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                                                                                                                                           Date : 20030715

                                                                                                                             Dossier : IMM-2948-02

                                                                                                                           Référence : 2003 CF 877

Ottawa (Ontario), ce 15e jour de juillet 2003

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD

ENTRE :

                                                                      QUEEN TAIRE

                                                                                                                                  Partie demanderesse

                                                                              - et -

                      LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                     Partie défenderesse

                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

Introduction

[1]                 Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision de la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (CISR) rendue par les commissaires le 5 juin 2002, selon laquelle la demanderesse n'était pas une réfugiée au sens de la Convention.   


Les Faits

[2]                 La demanderesse est citoyenne du Nigeria, née en 1968. Elle allègue avoir une crainte bien fondée de persécution en raison de son appartenance à un groupe social, une femme victime de violence conjugale.

[3]                 À l'âge de seize ans, en 1984, la demanderesse a épousé un homme plus âgé. Elle était forcée par ses parents de vivre avec lui, mais elle a refusé de l'épouser légalement. En échange, l'homme avait fait une promesse de fournir une éducation à la demanderesse et de donner de l'argent et des terres agricoles à ses parents. Mais il n'a pas assuré l'instruction de la demanderesse.

[4]                 La demanderesse allègue que son conjoint l'a battu constamment. En 1990, elle a donné naissance à une fille. En 1997, le conjoint de la demanderesse a demandé que l'enfant subisse une clitoridectomie. L'intervention a eu lieu. La demanderesse a fui chez ses parents, mais ils l'ont retourné chez son conjoint. Un ami du conjoint, âgé de 50 ans, a déclaré qu'il marierait la fille de la demanderesse quand elle atteindra l'âge de 13 ans. La demanderesse a décidé de quitter son conjoint de nouveau.

[5]                 Pendant l'automne de 1998, la demanderesse et sa fille se sont enfuis à Lagos avec l'aide d'un ami, Emmanuel. Elle est tombé amoureuse d'Emmanuel. Mais le conjoint de la demanderesse les a trouvées. Le 23 mai 1999, Emmanuel fut assassiné et la demanderesse et sa fille ont été ramenées de force chez le conjoint.


[6]                 La demanderesse allègue que son conjoint l'a encore battue, et cette fois en faisant couler de l'eau bouillante sur son corps. Elle dit que la police ne se préoccupe pas de l'abus domestique car c'est considéré un problème familial.

[7]                 La demanderesse a quitté son conjoint un fois de plus en novembre 1999. Elle a fui vers le Canada avec l'aide d'un ami d'Emmanuel qui s'appelle Olu. La demanderesse a laissé sa fille avec une tante dans la ville de Benin. Elle dit qu'elle craint d'être tuée par son conjoint si elle retourne au Nigéria et allègue aussi que les autorités ne l'aideront pas si elle est encore abusée.

[8]                 En décembre 1999, la demanderesse a épousé un citoyen canadien, M. Eddie Mukoro. En 2000, M. Mukoro a fait une demande pour la résidence permanente au Canada en faveur de sa femme.

[9]                 Cette demande de contrôle judiciaire est la deuxième déposée par la demanderesse. Sa première audience eu lieu en avril 2000. La décision de la CISR a été cassée par la Cour fédérale dans une décision rendue le 2 novembre 2001 par le juge Hansen.       

  

Le décision de la Section du statut

[10]            La CISR entendit la demanderesse le 25 avril 2002. Dans ses motifs datés du 5 juin 2002, le tribunal décida que la demanderesse n'avait pas établi qu'elle était une réfugiée au sens de la Convention. La CISR trouva que la demanderesse était non crédible et détermina qu'elle n'avait pas quitté son pays pour les raisons alléguées.


Passeport

[11]            La CISR nota que la demanderesse n'avait pas produit de preuve documentaire supplémentaire après sa première audience. La demanderesse témoigna qu'elle avait fait une demande pour un passeport et a reçu son passeport en 1999, au Nigéria. Elle dit que son frère avait complété le formulaire et que le passeport était encore au Nigéria avec celui-ci. Les commissaires demandèrent pourquoi elle n'a pas produit le passeport et elle répondit qu'elle avait essayé en avril 2000 sans succès. La demanderesse répondit aussi qu'elle ne savait pas qu'elle devait produire le passeport et qu'elle avait son certificat de naissance.

[12]            La CISR note qu'à la fin de l'audience, la demanderesse fit une demande pour un délai pour obtenir des documents supplémentaires. La demande était rejetée, mais la CISR avait déclaré que si les documents étaient reçus avant que la décision soit prise, ils seraient considérés. La CISR nota que trois jours après l'audience, la demanderesse a fourni son passeport. Il n'y avait pas d'explication comment le passeport fut obtenue du Nigéria dans trois jours. La CISR affirma aux pages 4 et 5 de sa décision :

...We did not receive the shipping envelope explaining how the document was received by counsel from Nigeria three days after the hearing.

While we accept the document as corroboration of the claimant's identity as a Nigerian citizen, the speed with which she would have received it from Nigeria raises serious doubts about other testimony she gave about not being able to obtain additional information in support of her claim.


[13]            La CISR observa que la demanderesse témoigna qu'elle n'avait pas essayé de se procurer des documents relatifs au décès de son père (dit mort d'une crise cardiaque à cause des problèmes de sa fille) et au meurtre d'Emmanuel. Elle répondit qu'elle n'était pas dans une position de faire une demande pour les documents concernant Emmanuel. La CISR conclut ainsi à la page 5,    « We found this to be a lack of diligence on the part of the claimant. » La CISR trouva que la demanderesse aurait pu présenter une preuve additionnelle avant l'audience plutôt qu'après.

