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     IMM-4719-96

OTTAWA (ONTARIO), LE MERCREDI 10 SEPTEMBRE 1997

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE RICHARD

ENTRE :

     UTHAYACHANDRAN SANDRASEGARAM,

     requérant,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     intimé.

     O R D O N N A N C E

     VU la demande de contrôle judiciaire, déposée par le requérant, de la décision par laquelle la Section du statut de réfugié a conclu, le 27 novembre 1996, qu"il n"était pas un réfugié au sens de la Convention,

     LA COUR ORDONNE que la demande soit accueillie, que la décision de la Commission soit annulée et que l"affaire soit envoyée à une formation différente pour qu"elle procède à une nouvelle audition afin de déterminer si une PRI s"offre au requérant.


John D. Richard

     juge

Traduction certifiée conforme                          ___________________

                                         Bernard Olivier, LL.B.

     IMM-4719-96

ENTRE :

     UTHAYACHANDRAN SANDRASEGARAM,

     requérant,

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L"IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L"ORDONNANCE

LE JUGE RICHARD

     Il s"agit de la demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle la Section du statut de réfugié a conclu, le 27 novembre 1996, que le requérant n"était pas un réfugié au sens de la Convention.

     Le requérant, âgé de 26 ans, est un Tamoul de Jaffna, originaire de Valvettithurai, dans le nord du Sri Lanka. Il s"est enfui de cette région pour éviter d"être enrôlé de force au sein des milices des LTTE. À son arrivée à Colombo, il avait l"intention de s"enfuir du pays. On lui a extorqué de l"argent à deux occasions. Il a été arrêté dans une rafle à la suite d"un attentat à la bombe et a été détenu et battu dans un poste de police. Il a été relâché six jours plus tard, après que son oncle a versé un pot-de-vin pour obtenir sa libération.

     Au début de l"audition, la Commission a dit que les seules questions litigieuses soulevées par sa revendication portaient sur la crédibilité et la PRI. À mon avis, la conclusion de la Commission selon laquelle une PRI s"offre au requérant ne peut être maintenue, vu les circonstances.

     La Commission s"est proposée d"appliquer le critère en deux volets de l"arrêt Rasaratnam1. La Commission n"a pas tiré de conclusions défavorables particulières en ce qui concerne la crédibilité. Elle a convenu que les événements décrits par le requérant, événements qui, selon lui, constituaient de la torture et de la persécution, s"étaient effectivement produits, mais elle a conclu que l"ensemble des mésaventures du requérant à Colombo n"équivalaient pas à de la persécution antérieure et ne donnait pas lieu, de la part du requérant, à une crainte fondée d"être persécuté s"il retournait maintenant à Colombo. De plus, la Commission a cité un rapport, préparé en 1996 par le Haut-commissariat du Canada à Colombo, selon lequel on a assisté à une diminution appréciable du nombre d"arrestations et à une augmentation de la rapidité avec laquelle on vérifiait l"identité des personnes interpellées dans cette ville. La Commission a également cité un rapport préparé en 1996 par le Department of State américain selon lequel les forces de l"ordre faisaient maintenant preuve de beaucoup plus de retenue.

     De l"avis de la Commission, il était peu probable que le requérant serait persécuté s"il retournait à Colombo.

     La Commission s"est ensuite demandée s"il serait déraisonnable pour le requérant, vu l"ensemble de la situation, y compris sa situation personnelle, de se réfugier à Colombo.

     La Commission a conclu que le requérant n"éprouverait pas de difficultés excessives en se réfugiant à Colombo. Elle a fondé sa conclusion sur de la preuve documentaire établissant qu"il y a une grande communauté tamoule à Colombo qui a historiquement appuyé les Tamouls et sur le Rapport de 1996 du HCNUR selon lequel il était possible de renvoyer au Sri Lanka, de façon méthodique et sécuritaire, les personnes auxquelles on a refusé d"accorder le droit d"asile, au terme d"un processus équitable.

     Cependant, compte tenu de la situation particulière du requérant, la Commission a déterminé qu"il était raisonnable pour lui de retourner à Colombo, étant donné qu"il comprend et parle l"anglais dans une certaine mesure et qu"en outre, il possède des qualités d"entrepreneur et connaît bien le domaine du traitement du poisson. Voici comment la Commission s"est exprimée :

         [TRADUCTION] Le revendicateur comprend et parle l"anglais dans une certaine mesure, comme le démontre le fait qu"il a constamment répondu aux questions en anglais et parfois même avant que l"interprète ne finisse d"interpréter les questions posées. La formation fait remarquer que l"anglais est l"une des langues du commerce, de la culture et des affaires à Colombo. En outre, le revendicateur possède des qualités d"entrepreneur et il connaît bien le domaine du traitement du poisson. La formation estime qu"il est raisonnable de s"attendre à ce que le revendicateur mette pleinement à profit sa jeunesse, ses connaissances linguistiques et son expérience professionnelle, dans la capitale.                 

     Les commissaires ont conclu, en évaluant la conduite du requérant à l"audition, que celui-ci comprenait et parlait l"anglais dans une certaine mesure, bien qu"il ait témoigné à l"aide d"un interprète. En effet, ils ont semblé avoir eu l"impression que le requérant répondait parfois aux questions avant que l"interprète n"eût fini de les interpréter. Or, les extraits de la transcription qui m"ont été cités n"étayent pas une telle conclusion. Le requérant a nié qu"il comprenait ou parlait l"anglais, en réponse à une question directe qu"un membre de la formation lui a posée à l"audition, et il a déposé une déclaration sous serment, dans le cadre de la présente demande, dans laquelle il réitère sa dénégation et explique pourquoi la Commission a pu avoir eu cette impression. Compte tenu du dossier dont je dispose, j"estime que cette conclusion tirée par la Commission est manifestement déraisonnable.

     La seule question qui reste à trancher est de savoir s"il s"agit d"une erreur importante à l"égard de la conclusion. La Commission a conclu qu"il était raisonnable de s"attendre à ce que le revendicateur mette pleinement à profit sa jeunesse, ses connaissances linguistiques et son expérience professionnelle, à Colombo. Je conclus que la Commission elle-même a considéré que les connaissances linguistiques du revendicateur, c"est-à-dire son aptitude apparente à comprendre et parler l"anglais, étaient déterminantes.

     Pour ce motif, la demande est accueillie. La décision de la Commission est annulée et l"affaire est envoyée à une formation différente pour qu"elle procède à une nouvelle audition en vue de déterminer si une PRI s"offre au requérant.


John D. Richard

     juge

Ottawa (Ontario)

Le 10 septembre 1997.

Traduction certifiée conforme                      ___________________

                                     Bernard Olivier, LL.B.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

    

NO DU GREFFE :          IMM-4719-96

INTITULÉ DE LA CAUSE :      UTHAYACHANDRAN SANDRASEGARAM c. MCI

LIEU DE L"AUDIENCE :      Toronto (Ontario)

DATE DE L"AUDIENCE :      le 27 août 1997

MOTIFS DE L"ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE RICHARD

EN DATE DU :              10 septembre 1997

ONT COMPARU :

Raoul Boulakia                              POUR LE REQUÉRANT

Robin Sharma                              POUR L"INTIMÉ

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Raoul Boulakia                              POUR LE REQUÉRANT

Toronto (Ontario)

George Thomson                              POUR L"INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

__________________

1      Rasaratnam c. M.E.I. [1992] 1 C.F. 706 (C.A.).

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