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Date : 20060223

Dossier : IMM‑9780‑04

Référence : 2006 CF 244

Toronto (Ontario), le 23 février 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MOSLEY

 

ENTRE :

SEON YANG KIM, JONG HEE KIM,

EUN‑KYUNG KIM, JONG MIN KIM

demandeurs

 

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La principale question en litige dans la présente demande de contrôle judiciaire est de savoir si l’agent qui a refusé d’accorder, à l’égard des conditions d’octroi de visa, une dispense fondée sur des motifs d’ordre humanitaire a suffisamment motivé sa décision. Étant donné que j’ai conclu que ce n’était pas le cas, il sera fait droit à la présente demande pour les motifs qui suivent.

 

[2]               Seon Yang Kim, son épouse Jong Hee Kim et leurs deux enfants Jong Min‑Kim et Eun‑Kyung Kim sont des citoyens sud‑coréens qui sont arrivés au Canada en juillet 1999 en qualité de visiteurs. Pendant qu’ils se trouvaient au Canada, ils ont obtenu un visa d’un an pour que M. Kim puisse accepter un contrat de travail comme pasteur pour une congrégation évangélique de Toronto. Lorsque la prorogation du visa a été refusée, la famille est demeurée au Canada en situation irrégulière. M. Kim exploite à l’heure actuelle une entreprise de nettoyage et sa femme travaille comme caissière. Eun‑Kyung (Ellen), 22 ans, étudie les sciences de la santé à l’Université de Toronto. Jong‑Min (Brian), 20 ans, fait également des études universitaires. Tous participent activement à la vie religieuse et sociale de leur collectivité.

 

[3]               Le 19 juin 2002, les demandeurs ont été convoqués pour être informés qu’ils faisaient l’objet d’une mesure d’interdiction de séjour, et ils ont à ce moment‑là présenté une demande d’asile. À l’audience tenue par la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la CISR), ils ont franchement reconnu qu’ils étaient venus au Canada uniquement pour des raisons économiques et qu’ils avaient déposé une demande d’asile pour reporter leur expulsion. La demande a été rejetée le 26 mars 2003. Une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’égard de cette décision a été rejetée le 7 juillet 2003.

 

[4]               Les demandeurs ont alors présenté au Canada une demande d’établissement fondée sur des motifs d’ordre humanitaire (demande CH), qui a été examinée et rejetée le 4 novembre 2004. La demande des demandeurs était fondée sur leur établissement et leur intégration au Canada.

 

LA DÉCISION ATTAQUÉE

 

[5]               Les motifs de la décision sont laconiques. L’agent affirme avoir pris sa décision après avoir examiné les observations présentées par les demandeurs et leur avocat ainsi que les renseignements obtenus grâce au système de soutien des opérations des bureaux locaux (SSOBL). L’agent a conclu que les éléments de preuve fournis par les demandeurs n’établissaient pas l’existence de motifs susceptibles de justifier une dispense des conditions normales imposées par la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIRP).

 

[6]               L’agent déclare que la plupart des documents fournis portaient sur les efforts déployés par la famille pour s’établir au Canada et s’intégrer à la collectivité. L’agent note ce qui suit :

 

[traduction] L’intégration est un facteur qui peut être pris en compte pour évaluer les difficultés que subiraient les membres de cette famille […] les preuves apportées par les intéressés ne m’ont pas convaincu que leur intégration au Canada est telle que leur demander de présenter leur demande à l’étranger leur causerait des difficultés excessives.

 

Ils ont démontré qu’ils étaient très motivés et désireux de demeurer ici. Ils semblent tous participer activement à la vie religieuse de leur congrégation et par ce moyen, à la vie sociale de leur collectivité.

 

L’intéressé est arrivé au Canada en qualité de visiteur, a obtenu une prorogation parce qu’il avait obtenu un contrat de travail comme pasteur pour une congrégation. Il a toutefois commencé à occuper un emploi qui n’était pas autorisé, à l’extérieur de son emploi comme pasteur. Lorsque sa demande de séjour au Canada a été refusée, et qu’il a été invité à quitter le pays, il a déposé une demande d’asile, qui a été rejetée. Sa famille et lui font maintenant l’objet de mesures de renvoi.