Certificat de naissance

[14]            La CISR nota que la demanderesse avait déposé en preuve la pièce P-2, son certificat de naissance daté le 20 juillet 1991. Le certificat fut émis à la demande du père de la demanderesse qui aurait déposé une déclaration d'âge sous serment. Attaché à ce certificat on retrouve l'affidavit de M. Johnson Taire, père de la demanderesse, daté le 19 juillet 1999, dans lequel il déclare : « I, Mr. Johnson Taire (Male), a Christian and Citizen of the Federal Republic of Nigeria, residing ..., do hereby make oath and state as follows.... »         

[15]            La CISR nota que la demanderesse avait témoigné que son père n'était pas un chrétien. Concernant cette incohérence, la demanderesse dit que son frère avait fait ce document et non son père. Les commissaires ont demandé comment son frère pouvait prêter serment si ce n'était pas son document. La demanderesse dit qu'il s'agissait peut être d'une erreur. La CISR conclut que la demanderesse n'était pas crédible sur ce point. La CISR trouva aussi que la demanderesse était non crédible lorsqu'elle affirmait que son père avait consenti de faire une demande pour un certificat de naissance lorsque ce dernier était responsable d'avoir vendu sa fille au conjoint et qu'il l'aurait forcé de retourner vivre avec son conjoint.


[16]            La CISR conclut que la demanderesse était citoyenne du Nigéria mais que cette preuve contradictoire et confuse qu'entoure l'obtention de son certificat de naissance entachait sa crédibilité en ce qui a trait à ses allégations d'abus.

Fuite de la demanderesse

[17]            La CISR nota que la demanderesse avait témoigné que Olu, un ami d' Emmanuel, l'avait aidé dans sa fuite. Elle dit qu'elle avait graissé la patte du surveillant avec l'argent obtenu de son frère. La CISR constata que la demanderesse avait donné une réponse différente lors de sa première audience : elle avait témoigné que l'argent venait de son conjoint. La réponse de la demanderesse était que l'argent venait de son conjoint et de son frère. La CISR conclut que la demanderesse n'était pas crédible.             

[18]            La demanderesse témoigna qu'elle avait quitté sa maison à 5 heures du matin. La CISR demanda quelle excuse elle présentait pour sortir si tôt. La demanderesse ne dit rien, et en suite répondit qu'elle avait dit qu'elle voulait acheter quelque chose. La CISR demanda quelles sortes de magasins seraient ouverts à cette heure-ci. Le procureur de la demanderesse répondit que les communautés Africaines sont en vie à cette heure. La CISR constata aussi que le surveillant aurait su que la demanderesse avait quitté la maison une fois déjà. La CISR conclut que l'histoire de la fuite de la demanderesse n'était pas crédible, disant que : « it was the claimant's inability to provide any consistent detail on this point which undermined her credibility. »


[19]            La demanderesse témoigna qu'elle avait donné 50 naira au surveillant. Elle dit qu'elle avait reçu cet argent de son frère et que l'argent lui avait été remis par sa fille. La demanderesse témoigna que lors de sa fuite, elle avait marché pendant 20 minutes car son frère l'attendait avec son auto à l'extérieur de l'enceinte. Ils conduisirent jusqu'à Lagos, un voyage de 5 à 6 heures. La CISR constata que la demanderesse avait écrit dans son FRP :

Finally I left him, at the end of November 1999, with the help of one of Emmanuel's friend called Olu. I left my daughter with my maternal aunt living in Benin.

[20]            La CISR dit que la demanderesse n'avait pas mentionné l'aide de son frère dans son FRP, ni l'aide d'Olu dans son témoignage. La CISR constata à la page 9 de sa décision :

...While this specific inconsistency was not addressed in the hearing room, they both constitute declarations made by the claimant. Again, it was this type of inconsistency which repeatedly undermined the claimant's credibility.

Secours à la police


[21]            La demanderesse témoigna qu'elle était allé à la police deux fois : après qu'elle fut brûlée par son conjoint en 1999, et avant qu'elle fuît chez Emmanuel. La CISR demanda plus de détails concernant la première visite au poste de police. La demanderesse dit que c'était après qu'elle fut battue et abusée. La CISR nota que la demanderesse fournit aucun détail additionnel, ni la date de cet événement. La CISR constata que la demanderesse n'avait pas mentionné dans son FRP qu'elle avait contacté la police suite à la violence de son conjoint. La CISR nota que lors de sa première audience la demanderesse a témoigné qu'elle avait communiqué avec la police en 1998 et que les policiers ont dit qu'ils ne feraient rien car il s'agissait d'une dispute familiale.

[22]            La CISR constata que le témoignage de la demanderesse n'était pas crédible, disant que :

Since the claimant testified that she had shown the burn marks from the boiling water poured on her to the police, which happened in 1999, we find it implausible that she would not have been able to consistently identify that incident in both hearings consistently. The vagueness of the rest of her testimony on this point further undermined her general credibility.

           

Documents médicaux

[23]            La CISR nota que la demanderesse avait déposé un document daté du 15 août 1999; il s'agissait d'une recette pour un traitement de brûlures. Elle avait aussi déposé un rapport médical daté du 17 avril 2000. Ce document indique que la demanderesse a plusieurs cicatrices et de l'hyper- pigmentation sur son corps. Le document dit que les cicatrices étaient causées par l'acné, mais que les autres, selon la demanderesse, étaient causées par l'eau bouillante. La CISR constate à la page 11 de sa décision :

...The panel does not contest the content of either Exhibit P-4 of [sic] P-5. However, given the credibility issues discussed in these reasons to this point, we find the documents insufficient in detail to counterbalance the lack of credibility in the other evidence before us.


