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     T-2768-91

Entre :

     GERALD ZUCAWICH,

     appelant,

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     intimée.

     Je requiers que la version corrigée de la transcription ci-annexée des motifs que j'ai prononcés à l'audience à Winnipeg (Manitoba), le 26 mai 1998, soit déposée pour satisfaire aux exigences de l'article 51 de la Loi sur la Cour fédérale.

                                 F.C. Muldoon

                    

                                     Juge

Ottawa (Ontario)

le 6 juillet 1998

     Date : 19980703

     Dossier : T-2768-91

Entre :

     GERALD ZUCAWICH,

     appelant,

     - et -

     SA MAJESTÉ LA REINE,

     intimée.

     MOTIFS

LE JUGE MULDOON

[1]      LA COUR : C'est un document au sujet duquel il aurait vraisemblablement témoigné sous serment. Ce document s'intitule un avis de publication de renseignements. [TRADUCTION] " L'examen de l'affidavit de documents de la défenderesse fait clairement ressortir que l'auteur de cet affidavit, Floyd Rayner, " - qui, en passant, a maintenant quitté le ministère - " n'a pas communiqué tous les renseignements dont il disposait ". Pouviez-vous témoigner à ce sujet ou auriez-vous pu le contre-interroger au sujet de son affidavit ? (2) [TRADUCTION] " La défenderesse a porté atteinte et continue de porter atteinte aux droits constitutionnels du demandeur ", mais on ne précise pas quels étaient ces droits, et quels sont les droits constitutionnels auxquels [TRADUCTION] " le demandeur n'est pas tenu à l'égard de la défenderesse tant que celle-ci n'a pas restauré et garanti les droits constitutionnels du demandeur ", une fois de plus on ne précise pas quels sont ces droits constitutionnels. (4) [TRADUCTION] " Le demandeur demande à connaître la date à laquelle la défenderesse a envisagé d'intenter la procédure en l'espèce, et les noms des personnes concernées. " Je ne comprends pas ce que cela veut dire. Cela n'a aucun sens pour moi. La Cour serait d'accord avec quiconque vous dirait qu'on ne peut pas déposer un tel document, parce que c'est de la foutaise.

[2]      M. ZUCAWICH : D'accord, mais c'est ce que je vous explique, Monsieur le juge, je ne connais pas la loi ni la jurisprudence et j'ai besoin de conseils.

[3]      LA COUR : Bien sûr, vous avez besoin de conseils. Vous aviez M. Chappell de Aikins MacAulay - attendez un instant - je pense que ce document a été déposé pour vous, n'est-ce pas ? Attendez encore une minute. Il a été déposé. Il y a une note au dossier portant la mention " Reçu ", mais c'est dans notre dossier. Depuis le tout début. La date indiquée est le 23 mars 1994. Il est indiqué ceci : " Lundi, le 21 mars 1994, M. Gerald Zucawich, demandeur, a produit un " Avis de publication de renseignements " pour fins de dépôt. Après avoir consulté le dossier de M. Zucawich, je l'ai informé qu'aucune disposition ne prévoyait le dépôt de ce document. M. Zucawich a insisté pour que le document soit déposé. Je l'ai informé que le document serait " reçu et versé au dossier ", mais non déposé ". Vous ne reconnaissez pas la personne qui vous a dit cela. Et c'est signé par M. Coutu, qui est le greffier ici aujourd'hui, et ce document est dans votre dossier.

[4]      M. ZUCAWICH : Mais, avec le plus grand respect, tout ce que cela démontre, c'est que nous essayons de poursuivre l'instance, mais que nous avons besoin de directives, Monsieur le juge.

