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Date : 20060504

Dossier : IMM‑4641‑05

Référence : 2006 CF 565

Ottawa (Ontario), le 4 mai 2006

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SNIDER

 

ENTRE :

AMARJIT SINGH

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]        M. Amarjit Singh (le demandeur) est un citoyen indien et il a revendiqué sans succès le statut de réfugié. N’ayant pas réussi à convaincre la Commission de l’immigration et du statut de réfugié qu’il craignait avec raison d’être persécuté dans son pays d’origine, le demandeur a déposé une demande en vue d’obtenir une dispense de l’application du règlement habituel sur les résidents permanents pour des motifs d’ordre humanitaire. Cette demande a été rejetée. Après contrôle judiciaire, l’affaire a toutefois été renvoyée pour nouvelle décision à un autre agent d’immigration (Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2004] A.C.F. no 216 (QL), 2004 CF 187).

 

[2]        La demande présentée par le demandeur a fait l’objet d’une nouvelle évaluation par une agente d’immigration (l’agente) : a) aux termes du règlement relatif à la catégorie d’« époux ou conjoints de fait au Canada », et b) et sur la base de motifs d’ordre humanitaire. Sa demande a été rejetée par une décision datée du 13 juillet 2005. Pour ce qui est du premier volet de la demande, l’agente n’a pas estimé que le demandeur vivait dans une authentique union de fait. Quant au volet subsidiaire, l’agente n’a pas estimé que le demandeur connaîtrait une difficulté inhabituelle, injustifiée ou excessive s’il retournait en Inde et demandait la résidence permanente de la façon normale. Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.

 

Questions en litige

[3]        La présente demande soulève les questions suivantes :

 

1.                  L’agente a‑t‑elle commis une erreur parce qu’elle a mal apprécié les preuves ou n’en a pas tenu compte lorsqu’elle a décidé que le demandeur n’avait pas démontré qu’il vivait dans une authentique union de fait?

 

2.                  L’agente a‑t‑elle violé son obligation d’équité en n’accordant pas d’entrevue au demandeur?

 

3.                  L’agente a‑t‑elle commis une erreur en décidant que le demandeur n’avait pas établi son identité?

 

4.                  L’agente a‑t‑elle commis une erreur en décidant que le demandeur ne subirait pas une difficulté inhabituelle, injustifiée ou excessive, en raison de son état de santé, s’il retournait en Inde?

 

5.                  L’agente a‑t‑elle commis une erreur de droit en concluant que le demandeur n’était pas suffisamment établi au Canada ou a‑t‑elle omis de motiver suffisamment sa décision?

 

Analyse

La norme de contrôle

[4]        La norme de contrôle qu’il convient d’appliquer à la décision discrétionnaire de l’agente est la décision raisonnable simpliciter (Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 243 N.R. 22, [1999] 2 R.C.S. 817). Une décision déraisonnable est une décision qui ne s’appuie pas sur des motifs qui peuvent résister à un examen assez poussé. En outre, la Cour doit intervenir si l’agente a basé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments présentés (alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C., 1985, ch. F‑7).

 

[5]        Toutefois, lorsque le demandeur allègue qu’il y a eu violation de l’équité procédurale, aucune norme de contrôle n’est alors applicable et c’est la Cour qui décide si, à son avis, l’obligation d’équité a été violée.

 

Question en litige no 1 : L’agente a‑t‑elle commis une erreur parce qu’elle a mal apprécié les preuves ou n’en a pas tenu compte lorsqu’elle a décidé que le demandeur n’avait pas démontré qu’il vivait dans une authentique union de fait?

[6]        Selon l’affidavit du demandeur, sa situation personnelle avait changé au moment où sa demande de résidence permanente devait être réexaminée. Il avait commencé une relation avec Satwinderjit Kaur Khangurha, une résidente permanente canadienne originaire de l’Inde, en mars 2000. En avril 2002, ils ont décidé d’emménager ensemble et sont demeurés en union de fait depuis lors. La difficulté vient du fait que le demandeur était déjà marié; il a une femme en Inde qu’il n’a pas revu depuis décembre 1990.

 

[7]        Pour que le demandeur soit accepté à titre de résident permanent au Canada dans la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada, l’agente doit être convaincue que le demandeur est le conjoint de fait de Mme Khangurha, que leur relation est authentique et ne vise pas principalement l’acquisition du statut de résident permanent, conformément à l’article 4 et à l’alinéa 124a) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227.