Autres documents

[24]            La CISR dit qu'elle accepte le passeport comme preuve de la nationalité de la demanderesse. Cependant, la CISR décida de ne pas accepter les lettres et photos du frère de la demanderesse (soumis après l'audience) à cause des problèmes de crédibilité de la demanderesse. La CISR commente ceci sur ce point à la page 11 de sa décision :

...The photos show a building the claimant shows as her parents' home. They also show a man she identified as her brother, with wounds and cotton dressing. We find that on their own, the photos could be subject to various explanations. Therefore, they are not sufficient to counterbalance our credibility findings on the claimant's oral testimony.

[25]            La CISR conclut que la demanderesse n'a pas démontré qu'il existe une possibilité sérieuse qu'elle soit victime de persécution advenant son retour en Nigérie. La CISR dit d'être consciente que les événements traumatiques peuvent causer des difficultés lors de la preuve orale, mais que dans ce cas, ce n'était pas une explication pour les nombreuses incohérences observées par la CISR aux pages 11 et 12 de sa décision :

...The claimant's inability to consistently state the number of times or when she went to the police was one example. Her inability to consistently identify who helped her escape in November 1999 is another example. Her inability to explain why a sworn declaration of her father would indicate that he is a Christian, when the claimant clearly states that he is not, is still another. Her inability to explain how she would have gotten past the guard who was hired to increase security around the compound, after she would have run away for the second time, is another. On the one hand, the claimant stated that she had difficulty getting documentary evidence from Nigeria to corroborate her story, while on the other, she was able to produce as passport three days after the hearing, which she testified was in Nigeria.

All of these points lead the panel to conclude that we do not believe the claimant's story as she alleges it....


Les questions en litige

[26]            La demanderesse prétend que la CISR a commis plusieurs erreurs en tirant des conclusions déraisonnables concernant sa crédibilité relatives aux points suivants: (i) la soumission du passeport trois jours après l'audience; (ii) la demande de son père de son certificat de naissance; (iii) le rejet des photos et lettres de son frère; (iv) l'identité de la personne qui avait aidé la demanderesse à fuir.

[27]            La demanderesse note qu'elle avait fait une demande pour un interprète Uvwie-Français et prétend que l'absence d'un interprète a provoqué une situation inconfortable pour elle et son procureur. Tant que la Commission n'avait pas trouvé ledit interprète, la demanderesse soumet qu'elle n'a pas eu droit à une audience juste et équitable. Aussi, la demanderesse prétend que l'article 133 de la Loi constitutionnelle de 1867 accorde à un procureur le droit d'utiliser l'anglais ou le français devant les tribunaux du Canada.

[28]            La demanderesse note qu'elle avait demandé que les transcriptions de la première audience soient écartées de son audience de novo. La demanderesse prétend qu'elle n'a pas été informée ni de la décision ni des motifs de cette décision, et que c'était inéquitable. La défenderesse note aussi que le tribunal a rendu une décision qui se fonde sur certains éléments qui avaient été spécifiquement expliqués dans le jugement de madame le juge Hansen.

Norme de Contrôle


[29]            l appartient à la Section du statut à titre de tribunal spécialisé d'apprécier la crédibilité des témoins et de la preuve présentée. En l'absence d'une démonstration par le demandeur que les inférences tirées par le tribunal ne pouvaient raisonnablement l'être, l'intervention de cette Cour ne saurait être justifiée: Kabengele c. M.C.I., [2000] A.C.F. No. 1866, (QL); Aguebor v. Canada (Minister of Employment and Immigration), [1993] A.C.F. No. 732 (QL), (1993) 160 N.R. 315.

Analyse

Credibilité

[30]            La demanderesse soumet que la CISR a basé ses conclusions concernant la vitesse à laquelle elle a soumis son passeport sur des hypothèses spéculatives, sans avoir posé des questions à la demanderesse. La demanderesse prétend qu'elle est en droit de déposer des documents supplémentaires avant que ne soit rendue la décision finale du tribunal : Sorogin c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. No 630 (QL); (1999), 163 F.T.R. 116. La CISR nota que la réception du passeport « raises doubts about other testimony she gave about not being able to obtain additional information in support of her claim. » La demanderesse prétend que la CISR a tiré une conclusion déraisonnable, car elle avait fourni un document demandé par la CISR lors de la première audience. Dans l'affidavit de la demanderesse, celle-ci dit qu'après l'audience elle avait demandé à un ami qui devait voyager au Canada d'apporter son passeport avec lui, et qu'il l'a fait quelques jours après l'audience.          

[31]            Le défendeur note que la demanderesse affirma le jour de l'audience qu'elle avait essayé de se procurer le passeport mais sans succès. Malgré ce témoignage, la demanderesse avait obtenu et transmis le passeport dans un délai de trois jours après l'audience.


[32]            À mon avis, la CISR a reçu et a considéré le passeport, car la décision indique que : « counsel was told by the panel that if, in the interim prior to a decision being made in this case, documentation was received, the panel would of course review it. » Enfin, le passeport a été accepté par la CISR comme preuve de la nationalité de la demanderesse. Cependant, le tribunal constata que dans les circonstances, la soumission du passeport trois jours après l'audience indique que la demanderesse n'était pas crédible quand elle témoigna qu'elle avait de la difficulté à fournir la preuve documentaire. La demanderesse avait une période de deux ans entre ses deux audiences au cours de laquelle elle aurait pu soumettre des documents. Dans les circonstances, je ne trouve pas que les conclusions de la CISR sont manifestement déraisonnables.      

