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Date : 19971209


Dossier : IMM-296-97

     OTTAWA (ONTARIO), LE 9 DÉCEMBRE 1997

     DEVANT : MONSIEUR LE JUGE RICHARD

     ENTRE


SYLVERINE ALADDIN HSIT,


requérante,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


intimé.


ORDONNANCE

         Une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle l'agente de révision des revendications refusées a conclu, le 26 novembre 1996, que la requérante ne courrait pas de risques si elle retournait à Myanmar ayant été présentée;

-      IL EST ORDONNÉ :

     Que la demande soit accueillie, que la décision soit infirmée et que l'affaire soit renvoyée à l'intimé pour nouvelle décision.

                                  John D. Richard

                                 Juge

Traduction certifiée conforme

_______________________________

F. Blais, LL.L.


Date : 19971209


Dossier : IMM-296-97

ENTRE


SYLVERINE ALADDIN HSIT,


requérante,


et


LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,


intimé.


MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE RICHARD

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision par laquelle l'agente de révision des revendications refusées a conclu, le 26 novembre 1996, que la requérante ne courrait pas de risques si elle retournait à Myanmar. La requérante sollicite une ordonnance annulant cette décision.

[2]      Le 14 mars 1995, il a été conclu que la requérante n'était pas un réfugié au sens de la Convention. La requérante est alors devenue admissible à une évaluation des risques destinée à permettre de déterminer si elle appartenait à la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada.

[3]      Dans son évaluation des risques, l'agente d'immigration a conclu que, compte tenu des renseignements dont elle disposait, il n'existait pas de [TRADUCTION] "fondement objectif tendant à démontrer que la requérante risqu[ait] d'être assujettie à des sanctions extrêmes ou à des traitements inhumains si elle retourn[ait] à Myanmar".

[4]      Dans son exposé du 20 février 1997, la requérante a soulevé deux moyens :

     1)      L'agente d'immigration qui a effectué la révision a-t-elle agi d'une façon inéquitable à l'endroit de la requérante du fait qu'elle a tenu compte d'éléments de preuve extrinsèques sans donner à la requérante la possibilité de répondre?
     2)      L'agent a-t-elle commis une erreur de droit du fait qu'elle a appliqué d'une façon erronée la définition en rejetant la preuve fondée sur des risques généraux?

[5]      À part la question de l'équité et l'application d'un critère erroné, l'avocat de la requérante a également soutenu que l'agente n'avait pas tenu compte de la totalité de la preuve.

[6]      Je conclus que l'agente d'immigration a omis de tenir compte de la totalité de la preuve dont elle disposait à l'égard de trois conclusions qu'elle a tirées et que ces conclusions ont donc été tirées d'une façon manifestement déraisonnable.

[7]      La première conclusion se rapporte à la crédibilité de la requérante. Dans l'analyse des risques, l'agente de révision des revendications refusées dit qu'elle n'est pas prête à omettre complètement de tenir compte de la conclusion tirée par la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, à savoir que la requérante n'était pas digne de foi. Les passages suivants se trouvent dans l'évaluation des risques que l'agente a effectuée et qui a mené à la décision en litige.

     [TRADUCTION]
     Compte tenu des renseignements dont je dispose, il n'existe pas de fondement objectif tendant à démontrer que la requérante risque d'être assujettie à des sanctions extrêmes ou à des traitements inhumains si elle retourne à Myanmar.
     J'aimerais faire remarquer que le tribunal de la SSR a conclu que la requérante n'était pas digne de foi en ce qui concerne les craintes qu'elle a exprimées et que les raisons qu'elle a données pour avoir tardé à présenter sa revendication étaient invraisemblables. Il ne s'agit pas ici d'évaluer de nouveau le bien-fondé d'une revendication du statut de réfugié. Toutefois, on ne saurait non plus examiner l'affaire dans le vide. Étant donné que la requérante ne m'a pas fourni de nouveaux renseignements en réponse aux préoccupations du tribunal, je ne suis pas prête à omettre complètement de tenir compte des conclusions du tribunal.

[8]      Dans sa décision, la Section du statut de réfugié avait conclu ceci :

     [TRADUCTION]
     Une fois arrivée au Canada, la demandeure a tardé à revendiquer le statut de réfugié parce qu'il lui fallait du temps pour fabriquer une histoire ou exagérer fortement le fondement de sa revendication.

[9]      Toutefois, le dossier préparé par l'intimé, lequel a été remis à cette cour le 10 septembre 1997, renferme des observations écrites datées du 25 novembre 1995 que la requérante a présentées par l'entremise de son procureur.

