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     IMM-3798-94

     AFFAIRE intéressant la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. 52, modifiée par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 28 & 29, L.C. 1992, ch. 14, et les règlements pris pour son application,         
     ET une demande d'admission au Canada faite sous le régime de la même loi         

Entre :

     CARL MEN KY CHING,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

     [texte révisé des motifs prononcés à l'audience tenue à

     Toronto (Ontario) le lundi 21 octobre 1997]

Le juge ROTHSTEIN

     Le 5 juillet 1994, le requérant, par son avocat, a demandé au ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration d'autoriser son admission au Canada à titre de visiteur ou, à défaut, par permis ministériel. Le 15 juillet 1994, sa demande a été rejetée, d'où ce recours en contrôle judiciaire. Il se pose en l'espèce deux questions préalables, savoir : (1) si le recours est subordonné à l'autorisation préalable, et (2) dans l'affirmative, s'il y a lieu pour la Cour d'accorder maintenant l'autorisation puis de juger l'affaire au fond.

     Les paragraphes 82.1(1) et (2) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (modifiée), prévoient ce qui suit :

     82.1 (1) La présentation d'une demande de contrôle judiciaire aux termes de la Loi sur la Cour fédérale ne peut, pour ce qui est des décisions ou ordonnances rendues, des mesures prises ou de toute question soulevée dans le cadre de la présente loi ou de ses textes d'application " règlements ou règles " se faire qu'avec l'autorisation d'un juge de la Section de première instance de la Cour fédérale.         
     (2) Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux décisions prises par l'agent des visas dans le cadre des articles 9, 10 ou 77 ni aux questions soulevées par toute demande qui lui est faite dans ce cadre.         

     L'intimé fait valoir que la décision attaquée n'est pas celle d'un agent des visas et ne tombe donc pas sous le coup du paragraphe (2) ci-dessus. Le requérant soutient que dans les faits, la décision du ministre, à savoir qu'il n'était pas admissible en application de l'alinéa 19(1)c.2), est celle qu'aurait rendue un agent des visas s'il avait été saisi lui-même de la demande, et que de ce fait, le paragraphe 82.1(2) s'applique et le recours n'est pas subordonné à l'autorisation préalable.

     Ce point a été résolu par la Cour d'appel fédérale dans la cause Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration c. Sajjan (A-247-97, 24 juin 1997, motifs du jugement prononcés par le juge Linden). Dans cette affaire portant sur une décision de la section d'appel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, il a été soutenu que la décision attaquée était une " question soulevée dans ce cadre " au sens du paragraphe (2). Le juge Linden a conclu en ces termes, page 2 :

         Une décision rendue par la Section d'appel, comme celle contestée par la présente demande, n'est pas une décision prise par l'agent des visas dans le cadre des articles 9, 10 ou 77. Une décision rendue par la Section d'appel est une décision rendue par un décideur différent de l'agent des visas et, par conséquent, ne relève pas de l'exception.         
         La version française du paragraphe 82.1(2) éclaircit ce point très bien en ce qu'elle insiste sur la nécessité d'une décision rendue par l'agent des visas lui-même pour que cette exception puisse être invoquée. Elle est rédigée de la façon suivante:         
             Le paragraphe (1) ne s'applique pas aux décisions prises par l'agent des visas dans le cadre des articles 9, 10 ou 77 ni aux questions soulevées par toute demande qui lui est faite dans ce cadre. [Non souligné dans l'original.]                 
     Ces mots ne peuvent que signifier que l'exception se rapporte exclusivement aux décisions de l'agent des visas rendues en vertu ou dans le contexte des articles 9, 10 et 77, et à aucune autre.         

     En l'espèce, le requérant a fait sa demande au ministre. Quelle que soit la nature de la ou des décisions en cause, et qu'elles aient été rendues en application de l'alinéa 19(1)c.2) (exclusion pour cause d'appartenance à une organisation criminelle) ou en application du paragraphe 37(1) de la Loi sur l'immigration (refus de délivrer un permis ministériel) ou des deux à la fois, cette ou ces décisions ont été rendues par le ministre. De ce fait, elles ne sont pas visées par l'exception prévue au paragraphe (2) de l'article 82.1 de la Loi sur l'immigration, et l'autorisation préalable est requise en l'espèce.

