraient les trouver n’importe où au Mexique. Elle a également dit que sa fille et elle avaient très peur et ne voulaient pas retourner dans leur pays. Lorsque la SPR, devant cette réponse, a demandé si elles pouvaient vivre dans les villes proposées comme possibilités de refuge intérieur si elles n’avaient pas de problèmes avec les gangs, Mme Solis Solis a dit qu’elle ne le pourrait pas parce que, de nos jours, il y a trop de criminalité, trop de cartels, et que le pays lui‐même n’est plus sûr. À la question de la SPR de savoir s’il y avait d’autres motifs, elle a répondu par la négative. Lorsque le conseil des appelants a demandé à M. Solis Mendoza s’il pensait que sa fille se sentirait en sécurité si les appelants retournaient au Mexique, mais vivaient ailleurs, il a répondu par la négative, sans rien ajouter.

[17] En résumé, les principales preuves à l’appui de la croyance des appelants selon laquelle il serait déraisonnable de s’attendre à ce qu’ils se réinstallent aux endroits proposés comme possibilités de refuge intérieur sont le rapport de la Dre Agarwal, qui ne tient pas compte expressément de la possibilité que les appelants retournent au Mexique dans une ville à l’extérieur de la région où ils ont subi le préjudice décrit dans leur demande d’asile, la déclaration de M. Solis Mendoza selon laquelle il ne croit pas que sa fille se sentira en sécurité où que ce soit au Mexique, et le témoignage de Mme Solis Solis selon lequel sa fille et elle ont peur et ne veulent pas y retourner. À mon avis, cette preuve n’est pas suffisante pour satisfaire au critère très exigeant pour établir qu’une possibilité de refuge intérieur est déraisonnable, ce qui exige rien de moins que l’existence de conditions qui mettraient en danger la vie et la sécurité d’un demandeur d’asile.

[58] Le défendeur soutient que les demandeurs ne sont pas aidés en faisant référence à l’intérêt supérieur de l’enfant parce qu’il est bien établi que cela « ne peut constituer le fondement d’une application de l’article 96 [ou de l’article 97] favorable au demandeur d’asile enfant dans les cas où celui‐ci verrait par ailleurs sa demande rejetée »; voir Douillard c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 390 [le juge LeBlanc] :

[24] L’intérêt supérieur de l’enfant est certes un critère incontournable aux fins des décisions prises aux termes de l’article 25 de la Loi, lesquelles sont fondées sur des considérations d’ordre humanitaire, mais il ne constitue pas un facteur déterminant dans l’octroi du statut de réfugié ou de personne à protéger. La Cour d’appel fédérale a expliqué, dans le contexte d’une évaluation de risques avant renvoi, que :

Ni la Charte ni la Convention relative aux droits de l’enfant n’exigent que l’intérêt des enfants touchés soit examiné dans le cadre de toutes les dispositions de la LIPR : De Guzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2006] 3 R.C.F. 655, 2005 CAF 436, au paragraphe 105. Si une loi fournit une possibilité réelle d’examiner l’intérêt des enfants touchés, y compris ceux nés au Canada, comme le fait la LIPR en son paragraphe 25(1), cet intérêt n’a pas à être pris en compte dans chaque décision qui peut les toucher défavorablement. Par conséquent, le juge qui a entendu la demande a commis une erreur en interprétant trop largement les dispositions définissant la portée de la tâche incombant à l’agent d’ERAR de manière à y inclure l’obligation de prendre également en compte l’intérêt des enfants nés au Canada des intimés adultes.

(Varga c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CAF 394 au para 13)

[59] En toute déférence, je ne suis pas d’accord.

[60] Par conséquent, les demandeurs n’ont pas gain de cause dans leur contestation des conclusions de la SAR concernant le deuxième volet du critère relatif à une PRI.

VII. Conclusion

[61] À mon avis, les demandeurs n’ont pas réussi à démontrer que la décision de la SAR n’était pas raisonnable. La SAR a analysé la preuve relative à la PRI et a raisonnablement conclu qu’ils ne seraient pas poursuivis par les voleurs de carburant à l’endroit proposé comme PRI. Contrairement à ce qu’affirment les demandeurs, la PRI satisfait raisonnablement aux deux volets de l’analyse de la PRI établie par la jurisprudence. Deux questions précises ont été soulevées; je les ai examinées en fonction de la législation applicable et de la preuve. Sans me lancer dans une chasse à l’erreur, j’estime que la décision, considérée de façon globale, est transparente, intelligible et justifiée en fonction des faits et des contraintes juridiques imposées au décideur. Elle se tient et ne contient aucune erreur fatale. Pour ce motif, je dois rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

[62] Cela dit, je tiens à souligner que le contrôle judiciaire a été effectué à partir du dossier dont disposait la Cour. Se fondant sur ce dossier, la Cour conclut que la sphère d’influence des cartels s’est étendue et pourrait continuer à s’étendre. Par conséquent, la présente décision ne vise pas une situation future au Mexique qui, si elle est évaluée par exemple dans le cadre d’un examen des risques avant renvoi, pourrait être différente de la situation présentée à la Cour.

VIII. Question certifiée

[63] Aucune partie n’a proposé de question de portée générale, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-1596-20

LA COUR DÉCLARE QUE la présente demande est rejetée. Aucune question de portée générale n’est certifiée et aucuns dépens ne sont adjugés.

« Henry S. Brown »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-1596-20

 

INTITULÉ :

ISRAEL SOLIS MENDOZA, KARINA SOLIS SOLIS, HIROMY SOLIS SOLIS, LUNA SOLIS SOLIS, BRISA SOLIS SOLIS c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE LE 23 FÉVRIER 2021 DEPUIS OTTAWA (ONTARIO) (LA COUR) ET TORONTO (ONTARIO) (LES PARTIES)

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BROWN

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 4 MARS 2021

 

COMPARUTIONS :

Me Jessica Chandrashekar

POUR LES DEMANDEURS

Me Leila Jawando

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

J Chandra Law

Avocate

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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