[33]            La demanderesse prétend aussi que la CISR a tiré des conclusions sans fondement en décidant qu'elle n'avait pas bien expliqué pourquoi son père aurait déclaré sous serment qu'il était chrétien si, selon la demanderesse, il ne l'était pas. De plus, la CISR conclut que la demanderesse était non-crédible lorsqu'elle dit que son frère s'était occupé de la déclaration de son père alors qu'il s'agissait d'un serment du père. Selon la demanderesse, de telle contradictions ne sont pas centrales à la revendication et conséquemment ne saurait justifier le rejet de la revendication. En appui de son argument, la demanderesse cite l'arrêt : Mahathmasseelan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1991), 15 Imm. L.R. (2d) 29 (C.A.F.).


[34]            Lors de l'audience, la demanderesse témoigna que son frère s'occupait des détails de la demande de passeport et qu'elle ne savait pas plus que ça. La CISR a déterminé qu'il n'était pas plausible que le frère de la demanderesse pouvait prêter serment à la place de son père. À mon avis, cette conclusion de non-plausibilité n'est pas manifestement déraisonnable. Je constate que dans l'affaire Mahathmasseelan, supra, la CISR n'avait pas conclu qu'il y avait une absence totale de crédibilité. Cependant, dans le cas présent, la CISR a tiré plusieurs conclusions négatives de crédibilité et de non-plausibilité, et a identifié des incohérences dans le témoignage de la demanderesse. Compte tenu de l'ensemble de la preuve, la CISR pouvait raisonnablement conclure que la demanderesse n'était pas crédible sur ce point et conséquemment n'a pas commis d'erreur révisable.

          

[35]            La demanderesse soumet que la CISR a commis une erreur en concluant que les photos de son frère pourraient être l'objet d'explications diverses, sans avoir posé des questions écrites ou orales à la défenderesse. La demanderesse avait soumis les lettres et photos après l'audience.

[36]            Dans l'affaire Hamid v. Canada, [1995] A.C.J. No 1293 (QL), Monsieur le juge Nadon, a statué qu'une fois que la CISR conclut que le demandeur n'est pas crédible, le tribunal n'est pas tenu d'accorder du poids aux documents, à moins que la demanderesse puisse démontrer que les documents sont crédibles. En l'espèce, la CISR a déterminé que ces documents « are not sufficient to counterbalance our credibility findings on the claimant's oral testimony. » À la lumière de l'arrêt Hamid, supra, je suis d'avis que la CISR n'a pas commis d'erreur en refusant les documents supplémentaires de la demanderesse.


[37]            La demanderesse prétend que la CISR s'est trompée en disant qu'elle n'avait pas mentionné dans son témoignage que son ami Olu l'avait aidé à fuir de sa maison en novembre 1999. Je donne raison à la demanderesse. La CISR dit dans sa décision : « there is no mention in her PIF of her brother helping her, or in her testimony of the friend of Emmanuel, called Olu. » À la lecture de la transcription de l'audience, je constate que la demanderesse avait témoigné ainsi : « yeah, because my brother came with a car to pick me up and we left for Lagos to meet Olu who helped me to get out of the country. » Cependant, la CISR a raison d'observer que le frère de la demanderesse n'était pas mentionné dans son FRP, qui se lit comme suit : « Finally I left him, at the end of November 1999, with the help of one of Emmanuel's friend called Olu. »

[38]            La demanderesse prétend qu'il s'agit d'une erreur révisable. Dans l'affaire Abarajithan c. M.E.I., [1992] A.C.F. No. 54 (QL), la Cour a constaté au para. 1 :

...Les mauvaises interprétations de la preuve de ce genre par un tribunal ne portent pas toutes un coup fatal à sa décision, mais la section du statut de réfugié a, en l'espèce, fait de cette conception erronée de la preuve, le point central de son raisonnement. La décision ne peut par conséquent être maintenue.

[39]            Je suis d'avis que cette erreur par la CISR est sans conséquences. Il y avait plusieurs autres exemples d'incohérences dans le témoignage de la demanderesse qui justifient la conclusion du tribunal.


Droits Linguistiques

[40]            La demanderesse constate qu'elle avait fait une demande pour un interprète uvwie-français, mais la CISR n'avait pu lui trouver un tel interprète. Elle soumet qu'il y a des questions de droit constitutionnel soulevées en l'espèce.

[41]            La CISR relate les faits pertinents dans sa décision ainsi aux pages 1 et 2 :

...Although the claimant speaks and understands English, current counsel, Me Lebrun, had hoped to have an interpreter capable of speaking Uvwie and French, which was counsel's first language. The claimant's first hearing was conducted in English, and there is no indication, in the transcripts or in the decision of the Federal Court, that the claimant's lack of comprehension was an issue. The claimant had done her elementary and secondary school education in English, and had indicated in her PIF, when it was originally submitted, that she was able to read and fully understand the contents of her PIF as written in English. The claimant did not state that she had trouble understanding the questions asked to her in English or expressing herself in English during the hearing.

To accommodate counsel, the panel heard his oral submissions on the claimant's behalf in French. Counsel was given time to obtain the claimant's consent to give his submissions in French without translation. Prior to his submissions, the claimant confirmed that she waived her right to translation of his submissions.

After two-and-a-half hours of testimony, counsel requested a conference with the panel to request that he be allowed to withdraw from the file, given his lack of skill in English. After counsel discussed the situation with the claimant, she requested him to remain as her counsel. After discussion with the panel, it was ruled that since the claimant herself had not expressed any difficulties with proceeding, it was the panel's intention to continue testimony, and that an adjournment would not be granted, but that counsel would be able to make his submissions on behalf of the claimant in French. Counsel agreed to continue with the claim.

[42]            L'article 19 de la Loi constitutionnelle de 1982 stipule ce qui suit :



Procédures devant les tribunaux établis par le Parlement

19. (1) Chacun a le droit d'employer le français ou l'anglais dans toutes les affaires dont sont saisis les tribunaux établis par le Parlement et dans tous les actes de procédure qui en découlent.           