[5]      LA COUR : Et pourquoi n'avez-vous pas vous-même fourni un affidavit de documents, ce que la défenderesse vous réclame depuis des années ? Avez-vous en votre possession des documents qui concernent cette affaire ? C'est ce que la défenderesse demande. Si vous avez l'intention de demander à la Cour d'exercer ses pouvoirs en vue de faire rejeter la réclamation d'impôt sur le revenu, vous devez fournir les documents qui sont en votre possession et qui tendent à prouver que cette réclamation d'impôt sur le revenu devrait être rejetée. Mais vous n'avez pas déposé d'affidavit de documents, ce que la défenderesse vous demande depuis des années. Vous savez que Floyd Rayner a déposé un affidavit de documents, comme on le constate aisément, au nom de Sa Majesté la Reine, de notre ministre du Revenu national, mais quand la défenderesse demande à Gerald Zucawich d'en faire autant, il ne le fait pas. Les années passent, elle le lui demande encore et encore, mais il ne dépose toujours pas d'affidavit. Le ministre fait sa part, mais Gerald Zucawich refuse de faire la sienne.

[6]      M. ZUCAWICH : Eh bien, Monsieur le juge, nous essayons d'obtenir des conseils juridiques pour nous aider. Nous savons que nous avons besoin - financièrement il semble que nous ne puissions nous le permettre - et je ne voudrais pas que cette affaire soit abandonnée à cause de ...

[7]      LA COUR : La défenderesse a déposé, combien y en a-t-il, 127 documents ou à peu près, et il est dit ici : [TRADUCTION] " Voici tous les documents qui étaient en notre possession. Nous avons établi un relevé de la valeur nette de M. Zucawich d'après ses propres livres, c'est de cette façon que nous avons établi la valeur nette dont nous nous servons, nous ne l'avons pas établi à partir de documents que nous avons fabriqués, mais à partir de ses documents à lui ". M. Wong, qui a comparu en votre nom devant la Cour de l'impôt a déclaré qu'il ne disposait d'aucun renseignement objectif, et que c'est vous qui lui avez fourni tous les renseignements qu'il avait.

[8]      M. ZUCAWICH : Et devant la Cour canadienne de l'impôt, nous avons demandé à interroger Sandra Campbell qui a établi le relevé de la valeur nette, et la Couronne nous l'a refusé.

[9]      LA COUR : Mais vous aviez M. Wong, n'est-ce pas, et M. Wong ...

[10]      M. ZUCAWICH : C'est vrai, il a déposé un relevé de la valeur nette et Revenu Canada ...

[11]      LA COUR : Et ensuite le juge Goetz a rendu sa décision. Bon, y a-t-il autre chose, Monsieur Zucawich ?

[12]      M. ZUCAWICH : Et pendant l'audience, M. Shipley a accepté d'utiliser notre relevé de la valeur nette, et ensuite il a demandé d'être excusé pour retourner à Toronto et M. Gosman est resté.

[13]      LA COUR : Et le juge Goetz a rendu sa décision.

[14]      M. ZUCAWICH : C'est exact.

[15]      LA COUR : Et en déposant cette déclaration devant la Cour, en instituant une action devant la présente Cour, vous avez, comme c'est votre droit de le faire, contesté la décision du juge Goetz.

[16]      M. ZUCAWICH : La déclaration a été déposée avant que nous ayons reçu une copie de sa décision à cause des délais.

[17]      La Cour : La déclaration a été déposée le 1er novembre 1991, et vous déclarez ceci : [TRADUCTION] " Un avis d'appel est par la présente déposé à l'encontre d'un jugement de la Cour canadienne de l'impôt prononcé le 30 juillet 1991 à Winnipeg (Manitoba), dans lequel l'appel du demandeur à l'égard des années d'imposition 1981, 1982 et 1984 a été rejeté. " Et vous dites que c'était le 1er novembre. C'est bien après la décision du juge Goetz. Comme vous le dites ici, cette décision a été prononcée le 30 juillet.

[18]      M. ZUCAWICH : C'est exact, mais nous n'avons pas reçu la transcription ou la copie du jugement avant cette date.

