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Date : 20211007


Dossiers : IMM-5851-20

Référence : 2021 CF 1048

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 7 octobre 2021

En présence de monsieur le juge Diner

ENTRE:

MUBARAKA ARIF

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de la décision lui étant défavorable qui a été rendue à l’issue d’un examen des risques avant renvoi [ERAR]. En résumé, la demanderesse affirme qu’elle craint pour sa vie en raison du déshonneur et de la honte que son divorce a jetés sur sa famille, qui l’a depuis menacée, et elle soutient qu’en conséquence, son renvoi vers le Pakistan, son pays natal, mettrait sa vie en péril. Elle avance en outre que, dans son pays, les femmes célibataires et divorcées sont exposées, dans le pire des cas, à un grave danger, voire à la mort, et, dans le meilleur des cas, à une discrimination cumulative équivalant à de la persécution. L’agent saisi de l’ERAR, qui a tenu compte des conclusions factuelles des deux tribunaux qui avaient déjà entendu la cause de la demanderesse, a rejeté sa demande d’ERAR. Dans le cadre de la présente demande de contrôle judiciaire, la demanderesse soutient que cette décision est viciée en raison d’un manquement à l’équité procédurale et de conclusions déraisonnables. Après avoir examiné attentivement l’ensemble des circonstances et des arguments qui m’ont été présentés, je ne souscris ni à l’une ni à l’autre de ces prétentions pour les motifs qui suivent.

II. Le contexte

[2] La demanderesse est une citoyenne du Pakistan âgée de 39 ans. Elle est arrivée au Canada le 2 août 2013 à titre de résidente permanente parrainée par son mari, qu’elle avait épousé au Pakistan en juillet 2010. Un mois après son arrivée, elle a quitté son mari et est retournée au Pakistan.

[3] Plus tard ce même mois d’août 2013, le mari de la demanderesse a envoyé une lettre [traduction] « de dénonciation » à Citoyenneté et Immigration Canada dans laquelle il sollicitait l’annulation de sa demande de parrainage et affirmait que, bien qu’il l’ait parrainée de bonne foi, la demanderesse n’avait pas eu l’intention de vivre avec lui dans le contexte d’une relation matrimoniale. Peu après le départ de la demanderesse, il a présenté une demande de divorce à la Cour supérieure de l’Ontario.

[4] La demanderesse a vécu au Pakistan pendant près de deux ans, puis, en juillet 2015, elle a demandé un titre de voyage et est rentrée au Canada en septembre de la même année. En novembre 2015, une enquête pour suspicion de mariage de complaisance a été menée, la demanderesse a fait l’objet d’un rapport pour fausses déclarations sur la nature de sa relation avec son parrain, et son dossier a été déféré à la Section de l’immigration [SI] de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié [CISR] pour enquête. La demanderesse a été déclarée interdite de territoire au titre de l’alinéa 40(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés , LC 2001, c 27 [LIPR]. Le 17 juillet 2017, une mesure d’exclusion et de renvoi a été prise contre elle par la SI et elle a perdu son statut de résidente permanente au Canada.

[5] La demanderesse a porté en appel la mesure de renvoi prise contre elle, et a été entendue par la Section d’appel de l’immigration [SAI], qui a rejeté son appel le 20 juin 2019. La SAI a jugé que la demanderesse n’était pas un témoin crédible, que la preuve dont elle disposait permettait de penser qu’elle s’était servie de son répondant pour obtenir la résidence permanente, qu’elle avait contracté un mariage de complaisance à des fins d’immigration et qu’elle avait menti dans le cadre de l’appel.

[6] La SAI a tenu compte de divers autres éléments factuels, dont la demande de titre de voyage présentée en 2015, dans laquelle la demanderesse a écrit qu’elle était retournée au Pakistan avec le consentement de son époux pour y travailler, et qu’elle rentrait au Canada pour le retrouver. (Je souligne que sa demande de titre de voyage pour le Canada indique qu’elle comptait retourner vivre chez son mari.)

[7] La SAI a jugé que cette affirmation était très problématique, car elle ne concordait ni avec les déclarations subséquentes de la demanderesse selon lesquelles elle avait quitté le Canada pour échapper à une situation de violence et elle n’avait eu aucun contact avec son mari pendant deux ans, ni avec la conclusion de la SAI portant que la demande de divorce avait été signifiée à la demanderesse lors de son séjour de deux ans au Pakistan.

[8] La SAI a rejeté l’appel le 24 juillet 2019 et, en conséquence, la demanderesse a été à nouveau frappée d’une mesure d’exclusion valide et prête à être exécutée. Rien n’indique que la demanderesse ait contesté la décision de la SAI, ce que l’avocat qui la représentait à l’audience sur la demande de contrôle judiciaire a également confirmé avoir compris.

[9] Le 8 août 2019, la demanderesse a présenté une demande d’ERAR ainsi que des affidavits souscrits par sa mère, sa/son cousin(e) et un(e) avocat(e) du Pakistan, des avis publiés dans des journaux, des documents relatifs à ses études, des pièces d’identité et les observations de son conseil. Elle n’a pas produit de déclaration personnelle ni d’affidavit en son nom à l’appui de sa demande d’ERAR.