 

L’intéressé n’a pas démontré qu’il existait des motifs d’ordre humanitaire justifiant l’octroi d’une dispense à l’égard du paragraphe 11(1) de la LIPR.

 

D’après les preuves présentées, je ne suis pas convaincu que l’intéressé subirait une difficulté inhabituelle, injustifiée ou excessive s’il était obligé de demander la résidence permanente de l’extérieur du Canada. La demande est refusée.

 

 

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[7]               Comme je l’ai déjà noté ci‑dessus, la principale question en litige dans la présente demande est de savoir si l’agent a suffisamment motivé sa décision. Les demandeurs ont également soulevé une question secondaire au sujet de la violation de l’équité procédurale par l’agent en question dans la mesure où celui‑ci s’est appuyé sur les notes du SSOBL.

 

[8]               Étant donné que j’ai conclu qu’il y avait lieu de faire droit à la demande, en me fondant sur le motif principal, je n’ai pas l’intention d’analyser la question de l’équité procédurale. Je mentionnerai toutefois pour la gouverne du prochain agent qui sera chargé d’examiner le dossier que, d’après mon examen du dossier, je ne pense pas que l’agent ait agi ici de façon inappropriée lorsqu’il a pris connaissance des notes du SSOBL avant de prendre sa décision. Les notes qui ont été déposées avec le dossier certifié ne contiennent aucun élément constituant des preuves extrinsèques qui auraient été prises en compte de façon inappropriée par l’agent en question. Les observations de l’avocat des demandeurs sur ce point sont purement hypothétiques.

 

LE CADRE LÉGAL

 

[9]               Les dispositions applicables de la LIPR se lisent ainsi :

11. (1) L’étranger doit, préalablement à son entrée au Canada, demander à l’agent les visa et autres documents requis par règlement, lesquels sont délivrés sur preuve, à la suite d’un contrôle, qu’il n’est pas interdit de territoire et se conforme à la présente loi.

11. (1) A foreign national must, before entering Canada, apply to an officer for a visa or for any other document required by the regulations. The visa or document shall be issued if, following an examination, the officer is satisfied that the foreign national is not inadmissible and meets the requirements of this Act.

 

 

ARGUMENTS ET ANALYSE

 

 

La norme de contrôle

 

[10]           Ma collègue, la juge Carolyn Layden‑Stevenson, a préparé un résumé fort utile des principes applicables au contrôle judiciaire des décisions prises à l’égard de demandes CH dans Agot c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2003), 232 F.T.R. 101, 2003 CFPI 436, au paragraphe 8, résumé que je souhaite adopter et incorporer aux présents motifs :

[...] La décision du représentant du ministre en ce qui concerne une demande fondée sur des raisons d’ordre humanitaire est une décision discrétionnaire : Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817 (l’arrêt Baker). La norme de contrôle judiciaire applicable à ces décisions est celle de la décision raisonnable simpliciter (l’arrêt Baker). Dans le cas d’une demande de dispense fondée sur des raisons d’ordre humanitaire, le fardeau de la preuve incombe au demandeur (Owusu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 94, [2003] A.C.F. n° 139, juge Gibson citant les jugements Prasad c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1996), 34 Imm.L.R. (2d) 91 (C.F. 1re inst.) et Patel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 36 Imm.L.R. (2d) 175 (C.F. 1re inst.). La pondération des facteurs pertinents ne ressortit pas au tribunal appelé à contrôler l’exercice du pouvoir discrétionnaire ministériel (Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 1 R.C.S. 3 (Suresh); Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 4 C.F. 358 (C.A.) (Legault). Les lignes directrices ministérielles n’ont pas force de loi et ne lient pas le ministre et ses représentants, mais elles sont accessibles au public et la Cour suprême les a qualifiées de très utiles à la Cour (Legault). Les décisions relatives à des raisons d’ordre humanitaire doivent être motivées (Baker). Il serait excessif d’exiger des agents de révision, en tant qu’agents administratifs, qu’ils motivent leurs décisions avec autant de détails que ce que l’on attend d’un tribunal administratif qui rend ses décisions à la suite d’audiences en règle (Ozdemir c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 282 N.R. 394 (C.A.F.).