[19]      LA COUR : Comment connaissiez-vous le nom de la sténographe qui, selon votre allégation, faisait partie d'un complot pour vous priver de vos droits constitutionnels ? Vous dites au paragraphe cinq de votre déclaration, le juge J.B. Goetz, M. J. Shiply, Violette Mchaylow et d'autres ont conspiré pour priver le demandeur de ses droits constitutionnels, y compris de son droit à un procès équitable, et à la présomption d'innocence jusqu'à ce qu'il soit trouvé coupable ". C'est bien le nom de la sténographe.

[20]      M. ZUCAWICH : C'est exact.

[21]      LA COUR : Lui avez-vous demandé son nom au cours du procès ? Comment avez-vous appris son nom si vous n'aviez pas la transcription ?

[22]      M. ZUCAWICH : Parce que c'était la deuxième séance de la Cour. Nous connaissions son nom.

[23]      LA COUR : Avait-elle pris en sténographie une cause antérieure ?

[24]      M. ZUCAWICH : Cette instance a été entendue en deux parties, Monsieur le juge.

[25]      La COUR : Oui.

[26]      M. ZUCAWICH : Excusez-moi, Monsieur le juge.

[27]      LA COUR : Bien sûr, assoyez-vous. Une autre suspension de cinq minutes peut-être.

[28]      M. ZUCAWICH : Il suffit ... je me sentirai mieux si je peux m'asseoir, je pense.

[29]      La COUR : C'est bon, merci.

[30]      M. ZUCAWICH : Et nous avons demandé aux gendarmes de saisir les bandes magnétiques parce que nous voulions protéger la preuve et les gendarmes ont dit que la protection de la preuve ne faisait pas partie de leur travail, qu'il fallait tout simplement la remettre immédiatement au gouvernement provincial.

[31]      LA COUR : Je n'ai jamais entendu dire qu'il faille protéger la preuve de cette façon.

[32]      M. ZUCAWICH : Et bien, dans ce cas, il fallait protéger la preuve.

[33]      LA COUR : Pourquoi êtes-vous si important pour le gouvernement du Canada ?

[34]      M. ZUCAWICH : C'est ce que j'aimerais bien savoir.

[35]      LA COUR : Et bien, je pense que vous ne l'êtes pas. Je pense que vous n'êtes pas assez important pour pousser le gouvernement du Canada, le juge Goetz et la sténographe à conspirer pour vous priver de vos droits constitutionnels.

[36]      M. ZUCAWICH : J'ai demandé à examiner le relevé de la valeur nette préparé par Sandra Campbell. J'ai demandé un subpoena pour Sandra Campbell de façon à pouvoir la contre-interroger, et le juge me l'a refusé. Maintenant, en vertu des règles de la Cour, ai-je le droit de contre-interroger Sandra Campbell ou non ?

[37]      LA COUR : La Cour n'est pas ici pour vous donner des conseils juridiques, Monsieur Zucawich.

[38]      M. ZUCAWICH : C'est exact. C'est pourquoi j'estime que cette affaire devrait suivre son cours. Elle est fondée. Toute cette affaire me stresse beaucoup.

[39]      LA COUR : Sans vouloir vous offenser, il est bien évident que cette affaire est stressante. Tous ceux qui s'engagent dans un litige subissent les effets du stress ; il n'y a aucun doute là dessus. Et je ne me réjouis nullement de constater que le stress vous atteint plus que la plupart des autres personnes. Mais, ce qui ressort réellement de cette affaire, c'est qu'il n'y a pas de question à juger. Il n'est pas nécessaire d'en poursuivre l'examen. À mon avis, c'est une affaire qui doit être conclue. Je ne vois aucun bien-fondé dans cette affaire jusqu'ici, absolument aucun. Avez-vous quelque chose d'autre à me dire, ou voulez-vous faire d'autres observations ?