[10] Le conseil qui représentait alors la demanderesse a soutenu qu’advenant son retour au Pakistan, elle serait exposée aux stigmates sociaux associés aux femmes pakistanaises divorcées, et à des risques sérieux d’être victime de persécution ou d’un crime d’honneur aux mains de sa famille. Il a ajouté que la demanderesse avait un petit ami musulman au Canada et qu’un mariage interconfessionnel jetterait sur elle la honte et augmenterait le risque qu’elle soit attaquée par sa famille ou par d’autres membres de la collectivité. Elle a affirmé qu’elle n’avait rien su de la demande de divorce alors qu’elle vivait au Pakistan, qu’elle avait habité chez ses parents pendant deux ans, de 2013 à 2015, mais qu’elle ne leur avait pas révélé tous les tenants et aboutissants de son séjour au Canada et qu’à l’époque ses parents l’avaient acceptée. Elle soutient que depuis lors cet appui lui a été retiré.

III. Décision relative à l’ERAR faisant l’objet du contrôle

[11] Le 30 avril 2020, dans une décision très détaillée, l’agent chargé de l’ERAR a rejeté la demande présentée par la demanderesse et conclu qu’elle ne serait pas exposée à un risque de persécution ou à une menace à sa vie aux termes des articles 96 et 97 de la LIPR advenant son retour au Pakistan. L’agent a résumé et analysé chacun des affidavits présentés à l’appui de la demande. Il a notamment souligné que, dans son affidavit, la mère de la demanderesse faisait état de l’ardente foi chrétienne qui animait la famille, et affirmait qu’une fois qu’elle et son mari avaient eu vent, après le retour au Canada de leur fille en 2015, du divorce, qui couvrait la famille de honte, ils l’avaient reniée et que son mari avait menacé de tuer leur fille afin de rétablir leur honneur.

[12] L’agent a fait observer que la sœur de la demanderesse avait fait les mêmes déclarations dans son affidavit et avait notamment affirmé qu’elle avait entendu son père menacer la demanderesse, que ce dernier avait fait paraître des avis dans les journaux annonçant qu’il la reniait et que la demanderesse avait jeté la honte sur la famille. En outre, la sœur de la demanderesse a affirmé que la demanderesse avait entaché la réputation de son beau-frère et qu’il l’avait menacée en disant qu’elle devrait assumer les conséquences de ses actes, peu importe où elle irait au Pakistan.

[13] L’agent a souligné que la demanderesse n’avait éprouvé aucune difficulté lorsqu’elle avait séjourné au Pakistan d’octobre 2016 à mars 2017, juste avant de rentrer au Canada pour l’enquête de la SI, au cours de laquelle elle avait affirmé que [traduction] « [son] mode de vie [lui] convenait très bien; [elle avait] de l’argent, de la nourriture, une voiture; [elle vivait] auprès de gens qui [la] traitaient très bien et [la] respectaient; [elle était] entourée de gens instruits, et ceux‑ci avaient beaucoup de respect pour [elle] ». L’agent a également fait remarquer que, dans sa demande ultérieure auprès de la SAI, elle n’avait fait part d’aucune inquiétude concernant sa famille, et que sa demande d’ERAR ne contenait aucun commentaire sur ce séjour de cinq mois au Pakistan.

[14] L’agent a conclu qu’il était donc raisonnable de croire que la demanderesse avait été acceptée et bien traitée par les membres de sa famille même après qu’ils aient appris son divorce. De plus, l’agent a jugé que les affidavits rédigés en août 2019 par les membres de la famille de la demanderesse afin d’empêcher son renvoi au Pakistan, dans lesquels on mentionnait pour la première fois que la demanderesse avait reçu des menaces, n’avaient pas été rédigés par des tiers objectifs et désintéressés, mais étaient plutôt intéressés compte tenu du moment de leur présentation (avant le renvoi). L’agent leur a accordé peu de poids et a conclu qu’ils ne permettaient pas d’établir que la demanderesse risquait d’être persécutée par sa famille et sa communauté à son retour au Pakistan.

[15] De même, l’agent a conclu que la documentation objective sur la situation dans le pays faisait état des difficultés subies par les femmes divorcées, y compris la stigmatisation sociale et les risques d’être prises pour cibles par leurs familles et par la société pouvant entraîner des crimes d’honneur, et constatait que cette discrimination et cette violence avaient toujours lieu dans certaines parties du pays. Toutefois, l’agent a également fait remarquer que, dans les grandes régions urbaines, les femmes pouvaient participer à la vie de la société, avoir accès à des services et voyager sans chaperon, et a jugé que la discrimination contre les femmes n’était pas suffisamment grave pour constituer de la persécution, en particulier dans le cas de femmes issues de milieux socio-économiques plus favorisés.