     Il échet ensuite d'examiner s'il y a lieu d'accorder cette autorisation. Il est constant que le requérant a exercé son recours en contrôle judiciaire dans les délais et qu'il n'y a pas eu de retard. Cependant, la véritable question qui se pose est de savoir si l'affaire présente encore quelque valeur pratique. Le requérant a demandé un visa de visiteur pour assister au tournoi de la Fédération internationale de basket-ball, qui s'est déroulé en juillet 1994 à Toronto. Sa demande a été rejetée. Le tournoi en question a eu lieu et a pris fin. À supposer que l'autorisation soit accordée, que la Cour juge le requérant fondé dans son recours, et même que le ministre revoie sa décision et le déclare admissible, il ne pourrait pas défaire ce qui a été fait. Le requérant a manqué le tournoi de 1994 et aucune décision, si favorable soit-elle à son égard, ne peut rien y changer.

     Il ressort des documents versés au dossier que de l'avis des collaborateurs du ministre, le requérant avait des liens avec les triades de Hong Kong et avec d'autres organisations du même genre au Canada et aux États-Unis, et qu'il trempait dans le trafic de drogues, le blanchiment d'argent, le meurtre contre rémunération et le trafic d'armes. L'avocate du requérant fait savoir que celui-ci s'était vu refuser l'entrée au Canada depuis plusieurs années et qu'il y a lieu de lui permettre de poursuivre la solution judiciaire de la question afin de se blanchir. Elle tient que le requérant n'avait pas été prévenu des motifs pris par le ministre pour lui refuser l'admission, et que l'équité exige de lui donner maintenant la possibilité d'y répondre.

     Il se trouve cependant qu'il a cette possibilité en faisant une demande d'admission au Canada à n'importe quel moment, que ce soit à titre de visiteur ou d'immigrant. De fait, c'est ce qu'il a fait en vain en 1996. Maintenant qu'il a en main tous les éléments qu'il disait ne pas avoir précédemment, il peut répondre aux appréhensions du Canada dans toute nouvelle demande qu'il pourrait faire. Si en fait il a des éléments d'information qui dissipent les appréhensions du Canada au sujet de sa participation à la criminalité organisée, il pourra les faire valoir.

     De mener à terme ce recours en contrôle judiciaire ne lui donnera pas plus que ce qu'il pourrait obtenir de son propre chef. Il peut faire une demande auprès d'un agent des visas ou demander de nouveau au ministre un permis ministériel sous le régime de l'article 37 ou encore une exemption de l'application de l'alinéa 19(1)c.2) de la Loi sur l'immigration. Qu'il vienne devant l'agent des visas ou le ministre de son propre chef ou en vertu d'une ordonnance de nouvelle instruction rendue par la Cour, cela ne présente aucune importance.

     Le point litigieux ne présente aucune valeur pratique et il ne servirait à rien d'accorder l'autorisation puis de juger l'affaire au fond. Le recours est subordonné à l'autorisation préalable, laquelle est refusée.

     Signé : Marshall E. Rothstein

     ________________________________

     Juge

Calgary (Alberta),

le 29 octobre 1997

Traduction certifiée conforme      ________________________________

     F. Blais, LL. L.

     IMM-3798-94

AFFAIRE intéressant la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. 52, modifiée par L.R.C. (1985) (4e suppl.), ch. 28 & 29, L.C. 1992, ch. 14, et les règlements pris pour son application,

ET une demande d'admission au Canada faite sous le régime de la même loi

Entre :

     CARL MEN KY CHING,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

NUMÉRO DU GREFFE :          IMM-3798-94

INTITULÉ DE LA CAUSE :      Carl Men Ky Ching

                         c.

                         Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration

LIEU DE L'AUDIENCE :          Toronto (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PRONONCÉS PAR LE JUGE ROTHSTEIN

LE :                          29 octobre 1997

ONT COMPARU :

Barbara Jackman                  pour le requérant

Sadian Campbell                  pour l'intimé

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Jackman, Waldman & Associates          pour le requérant

Toronto (Ontario)

George Thomson                  pour l'intimé

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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