[40]      M. ZUCAWICH : Et bien, la documentation, le relevé de la valeur nette que Revenu Canada utilise n'est pas exact. Il n'y a pas de documents. Ils prétendent avoir établi ce relevé à partir de mes documents. Mais il n'y a jamais eu de documents pour appuyer leur preuve. C'est pourquoi j'ai demandé à contre-interroger Sandra Campbell et c'est pourquoi la Couronne a refusé, ou c'est pourquoi M. Shiply a accepté d'utiliser mon relevé de la valeur nette.

[41]      LA COUR : M. Shiply ? Qui est M. Shiply ? Il n'est pas assez important pour que je le connaisse.

[42]      M. ZUCAWICH : À l'époque, c'était le conseiller juridique de la Couronne.

[43]      LA COUR : Y a-t-il autre chose ?

[44]      M. ZUCAWICH : Non, Monsieur le juge.

[45]      LA COUR : Et bien, en fait, il ne m'appartient pas d'aller au-delà du jugement du juge Goetz. Vous avez déposé une déclaration devant la présente Cour en novembre ...

[46]      M. ZUCAWICH : Si nous avions l'autorisation de poursuivre, nous modifierions la déclaration pour supprimer toute référence au juge Goetz.

[47]      LA COUR : Je vois. Voulez-vous répondre à cela Monsieur Shore ? Voulez-vous faire des commentaires ?

[48]      M. SHORE : Non, Monsieur le juge.

[49]      LA COUR : La Cour est prête à prononcer son jugement, ou du moins à rendre une ordonnance ayant trait à l'avis déposé par Sa Majesté la Reine en vue d'obtenir une ordonnance rejetant l'action de l'appelant dans le dossier T-2768-91 avec dépens. * * * La déclaration dans cette action a été déposée devant la Cour fédérale à Winnipeg, le 1er novembre 1991. La défense a été déposée - ou du moins elle est datée, si elle n'a pas été déposée, du 5 décembre 1991. Il n'y a pas eu de réplique ni d'autres actes de procédure ayant trait à la défense. Le ministre a déposé un affidavit de documents de sorte que, (avant que la Cour continue son exposé, cette question est en suspens, d'après le calcul des avocats, en tenant compte des brèves vacances de la Cour, qui ont été accordées à la partie adverse, puisque le délai ne court pas contre la partie adverse pendant les vacances judiciaires), cette affaire est en suspens depuis le 20 janvier 1992. C'est-à-dire depuis six ans. Pendant ce délai, le ministre a déposé un affidavit de documents devant être communiqués à M. Zucawich, c'est-à-dire tous les documents sur lesquels le ministre s'est appuyé pour prouver les arriérés d'impôt sur le revenu qu'il réclame, et cet affidavit de documents a été déposée le 23 février 1994, soit il y a plus de quatre ans. Cet affidavit de documents, préparé par M. Floyd Rayner, énumère quelque 217 documents qui, pendant toute cette période, ont été mis à la disposition de M. Zucawich qui a été invité à venir les consulter pendant les heures de travail. Le dossier révèle, par l'entremise de l'affidavit de Robert Gosman, que le ministre essaie depuis plusieurs années d'encourager par tous les moyens M. Zucawich à déposer son affidavit de documents, mais M. Zucawich n'en a déposé aucun. En fait, rien n'a été reçu ni aucune mesure n'a été prise dans l'action par Gerald Zucawich depuis le 20 janvier 1992. Il y a eu une ou deux lettres d'un avocat, Charles L. Chappell, du cabinet Aikins MacAulay de Winnipeg, indiquant qu'il s'apprêtait à revoir le dossier au nom de M. Zucawich. Par la suite, M. Chappell a informé l'avocat du ministre qu'il ne représentait plus M. Zucawich, dans une lettre du 22 septembre 1995, pièce J, jointe à l'affidavit de M. Robert Gosman, établi sous serment le 3 avril 1998, à l'appui de cette requête en radiation de la déclaration et en rejet de l'action. La dernière pièce jointe à l'affidavit de M. Gosman est la pièce L. Il s'agit d'une note à verser au dossier, une conversation téléphonique de Gerald Zucawich avec un avocat du ministère de la Justice concernant cette note au dossier intitulée " Conversation téléphonique entre G. Zucawich et Pam Malone ". Mme Malone est-elle une avocate ?