 

 

[11]           Les tribunaux doivent faire preuve d’une retenue considérable à l’égard des agents d’immigration qui exercent les pouvoirs que leur attribue la loi, compte tenu de la nature factuelle de leur enquête, du rôle d’exception qu’elle joue dans le régime légal, du fait que le décideur est le ministre et que les termes de la loi lui attribuent un large pouvoir discrétionnaire : Baker, ci‑dessus; Legault, ci‑dessus, autorisation de pourvoi devant la C.S.C. refusée, [2002] S.C.C.A. nº 220.

 

[12]           Par conséquent, dans mon analyse générale de la décision de l’agent, j’appliquerai la décision raisonnable comme norme de contrôle. Le juge Iacobucci a analysé la notion de décision raisonnable dans Barreau du Nouveau‑Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, 2003 CSC 20, et il a déclaré au paragraphe 55 :

La décision n’est déraisonnable que si aucun mode d’analyse, dans les motifs avancés, ne pouvait raisonnablement amener le tribunal, au vu de la preuve, à conclure comme il l’a fait. Si l’un quelconque des motifs pouvant étayer la décision est capable de résister à un examen assez poussé, alors la décision n’est pas déraisonnable et la cour de révision ne doit pas intervenir… Cela signifie qu’une décision peut satisfaire à la norme du raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux de la cour de révision […] [citations omises].

 

 

La décision de l’agent était‑elle suffisamment motivée?

 

[13]           Les demandeurs soutiennent que les motifs formulés par l’agent ne permettent pas de savoir s’il a procédé à un examen détaillé et raisonnable de la volumineuse documentation qu’ils ont fournie à l’appui de leur demande d’établissement. L’agent a certes reconnu que le degré d’établissement des demandeurs était le principal aspect de la demande, mais il n’a pas examiné de façon approfondie cet aspect. Avec des motifs aussi brefs, formulés en termes généraux, il est difficile de savoir si la demande a fait l’objet d’un examen détaillé et raisonnable. Les motifs ne permettent pas de comprendre clairement le raisonnement qu’a tenu l’agent et ne peuvent donc résister à un examen poussé.

 

[14]           Le défendeur soutient que l’agent a manifestement tenu compte des documents présentés et qu’il mentionne directement le fait que les demandeurs sont des personnes extrêmement motivées qui participent très activement à la vie de leur congrégation. L’agent fait également référence aux antécédents professionnels du père au Canada. Les demandeurs n’ont pas démontré que l’agent avait laissé de côté certains éléments de preuve.

 

[15]           Les lignes directrices ministérielles exigent que le demandeur démontre qu’il éprouverait une « difficulté indue et injustifiée ou excessive » s’il était obligé de quitter le Canada : IP‑5 Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire, article 12.1. Les lignes directrices définissent l’expression difficulté inhabituelle ou excessive comme une difficulté non prévue à la LIPR ou au Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (RIPR), le résultat de circonstances échappant au contrôle du demandeur ou une difficulté qui ne découle pas de la conduite de ce dernier : Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 1041 (C.F. 1re inst.), conf. par [2003] 2 C.F. 555, 2002 CAF 475.

 

[16]           Le défendeur soutient qu’à part leur établissement, les demandeurs n’ont pas présenté d’éléments convaincants quant aux raisons pour lesquelles ils subiraient une « difficulté indue et injustifiée ou excessive » s’ils présentaient leur demande depuis la Corée du Sud. Les demandeurs n’ont pas fourni suffisamment de preuves ou d’arguments démontrant que leur intégration au Canada était telle que le fait de leur demander de présenter leur demande de l’étranger leur causerait des difficultés excessives.

