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     Dossier : T-2836-94

Entre :


KEN STEPHAN WILLIAM FEGOL,

     demandeur,

     - et -


SA MAJESTÉ LA REINE,

     défenderesse.

     Je requiers que la version révisée des motifs que j'ai prononcés à l'audience à Winnipeg (Manitoba), le 27 octobre 1998 soit déposée pour satisfaire aux exigences de l'article 51 de la Loi sur la Cour fédérale.

                             F.C. Muldoon

                    

                                 Juge

Ottawa (Ontario)

le 14 décembre 1998

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL. L.

     DOSSIER T-2836-94


COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

AFFAIRE INTÉRESSANT

     LA LOI SUR LA TAXE D'ACCISE

Entre :


KEN STEPHAN WILLIAM FEGOL,

     demandeur,


- et -


SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, REPRÉSENTÉE PAR LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

     défenderesse.

TRANSCRIT PAR :

Joanne L. Acthim

Auditeur officiel, C.B.R.

Le mardi 27 octobre 1998

(À la reprise de l'audience à 11h40)

         LA COUR : La Cour est prête à rendre sa décision dans l'instance d'aujourd'hui. Il s'agit d'une demande présentée au nom du demandeur, Ken Stephan William Fegol, en vue d'obtenir une ordonnance concluant que le représentant de la défenderesse, le ministre du Revenu national, Herb Dhaliwall, le sous-procureur général, Morris Rosenberg et leurs avocats, Duncan A. Fraser et Robert Gosman, sont coupables d'outrage au tribunal pour avoir contrevenu à l'ordonnance du juge Campbell, que celui-ci a prononcée dans son jugement du 31 mars 1998, accordant " à M. Fegol les dépens de l'action prévus à la colonne 5 du tarif B ".

     Le demandeur a poursuivi les défendeurs et a obtenu gain de cause puisque le juge Campbell lui a accordé la somme de huit mille quatorze dollars et trois cents qui, selon l'ordonnance du juge Campbell, devait lui être payée sans délai. Il semble qu'un certain temps se soit écoulé avant que la somme de huit mille quatorze dollars et trois cents soit payée à M. Fegol.

     Le juge Campbell a également accordé les dépens de l'action prévus à la colonne 5 du tarif B. Il les a cependant accordés de façon globale sans les détailler. M. Fegol a d'abord demandé à la Cour une ordonnance déclarant que les quatre représentants publics étaient coupables d'outrage au tribunal à l'égard de cette ordonnance importante, mais le chèque lui a été remis. Il semble qu'on ait un peu étiré le sens de l'expression " sans délai " en l'espèce.

     Finalement, M. Fegol a réussi à faire taxer son mémoire de frais, au regard de la colonne 5 du tarif B, à ce qu'il semble. Ce mémoire a été taxé par un officier taxateur de la présente Cour, M. Charles E. Stinson. M. Stinson a procédé à la taxation et délivré son certificat le 19 octobre 1998. C'est donc avec une rapidité vertigineuse, pour ne pas dire avec négligence, que M. Fegol a présenté la requête dont nous sommes saisis aujourd'hui. En fait, il l'a présentée le lendemain même.

     La requête est prématurée, comme le reconnaît le requérant, puisqu'il est le requérant dans la présente procédure, ce matin même en Cour. Les dispositions des paragraphes 474 (1) et (2) des Règles indiquent clairement que cette requête est prématurée. Le demandeur a déposé et signifié cette requête en vue d'obtenir une ordonnance, afin que les quatre représentants publics soient reconnus coupables d'outrage au tribunal, le 20 octobre 1998. Le 22 octobre 1998, il a ensuite déposé une requête fondée sur la Règle 414 en vue de faire réviser la taxation des dépens effectuée par M. Stinson relativement aux dépens qui lui ont été accordés à titre de demandeur dans l'action intentée contre la Reine et le ministre du Revenu national.

     Le requérant a présenté un mémoire de frais de quarante-sept mille sept cent quatorze dollars et vingt-neuf cents, et l'officier taxateur a taxé ces dépens à quatre mille quatre dollars quarante-huit cents, taxation qui devrait être révisée à la demande de M. Fegol le 3 novembre 1998.

     Étant donné que les frais du demandeur dans l'action ne pourront être déterminés avec certitude avant cette révision, il va sans dire qu'il ne peut demander à l'administrateur de rendre un certificat de jugement en vertu de la Règle 474(1), ni faire transmettre ce certificat au bureau du sous-procureur général en vertu de la Règle 474(2). C'est pourquoi la présente requête en vue de déclarer qu'il y a outrage au tribunal est prématurée.

