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Date : 20010313

Dossier : IMM-5554-99

Ottawa (Ontario), le mardi 13 mars 2001

EN PRÉSENCE DE Madame le juge Dawson

ENTRE :

                    MAIA SVETOSLAVOVA MARINOVA

                                                                                    demanderesse

                                                  - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                           défendeur

                                           JUGEMENT

LA COUR ORDONNE QUE :

La demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

     « Eleanor R. Dawson »     

J.C.F.C.

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


Date : 20010313

Dossier : IMM-5554-99

Citation neutre : 2001 CFPI 178

ENTRE :

                    MAIA SVETOSLAVOVA MARINOVA

                                                                                    demanderesse

                                                  - et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                           défendeur

                               MOTIFS DU JUGEMENT

LE JUGE DAWSON

[1]                Maia Marinova, une citoyenne de la Bulgarie âgée de 20 ans, a revendiqué le statut de réfugiée au sens de la Convention en même temps que sa mère. Elles soutiennent qu'elles ont une crainte fondée d'être persécutées par les autorités policières et des skinheads en Bulgarie en raison de leur appartenance ethnique tzigane.


[2]    Dans une décision écrite datée du 26 octobre 1999, la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la SSR) a conclu que la mère, Maria Marinova, était une réfugiée au sens de la Convention, mais que Maia Marinova, elle, ne l'était pas. La présente demande de contrôle judiciaire de Maia Marinova vise cette décision.

LES FAITS

[3]    Les événements qui ont incité la mère et sa fille à s'enfuir de la Bulgarie ont débuté en octobre 1998. La mère de Mme Marinova rendait alors visite à son cousin dans un ghetto tzigane de Plovdiv. Des policiers ont fait une descente dans le ghetto et se sont introduits de façon violente dans la demeure du cousin de Maria, en jurant. Le fils du cousin de Maria a eu peur et il s'est mis à pleurer. Comme il ne s'arrêtait pas de pleurer, un policier lui a donné un coup de pied, ce qui a donné lieu à une discussion animée entre Maria et son cousin et les policiers. Par la suite, Maria a été battue, arrêtée et emmenée au poste de police, où on a pris ses empreintes digitales, l'a photographiée, puis enfermée dans une cellule; on l'a accusée d'avoir agressé un policier, interrogée au sujet de marchandises volées, et verbalement et physiquement maltraitée. Maria a été libérée le lendemain et elle a reçu des traitements pour les blessures suivantes : saignement de nez, enflures traumatiques, ecchymoses à la tête et poitrine et commotion cérébrale.


[4]                Par suite des mauvais traitements qu'elle a subis aux mains des policiers, Maria Marinova a déposé une plainte. Elle a ensuite été convoquée au poste de police, interrogée au sujet d'un vol dans le quartier, été verbalement maltraitée et battue « à coups de poing et à coups de pied » , et menacée d'agression sexuelle. Les autorités policières ont également dit à Maria que sa famille souffrirait en raison de son comportement.

[5]                Par la suite, les autres membres de sa famille ont commencé à recevoir des appels téléphoniques menaçants à leur résidence. Au début du mois de décembre 1998, on a peint des swastikas et slogans comme « Mort aux Tziganes » sur la porte de leur appartement.

[6]                Maria et sa fille ont obtenu des visas leur permettant de venir au Canada le 7 février 1999. Elles ont revendiqué le statut de réfugiées le même jour.

[7]                Maria a déclaré qu'elle craignait qu'elle-même et sa famille étaient en danger en Bulgarie, car elle avait peur des autorités policières et des skinheads. Elle estimait qu'ils n'étaient en sécurité nulle part en Bulgarie et qu'ils n'y bénéficiaient d'aucune protection.

[8]                Maia Marinova a confirmé le récit de sa mère, sur lequel elle s'est fondée.

[9]                La SSR a conclu que les témoignages des deux revendicatrices étaient sincères. Elle a conclu que Maria était une Tzigane et que sa fille était à moitié tzigane. Maria avait épousé un homme d'origine macédonienne, le père de Maia.


[10]            La SSR a conclu que la revendication de Maria était fondée, sur la base de son témoignage et des documents produits en preuve au sujet de la situation qui règne en Bulgarie, qui confirmaient que les Tziganes y étaient maltraités par les autorités policières. La formation s'est également fondée sur les convocations que Maria avait reçues et qui lui enjoignaient de se rendre au poste de police. Elle a conclu que ces documents étayaient la prétention selon laquelle les autorités policières s'intéressaient toujours à Maria, même après son départ de Bulgarie.

[11]            Cependant, en ce qui concerne Maia, la SSR a conclu qu'il était peu probable qu'elle soit persécutée par les autorités policières ou des skinheads en Bulgarie si elle retournait dans ce pays.

