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Date : 20000623


Dossier : IMM-5362-99



ENTRE :



ABDERRAHIM ABDELHADI

     demandeur

    


     - et -



     LE MINISTRE DE LA

     CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE McKEOWN


[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'égard de la décision d'un agent d'immigration datée du 30 septembre 1999 dans laquelle cet agent rejetait la demande de résidence permanente présentée par le demandeur pour le motif que la fille à la charge de celui-ci n'était pas admissible pour une raison médicale, à savoir qu'elle souffrait de « bronchopathie chronique obstructive » .

[2]      Il s'agit de déterminer si l'opinion du médecin agréé était raisonnable dans les circonstances de l'affaire et si la décision de l'agent d'immigration a été prise de façon raisonnable, conformément aux principes de l'équité et de la justice naturelle.

[3]      La fille à la charge du demandeur a subi un examen médical à des fins d'immigration le 12 novembre 1998. Le docteur Bouyssou en est arrivé à la conclusion suivante :

« Bon état général d'ensemble chez fillette maghrébine de 6 ans, longiligne leptosome sans séquelles chirurgicales; bronch-pneumopathie chronique d'origine périnatale traitée en permanence et périodiquement réévaluée, compatible avec une activité sensiblement normale, sans autre pathologie majeure. Développement harmonieux, niveau psycho-scolaire normal à cet âge. »

[4]      Le pronostic était favorable pourvu que la fille du demandeur soit suivie de façon régulière et reçoive des soins à long terme appropriés. Le docteur Michel Lapointe a préparé une déclaration médicale le 3 juin 1999 dans laquelle il confirmait le diagnostic de bronchopathie chronique obstructive. Il a estimé que l'état de santé de cette personne allait se détériorer, qu'elle aurait besoin de physiothérapie respiratoire quotidienne combinée à l'utilisation d'antibiotiques, de bronchodilateurs et d'anti-inflammatoires. Il était donc raisonnable de penser que son admission au Canada imposerait un fardeau excessif aux services de santé canadiens et que cela pourrait constituer un motif pour refuser la demande de résidence permanente présentée par le demandeur.

[5]      L'agent d'immigration a ensuite envoyé ce qu'on appelle « une lettre d'équité » datée du 26 juillet 1999 qui donnait au demandeur l'occasion de fournir d'autres renseignements concernant la santé de sa fille. Le demandeur a répondu à la lettre d'équité par une lettre datée du 16 août 1999 adressée au défendeur dans laquelle il déclarait que sa fillette n'avait pas été malade depuis son arrivée au Canada sept mois auparavant, qu'elle fréquentait l'école régulièrement et qu'elle n'avait pas manqué un seul jour d'école pour des raisons médicales. Le demandeur avait joint à cette lettre une copie du rapport du Dr Gurwitz, un spécialiste des troubles respiratoires infantiles qui avait traité la fille du demandeur au Canada.

[6]      Le Dr Gurwitz a constaté que [TRADUCTION] « sa respiration était tout à fait stable et en fait asymptomatique » . Le 9 juin 1999 et le 4 août 1999, il a déclaré [TRADUCTION] qu' « elle était asymptomatique et n'avait pris aucun médicament au cours des 15 derniers jours » . Voici ses conclusions :

[TRADUCTION] Mon évaluation actuelle de Ouafae est qu'elle est légèrement asthmatique et que son état est en voie d'amélioration. Éventration diaphragmatique ne nécessitant aucun traitement et reflux gastroesophagien et de respiration entraînant des difficultés respiratoires exigeant la prise d'oxygène complètement guéri. Le pronostic semble excellent et je pense que nous devrions continuer à suivre son état respiratoire mais elle se comporte en fait comme une enfant de six ans normale. Comme vous le savez, les poumons continuent à se développer après la naissance jusqu'à ce que l'enfant ait quatre ans et ils continuent à le faire plus lentement par la suite; je pense que les problèmes respiratoires dont souffre cette jeune fille découlent de problèmes néonataux qui ont tous été guéris. Ses poumons sont bien développés. Si elle continue à progresser sans connaître de recul important, on peut prévoir la disparition de ses problèmes respiratoires avec une certaine hyperactivité des voies aériennes pouvant être facilement contrôlée.

[7]      Le 17 septembre 1999, le Dr Lapointe a rédigé une note de service dans laquelle il indiquait la raison pour laquelle les nouveaux renseignements médicaux transmis ne l'avaient pas fait changer d'avis; il a déclaré ceci :

[...] Le Docteur Gurwitz confirme les diagnostics pulmonaires (i.e. bronchopathie chronique obstructive, trachéodyskinésie et déhiscence diaphragmatique droite) et indique que depuis son arrivée au Canada elle est stable. Elle a abandonné sa médication très récemment. L'enfant est au Canada depuis janvier 1999. Donc malgré ces informations nouvelles qui semble favorables pour la candidate, nous n'avons que très peu de recul au Canada. C'est à dire que quelques mois. C'est à mon avis trop peu pour réviser le profil M-5 actuel, basé sur plusieurs rapports médicaux ainsi que des analyses objectives. C'est son pronostic à moyen terme et les risques de complications graves qui ont motivés ce refus temporaire qui pourra être révisé lorsque nous aurons un recul plus important.

[8]      L'agent d'immigration a envoyé la lettre de refus le 30 septembre 1999 dans laquelle il déclarait que les nouveaux renseignements médicaux reçus n'avaient pas amené le médecin chargé du cas à changer d'avis.