 

[17]           Comme l’a déclaré le juge Sexton, parlant au nom de la Cour d’appel dans Via Rail Canada Inc. c. Office national des transports, [2001] 2 C.F. 25, 193 D.L.R. (4th) 357, au paragraphe 21, l’obligation de motiver une décision n’est remplie que lorsque les motifs fournis sont suffisants. La notion de motifs suffisants est une question qui doit être tranchée en fonction des circonstances de chaque espèce. Toutefois, le juge Sexton note que, règle générale, les motifs sont suffisants lorsqu’ils remplissent les fonctions pour lesquelles l’obligation de motiver a été imposée.

 

[18]           Au paragraphe 22 de ses motifs, dans Via Rail, le juge Sexton s’exprime de la façon suivante :

On ne s’acquitte pas de l’obligation de donner des motifs suffisants en énonçant simplement les observations et les éléments de preuve présentés par les parties, puis en formulant une conclusion. Le décideur doit plutôt exposer ses conclusions de fait et les principaux éléments de preuve sur lesquels reposent ses conclusions. Les motifs doivent traiter des principaux points en litige. Il faut y retrouver le raisonnement suivi par le décideur et l’examen des facteurs pertinents. [notes omises]

 

 

[19]           Cette observation a été reprise par la Cour à plusieurs reprises : Abdollahi‑Ghane c. Canada (Procureur général) (2004), 259 F.T.R. 9, 2004 CF 741; Alexander c. Canada (Solliciteur général), 2005 CF 1147, [2005] A.C.F. n° 1416 (QL); Demirovic c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1284, [2005] A.C.F. n° 1560 (QL).

 

[20]           Dans une décision récente, Adu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2005), 139 A.C.W.S. (3d) 164, 2005 CF 565, ma collègue la juge Anne Mactavish a déclaré que les motifs formulés par l’agent à l’égard d’une demande CH étaient insuffisants et ne pouvaient résister à un examen assez poussé parce qu’ils consistaient uniquement en une relation des faits et une conclusion. Ces motifs ne permettaient pas aux demandeurs de savoir pourquoi leur demande avait été rejetée ni comment l’agente en question en était arrivée à sa conclusion.

 

[21]           Dans Adu, la juge Mactavish a cité plusieurs décisions de la Cour dans lesquelles la motivation des décisions des agents a été jugée suffisante. Dans chacune de ces affaires, les demandeurs avaient soulevé dans leur demande CH des éléments pour lesquels un retour dans leur pays d’origine leur ferait subir un préjudice inhabituel, excessif et injustifié, aspect que l’agent concerné avait abordé.

 

[22]           Dans Irimie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 10 Imm. L.R. (3d) 206, [2000] A.C.F. n° 1906 (C.F. 1re inst.) (QL), par exemple, les demandeurs avaient soutenu que leur fils éprouverait des difficultés à s’adapter à une nouvelle école s’il était obligé de retourner dans son pays. Dans Nazim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2005), 137 A.C.W.S. (3d) 405, 2005 CF 125, le demandeur avait de la famille au Pakistan mais aucun parent au Canada, élément dont l’agent avait tenu compte. Dans Mohammed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 100 A.C.W.S. (3d) 121, [2000] A.C.F. n° 1508 (C.F. 1re inst.) (QL), l’agent avait abordé dans ses motifs les craintes qu’entretenait la demanderesse à l’égard d’un ex‑conjoint abusif et le jeune âge des enfants.

 

[23]           En l’espèce, l’avocat des demandeurs a présenté des observations à l’appui de la demande CH le 1er avril 2003 et il a fourni un complément d’information le 14 juillet 2004 portant sur l’intégration des demandeurs au Canada. Pour ce qui est des difficultés que les demandeurs subiraient s’ils étaient obligés de présenter une demande de visa depuis l’étranger, les observations d’avril 2003 font référence au formulaire de renseignements personnels (FRP) des demandeurs présenté à l’appui de leur demande d’asile et à la décision de la CISR. Les observations contiennent ce qui suit :

[traduction] […] après avoir passé près de six ans au Canada, la famille, mais surtout les enfants, auraient du mal à se réintégrer dans la société coréenne. Les demandeurs ont apporté une contribution positive à la société canadienne, mais cette demande constitue leur seule possibilité de solliciter la résidence permanente. Veuillez noter que la Cour fédérale du Canada a jugé que le fait de perdre une telle possibilité constituait un préjudice irréparable.