 

[8]        En l’espèce, l’agente n’a pas estimé que le demandeur avait coupé ses liens avec sa femme indienne, que les liens qu’il avait tissés avec sa conjointe de fait au Canada étaient plus forts ou que la décision de vivre en union de fait ne visait pas à faciliter le processus d’immigration. L’agente a noté que Mme Khangurha avait épousé une autre personne en Inde, après qu’elle et le demandeur aient apparemment commencé à se fréquenter, bien qu’elle ait divorcé par la suite. Dans les documents à l’appui, le demandeur se qualifie habituellement de marié et ne mentionne pas sa conjointe de fait. Le demandeur affirme avoir un enfant au Canada, mais n’est pas en mesure d’en établir la filiation. Le demandeur a envoyé de l’argent à sa femme en 2000 et a refusé le divorce, à cause des difficultés qu’un divorce causerait à cette dernière. L’agente n’a pas estimé que le demandeur était dans une union de fait authentique et elle a donc conclu qu’il ne répondait pas aux critères de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada.

 

[9]        Le demandeur soutient que l’agente n’a pas tenu compte des preuves et a tiré une conclusion abusive lorsqu’elle a décidé qu’il n’avait pas démontré que son union de fait était authentique. Il affirme que l’agente a commis un certain nombre d’erreurs. J’ai examiné toutes les erreurs alléguées et les preuves présentées. À l’exception d’un aspect, au sujet duquel il est possible qu’une erreur ait été commise, je ne suis pas convaincue que l’agente ait commis d’erreur.

 

[10]      À la lecture de la décision de l’agente, j’ai noté que la principale source de ses réserves – en ce qui touche les deux parties à la prétendue union de fait – était le rôle que les autres conjoints avaient joué dans la vie du demandeur et dans celle de Mme Khangurha. Comme cela est indiqué dans le guide des opérations OP 2 de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) « [u]ne relation conjugale se caractérise par un engagement mutuel, une exclusivité et une interdépendance et ne peut unir plus de deux personnes simultanément » (OP 2, au paragraphe 5.26). L’omission du demandeur de divorcer d’un conjoint n’est pas toujours un empêchement absolu à l’existence d’une union de fait, mais « [u]ne union de fait ne peut être établie aux yeux de la loi si l’une des parties poursuit son mariage » (OP 2, au paragraphe 5.38). Dans ce contexte, l’agente était tenue d’examiner la nature de la relation qu’avait le demandeur avec sa femme en Inde et celle de Mme Khangurha avec son ex‑mari. Pour ce qui est du demandeur, l’agente a noté que le demandeur était toujours marié et n’allait pas demander le divorce; et ce dernier a même reconnu que s’il retournait en Inde, sa femme s’attendrait à ce qu’il revienne vivre avec elle. Même s’il prétend avoir été séparé de sa femme depuis 1990, il lui versait encore de l’argent en 2000. Compte tenu de ces éléments, il n’était pas déraisonnable que l’agente conclue : [traduction] « Je ne suis pas convaincue que l’intéressé ait rompu ses liens avec sa femme en Inde. » Quels que soient les autres éléments établissant l’existence d’une relation authentique avec Mme Khangurha – y compris un enfant –, ce seul facteur constitue un motif raisonnable pour rejeter la demande fondée sur la qualité de conjoint.

 

[11]      Pour ce qui est de Mme Khangurha, l’agente a noté que, même si elle est maintenant divorcée, elle s’était mariée en Inde à l’époque où elle et le demandeur se seraient fréquentés. Élément plus important encore, Mme Khangurha a continué à appuyer son conjoint et a présenté une demande de parrainage qui a amené cette personne à se rendre au Canada au décembre 2001. Compte tenu de ces preuves, l’agente avait toute latitude de douter du caractère authentique de la relation existant entre Mme Khangurha et le demandeur; cela suscite certainement certains doutes au sujet des motifs pour lesquels Mme Khangurha parraine maintenant le demandeur et de l’authenticité de leur relation.