Analyse

[9]      La règle applicable en matière d'examen des avis médicaux est énoncée dans l'arrêt Gao c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 18 Imm. L.R. (2d) 306, dans lequel le juge Dubé déclare :

Le principe le plus important... est que les tribunaux de révision ou d'appel n'ont pas compétence pour tirer des conclusions de fait liées au diagnostic médical, mais qu'ils sont compétents pour examiner la preuve afin de savoir si l'avis des médecins agréés est raisonnable, compte tenu des circonstances de l'affaire. Le caractère raisonnable d'un avis médical doit être apprécié non seulement à l'époque où il a été émis mais également à l'époque à laquelle l'agent d'immigration s'en est servi pour rendre sa décision, puisque c'est cette décision qui fait l'objet du contrôle ou de l'appel. Les motifs pour lesquels une décision peut être jugée déraisonnable comprennent l'incohérence ou les contradictions, l'absence de preuve à l'appui de la décision, le défaut d'avoir tenu compte d'une preuve convaincante, ou le défaut d'avoir tenu compte de facteurs énoncés à l'art. 22 du Règlement.

[10]      Le demandeur soutient que le médecin agréé n'a pas tenu compte des renseignements contenus dans le rapport du 12 août 1999 préparé par le Dr Gurwitz. Le demandeur affirme que le Dr Gurwitz a reconnu que sa fille était en bonne santé. Le demandeur soutient également que le Dr Gurwitz n'a pas confirmé le diagnostic de bronchopathie chronique obstructive, mais qu'il a effectivement mentionné les antécédents dans ce domaine. Il affirme :

         [TRADUCTION]
         Le pronostic semble excellent

     Mais il poursuit :
         [TRADUCTION]
         Je pense qu'il y a lieu de continuer à suivre son état respiratoire

     Il signale également ceci dans sa conclusion :
         [TRADUCTION]
         Si elle continue à progresser sans connaître de recul important, on peut prévoir la disparition de ses problèmes respiratoires avec une certaine hyperactivité des voies aériennes pouvant être facilement contrôlée.

[11]      Il affirme également que s'il n'y a pas de [TRADUCTION] « recul important, elle devrait bien s'en tirer. » Il n'écarte toutefois pas la possibilité qu'il se produise un recul, et c'est sur cette possibilité que se fonde l'avis du médecin agréé selon lequel la fillette n'est pas admissible pour des raisons médicales. Le Dr Gurwitz n'a vu la fille du demandeur pour la première fois que trois mois avant de formuler son avis et deuxièmement, il mentionne dans sa lettre que cela ne fait que deux semaines qu'elle ne prend plus de médicament.

[12]      Le Dr Lapointe affirme qu'il est, d'après lui, encore trop tôt pour réviser le profil médical de la fillette du demandeur. J'estime qu'aucun des motifs démontrant le caractère déraisonnable de l'avis médical cité par le juge Dubé n'existe en l'espèce. Par conséquent, l'avis du médecin agréé était raisonnable dans les circonstances de l'affaire.

[13]      J'estime également que la décision de l'agent d'immigration a été prise de façon raisonnable et conformément aux principes de justice naturelle et d'équité. L'agent d'immigration était lié par l'avis médical valide qu'il a reçu, et comme il a déjà été mentionné, l'examen médical et le rapport du Dr Gurwitz fondés sur cet examen ne sont pas incompatibles avec l'avis du médecin agréé et ne sont pas non plus contraires à cet avis.

[14]      L'agent d'immigration ne possédait donc pas de renseignements contradictoires qui auraient fait ressortir la nécessité de poursuivre son enquête. L'agent d'immigration a agi de façon raisonnable en se fondant sur l'avis médical selon lequel il était encore trop tôt pour réviser le profil médical de la fille du demandeur. L'agent d'immigration était tenu d'informer le demandeur de la décision prise à l'égard de sa demande de résidence permanente, puisque l'avis médical ne contenait aucune erreur apparente.

[15]      Par conséquent, la décision de l'agent d'immigration a été prise de façon raisonnable et conformément aux principes de justice naturelle et d'équité.

[16]      La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


                          « W.P. McKeown »

                                      J.C.F.C.

Toronto (Ontario)

Le 23 juin 2000






Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad a.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats inscrits au dossier

No DU GREFFE :              IMM-5362-99
INTITULÉ DE LA CAUSE :          ABDERRAHIM ABDELHADI

                         - et -

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

                         DE L'IMMIGRATION


DATE DE L'AUDIENCE :          LE JEUDI 22 JUIN 2000
LIEU DE L'AUDIENCE :          TORONTO (ONTARIO)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE McKEOWN

EN DATE DU :                  VENDREDI 23 JUIN 2000

ONT COMPARU :              Peter J. Reiner

                        

                                 pour le demandeur

                         Ian Hicks

                    

                                 pour le défendeur
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     

                         Peter J. Reiner

                         Avocat

                         2200, rue Yonge

                         Bureau 601

                         Toronto (Ontario)

                         M4S 2C6

                                 pour le demandeur

                        

                         Morris Rosenberg

                         Sous-procureur général du Canada

                                 pour le défendeur

                         COUR FÉDÉRALE DU CANADA


                                 Date : 20000623

                        

         Dossier : IMM-5362-99


                         ENTRE :


                         ABDERRAHIM ABDELHADI

demandeur



                         - et -




                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                         ET DE L'IMMIGRATION


défendeur






                        

            

                         MOTIFS DE L'ORDONNANCE

                        





Date : 20000622


Dossier : IMM-5362-99


Toronto (Ontario), le jeudi 22 juin 2000

EN PRÉSENCE DE M. le juge McKeown


ENTRE :


     ABDERRAHIM ABDELHADI

     demandeur


     - et -


     LE MINISTRE DE LA

     CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

     défendeur


     ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire est rejetée.


                                 « W.P. McKeown »

     J.C.F.C.


Traduction certifiée conforme


Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad a.

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