Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20051129

Dossier : IMM-3696-05

Référence : 2005 CF 1615

Ottawa (Ontario), le 29 novembre 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

ENTRE :

FA AN HUANG

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                La demande de visa de résident permanent de M. Huang a été rejetée parce que, selon l'agent des visas canadien, ce dernier avait fait de fausses déclarations importantes pouvant entraîner une erreur dans l'application de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés (la LIPR).

[2]                À la fin des plaidoiries, j'ai dit que je ferais droit au contrôle judiciaire visant cette décision et que je renverrais l'affaire pour nouvelle décision à un autre agent. J'ai dit que je me fonderais sur deux évidences : il est impossible de juger un livre à sa couverture et le droit ne ressortit pas à la logique, mais à l'expérience, pour reprendre les mots d'Oliver Wendell Holmes junior.

[3]                M. Huang avait présenté une demande dans le cadre du Programme des candidats de Terre-Neuve-et-Labrador, un programme créé par une entente avec le gouvernement fédéral. Le demandeur doit toutefois être admissible suivant la LIPR. Les agents qui ont examiné le dossier de M. Huang avaient des doutes au sujet de ses intérêts financiers dans une société chinoise. Le demandeur a produit un rapport de vérification établi par un cabinet de vérificateurs, qui confirmait qu'il possédait un intérêt de 80 p. 100 dans une entreprise de construction. Le document indiquait toutefois que cette compagnie était une entreprise à propriétaire unique. Comment peut-on posséder 80 p. 100 d'une entreprise à propriétaire unique? On a communiqué avec le cabinet de vérificateurs. Celui-ci a d'abord dit que le rapport était un faux puisqu'aucun document semblable ne se trouvait dans le dossier. Il s'est ensuite rétracté en disant qu'il était en train de déménager et que le rapport n'avait pas encore été versé au dossier. Le fait que M. Huang a dit que l'entreprise avait démarré en 1998, alors que le cabinet de vérificateurs a dit qu'elle avait commencé ses activités en 1994, soulevait également des questions.

[4]                L'alinéa 40(1)a) de la LIPR prévoit ce qui suit :

40. (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

40. (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d'entraîner une erreur dans l'application de la présente loi;

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

[5]                On a avancé que c'est la norme de la décision manifestement déraisonnable qui s'applique à la conclusion selon laquelle de fausses déclarations ont été faites, mais que c'est celle de la décision raisonnable simpliciter qui s'applique à la question de savoir si ces fausses déclarations entraînent ou risquent d'entraîner une erreur dans l'application de la LIPR (Bellido c. Canada (M.C.I.), 2005 CF 452). Si de fausses déclarations avaient été faites, elles auraient entraîné une erreur. Par conséquent, la question doit être examinée en fonction de la norme de la décision manifestement déraisonnable (Zhang c. Canada (M.C.I.), 2005 CF 1313).

[6]                En ce qui concerne le rapport de vérification, la preuve fournie par le cabinet doit être considérée en entier. On ne peut pas simplement en choisir une partie. L'explication donnée par le cabinet relativement à l'erreur qu'il a commise était parfaitement raisonnable. La Cour a été saisie de nombreux cas où le ministère avait mal classé des documents ou avait tardé à les classer. Il aurait fallu faire un meilleur suivi pour éviter qu'une telle situation se produise.

[7]                Pour ce qui est de l'impossibilité de posséder 80 p. 100 d'une entreprise à propriétaire unique, les explications données et les documents fournis indiquaient que le droit chinois fait une différence entre la propriété individuelle (d'un particulier) et la propriété collective. Au cours des plaidoiries, j'ai fait référence à ce que l'on a déjà appelé au Québec le bureau d'enregistrement des sociétés de personnes. Les sociétés de personnes pouvaient s'enregistrer, mais également les entreprises à propriétaire unique et les sociétés titulaires d'une licence extra-provinciale. L'agent n'aurait pas dû fonder son évaluation sur une logique interne. Il aurait pu clarifier la situation en poussant son enquête plus loin.

[8]                Finalement, quant à la date à laquelle l'entreprise a été fondée, le dossier indique qu'une entreprise collective a d'abord été créée en 1994, avant d'être transformée en une entreprise individuelle en 1998. C'est à ce moment-là que M. Huang a obtenu sa licence d'exploitation. Aucune fausse déclaration n'a donc été faite.

ORDONNANCE

            LA COUR ORDONNE :

1.                   La demande de contrôle judiciaire est accueillie.

2.                   L'affaire est renvoyée à un autre agent pour que celui-ci rende une nouvelle décision.

3.                   Aucune question n'est certifiée.

« Sean Harrington »

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 29 novembre 2005

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                           IMM-3696-05

INTITULÉ :                                                         FA AN HUANG

                                                                              c.

                                                                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                              ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                    MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                                  LE 24 NOVEMBRE 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                     LE JUGE HARRINGTON

DATE DES MOTIFS :                                         LE 29 NOVEMBRE 2005

COMPARUTIONS :

Stephen J. Fogarty                                                   POUR LE DEMANDEUR

Thi My Dung Tran                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Harvey et Associés, s.r.l.                                         POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

John H. Sims, c.r.                                                    POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.