[50]      M. SHORE : Mme Malone est une secrétaire de notre bureau et quand elle a reçu l'appel, j'étais à côté d'elle et elle m'a tendu le combiné.

[51]      LA COUR : Merci. Donc c'est une note qui provient de vous, Monsieur Shore.

[52]      M. SHORE : C'est exact.

[53]      LA COUR : Voici ce qui figure dans cette note du 29 septembre 1997.

         [TRADUCTION]                 
         " J'ai pris l'appel. M. Zucawich a dit qu'il ne poursuivrait pas son action parce qu'il ne pouvait pas en appeler d'un " acte criminel ". Je lui ai demandé son adresse de façon à pouvoir lui signifier la lettre, et il m'a dit que je pouvais la déposer dans le " dossier 19 ". En outre, M. Zucawich a dit que la Cour fédérale, " pour qui je travaille ", ne voulait pas accepter ses documents. Nous avions déjà discuté de ce point le matin même à l'audience. " Il a indiqué que nous avions commis un crime parce que nous n'avions pas énuméré tous les documents et qu'il ne pouvait pas en appeler de cette mesure. Il a parlé du crime de Goetz " - il faut présumer qu'il s'agit du crime du juge Goetz - " couvert par Kim Campbell ". L'appelant voulait que l'instance soit suspendue. Je lui ai demandé pourquoi et il m'a dit qu'une enquête publique était nécessaire. La conversation s'est déroulée sur un ton très belliqueux, avec des cris et des injures. " [Visiblement, M. Zucawich ne ressentait aucun malaise à cette occasion.] " J'ai mis fin à l'appel quand il a refusé de me donner son adresse parce qu'il a dit qu'il ne poursuivait pas la cause parce qu'un crime avait été commis. M. Zucawich était très agressif à mon égard, indiquant que je travaillais pour le gouvernement du Canada et par conséquent, pour la Cour fédérale et que " nous " l'avions empêché de déposé ses documents ". Quand on lui a demandé au cours de l'audience à qui ce " nous " faisait référence, il a répondu qu'il faisait référence à lui-même.                 

[54]      Le dernier paragraphe est le suivant :

         [TRADUCTION]                 
         " Je lui ai précisé que je mettrais cette conversation par écrit et que je présenterais une requête pour faire rejeter sa demande. "                 

C'était la pièce " L " jointe à l'affidavit de Robert Gosman.