[10]      Quant à la question de la crédibilité, le procureur a fourni les explications suivantes :

     [TRADUCTION]
     La Section du statut de réfugié a conclu que la requérante n'est pas digne de foi. En effet, la requérante a attendu six mois pour revendiquer le statut de réfugié. En fait, elle a tenté de revendiquer ce statut le 4 août 1993, une semaine seulement après être arrivée au Canada. Cependant, l'agent du Centre d'Immigration Canada, situé au 5343, ouest rue Dundas, Etobicoke (Ontario) lui a fait savoir qu'il devait lui enlever son passeport. La requérante redoutait ce qui allait se passer. Elle a donc retiré sa demande. Ce n'est qu'après avoir rencontré son avocat qu'elle a été suffisamment sûre d'elle - même pour présenter une nouvelle demande (annexe V).

[11)      L'annexe V est une copie d'une enveloppe adressée au Centre d'Immigration Canada sur laquelle sont inscrits le nom et l'adresse de retour de la requérante. Le document a été timbré au CIC d'Etobicoke, lors de la réception, le 4 août 1993.

[12]      Cela constitue un nouvel élément de preuve qui se rapporte à la question de la crédibilité. L'agente a clairement omis d'en tenir compte ou n'en a fait aucun cas en disant que la requérante n'avait pas fourni de nouveaux renseignements en réponse aux préoccupations exprimées par le tribunal au sujet de sa crédibilité.

[13]      La deuxième conclusion se rapporte au passeport de la requérante. L'agente a conclu que la situation personnelle de la requérante n'avait rien à voir avec la situation dans le pays. Elle a fait remarquer que la requérante avait quitté la Birmanie avec un passeport valide sur lequel figuraient sa photo et son nom.

[14]      Toutefois, dans le Formulaire de renseignements personnels du 6 décembre 1994, la requérante a déclaré avoir versé un pot-de-vin afin d'obtenir son passeport. L'agente n'a pas tenu compte de cet élément de preuve.

[15]      La troisième conclusion se rapporte à la situation dans laquelle se trouve la famille de la requérante, à Myanmar. L'agente a fait remarquer que, selon le Formulaire de renseignements personnels, le conjoint et les quatre enfants de la requérante vivent tous à Myanmar, et qu'ils travaillent et fréquentent l'école à cet endroit. Elle a en outre fait remarquer que la preuve dont elle disposait ne l'amenait pas à conclure que la famille éprouvait des difficultés.

[16]      Toutefois, dans les observations écrites qu'il a présentées à l'agente, le procureur de la requérante dit clairement que sa cliente avait reçu une lettre de son mari pour la dernière fois deux ans plus tôt, en décembre 1993, et qu'elle ne sait même pas où est sa famille à l'heure actuelle et comment elle se porte. Elle n'a plus de contacts avec sa famille.

[17]      L'agente a ensuite conclu qu'il n'existait pas suffisamment d'éléments de preuve objectifs à l'appui de la conviction de la requérante, qui affirme qu'elle sera arrêtée par les services de sécurité birmaniens et qu'elle sera détenue si elle retourne à Myanmar. Cette conclusion était fondée en partie sur le témoignage de la requérante et en partie sur la preuve documentaire.

[18]      Voici ce que l'agente a dit :

     [TRADUCTION]
     Après avoir minutieusement examiné tous les éléments de preuve dont je dispose, j'estime qu'il existe tout au plus une simple possibilité que la requérante courrait des risques au sens de la définition de la CDNRSRC si elle est renvoyée à Myanmar.

[19]      L'agente n'a pas tenu compte de la totalité de la preuve dont elle disposait. Les éléments dont elle n'a fait aucun cas ne sont pas des éléments accessoires ou n'ayant qu'une faible valeur probante.

[20]      Dans ces conditions, la demande est accueillie, la décision est infirmée et l'affaire est renvoyée à l'intimé pour nouvelle décision.

                         John D. Richard

                             Juge

Ottawa (Ontario)

le 9 décembre 1997

Traduction certifiée conforme

_________________________________

F. Blais, LL.L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :      IMM-296-97

INTITULÉ DE LA CAUSE :      SYLVERINE ALADDIN HSIT c. MCI

    

LIEU DE L'AUDIENCE :      Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :      le mercredi, le 19 novembre 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE du juge Richard en date du 9 décembre 1997

ONT COMPARU :

Lorne Waldman      POUR LA REQUÉRANTE

James Brender      POUR L'INTIMÉ

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

JACKMAN, WALDMAN & ASSOCIATES      POUR LA REQUÉRANTE

Toronto (Ontario)

George Thomson      POUR L'INTIMÉ

Sous-procureur général du Canada

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