 

[12]      Il reste une dernière question. Pour établir la paternité de l’enfant de Mme Khangurha, le demandeur a présenté une lettre d’un médecin déclarant que Mme Khangurha était devenue enceinte parce qu’elle avait été inséminée par le sperme du demandeur. L’agente a commis une erreur parce qu’elle a omis d’apprécier cette preuve indépendante qui peut être interprétée comme venant contredire sa conclusion (Cepeda‑Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 F.T.R. 35, [1998] A.C.F. no 1425 (QL), au paragraphe 17 (1re inst.). J’estime néanmoins que cette conclusion n’a pas joué un rôle déterminant dans l’issue de la demande. En fait, comme cela a été noté ci‑dessus, l’agente n’a tout simplement pas été convaincue que la relation était caractérisée « par un engagement mutuel, une exclusivité et une interdépendance ». Le seul fait qu’ils aient eu un enfant ne démontre pas l’authenticité de la relation.

 

[13]      À cette exception près, le reste des motifs fournis par l’agente résiste « à un examen assez poussé ». Malgré les explications que le demandeur a fournies au sujet d’un certain nombre d’événements bizarres dont faisait état sa relation des faits, il était loisible à l’agente de déclarer n’être pas convaincue par les preuves présentées.

 

Question en litige no 2 : L’agente a‑t‑elle violé son obligation d’équité en n’accordant pas d’entrevue au demandeur?

[14]      Le demandeur n’a pas eu d’audience ou d’entrevue avec l’agente. Il soutient que l’agente a violé son obligation d’équité procédurale en examinant les preuves concernant le caractère authentique de la relation sans lui accorder d’entrevue. Le demandeur invoque sur ce point la décision Khan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1372, [2005] A.C.F. no 1688 (QL), dans laquelle la Cour a jugé qu’étant donné que l’agent avait des doutes au sujet de la légitimité du mariage, il aurait dû accorder au demandeur une entrevue pour qu’il puisse participer utilement à la défense de l’authenticité de sa relation (en particulier aux paragraphes 20 et 26). Le demandeur demande que le même raisonnement soit appliqué ici.

 

[15]      Dans l’arrêt Baker, précité, au paragraphe 34, la Cour suprême a clairement déclaré qu’une entrevue n’est pas une exigence générale pour les décisions fondées sur des motifs d’ordre humanitaire. La Cour a jugé dans l’arrêt Baker que la possibilité de produire une documentation écrite complète concernant tous les aspects de la demande remplissait les exigences en matière de droits de participation que commande l’obligation d’équité. Le demandeur admet que dans la plupart des cas, une entrevue n’est pas exigée.

 

[16]      Tel que l’interprète le demandeur, la décision Khan permettrait d’affirmer qu’une entrevue est exigée chaque fois que la légitimité d’un mariage ou d’une union de fait est mise en doute. Cette interprétation ne tient pas compte de l’arrêt Baker et ne peut être la bonne. Il convient de lire la décision Khan à la lumière de ses faits. À mon avis, les faits de la présente espèce ne sont pas comparables à ceux de l’affaire Khan, dans laquelle l’agent s’était fondé sur des éléments très hypothétiques ou non pertinents.

 

[17]      En l’espèce, le demandeur a eu amplement la possibilité de présenter des observations détaillées et d’expliquer la nature de sa relation. L’agente a établi des faits importants qui contredisent l’existence d’un mariage authentique, notamment, parmi les plus importants, le fait que le demandeur est marié actuellement et refuse de demander le divorce, le mariage antérieur de Mme Khangurha et l’omission de la part du demandeur de mentionner cette relation jusqu’à ce qu’il présente sa seconde demande humanitaire. Ce sont là des faits et non pas des hypothèses ou des déductions comme c’était le cas dans l’affaire Khan, précitée. À la lumière des preuves présentées à l’agente et compte tenu des doutes que soulevait la présente demande, l’agente n’a pas refusé au demandeur la possibilité de participer utilement au processus décisionnel en ne convoquant pas le demandeur à une entrevue.

 

Question en litige no 3 : L’agente a‑t‑elle commis une erreur en décidant que le demandeur n’avait pas établi son identité?

[18]      L’agente n’était pas convaincue que le demandeur avait établi son identité. Le demandeur est arrivé au Canada avec de faux papiers, et les documents présentés à l’agente faisaient état de deux noms différents, Amarjit Singh et Amarjit Singh Hothi.

