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Date : 19981009

Dossier : IMM-3189-97

ENTRE :

                HAMID ELLASVRAND RAHBARI,

                                                demandeur,

                          - et -

    LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

                                                défendeur.

                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE BLAIS :

[1] Il s'agit de la demande de contrôle judiciaire de la décision du 14 juillet 1997, par laquelle l'agent de révision des revendications refusées (ARRR) a décidé que le demandeur n'était pas membre de la catégorie des demandeurs non reconnus du statut de réfugié au Canada (la catégorie des DNRSRC).

[2] Le demandeur soutient que l'ARRR a commis une erreur de droit au motif qu'il a indûment entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en se fondant entièrement sur le raisonnement et sur la décision de la SSR.


[3] L'avocat du demandeur souligne qu'une personne qui présente une demande d'établissement comme membre de la catégorie des DNRSRC a droit à une révision complète et équitable de sa cause par un ARRR.

[4] L'avocat du demandeur souligne également que la procédure applicable à la catégorie des DNRSRC constitue un filet de sécurité destiné à permettre une évaluation définitive du risque à la suite d'une revendication du statut de réfugié.

[5] Enfin, l'avocat du demandeur souligne qu'en l'espèce, les notes et le dossier de la décision de l'ARRR chargé de la révision de la demande, montrent qu'aucune évaluation du risque distincte n'a été effectuée relativement à la demande et que l'agent n'a pas examiné la preuve matérielle afférente aux violations des droits de la personne en Iran que lui a soumise le demandeur.

[6] L'avocat du défendeur mentionne à la Cour que bien que l'ARRR ait examiné les motifs de la SSR, ce dernier est arrivé à sa propre conclusion que le demandeur n'était pas membre de la catégorie des DNRSRC.

[7] En se référant la décision de madame le juge Tremblay-Lamer dans Lishchenko c. M.C.I. (C.F. 1re inst., 9 janvier 1996, IMM-803-95), à la page 5, l'avocat du défendeur prétend que le simple fait que l'ARRR ait tiré la même conclusion que celle tirée par la SSR ne signifie pas qu'il a entravé son pouvoir discrétionnaire.

[8] Nous pouvons nous en remettre aux propos de madame le juge Tremblay-Lamer :

Les requérants prétendent en dernier lieu que l'agente n'aurait pas dû s'appuyer sur les motifs de la SSR et que, ce faisant, elle a entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire. Encore une fois je ne suis pas d'accord. Les motifs de la décision font partie des documents que l'agente doit examiner. En fait, l'avis envoyé aux requérants énumère les documents devant être examinés par l'agente dans l'examen d'un cas de la CDNRSRC, et on demande aux requérants d'envoyer un exemplaire des motifs de la SSR. Le simple fait que l'agente ait tiré la même conclusion que celle tirée par la SSR ne signifie pas qu'elle a entravé l'exercice de son pouvoir discrétionnaire.

[9] Tel que l'a correctement mentionné l'avocat du défendeur, le document annexé à la décision de l'ARRR compte quatre pages comportant, en leur coin supérieur droit, l'inscription « Notes sur le dossier » . Il s'agit là d'un document personnel de l'ARRR, qui a servi à ce dernier à prendre ses notes et à en arriver à sa décision finale, soit la lettre envoyée au demandeur le 14 juillet 1997.

[10]Ce document fait référence à quatre documents sur lesquels l'agent s'est fondé et fait état, également, de la décision rendue au terme de la procédure de révision.

[11]À mon avis, rien dans ce document ni dans la décision, soit la lettre du 14 juillet 1997, ne révèle une erreur de la part de l'agent.

[12]De toute évidence, l'ARRR s'est référé à la preuve documentaire relativement à la crainte qu'aurait le demandeur d'être persécuté en Iran, persécution attribuable au défaut de ce dernier de faire son service militaire.

[13]Il est clair également que l'ARRR s'est référé à la preuve documentaire relative à la crainte du demandeur d'être étiqueté comme opposant politique parce que ce dernier a quitté illégalement l'Iran.

