Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

                                                                                                                                  Date : 19990623

                                                                                                                       Dossier : IMM-4204-98

ENTRE :

                                                             MANSOUR AHANI,

                                                                                                                                          demandeur,

                                                                             et

                         LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                                                                                                            défendeur.

                                                       MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE McGILLIS

[1]         Par cette demande de contrôle judiciaire, le demandeur conteste une décision du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (ministre) voulant qu'il constitue un danger pour la sécurité du Canada, au sens de l'alinéa 53(1)b) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2, modifiée (Loi). Le demandeur est un citoyen iranien qui est arrivé au Canada le 14 octobre 1991 et qui a revendiqué le statut de réfugié au sens de la Convention du fait de ses opinions politiques et de son appartenance à un groupe social donné. Le 1er avril 1992, il a reçu le statut de réfugié au Canada.

[2]         Les 9 et 15 juin 1993 respectivement, le Solliciteur général du Canada et le ministre ont certifié, en vertu du paragraphe 40.1(1) de la Loi, qu'ils étaient d'avis, sur la base de renseignements secrets en matière de sécurité dont ils ont eu connaissance, que le demandeur appartenait à l'une des catégories de personnes non admissibles visées par les dispositions antiterroristes du sous-alinéa 19(1)e)(iii), de la division 19(1)e)(iv)(C), du sous-alinéa 19(1)f)(ii), de la division 19(1)f)(iii)(B) et de l'alinéa 19(1)g) de la Loi. Le 17 juin 1993, l'attestation du Solliciteur général du Canada et du ministre a été déposée devant notre Cour. Le demandeur a alors été arrêté en vertu de l'alinéa 40.1(2)b) de la Loi, et il est détenu depuis lors.

[3]         Le demandeur a intenté une action par laquelle il conteste la constitutionnalité de l'article 40.1 de la Loi. Le 12 septembre 1995, la constitutionnalité du régime prévu à l'article 40.1 de la Loi a été confirmée. [Voir Ahani c. Canada, [1995] 3 C.F. 669 (1re inst.); confirmé (1996), 201 N.R. 233 (C.A.F.); demande d'autorisation de pourvoi devant la C.S.S. no 25580, rejetée avec dépens le 3 juillet 1997.]

[4]         Le juge Denault a examiné la question sous le régime prévu à l'article 40.1 de la Loi et, le 17 avril 1998, il a conclu que l'attestation ministérielle avait un caractère raisonnable.

[5]         Le 28 avril 1998, un arbitre a conclu que le demandeur était une personne décrite à l'alinéa 27(2)a), au sous-alinéa 19(1)e)(iii), à la division 19(1)e)(iv)(C), au sous-alinéa 19(1)f)(ii), à la division 19(1)f)(iii)(B), et à l'alinéa 19(1)g) de la Loi, et il a ordonné que celui-ci soit expulsé du Canada.

[6]         Le 12 août 1998, le ministre a signifié son avis, en vertu de l'alinéa 53(1)b) de la Loi, que le demandeur constitue un danger pour la sécurité du Canada.

[7]         Le 18 août 1998, le demandeur a présenté une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire de la décision du ministre, demande dans laquelle il soulevait notamment plusieurs questions constitutionnelles liées à l'alinéa 53(1)b) de la Loi.

[8]         Le 9 septembre 1998, le demandeur a intenté une action par laquelle il soulevait les mêmes questions constitutionnelles que dans sa demande d'autorisation et de contrôle judiciaire. Suite à une ordonnance du juge Rothstein (alors juge de première instance), en date du 17 février 1999, une déclaration modifiée a été déposée le 24 février 1999.

[9]         Le 26 février 1999, le juge Rothstein a donné au demandeur l'autorisation de déposer la présente demande de contrôle judiciaire et il a ordonné que celle-ci et l'action portant le no de greffe T-1767-98 soient entendues ensemble le 15 juin 1999.

[10]       Le 5 mai 1999, j'ai ordonné que la demande de contrôle judiciaire portant le no de greffe IMM-6546-98, Singh c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, et l'action portant le no de greffe IMM-4825-98, Singh c. Sa Majesté la Reine et autres, soient entendues en même temps que la présente affaire, ainsi que l'action portant le no de greffe T-1767-98, puisqu'elles soulèvent les mêmes questions constitutionnelles.

[11]       À l'ouverture de l'audience le 15 juin 1999, l'avocat du défendeur a présenté une requête préliminaire demandant que j'applique la décision récente du juge McKeown dans Suresh c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (no de greffe IMM-117-98, le 11 juin 1999) à la présente affaire et à celles qui s'y rattachent, dans la mesure où elle tranchait les mêmes questions constitutionnelles. Le 15 juin 1999, j'ai accueilli la requête séance tenante, adoptant et appliquant la décision dans Suresh c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, précitée, dans la mesure où elle tranchait les mêmes questions constitutionnelles. Suite à cette décision, j'ai entendu les plaidoiries des avocats sur les questions qui restaient en litige dans la présente demande de contrôle judiciaire.

[12]       Dans le cadre de sa présentation, l'avocate du demandeur a soutenu que la décision du ministre selon laquelle le demandeur constituait un danger pour la sécurité du Canada en vertu de l'alinéa 53(1)b) de la Loi n'était pas raisonnable. Elle a aussi soutenu que le ministre ne pouvait raisonnablement conclure que le demandeur ne serait confronté qu'à un « risque minimal » en Iran.

[13]       Malgré les arguments très fouillés de l'avocate du demandeur, j'en conclus que la preuve justifie amplement que le ministre ait décidé, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, que le demandeur constitue un danger pour la sécurité du Canada en vertu de l'alinéa 53(1)b) de la Loi. Dans le contexte, je juge que cette décision est raisonnable. Subsidiairement, même si le critère applicable n'était pas celui du caractère raisonnable, je conclus que le ministre n'a commis aucune erreur qui justifierait l'intervention de la Cour.

[14]       La demande de contrôle judiciaire est rejetée. Les avocats des parties doivent présenter leurs arguments écrits, s'il en est, au plus tard le 28 juin 1999, en vue de la certification d'une question grave de portée générale en vertu de la règle 18(1) des Règles de 1993 de la Cour fédérale en matière d'immigration, DORS/93-22. Mon jugement formel en l'instance, ainsi que mes jugements dans toutes les affaires connexes, seront prononcés au plus tard le 29 juin 1999.

D. McGillis

__________________________

Juge

OTTAWA

le 23 juin 1999

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier


COUR FÉDÉRALEDU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                                AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                 IMM-4204-98

INTITULÉ DE LA CAUSE :MANSOUR AHANI c. MINISTRE DE LA

CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                     TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                    LE 15 JUIN 1999

MOTIFS DU JUGEMENT DE MADAME LE JUGE McGILLIS

EN DATE DU :                                     23 JUIN 1999

ONT COMPARU :

Mme BARBARA JACKMANPOUR LE DEMANDEUR

M. LORNE WALDMAN

M. DONALD McINTOSHPOUR LE DÉFENDEUR

M. JIM LEISING

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

JACKMAN, WALDMAN AND ASSOCIATESPOUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris RosenbergPOUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.