Proceedings in courts established by Parliament

19. (1) Either English or French may be used by any person in, or in any pleading in or process issuing from, any court established by Parliament.


[43]            La demanderesse note aussi que la règle 17(1) des Règles de la Section du statut précise ce qui suit :


La section du statut fournit les services d'un interprète à la partie ou au témoin qui l'avise par écrit, au moins 15 jours avant la date fixée pour la conférence ou l'audience selon le cas, qu'il est incapable de comprendre ou de parler la langue dans laquelle se déroulera la conférence ou de l'audience ou qu'il a une déficience auditive.

The Refugee Division shall provide an interpreter to assist a party or witness where the party or witness advises the Refugee Division in writing at least 15 days before the date set for a conference or hearing, as the case may be, that the party or witness does not understand or speak the language in which the conference or hearing is to be conducted, or is hearing impaired.


[44]            La demanderesse prétend qu'une fois que le choix est fait, il revient à la Commission de faire en sorte que la demanderesse comprenne la langue dans laquelle se déroulent les procédures. La demanderesse allègue que le non respect de ses droits a nui grandement à sa crédibilité et à l'utilité qu'aurait pu avoir son procureur dans la présente affaire.

[45]            Le défendeur constate que les prétentions soulevées par la demanderesse confondent le droit à un interprète garanti par l'article 14 de la Charte et les droits linguistiques énoncés à l'article 19 de la Loi constitutionnelle de 1982 et à la Partie III de la Loi sur les langues officielles (LLO).


[46]            L'article 14 de la Charte se lit comme suit :


14. La partie ou le témoin qui ne peuvent suivre les procédures, soit parce qu'ils ne comprennent pas ou ne parlent pas la langue employée, soit parce qu'ils sont atteints de surdité, ont droit à l'assistance d'un interprète.

14. A party or witness in any proceedings who does not understand or speak the language in which the proceedings are conducted or who is deaf has the right to the assistance of an interpreter.


[47]            Dans l'affaire R. c. Beaulac, [1999] 1 R.C.S. 768 à la page 800, la Cour suprême a traité de cette distinction entre le droit à un interprète et les droits linguistiques :

Le droit à une défense pleine et entière est lié aux aptitudes linguistiques uniquement en ce que l'accusé doit être en mesure de comprendre son procès et de s'y faire comprendre. Toutefois, ce droit est déjà garanti par l'art. 14 de la Charte [...] Les droits linguistiques ont une origine et un rôle complètement distincts. Ils visent à protéger les minorités de langue officielle du pays et à assurer l'égalité de statut du français et de l'anglais....

Le défendeur fait valoir que les prétentions de la demanderesse n'établissent aucunement que son droit à un interprète ou ses droits linguistiques (ou ceux de son procureur) ont été enfreints devant la Section du statut.

[48]            Le défendeur soumet que l'arrêt-clé quant à l'article 14 de la Charte est l'arrêt R. c. Tran, [1994] 2 R.C.S. 951. Le droit à un interprète s'applique autant aux personnes accusées qu'aux parties à des actions civiles et à des procédures administratives, ainsi qu'aux témoins. Le défendeur soumet que le droit à un interprète n'en est donc pas un droit qui s'applique aux avocats impliqués dans les procédures en question. À la page 979 de l'arrêt Tran, la Cour a écrit, « il doit être clair que l'accusé avait effectivement besoin de l'assistance d'un interprète ... qu'il ne comprenait pas ou ne parlait pas la langue du prétoire. »   


[49]            Le défendeur constate que dans l'affaire Bykov c. Canada (M.C.I.), [1999] A.C.F. No. 1459 (C.F. 1re inst.) (QL), la CISR avait été incapable d'engager un interprète tchouvache, mais avait fourni un interprète russe. M. Bykov comprenait le russe et avait poursuivi des études en russe pendant dix ans. Le juge Teitelbaum a conclu que le demandeur comprenait le russe suffisamment bien pour l'audience et que la CISR n'est pas tenue « de fournir les services d'un interprète qui parle exactement le même dialecte que celui-ci. » (para. 22).

[50]            Le défendeur prétend que la demanderesse comprend et s'exprime en anglais, et qu'elle a fait ses études primaires et secondaires au Nigeria en anglais, qui est d'ailleurs la langue officielle de ce pays. Le défendeur dit aussi que ni la requérante ni son avocat n'ont fait objection à ce que les audiences se déroulent en anglais. Au surplus, le défendeur dit que la demanderesse n'a pas démontré qu'il s'agissait d'un besoin réel et donc l'absence d'un interprète anglais uvwie ne constitue donc pas un motif suffisant pour faire annuler la décision de la Section du statut.


[51]            Concernant les droits linguistiques, le défendeur constate que les droits de la s. 19 de la Charte sont réitérés dans la LLO, qui exprime le droit de chacun d'employer le français ou l'anglais dans toutes les affaires dont sont saisis les tribunaux fédéraux et dans les actes de procédure qui en découlent [voir l'extrait de la Loi, Annexe "A" attachée]. Le défendeur constate aussi que la CISR est un « tribunal fédéral » au sens du paragraphe 3(2) de la LLO. Il note aussi que les droits énoncés à la Partie III sont reconnus aux individus qui sont libres de les faire valoir ou non.

