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     Date: 19991105

     Dossier: IMM-467-99


Ottawa (Ontario), ce 5e jour de novembre 1999

En présence de l'honorable juge Pinard


Entre :

     DANIAL ARIYAN

     Partie demanderesse

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Partie défenderesse



     ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire visant la décision rendue le 21 janvier 1999 par Chantal Sarrazin, Conseiller en immigration, Citoyenneté et Immigration Canada, à l'effet de rejeter la demande d'établissement fondée sur des considérations humanitaires présentée par le demandeur, est rejetée.



                            

                             JUGE




     Date: 19991105

     Dossier: IMM-467-99


Entre :

     DANIAL ARIYAN

     Partie demanderesse

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Partie défenderesse



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD :

[1]      La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 21 janvier 1999 par Chantal Sarrazin, Conseiller en immigration, Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), à l'effet de rejeter la demande d'établissement fondée sur des considérations humanitaires présentée par le demandeur.

[2]      Dans un premier temps, le demandeur allègue qu'en violation des procédures en vigueur dans la région du Québec en matière de demande d'établissement de la catégorie de la famille, lui et son épouse n'ont pas eu d'entrevue et n'ont pas été entendus au sujet de la demande d'établissement. Concernant ces procédures ou cette politique, le demandeur réfère, dans son dossier, à la page 75, à l'affidavit de Marie-Hélène Paquin, travailleuse sociale, membre du Conseil d'administration du Comité d'aide aux réfugiés et porte-parole de la Coalition pour le respect des droits humains, laquelle y affirme:

         8- Il fut alors clairement indiqué aux participants du Comité de travail, que la politique de CIC Montréal était claire à cet effet et qu'il devait pour de tels cas y avoir systématiquement une entrevue avec le couple avant la prise de décicion (sic) par l'agent d'Immigration.


[3]      Par contre, la partie défenderesse réfère à l'affidavit de Himmat Shinhat, agent d'expertise régional à la direction des programmes, région du Québec, CIC, qui y relate comme suit la politique pertinente qui n'exige pas d'un agent chargé d'examiner semblable demande de dispense à procéder à une entrevue:

         5. Politique relative aux conjoints
         a. Les demandes de dispense du visa présentées par les conjoints de résidents permanents devraient être considérées d'un oeil favorable, car la séparation de conjoints unis de bonne foi entraîne des difficultés qui, normalement, justifieraient des mesures d'aide spéciales. Lorsque le mariage est authentique, c'est-à-dire qu'il a de bonnes chances de durer et a été contracté de bonne foi, non simplement aux fins d'immigration, il n'est pas nécessaire que les personnes concernées fassent la preuve qu'elles subiraient des difficultés supplémentaires pour qu'une demande de dispense de l'application du L9(1) puisse être traitée.
         b. On notera que la politique relative aux conjoints ne prime pas la Loi sur l'immigration. [. . .]


[4]      Ainsi, il appert que la politique en question requiert simplement que les conjoints de résidents permanents soient considérés d'un oeil favorable, ce qui ne veut pas nécessairement dire que les agents d'immigration sont contraints de procéder à une entrevue. En outre, la politique est subordonnée à la Loi sur l'immigration et, à cet égard, l'arrêt récent de la Cour suprême du Canada dans Baker c. Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et al. (9 juillet 1999), 25823, nous enseigne ce qui suit, sous la plume de l'honorable juge L'Heureux-Dubé, aux paragraphes 32, 33 et 34:

             Pondérant ces facteurs, je ne suis pas d'accord avec la conclusion de la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Shah, précité [(1994), 170 N.R. 238 (C.A.F.)], p. 239, que l'obligation d'équité dans ces circonstances est simplement "minimale". Au contraire, les circonstances nécessitent un examen complet et équitable des questions litigieuses, et le demandeur et les personnes dont les intérêts sont profondément touchés par la décision doivent avoir une possibilité valable de présenter les divers types de preuves qui se rapportent à leur affaire et de les voir évalués de façon complète et équitable.
             Toutefois, on ne peut pas dire non plus qu'une audience est toujours nécessaire pour garantir l'audition et l'examen équitables des questions en jeu. La nature souple de l'obligation d'équité reconnaît qu'une participation valable peut se faire de différentes façons dans des situations différentes. La Cour d'appel fédérale a statué que l'équité procédurale n'exige pas la tenue d'une audience dans ces circonstances: voir, par exemple, Said, précité [(1992), 6 Admin. L.R. (2d) 23 (C.F. 1re inst.)], p. 30.
             Je conviens que la tenue d'une audience n'est pas une exigence générale pour les décisions fondées sur des raisons d'ordre humanitaire. Il n'est pas indispensable qu'il y ait une entrevue pour exposer à un agent d'immigration les renseignements relatifs à une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire et pour que les raisons d'ordre humanitaire présentées puissent être évalués de façon complète et équitable. En l'espèce, l'appelante a eu la possibilité d'exposer par écrit, par l'entremise de son avocat, sa situation, celle de ses enfants et leur dépendance émotive vis-à-vis d'elle, et de présenter à l'appui de sa demande des lettres d'un travailleur social de la Société d'aide à l'enfance et de son psychiatre. Ces documents étaient à la disposition des décideurs, et ils contenaient les renseignements nécessaires pour la prise de décision. Compte tenu de tous les facteurs pertinents pour évaluer le contenu de l'obligation d'équité, le fait qu'il n'y a pas eu d'audience ni d'avis d'audience ne constituait pas, selon moi, un manquement à l'obligation d'équité procédurale envers Mme Baker dans les circonstances, particulièrement en raison du fait que plusieurs des facteurs militaient en faveur d'une norme plus souple. La possibilité qui a été offerte à l'appelante et à ses enfants de produire une documentation écrite complète relativement à tous les aspects de sa demande remplit les exigences en matière de droits de participation que commandait l'obligation d'équité en l'espèce.


[5]      Or, en l'espèce, le demandeur a rempli une "Demande de dispense de visa d'immigrant" le 15 juillet 1998, de même qu'une formule intitulée "Renseignements supplémentaires - conjoint au Canada", également datée du 15 juillet 1998. Au haut de la "Demande de dispense de visa d'immigrant", il est imprimé ce qui suit: "S'il manque d'espace pour inscrire des renseignements, utiliser une feuille supplémentaire". De plus, la question 2C de la formule "Renseignements supplémentaires - conjoint au Canada" demande s'il serait difficile pour le demandeur de présenter sa demande à un bureau des visas à l'étranger comme l'exige la Loi sur l'immigration, question à laquelle le demandeur a choisi de répondre laconiquement: "Oui, à cause de ma situation".

[6]      Je suis donc d'opinion, dans les circonstances, que la possibilité offerte au demandeur et à son épouse de produire une documentation écrite complète relativement à tous les aspects de la demande d'établissement rencontre les exigences de l'obligation d'équité procédurale.

[7]      Dans un deuxième temps, le demandeur reproche à l'agent de ne pas avoir considéré les pièces B et C annexées à son affidavit du 3 février 1999. La décision de l'agent d'immigration ayant été rendue le 21 janvier 1999, on ne saurait certes lui reprocher de ne pas avoir considéré des éléments de preuve qui sont eux-mêmes datés respectivement des 22 janvier et 23 janvier 1999.

[8]      Les arguments du demandeur sont donc sans mérite et sa demande de contrôle judiciaire est rejetée.




                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 5 novembre 1999



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