[55]      Parmi la jurisprudence citée au nom du ministre figurent les affaires suivantes : Nichols c. Canada et al.. La référence exacte est William Nichols c. La Reine et al., (1990), 36 F.T.R. 77, une décision de M. le juge Dubé en date du 25 juin 1990 ; Waterside Cargo Co-operative c. Conseil des ports nationaux, (1986) 3 F.T.R. 189, une décision du soussigné; Androwich c. M.R.N., (1989) 31 F.T.R. 173, une décision du juge MacKay ; Ahmad c. La Reine, [1995] 1 C.T.C. 58, 95 D.T.C. 5123, 87 F.T.R. 193, une décision du protonotaire Hargrave de la présente Cour en date du 22 novembre 1994, et Universal Graphics Ltd. c. La Reine, une décision du protonotaire Hargrave de 1997, en fait du 18 août 1997, et il n'y a pas de référence exacte pour cette affaire. Le numéro de greffe est le T-2455-91. Le demandeur, M. Zucawich, a cité la jurisprudence suivante : Ministre du Revenu national c. Ville de Kitchener, le 9 novembre 1983, c'est sa seule référence, et Ministre du Revenu national c. J. Robitaille, le 15 décembre 1983, et il n'y a pas d'autre référence. Une autre cause a été mentionnée, Attorney-General of Nova Scotia c. Procureur général du Canada, et la date est 1953, peut-être le 26 mai. Ces causes semblent très éloignées de l'affaire de M. Zucawich. Elles semblent se rapporter, d'après ce que la Cour a entendu, à des questions de partage des pouvoirs constitutionnels et de compétence plutôt qu'à des questions de cotisation et de recouvrement de l'impôt sur le revenu. M. Zucawich a indiqué que le Parlement du Canada et le gouvernement du Canada n'avaient pas le droit d'envoyer un avis de production d'une déclaration d'impôt et de saisir des fonds qui sont en possession du contribuable ou qui lui sont dus. La Cour est absolument certaine que la jurisprudence citée par M. Zucawich ne reflète aucunement sa situation. En fait, il est tout à fait dans les pouvoirs du ministère du Revenu national ou du gouvernement du Canada d'envoyer un avis de production d'une déclaration d'impôt sur le revenu et, lorsque des impôts sont dus, de saisir des montants qui sont dus au contribuable ou qui sont conservés dans le compte bancaire du contribuable, si celui-ci en a. Pour sa part, le ministre déclare que non seulement y a-t-il trop longtemps que cette affaire est en cours, mais que le ministre pourrait subir un préjudice du fait que son principal témoin a pris sa retraite, parce que le demandeur a réussi à éviter la signification et s'est traîné les pieds et n'a pas déposé d'affidavit de documents, et en fait qu'il a retardé la poursuite de sa propre action contre le ministre, causant ainsi un préjudice au ministre. L'avocat du ministre cite également la décision Universal Graphics, une décision de 1997 du protonotaire Hargrave, dans laquelle il est dit qu'il y avait en l'espèce " suffisamment de retard pour soulever une présomption de préjudice ". Il a conclu que le demandeur n'avait pas d'intérêt dans l'action et qu'il n'avait aucune excuse pour ne pas la poursuivre. Et de nouveau, on peut se référer à la pièce " L " de l'affidavit de M. Gosman. M. Zucawich a tout d'abord usé d'une habile diversion. Il a prétendu que son domicile avait été cambriolé. Quand la Cour lui a demandé s'il pensait que le ministère du Revenu avait quelque chose à voir dans cette affaire de cambriolage, il a répondu qu'il ne savait pas si le ministre du Revenu national ou le ministère du Revenu national avait quelque chose à voir là-dedans. C'est à ce moment que M. Zucawich a eu un malaise et que l'audience a été suspendue. À la reprise de l'audience, M. Zucawich a déclaré qu'il y avait certains précédents dans les causes que M. Chappell avaient trouvées (il l'a d'abord appelé Chapman, mais il s'est ensuite souvenu que son nom était Chappell), et qu'on avait pris contact avec lui dans les quelques derniers mois, et parce que " d'autres renseignements nous ont été fournis ", et c'est ici que la première personne du pluriel commence à être utilisée. Quand la Cour a demandé à M. Zucawich qui étaient les autres, il a dit qu'il se référait à lui-même, " moi ". Et c'est alors qu'il a cité les causes Ville de Kitchener et Robitaille. Il a déclaré qu'il y trouverait la plupart des renseignements dont il avait besoin pour poursuivre sa cause. Ces causes traitent de mesures ultra vires prises par le gouvernement. La Cour a déjà traité de ces questions de mesures ultra vires. Il y a eu une discussion, qui n'était ni sarcastique ni péjorative, mais puisque M. Zucawich prétend qu'il y a eu un complot pour le priver de ses droits