[52]            Le défendeur note que l'audience s'est déroulée en anglais, et que l'avocat de la demanderesse a choisi, conformément à l'art. 133 de la Loi constitutionnelle de 1867, au paragraphe 19(1) de la Charte et à l'article 14 de la LLO, de faire ses plaidoiries orales en français. Il constate que, pour cette partie de l'audience, la demanderesse aurait pu, en vertu de l'article 15 de la LLO, demander des services d'interprétation simultanée du français à l'anglais. Le défendeur note que la demande n'avait pas été faite, car la Section du statut a indiqué ceci : « If you say, well, I would prefer to hear it in English, then we may have to get a French/English interpreter in here for the purposes of submissions. »

[53]            Le défendeur souligne aussi que la demanderesse aurait également pu choisir de procéder en français, et elle aurait pu demander les services d'interprétation de la langue française à la langue anglaise. Mais, dans tous les cas, la demanderesse doit faire valoir son droit avant la tenue des procédures afin que le tribunal puisse prendre des dispositions pour qu'il puisse être exercé. À tout événement, la demanderesse a manifestement choisi de ne pas exercer son droit à des services d'interprétation du français à l'anglais.


[54]            Je suis en accord avec les soumissions du défendeur. Je suis d'avis que la demanderesse n'a pas subi de préjudice en raison de l'utilisation de la langue anglaise lors de l'audience. Les conclusions négatives de crédibilité ne sont pas manifestées en raison de la langue, mais en raison du fond et de la forme du témoignage de la demanderesse. Les commissaires de la CISR ont souligné que si la demanderesse n'avait pas compris les questions, elle aurait dû demander des clarifications. Je suis satisfait que l'article 14 de la Charte a été respecté.

[55]            De plus, je suis satisfait que les services linguistiques garantis par la LLO et la Loi constitutionnelle de 1982 ont été renoncé par le procureur et sa cliente. Par conséquent, je rejette les arguments de la demanderesse en ce qui a trait aux droits linguistiques.     

Transcription de la première audience

[56]            La demanderesse constate qu'elle avait demandé que les transcriptions de la première audience soient écartées de son audience de novo. Elle dit que lors de l'audience, une conférence fut tenue en son absence sur des questions touchant la possibilité que soit déposée la transcription de la première audience. La demanderesse prétend qu'elle n'a pas été informée ni de la décision ni des motifs de cette décision, et que cela est inéquitable. La demanderesse prétend aussi que le tribunal a rendu une décision qui se fonde sur certains éléments qui avaient été spécifiquement expliqués dans le jugement de madame le juge Hansen.

[57]            Le défendeur soumet que la Cour fédérale s'est déjà prononcée sur la question de l'utilisation de la transcription de la première audience sur la revendication du statut de réfugié d'une personne lorsque la décision qui en a résulté est cassée par la Cour fédérale. Dans l'affaire Diamanama c. M.C.I., [1996] A.C.F. No. 121 (QL), le juge Reed a affirmé ce qui suit au para. 10 :


With respect to the wording of the order, I do not think it appropriate to word it in a way which would limit the Board that rehears the application. [...] The second panel can, of course, use the transcript of the first hearing for whatever purposes it wishes but no order, from me, conditioning that use is either required or appropriate.

[58]            Le défendeur note aussi que le jugement de l'affaire Kabengele, supra, confirme que la CISR est justifiée de consulter la transcription de l'audience initiale lorsqu'il y a lieu de vérifier la véracité de l'histoire du demandeur.

[59]            Le défendeur prétend que les conclusions de la CISR ne reposent pas sur les mêmes conclusions que celles tirées par la première formation. Il dit que, selon le jugement de Madame le juge Hansen, les conclusions d'absence de crédibilité tirées par le premier tribunal concernaient la durée du séjour de la demanderesse à Lagos, la plausibilité du refus de la demanderesse de participer à une cérémonie de mariage officielle, les contradictions de la demanderesse en ce qui concerne l'âge de son conjoint, les détails concernant le meurtre de son ami Emmanuel, les circonstances entourant l'obtention de son passeport, et le fait que ce soit son père qui ait signé la demande pour l'obtention de son certificat de naissance. En l'espèce la CISR a fondé sa décision sur les nombreuses incohérences que j'ai déjà constaté au paragraphe 25 de ces motifs. Le défendeur prétend que, de toute façon, la Section du statut avait tout le loisir de tirer des conclusions d'absence de crédibilité sur les mêmes éléments non crédibles de l'histoire de la demanderesse dans le cas où celle-ci se contredirait de nouveau sur ces éléments de sa revendication.


[60]            Je conclus que selon la jurisprudence, la CISR est en droit d'utiliser les transcriptions de la première audience pour rendre sa décision. Par conséquent, la demanderesse n'a pas subi un manque d'équité procédurale dans les circonstances. Concernant la notion de res judicata invoquée par la demanderesse sur les éléments de crédibilité, je suis essentiellement en accord avec les arguments du défendeur. Je trouve que les questions de crédibilité analysées par Madame le juge Hansen sont différentes des points soulevés par la CISR, à l'exception du fait que le père de la demanderesse ait signé la demande pour l'obtention de son certificat de naissance. À tout événement, la CISR était en droit d'exprimer des conclusions négatives de plausibilité dans ces circonstances.

Conclusion

[61]            Étant satisfait que la CISR n'a pas commis d'erreur révisable, cette demande de contrôle judiciaire sera rejetée.    

[62]            Les parties n'ont pas proposé la certification d'une question grave de portée générale telle qu'envisagée à l'article 74(d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, S.C. (2001) chapitre 27. Je ne propose pas de certifier une question grave de portée générale.


                                                                     ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE:

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.         Aucune question grave de portée générale n'est certifiée.

                                                                                                                                 "Edmond P. Blanchard"                    

                                                                                                                                                                 Juge                          


                                                                       ANNEXE "A"

voir document séparé


                                                                       ANNEXE "A"

                                                          Loi sur les langues officielles



DÉFINITIONS

3(2) Définition de « tribunal »

(2) Pour l'application du présent article et des parties II et III, est un tribunal fédéral tout organisme créé sous le régime d'une loi fédérale pour rendre la justice.