 

[19]      Le demandeur soutient que l’agente aurait dû tenir pour acquis que son identité avait déjà été vérifiée, puisque les autorités indiennes avaient autorisé le demandeur à revenir en Inde dans le cadre du processus de renvoi. Selon les lignes directrices en matière de renvoi contenues dans le guide ENF 10, le citoyen d’un pays étranger qui ne possède pas de passeport (comme le demandeur) obtient généralement l’admission dans son pays d’origine s’il peut convaincre les autorités « qu’[il] est un ressortissant du pays en question ».

 

[20]      J’estime que l’argument du demandeur est insoutenable. Premièrement, le libellé du guide ENF 10 n’est pas concluant, puisqu’il s’applique d’une façon générale et qu’il est précédé du mot « généralement ». Il n’est pas certain que les autorités indiennes aient vérifié l’identité du demandeur. Deuxièmement, si on acceptait l’argument du demandeur, cela permettrait d’affirmer que les agents d’immigration peuvent limiter leur pouvoir décisionnel en le confiant non seulement à un autre fonctionnaire (ce qui irait à l’encontre des principes de la justice naturelle), mais aussi à un représentant d’un pays étranger. Bien évidemment cela n’est pas possible. L’agent est tenu de décider si l’identité a été établie « à la lumière de tous les renseignements connus du ministère » (Singh, précitée, au paragraphe 25). Manifestement, la différence entre les noms mentionnés sur les documents qui jouent un rôle central pour démontrer l’établissement du demandeur au Canada et l’authenticité de sa relation suscite des interrogations graves, tout comme l’absence de tout papier d’identité officiel.

 

Question en litige no 4 : L’agente a‑t‑elle commis une erreur en décidant que le demandeur ne subirait pas une difficulté inhabituelle, injustifiée ou excessive, en raison de son état de santé, s’il retournait en Inde?

[21]      Le principal élément de la demande humanitaire présentée par le demandeur est son allégation selon laquelle il subirait un grave préjudice psychologique s’il était renvoyé en Inde et obligé de demander la résidence permanente dans ce pays. Cela, soutient‑il, constitue une difficulté inhabituelle, injustifiée ou excessive qui justifie l’acceptation de la demande humanitaire. Le demandeur s’appuie sur un rapport psychologique, daté de mars 2001, préparé par le Dr Pilowsky, qui conclut en ces termes :

 

[TRADUCTION] S’il était effectivement obligé de retourner en Inde, son angoisse atteindrait un niveau tel qu’il ne serait pas en mesure de fonctionner sur le plan émotif et s’effondrerait […] Que son retour en Inde lui fasse courir ou non un danger réel, M. Singh est convaincu qu’il sera retracé où qu’il se trouve en Inde et sera tué. Cela démontre amplement qu’il subirait un autre traumatisme s’il retournait dans ce pays.

 

[22]      Ce pronostic a été confirmé par un autre rapport daté de mars 2004, dans lequel le Dr Pilowski conclut qu’expulser M. Singh serait [traduction] « émotivement bouleversant pour lui et sa nouvelle famille au Canada; cela causerait certainement une difficulté psychologique indue ».

 

[23]      Lorsque l’agente a examiné l’état de santé du demandeur, elle a remarqué que les preuves soulevaient un certain nombre de questions. Par exemple, les preuves relatives à la cause de ses souffrances sont incompatibles. Malgré ses affirmations selon lesquelles ces symptômes se manifesteraient uniquement en Inde, le demandeur a parlé à plusieurs reprises de symptômes permanents associés au syndrome de stress post‑traumatique. Malgré tout cela, le demandeur n’a pas eu recours à des soins médicaux au Canada, si ce n’est dans le cadre des efforts qu’il a déployés pour demeurer au Canada. L’agente a examiné les preuves et conclu : [traduction] « Je ne suis pas convaincue que l’intéressé ne serait pas en mesure d’utiliser les services offerts en Inde. »

 

[24]      Le demandeur soutient que la conclusion de l’agente est abusive, étant donné que l’opinion du Dr Pilowsky indique qu’il ne serait absolument pas fonctionnel s’il retournait en Inde. Le demandeur invite en fait la Cour à interpréter l’avis du Dr Pilowsky comme s’il voulait dire que dès que le demandeur toucherait le sol indien, il souffrirait d’une incapacité telle qu’il ne serait pas en mesure de demander un traitement médical.