[14]Il est aussi évident que l'ARRR est arrivé à la conclusion qu'on ne lui avait présenté aucun élément de preuve digne de foi montrant que le groupe du demandeur poursuivait toujours ses activités en Iran. Il n'est pas vraisemblable, a-t-il conclu, que le demandeur soit recherché par les autorités.

[15]L'ARRR est également arrivé à la conclusion que le demandeur ne courait aucun danger du fait de ses opinions politiques ou de ses activités.

[16]J'ai lu la décision de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui, de l'avis des deux parties, s'avère longue et détaillée.

[17]Je suis en désaccord avec l'argument selon lequel l'ARRR a commis une erreur de droit en se fondant sur la décision de la SSR pour en arriver à sa décision.

[18]En aucun temps l'ARRR a-t-il affirmé qu'il était lié par la décision de la SSR. S'il s'était considéré lié par cette décision, il aurait commis une erreur, mais tel n'est pas le cas; citons les termes clairs utilisés par monsieur le juge Hugessen dans Shah c. M.E.I. (1995) 170 N.R. 240 :

Pour avoir gain de cause, la partie requérante doit démontrer que la personne investie d'un pouvoir discrétionnaire a commis une erreur de droit, a appliqué un principe erroné ou inapplicable ou a agi de mauvaise foi(...) Il s'agit d'un fardeau très lourd dont la partie requérante ne s'est pas acquittée.

[19]L'avocat du défendeur a également cité monsieur le juge Richard dans l'arrêt Nadarajah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1996) 122 F.T.R. 299 :

Les avocats ont mentionné que les agents des revendications refusées ont pour habitude d'indiquer aux requérants les documents qui seront examinés en ce qui concerne les conditions qui ont cours dans un pays. Cela semble être une bonne attitude à adopter dans de tels cas. Cependant, étant donné que, selon l'espèce Shah, le critère d'équité applicable à de telles procédures est très peu rigoureux, il n'y aura pas à mon avis transgression des règles de l'équité dans les affaires de ce genre si l'agent des revendications refusées ne communique pas ladite information, à moins que le public n'y ait pas accès et qu'elle soit essentielle pour la décision à prendre.

[20]L'avocat du défendeur a également soulevé la question de crédibilité. Pour évaluer la crédibilité du demandeur, l'ARRR s'est fondé sur la décision de la SSR de même que sur les éléments de preuve qui lui ont été présentés.

[21]Monsieur le juge McGuigan dans Sheikh c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1990] 11 Imm. L.R. (2d) 86 (C.A.F.) a affirmé :

C'est le premier niveau d'audience qui doit fonder sa décision sur des éléments de preuve qui sont considérés, évidemment par lui, comme crédibles ou dignes de foi en l'occurrence. Le concept de la crédibilité des éléments de preuve et celui de la crédibilité du demandeur sont évidemment deux choses différentes, mais il est évident que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui le relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même (outre, peut-être, les dossiers sur différents pays dont on ne peut rien déduire directement à l'égard de la revendication du demandeur), la perception du tribunal que le demandeur n'est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel pourrait se fonder le second palier d'audience pour faire droit à la demande.


[22]Pour tous ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[23]Aucune question ne sera certifiée.

Pierre Blais

                                                                            

juge

OTTAWA (ONTARIO)

Le 9 octobre 1998

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.


                 COUR FÉDÉRALE DU CANADA

               SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

               AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

NO DE GREFFE :IMM-3189-97

INTITULÉ DE LA CAUSE : Hamid Ellasvrand Rahbari c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :Toronto

DATE DE L'AUDIENCE :30 septembre 1998

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE PAR :monsieur le juge Blais

EN DATE DU :9 octobre 1998

ONT COMPARU:

M. Sil Salvaterrapour le demandeur

M. James Brender                       pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

M. Sil Salvaterrapour le demandeur

North York (Ontario)

M. Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canadapour le défendeur

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