L.R. (1985), ch. 31 (4e suppl.), art. 3; 1993, ch. 28, art. 78.

[...]

PARTIE III

ADMINISTRATION DE LA JUSTICE

14 Langues officielles des tribunaux fédéraux

14. Le français et l'anglais sont les langues officielles des tribunaux fédéraux; chacun a le droit d'employer l'une ou l'autre dans toutes les affaires dont ils sont saisis et dans les actes de procédure qui en découlent.

15(1) Droits des témoins

15. (1) Il incombe aux tribunaux fédéraux de veiller à ce que tout témoin qui comparaît devant eux puisse être entendu dans la langue officielle de son choix sans subir de préjudice du fait qu'il ne s'exprime pas dans l'autre langue officielle.

15(2) Services d'interprétation_: obligation

(2) Il leur incombe également de veiller, sur demande d'une partie, à ce que soient offerts, notamment pour l'audition des témoins, des services d'interprétation simultanée d'une langue officielle à l'autre langue.

15(3) Services d'interprétation_: faculté

(3) Ils peuvent faire aussi ordonner que soient offerts, notamment pour l'audition des témoins, des services d'interprétation simultanée d'une langue officielle à l'autre s'ils estiment que l'affaire présente de l'intérêt ou de l'importance pour le public ou qu'il est souhaitable de le faire pour l'auditoire.

16(1) Obligation relative à la compréhension des langues officielles

16. (1) Il incombe aux tribunaux fédéraux autres que la Cour suprême du Canada de veiller à ce que celui qui entend l'affaire_:

a) comprenne l'anglais sans l'aide d'un interprète lorsque les parties ont opté pour que l'affaire ait lieu en anglais;

b) comprenne le français sans l'aide d'un interprète lorsque les parties ont opté pour que l'affaire ait lieu en français;

c) comprenne l'anglais et le français sans l'aide d'un interprète lorsque les parties ont opté pour que l'affaire ait lieu dans les deux langues.

16(2) Fonctions judiciaires

(2) Il demeure entendu que le paragraphe (1) ne s'applique aux tribunaux fédéraux que dans le cadre de leurs fonctions judiciaires.

16(3) Mise en oeuvre progressive

(3) Les tribunaux fédéraux autres que la Cour fédérale et la Cour canadienne de l'impôt disposent toutefois, pour se conformer au paragraphe (1), d'un délai de cinq ans après son entrée en vigueur.

17(1) Pouvoir d'établir des règles de procédure

17. (1) Le gouverneur en conseil peut établir, sauf pour la Cour suprême du Canada, la Cour fédérale et la Cour canadienne de l'impôt, les règles de procédure judiciaire, y compris en matière de notification, qu'il estime nécessaires pour permettre aux tribunaux fédéraux de se conformer aux articles 15 et 16.

17(2) Cour suprême, Cour fédérale, Cour canadienne de l'impôt

(2) La Cour suprême du Canada, la Cour fédérale et la Cour canadienne de l'impôt peuvent exercer, pour leur propre fonctionnement, le pouvoir visé au paragraphe (1), sous réserve de l'agrément du gouverneur en conseil.

18 Cas où Sa Majesté est partie à l'affaire

18. Dans une affaire civile à laquelle elle est partie devant un tribunal fédéral, Sa Majesté du chef du Canada ou une institution fédérale utilise, pour les plaidoiries ou les actes de la procédure, la langue officielle choisie par les autres parties à moins qu'elle n'établisse le caractère abusif du délai de l'avis l'informant de ce choix. Faute de choix ou d'accord entre les autres parties, elle utilise la langue officielle la plus justifiée dans les circonstances.

19(1) Actes judiciaires

19. (1) L'imprimé des actes judiciaires des tribunaux fédéraux que doivent signifier les institutions fédérales est établi dans les deux langues officielles.

19(2) Compléments d'information

(2) Ces actes peuvent être remplis dans une seule des langues officielles pourvu qu'il y soit clairement indiqué que la traduction peut être obtenue sur demande; celle-ci doit dès lors être établie sans délai par l'auteur de la signification.

20(1) Décisions de justice importantes

20. (1) Les décisions définitives - exposé des motifs compris - des tribunaux fédéraux sont simultanément mises à la disposition du public dans les deux langues officielles_:

a) si le point de droit en litige présente de l'intérêt ou de l'importance pour celui-ci;

b) lorsque les débats se sont déroulés, en tout ou en partie, dans les deux langues officielles, ou que les actes de procédure ont été, en tout ou en partie, rédigés dans les deux langues officielles.

20(2) Autres décisions

(2) Dans les cas non visés par le paragraphe (1) ou si le tribunal estime que l'établissement au titre de l'alinéa (1)a) d'une version bilingue entraînerait un retard qui serait préjudiciable à l'intérêt public ou qui causerait une injustice ou un inconvénient grave à une des parties au litige, la décision - exposé des motifs compris - est rendue d'abord dans l'une des langues officielles, puis dans les meilleurs délais dans l'autre langue officielle. Elle est exécutoire à la date de prise d'effet de la première version.

20(3) Décisions orales

(3) Les paragraphes (1) et (2) n'ont pas pour effet d'interdire le prononcé, dans une seule langue officielle, d'une décision de justice ou de l'exposé des motifs.

20(4) Précision

(4) Les décisions de justice rendues dans une seule des langues officielles ne sont pas invalides pour autant.

DÉFINITIONS

3(1) Definitions

3(2) Definition of "federal court"

(2) In this section and in Parts II and III, "federal court" means any court, tribunal or other body that carries out adjudicative functions and is established by or pursuant to an Act of Parliament.

R.S., 1985, c. 31 (4th Supp.), s. 3; 1993, c. 28, s. 78.

[...]