constitutionnels, la Cour lui a demandé s'il était important au point d'amener le gouvernement du Canada à risquer sa réputation et à subir l'opprobre public en essayant de le priver lui, en particulier, de ses droits constitutionnels. Et il a indiqué qu'il n'est pas important au point de devenir une victime spéciale du gouvernement du Canada. Et en fait, la Cour, d'après sa propre expérience, sait fort bien qu'il y a de nombreuses personnes au Canada qui ne paient pas leurs impôts sur le revenu et dont les comptes bancaires sont saisis, et dont les débiteurs hypothécaires sont saisis, et que des ordonnances de saisie sont rendues et il n'est jamais question de mesures ultra vires. En fait, les ordonnances de saisie-arrêt ne sont pas ultra-vires ; elles constituent des outils de recouvrement tout à fait légitimes dont le gouvernement peut se servir pour recouvrer les impôts dus. La Loi constitutionnelle de 1867 accorde au Parlement du Canada des pouvoirs d'imposition par tout mode ou méthode de taxation, de sorte que le gouvernement du Canada peut prélever des impôts directs et indirects et l'impôt sur le revenu est un impôt direct que le gouvernement peut recouvrer. Tout pays libre et démocratique perçoit des impôts auprès de la population et tous les pays libres et démocratiques du monde réservent à leur gouvernement le droit de percevoir des impôts. Donc, comme il s'agit d'une affaire tout à fait ordinaire, d'après l'expérience de la Cour, il ne semble y avoir rien d'autre que de la paranoïa dans les affirmations de M. Zucawich voulant qu'il ait été spécialement ciblé par le ministère du Revenu national qui aurait porté atteinte à ses droits constitutionnels. Et finalement, M. Zucawich a plaidé qu'il avait besoin de temps, six années ne lui semblant pas un délai suffisamment long, pour se renseigner au sujet de l'impôt sur le revenu, des diverses lois et de la constitution, et que s'il était autorisé à continuer, il modifierait sa déclaration pour en retirer toutes les références au juge Goetz et, j'imagine, les références à la sténographe judiciaire qui a pris la transcription de l'instance devant le juge Goetz. Il a demandé à la Cour d'avoir pitié de lui et de " nous laisser poursuivre " (encore une fois l'utilisation du pluriel) sa cause devant la Cour. Sans vouloir pour le moins du monde faire de plaisanterie, la Cour pense que la plus grande commisération dont elle puisse faire preuve serait, comme le ministre le demande, de rejeter l'action, de radier la déclaration et de rejeter l'action pour défaut de poursuivre. Cette affaire dure depuis trop longtemps. On ne peut donner à M. Zucawich un nouveau cours de droit fiscal à chaque nouvelle étape de l'action. Quand le ministre lui demande de déposer son affidavit de documents et il le lui a demandé à de nombreuses reprises, quand le ministre lui dit : [TRADUCTION] " Nous avons maintenant subi un préjudice parce que notre principal témoin a pris sa retraite et qu'il ne sera peut-être pas très coopératif ; on ne sait pas où il est et quel est son état de santé ", il y a certainement là une possibilité de préjudice. De sorte que la plus grande compassion dont la Cour puisse faire preuve à l'égard de M. Zucawich serait de rejeter son action pour défaut de poursuivre. Le ministre a demandé que les dépens lui soient adjugés. Certainement, le ministre a droit à ses débours qui devront être détaillés et qui seront transmis par un agent d'évaluation pour éviter la taxation d'un mémoire de frais. La Cour accorde au ministre des frais de 450 $, ce qui n'est pas excessivement cher, comme tout le monde pourra le dire à M. Zucawich ; c'est au contraire une aubaine.

[56]      Y a-t-il des questions ? S'il n'y a pas de question, la séance est levée.

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL. L.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                  T-2768-91

INTITULÉ DE LA CAUSE :          GERALD ZUCAWICH c.
                         SA MAJESTÉ LA REINE
LIEU DE L'AUDIENCE :          Winnipeg (Manitoba)
DATE DE L'AUDIENCE :          le 26 mai 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE MULDOON

DATE :                      le 6 juillet 1998

ONT COMPARU :

Gerald Zucawich                      EN SON PROPRE NOM

Sean D. Shore                      POUR L'INTIMÉE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

                             POUR L'APPELANT

Morris Rosenberg                      POUR L'INTIMÉE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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