L'ANALYSE

[12]            Madame Marinova estime que la question litigieuse générale concernant la décision de la SSR est de savoir si le tribunal a commis une erreur de droit en omettant de tenir compte de l'ensemble de la preuve dont il disposait et en tirant des conclusions de fait erronées de manière arbitraire ou abusive.


[13]            J'estime que les allégations non étayées par la preuve selon lesquelles la SSR a omis de tenir compte des documents sur le pays dont elle disposait, mal interprété les documents sur la situation qui règne au pays, s'est fondée sur des documents généraux ou désuets, s'est fondée sur des considérations non pertinentes, a mal interprété la preuve pertinente ou a omis de tenir compte de l'ensemble de la preuve documentaire dont elle disposait, ne sont pas fondées. De la même façon, j'estime qu'aucun fondement ne permet de conclure que la SSR a mal appliqué la définition de réfugié au sens de la Convention. La SSR s'est demandée s'il y avait davantage qu'une simple possibilité que la revendicatrice serait persécutée.

[14]            L'argument le plus sérieux qu'on a présenté pour le compte de Mme Marinova était qu'après avoir conclu que sa mère était une réfugiée au sens de la Convention, la formation a à tort rejeté sa revendication même si elle appartenait à la même famille que sa mère et que la seule différence entre la mère et sa fille était le fait que la mère s'était trouvée au mauvais endroit, au mauvais moment.

[15]            La SSR a tranché la revendication de la fille après avoir examiné la preuve dont elle disposait et qui établissait qu'après que Maria Marinova a quitté la Bulgarie, son époux, le père de Maia, n'y a subi aucun incident. Bien que des policiers se soient rendus à la résidence familiale pour poser des questions au sujet de Maria, ils ne se sont pas informés de Maia. Le dossier ne contient aucun élément de preuve convaincante établissant que les autorités policières bulgares persécutent les membres de la famille des individus qu'elles ciblent. La formation a également souligné que Maia avait grandi en Bulgarie sans jamais avoir été confrontée par des skinheads et que bien qu'elle en ait vus à une occasion, elle les avait vus de loin.


[16]            En outre, la SSR disposait de preuve établissant que les parents de Maria, qui vivaient dans un quartier tzigane, n'avaient pas de « graves problèmes » et qu'ils vivaient « de façon relativement paisible » . Le cousin de Maria, qui s'était disputé avec les policiers en octobre 1998, n'a eu aucun autre problème avec les autorités policières.

[17]            La question de savoir s'il existe une crainte fondée de persécution est une question mixte de droit et de fait. Dans tous les cas, il revient à la SSR de tirer sa conclusion dans un contexte factuel particulier en procédant à une analyse détaillée de la preuve dont elle dispose. L'intervention judiciaire n'est pas justifiée à moins que la conclusion de la SSR ne paraisse abusive ou déraisonnable (voir Sagharichi c. Canada (Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 182 N.R. 398 (C.A.F.)).

[18]            Le fait qu'un membre d'une famille soit persécuté ne donne pas automatiquement droit aux autres membres de la famille d'être considérés comme des réfugiés (voir Pour-Shariati c. Canada (Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1997), 215 N.R. 174 (C.A.F.)).


[19]            En l'espèce, la SSR a correctement énoncé le critère juridique auquel il doit être satisfait. On ne saurait dire, sur la base du dossier dont elle disposait, que la SSR a tiré une conclusion abusive ou déraisonnable. Les conclusions de la SSR sont toutes étayées par la preuve dont elle disposait.

[20]            En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[21]            L'avocat de Mme Marinova a proposé deux questions à certifier. Premièrement, les craintes fondées sur l'expérience de la mère de la demanderesse créent-elles une appréhension suffisante de préjudice? Deuxièmement, la SSR a-t-elle commis une erreur [TRADUCTION] « en considérant qu'une personne à moitié tzigane était macédonienne » ?

[22]            L'avocat du ministre s'est opposé à la certification de ces questions en faisant valoir que celles-ci étaient de nature factuelle et qu'elles ne méritaient pas d'être certifiées. L'avocat du ministre a soutenu qu'aucune question grave de portée générale n'avait été soulevée.


[23]            Je souscris aux observations de l'avocat du ministre. Aucune question n'est certifiée.

         « Eleanor R. Dawson »          

J.C.F.C.                        

Ottawa (Ontario)

Le 13 mars 2001

Traduction certifiée conforme

Bernard Olivier, B.A., LL.B.


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DU GREFFE :                                 IMM-5554-99

INTITULÉ DE LA CAUSE :                Maria Svetoslavova Marinova c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                     Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                   le 3 novembre 2000

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :         Madame le juge Dawson

EN DATE DU :                                     13 mars 2001

ONT COMPARU :                              

Robert Moores                                                              pour la demanderesse

Stephen H. Gold                                                                        pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Moores & Reynolds                                                                  pour la demanderesse

Burlington (Ontario)

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada                                            pour le défendeur

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