PART III

ADMINISTRATION OF JUSTICE

14 Official languages of federal courts

14. English and French are the official languages of the federal courts, and either of those languages may be used by any person in, or in any pleading in or process issuing from, any federal court.

15(1) Hearing of witnesses in official language of choice

15. (1) Every federal court has, in any proceedings before it, the duty to ensure that any person giving evidence before it may be heard in the official language of his choice, and that in being so heard the person will not be placed at a disadvantage by not being heard in the other official language.

15(2) Duty to provide simultaneous interpretation

(2) Every federal court has, in any proceedings conducted before it, the duty to ensure that, at the request of any party to the proceedings, facilities are made available for the simultaneous interpretation of the proceedings, including the evidence given and taken, from one official language into the other.

15(3) Federal court may provide simultaneous interpretation

(3) A federal court may, in any proceedings conducted before it, cause facilities to be made available for the simultaneous interpretation of the proceedings, including evidence given and taken, from one official language into the other where it considers the proceedings to be of general public interest or importance or where it otherwise considers it desirable to do so for members of the public in attendance at the proceedings.

16(1) Duty to ensure understanding without an interpreter

16. (1) Every federal court, other than the Supreme Court of Canada, has the duty to ensure that

(a) if English is the language chosen by the parties for proceedings conducted before it in any particular case, every judge or other officer who hears those proceedings is able to understand English without the assistance of an interpreter;

(b) if French is the language chosen by the parties for proceedings conducted before it in any particular case, every judge or other officer who hears those proceedings is able to understand French without the assistance of an interpreter; and

(c) if both English and French are the languages chosen by the parties for proceedings conducted before it in any particular case, every judge or other officer who hears those proceedings is able to understand both languages without the assistance of an interpreter.

16(2) Adjudicative functions

(2) For greater certainty, subsection (1) applies to a federal court only in relation to its adjudicative functions.

16(3) Limitation

(3) No federal court, other than the Federal Court of Canada or the Tax Court of Canada, is required to comply with subsection (1) until five years after that subsection comes into force.

17(1) Authority to make implementing rules

17. (1) The Governor in Council may make such rules governing the procedure in proceedings before any federal court, other than the Supreme Court of Canada, the Federal Court or the Tax Court of Canada, including rules respecting the giving of notice, as the Governor in Council deems necessary to enable that federal court to comply with sections 15 and 16 in the exercise of any of its powers or duties.

17(2) Supreme Court, Federal Court and Tax Court

(2) Subject to the approval of the Governor in Council, the Supreme Court of Canada, the Federal Court and the Tax Court of Canada may make such rules governing the procedure in their own proceedings, including rules respecting the giving of notice, as they deem necessary to enable themselves to comply with sections 15 and 16 in the exercise of any of their powers or duties.

18 Language of civil proceedings where Her Majesty is a party

18. Where Her Majesty in right of Canada or a federal institution is a party to civil proceedings before a federal court,

(a) Her Majesty or the institution concerned shall use, in any oral or written pleadings in the proceedings, the official language chosen by the other parties unless it is established by Her Majesty or the institution that reasonable notice of the language chosen has not been given; and

(b) if the other parties fail to choose or agree on the official language to be used in those pleadings, Her Majesty or the institution concerned shall use such official language as is reasonable, having regard to the circumstances.

19(1) Bilingual forms

19. (1) The pre-printed portion of any form that is used in proceedings before a federal court and is required to be served by any federal institution that is a party to the proceedings on any other party shall be in both official languages.

19(2) Particular details

(2) The particular details that are added to a form referred to in subsection (1) may be set out in either official language but, where the details are set out in only one official language, it shall be clearly indicated on the form that a translation of the details into the other official language may be obtained, and, if a request for a translation is made, a translation shall be made available forthwith by the party that served the form.

20(1) Decisions, orders and judgments that must be made available simultaneously

20. (1) Any final decision, order or judgment, including any reasons given therefor, issued by any federal court shall be made available simultaneously in both official languages where

(a) the decision, order or judgment determines a question of law of general public interest or importance; or

(b) the proceedings leading to its issuance were conducted in whole or in part in both official languages.

20(2) Other decisions, orders and judgments

(2) Where

(a) any final decision, order or judgment issued by a federal court is not required by subsection (1) to be made available simultaneously in both official languages, or

(b) the decision, order or judgment is required by paragraph (1)(a) to be made available simultaneously in both official languages but the court is of the opinion that to make the decision, order or judgment, including any reasons given therefor, available simultaneously in both official languages would occasion a delay prejudicial to the public interest or resulting in injustice or hardship to any party to the proceedings leading to its issuance,

the decision, order or judgment, including any reasons given therefor, shall be issued in the first instance in one of the official languages and thereafter, at the earliest possible time, in the other official language, each version to be effective from the time the first version is effective.

20(3) Oral rendition of decisions not affected

(3) Nothing in subsection (1) or (2) shall be construed as prohibiting the oral rendition or delivery, in only one of the official languages, of any decision, order or judgment or any reasons given therefor.

20(4) Decisions not invalidated

(4) No decision, order or judgment issued by a federal court is invalid by reason only that it was not made or issued in both official languages.



                                                                 COUR FÉDÉRALE

                                                 AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                   

DOSSIER :                                           IMM-2948-02

INTITULÉ :                                        Queen Taire c. Le Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :              21 mars 2003

MOTIFS[de l'ordonnance ou du jugement] : le juge Blanchard

DATE DES MOTIFS :                      15 juillet 2003

COMPARUTIONS:

Me Michel Le Brun                                                                        POUR LE DEMANDEUR

Me Martine Valois                                                                          POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Michel Lebrun                                                                          POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ministre de la Justice

Montréal (Québec) H2Z 1X4


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