     Le requérant fait valoir qu'il a réfléchi à cela et demandé un ajournement ce matin seulement. Aucune raison valable ne me paraît expliquer pourquoi cette réflexion n'a pas été faite au cours de la semaine dernière, le 22 octobre 1998, quand il a présentée une requête pour obtenir la révision de la taxation de ses dépens effectuée par M. Stinson.

     L'avocat de la défenderesse soutient que la requête en vue de déclarer qu'il y a outrage au tribunal est prématurée, qu'elle devrait être rejetée pour une raison seulement, la Règle 414 accordant un délai de dix jours pour demander la révision d'une taxation des dépens et que ce délai n'est pas encore expiré, c'est-à-dire qu'il reste deux jours jusqu'au 29 octobre 1998. L'avocat de la défenderesse mentionne également l'alinéa 3 k) de la Règle 400, qui est formulé de la façon suivante :

     "Dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en application du paragraphe (1) [qui accorde à la Cour entière discrétion pour déterminer le montant des dépens et les répartir], la Cour peut tenir compte de l'un ou l'autre des facteurs suivants : k ) la question de savoir si une mesure prise au cours de l'instance, selon le cas : i) était inappropriée, vexatoire ou inutile, (ii) a été entreprise de manière négligente, par erreur ou avec trop de circonspection. "         

     L'avocat de la défenderesse met l'accent sur le sous-alinéa (i), en faisant valoir que cette étape de la procédure, c'est-à-dire la demande pour qu'il soit déclaré que les quatre représentants publics sont coupables d'outrage au tribunal, était inappropriée, vexatoire ou inutile, et il répète, comme un leitmotiv, qu'elle a peut-être été entreprise de manière négligente. Cependant, l'avocat de la défenderesse ne prétend pas qu'elle a été entreprise par erreur ou avec trop de circonspection.

     Ayant été importunée par une requête prématurée pour faire déclarer quatre représentants publics coupables d'outrage au tribunal, la Cour est d'avis que la procédure est en fait inappropriée, vexatoire ou inutile, et en toute justice, il ne faudrait pas permettre au requérant de dire simplement : " Et bien, j'ai réfléchi à cela ce matin, et je demande un ajournement ". En fait, en présentant sa requête, le requérant a obligé la défenderesse à donner des instructions à ses avocats, à préparer et déposer le dossier de la requête et à comparaître en cour. L'avocat a exprimé ce qui est manifestement évident, c'est-à-dire qu'il avait autre chose à faire, mais que parmi ces choses qu'il avait à faire, il devait se présenter ici ce matin. De sorte que le représentant ou demandeur, M. Fegol, a obligé l'intimée ou la défenderesse à engager des frais et à déployer des efforts pour répondre à cette requête prématurée qu'il n'a songé à faire ajourner que ce matin, au lieu de le faire le jour même où il a décidé de demander la révision de la taxation des dépens effectuée par M. Stinson.

     Maintenant, la défenderesse a demandé que les dépens lui soient accordés et qu'ils lui soient payés sans délai, en vertu des paragraphes (1) et (2) de la Règle 401. Selon le paragraphe (1), la Cour peut adjuger les dépens afférents à une requête selon le montant qu'elle fixe. Selon le paragraphe (2), si la Cour est convaincue qu'une requête n'aurait pas dû être présentée ou contestée, elle ordonne que les dépens afférents à la requête soient payés sans délai.

     Bien entendu, la Cour est convaincue que cette requête devait être contestée, mais elle n'est pas convaincue que cette requête aurait dû être présentée uniquement pour faire l'objet d'une demande d'ajournement dès l'ouverture de l'audience. Toutes les parties sont présentes, dont le requérant en personne et la défenderesse par l'entremise de son avocat.

     M. Fegol demande maintenant comment on peut l'obliger à payer sans délai, puisqu'il prétend ne pas en avoir les moyens. La Cour pense pouvoir trouver une solution à ce problème. À l'heure actuelle, les dépens taxés en faveur de M. Fegol s'élèvent à quatre mille quatre dollars et quarante-huit cents. Ils ne sont pas déterminés avec certitude, parce qu'ils pourront être soit augmentés, soit diminués, après la révision de la taxation effectuée par M. Stinson. Pour la procédure entendue ce matin, la Cour invoque le pouvoir qui lui est conféré au paragraphe (1) de la Règle 401, et elle adjuge à la défenderesse des dépens de huit cents dollars, y compris les débours, pour l'audience de ce matin.