 

[25]      Le Dr Pilowsky ne dit pas que le demandeur s’effondrerait, le cas échéant, immédiatement et qu’il ne serait pas en mesure d’obtenir une aide psychologique. Il ne paraît pas du tout déraisonnable que l’agente ait conclu que le demandeur pourrait faire traiter la dépression dont il pourrait souffrir par les services médicaux offerts en Inde. Elle a vérifié que ces services existaient. Il était donc loisible à l’agente d’accepter l’avis du Dr Pilowsky et de conclure néanmoins, en se fondant sur les preuves dont elle disposait, que le demandeur n’avait pas établi qu’il ne pourrait pas recevoir de soins médicaux en Inde.

 

[26]      Le demandeur s’appuie sur la décision qu’a rendue la Cour dans R.B. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 1849 (QL) (1re inst.). Dans cette affaire, un rapport médical avait été présenté à l’agent en question et indiquait que le demandeur subirait un nouveau traumatisme s’il retournait en Jamaïque. Il a été fait droit à la demande. En l’espèce, le demandeur affirme que l’agente a commis la même erreur. Je ne suis pas d’accord avec lui. Dans la décision R.B., la Cour a noté que l’agent d’immigration n’avait pas pris en compte le nouveau traumatisme que subirait le demandeur. Par contre, en l’espèce, l’agente n’a pas omis de prendre en compte les prétendus effets psychologiques qu’aurait son renvoi en Inde. Elle a en fait examiné soigneusement les preuves médicales et a tiré une conclusion, à partir de ces preuves.

 

[27]      En bref, la conclusion à laquelle l’agente en est arrivée sur la question du risque psychologique potentiel que l’expulsion causerait au demandeur n’est pas déraisonnable.

 

Question en litige no 5 : L’agente a‑t‑elle commis une erreur de droit en concluant que le demandeur n’était pas suffisamment établi au Canada ou a‑t‑elle omis de motiver suffisamment sa décision?

[28]      Le demandeur affirme que l’agente n’a pas respecté son obligation de motiver adéquatement sa décision humanitaire et s’est contentée de relater les faits et de formuler une conclusion.

 

[29]      Il n’est pas nécessaire que les motifs d’un agent soient aussi détaillés que ceux d’un tribunal administratif, mais la décision doit faire apparaître un raisonnement (Kim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 244, [2006] A.C.F. no 318 (QL), aux paragraphes 18 à 20)). J’estime néanmoins que les motifs, pris dans leur ensemble, répondent à ce critère. Ce n’est pas la situation qui existait dans l’affaire Kim, dans laquelle la décision comprenait quelques brefs paragraphes qui ne faisaient aucunement référence à la plupart des preuves et ne contenaient aucun raisonnement. Dans la demande qui m’a été présentée, les motifs sont suffisants pour résister à l’examen assez poussé que la norme de la décision raisonnable exige. Aucune erreur susceptible de contrôle n’a été commise.

 

Conclusion

[30]      En résumé, la décision de l’agente, tant pour ce qui est des considérations relatives à la catégorie des conjoints que des facteurs humanitaires, est raisonnable. La décision résiste à un examen assez poussé. À l’exception de la relation existant entre le demandeur et l’enfant, je ne vois aucune preuve importante qui ait été mal interprétée ou mise de côté. Pour ce qui est de cette erreur, je ne suis pas convaincue que la question de l’enfant ait joué un rôle central dans la décision de l’agente. En fait, l’absence d’entrevue n’a pas entraîné une violation de l’obligation d’équité. Pour ces motifs, la demande sera rejetée. Aucune partie n’a proposé qu’une question soit certifiée; aucune question ne sera certifiée.

 

ORDONNANCE

 

            la cour ordonne :

 

  1. La demande est rejetée;

 

  1. Aucune question de portée générale n’est certifiée.

 

« Judith A. Snider »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑4641‑05

 

 

INTITULÉ :                                                   AMARJIT SINGH

                                                                        c.

                                                                        MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 24 AVRIL 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :              LA JUGE SNIDER

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 4 MAI 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

David Orman

 

      POUR LE DEMANDEUR

Angela Marinos

 

      POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

David Orman

Toronto (Ontario)

 

      POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

      POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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