 

[24]           J’estime que ces dernières remarques sont inexactes, dans la mesure où elles concernent les possibilités de présenter de l’étranger une demande de résidence permanente, mais elles étaient suffisantes pour attirer l’attention du décideur sur la question du préjudice et des moyens de trouver les preuves susceptibles d’appuyer cette conclusion. Un nombre de preuves considérable avait été présenté à l’agent au sujet de l’intégration de la famille Kim au Canada. Figuraient au dossier, des preuves relatives à l’emploi, à leur activité économique, à leur éducation et à leur intégration sociale.

 

[25]           Dans son FRP daté du 16 juillet 2002, M. Kim relate comment sa famille est arrivée au Canada, les motifs pour lesquels ils souhaitent y demeurer, en particulier la possibilité de s’instruire qu’auraient leurs enfants. Il souhaite que ses enfants apprennent selon une méthode plus créatrice, qu’ils soient en contact avec différentes façons de penser plutôt que d’avoir simplement à apprendre par cœur des livres de classes. Il affirme que ses enfants se sont très bien adaptés au système éducatif canadien et que son fils en particulier, qui n’avait que neuf ans lorsqu’ils sont arrivés ici, aurait du mal à s’adapter au système d’éducation coréen. M. Kim mentionne les difficultés qu’il a lui‑même éprouvées pour trouver du travail en Corée et affirme qu’il aurait du mal à y retrouver du travail. Dans sa décision, la CISR a jugé que son témoignage était crédible et qu’il avait parlé franchement de ses perspectives économiques.

 

[26]           Il était loisible à l’agent chargé de la demande CH de conclure que malgré ces preuves, les demandeurs seraient en mesure de se réadapter à la vie en Corée et de présenter de ce pays une demande de résidence permanente. En fait, la CISR en est arrivée à cette conclusion dans son analyse, même si celle‑ci a été effectuée il y a trois ans, à un moment où la famille était peut‑être moins intégrée au Canada qu’elle l’est actuellement.

 

[27]           Je suis tout à fait conscient du fait qu’il incombait aux demandeurs de démontrer qu’ils subiraient une « difficulté indue et injustifiée ou excessive » s’ils étaient obligés de retourner en Corée. En outre, l’obligation de motiver ses décisions qui incombe à l’agent chargé de la demande CH ne l’oblige pas à fournir des motifs aussi détaillés que ceux d’un tribunal administratif. Néanmoins, les demandeurs pouvaient s’attendre à autre chose de la part de cet agent que des déclarations vagues comme motifs de refus de leur demande.

 

[28]           Je conclus donc que les motifs ne résistent pas à a un examen assez poussé. Il n’y a aucun mode d’analyse qui puisse amener le lecteur, au vu de la preuve, à conclure comme l’a fait le décideur et ils ne contiennent aucune explication défendable qui soit conforme à la norme applicable, soit la décision raisonnable.

 

[29]           Il sera donc fait droit à la demande et l’affaire sera renvoyée à un autre agent pour nouvel examen. Aucune question de portée générale n’a été proposée et aucune ne sera certifiée.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE qu’il soit fait droit à la demande et que l’affaire soit renvoyée à un autre agent pour nouvel examen. Aucune question n’est certifiée.

 

« Richard G. Mosley »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        Imm‑9780‑04

 

 

INTITULÉ :                                       SEON YANG KIM, JONG HEE KIM, EUN‑KYUNG KIM, JONG MIN KIM

                                                            c.

                                                            LE Ministre de la Citoyenneté

                                                            et de l’immigration

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 21 FÉVRIER 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE 
ET ORDONNANCE :
                       LE JUGE MOSLEY

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 23 FÉVRIER 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Wennie Lee

POUR LES DEMANDEURS

 

Gordon Lee

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Wennie Lee

Toronto (Ontario)

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

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