     Comment M. Fegol pourra-t-il payer sans délai ces dépens ? Et bien, ils seront pris sur la somme qui a été taxée par M. Stinson, ce qui laisse, pour le moment, un solde de trois mille deux cents quatre dollars et quarante-huit cents. Cette somme n'est toujours pas certaine, parce que ces dépens doivent être révisés le 3 novembre prochain. M. Fegol touchera donc la différence entre le montant déterminé à la révision et les huit cents dollars qui ont été accordés à la défenderesse ce matin. Et " sans délai " signifie en moins de temps qu'il faut pour faire une soustraction arithmétique. C'est, en l'espèce, sur-le-champ.

     Y a-t-il des questions ? Pas de question, M. Gosman ? M. Fegol.

         M. FEGOL : M. le juge, nous avons deux autres avocats dans la salle d'audience. Leur présence n'était pas nécessaire. Les deux requêtes ont été déposées pour être entendues en même temps, alors, ce n'était pas ... ils n'avaient pas à se présenter séparément pour la procédure d'outrage au tribunal. Parce que l'autre requête était prévue pour la même date.

         LA COUR : C'est exact. Cela n'est pas contesté.

         M. FEGOL : Non. Mais ils n'avaient pas à se présenter séparément pour la présente requête.

         LA COUR : Eh bien, ils devaient comparaître au sujet de votre requête. Vous voyez, ils n'auraient pas eu à se présenter si vous aviez téléphoné au bureau de M. Gosman pour lui dire, avec votre consentement, je voudrais ajourner ma requête pour outrage au tribunal. Elle est prématurée. S'il avait été d'accord, alors cela lui aurait évité de comparaître en cour. Vous auriez pu faire cela.

         M. FEGOL : Non. Mais M. le juge ...

         LA COUR : Je vous ai demandé si vous avez des questions, et non pas de présenter un appel, M. Fegol. Ceci n'est pas un appel de mon ordonnance. Des questions, avez-vous des questions.

         M. FEGOL : Mais c'est le registraire qui a différé la requête au 3. Ma requête devait être entendue aujourd'hui.

         LA COUR : Non, ce n'est pas le registraire qui a différé la requête au 3. C'est le juge qui l'a différée au 3, parce que le juge n'était pas convaincu que vous pouviez faire réviser la taxation de M. Stinson en moins de deux heures. Pas convaincu, et toujours pas convaincu.

         M. FEGOL : Mais, je croyais toujours qu'elle devait être entendue aujourd'hui.

         LA COUR : Non, elle est ajournée.

         M. FEGOL : Oui, mais j'ai une directive indiquant que ...

         LA COUR : Mais vous vous êtes présenté en cour pour votre requête en outrage au tribunal.

         M. FEGOL : Oui, mais cela n'était qu'une des raisons de leur comparution, vous voyez.

         LA COUR : M. Fegol, je ne veux pas discuter avec vous.

         M. FEGOL : Non, je ... je ...

         LA COUR : Je ne vais pas accepter votre appel contestant mon ordonnance parce qu'il y a un autre tribunal qui peut s'occuper de cette procédure, si vous souhaitez former un appel. Par simple courtoisie, je vous ai demandé si vous aviez d'autres questions. Si vous avez des questions, je les entendrai. Si vous n'en n'avez pas, la séance est levée.

         M. FEGOL : Non. La question que j'avais est celle-ci : quand j'ai déposé la requête, il y avait deux requêtes pour la date d'aujourd'hui. Alors, ils n'ont eu aucun effort supplémentaire à faire pour comparaître.

         LA COUR : Alors, dites cela à un tribunal d'appel.

         M. FEGOL : Je ne veux pas appeler ... je voulais seulement vous dire cela et vous remercier.

         LA COUR : Merci M. Fegol. La séance est levée.

     (La séance est levée à 11 h 55)

Traduction certifiée conforme

Laurier Parenteau, LL. L.

COUR FÉDÉRALE DU CANADA

SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE


Avocats et procureurs inscrits au dossier

No DE GREFFE :                  T-2836-94

INTITULÉ DE LA CAUSE :          KEN STEPHAN WILLIAM FEGOL et SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA, représentée par le ministre du Revenu national

LIEU DE L'AUDIENCE :          WINNIPEG (MANITOBA)

DATE DE L'AUDIENCE :          le 27 octobre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :      M. le juge Muldoon

DATE :                      le 14 décembre 1998

ONT COMPARU :

Ken Fegol                          EN SON PROPRE NOM

Robert Gosman                      POUR LA DÉFENDERESSE

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

Ken Fegol

Winnipeg (Manitoba)                  EN SON PROPRE NOM

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada          POUR LA DÉFENDERESSE

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