[16] L’agent a ensuite examiné le contexte familial et personnel propre à la demanderesse, son appartenance à un groupe social particulier et ses antécédents personnels. Il a souligné que la demanderesse avait habité presque exclusivement la région métropolitaine densément peuplée des villes jumelles de Rawalpindi et d’Islamabad, où elle a fait ses études, y compris des études supérieures, et obtenu un emploi lui fournissant un salaire ainsi qu’une allocation de logement.

[17] L’agent a fait remarquer qu’aucun problème familial survenu pendant ses deux séjours au Pakistan, de 2013 à 2015 et de 2016 à 2017, n’avait été signalé par la demanderesse, et qu’elle décrivait la vie agréable qu’elle y avait mené, y compris après que sa famille ait été au courant de son divorce. L’agent a donc accordé peu de poids aux allégations selon lesquelles elle risquait d’être victime d’un crime d’honneur aux mains de son père, au motif que ces allégations étaient intéressées étant donné le moment où elles avaient été formulées, et que le profil de la demanderesse ne correspondait pas à celui des femmes décrites dans la documentation sur le pays.

[18] S’agissant du risque lié à un mariage interconfessionnel, l’agent a souligné que les allusions à son petit ami musulman étaient vagues et non étayées par d’autres détails quant à leur relation ou au projet de se marier ou de retourner ensemble au Pakistan. En outre, l’agent a souligné que les menaces proférées par le beau-frère de la demanderesse n’avaient pas été rapportées par des témoins directs, mais plutôt par le biais de l’affidavit de la sœur de la demanderesse, lequel, selon les conclusions de l’agent, avait été rédigé à des fins d’immigration, et que les supposées « conséquences » que subirait la demanderesse demeuraient vagues. L’agent a accordé peu de poids à l’argument selon lequel la relation de la demanderesse avec son petit ami l’exposait au risque d’être attaquée par sa famille compte tenu de l’insuffisance des preuves.

[19] S’agissant des avis annonçant que la demanderesse avait été reniée par sa famille et des allégations selon lesquelles elle risquait d’être violentée par son père, l’agent a reconnu les difficultés particulières subies par les femmes au Pakistan et les cas bien documentés de violence familiale et d’assistance insuffisante fournie par la police aux victimes. L’agent a fait remarquer que l’État avait rehaussé les initiatives prises pour venir en aide aux femmes se trouvant dans la situation de la demanderesse, par exemple, en prenant des mesures visant à protéger les droits des femmes, telles que l’adoption de lois pour réprimer la violence à l’égard des femmes, la création de postes de police destinés aux femmes et dotés de policières féminines dans le Punjab, la province d’origine de la demanderesse, et la mise sur pied de refuges et d’autres services offerts aux femmes victimes de violence. Selon l’agent, bien que les mesures de protection prises par l’État présentent toujours des lacunes dans certaines régions du Pakistan, le gouvernement y remédie et des améliorations ont eu lieu dans les centres urbains.

[20] L’agent a noté que la demanderesse n’avait pas présenté de preuve d’incident où elle avait demandé et s’était vu refuser une protection, et que ses arguments étaient fondés uniquement sur la situation dans le pays et non sur son expérience personnelle.

IV. Questions en litige et analyse

[21] La demanderesse soulève deux questions dans le cadre du présent contrôle judiciaire : celles de savoir si la décision relative à l’ERAR est raisonnable et si elle respecte l’équité procédurale.

[22] La demanderesse invoque trois moyens à l’appui de son argument selon lequel la décision de l’agent était déraisonnable : elle allègue que l’agent a commis une erreur lorsqu’il a 1) conclu que la famille de la demanderesse était au courant de son divorce depuis 2015, 2) évalué de manière déraisonnable le risque auquel serait exposée la demanderesse en accordant peu de poids aux affidavits qu’il a jugés intéressés et 3) analysé de manière déraisonnable la question des mesures de protection prises par l’État.

[23] Pour ce qui est de l’iniquité procédurale, la demanderesse soutient que l’agent a tiré des conclusions déguisées quant à sa crédibilité.

[24] Les parties conviennent que la présomption de la norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique aux décisions des agents d’immigration concernant les demandes d’ERAR. L’arrêt récent de la Cour suprême du Canada Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov], qui établit un cadre révisé permettant de déterminer la norme de contrôle applicable, ne permet pas de justifier en l’espèce une dérogation à la norme du caractère raisonnable suivie dans la jurisprudence antérieure : Subramaniam c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CAF 202 au para 17; Jystina c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 912 [Jystina] au para 16.

[25] La cour de révision qui contrôle une décision selon la norme du caractère raisonnable cherche à savoir si elle possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, afin de vérifier si elle est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes propres au contexte de cette décision. Tant le résultat que le raisonnement suivi doivent être raisonnables et la décision doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et être justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti : Vavilov, aux para 99, 83‑85.

[26] S’agissant de la question de l’équité procédurale, comme dans Jystina, où la Cour s’est prononcée aux paragraphes 18 à 20 sur la question des conclusions déguisées en matière de crédibilité, je conclus qu’il n’y a pas eu de telles conclusions en l’espèce. L’agent a plutôt jugé que la demanderesse avait présenté des preuves insuffisantes pour établir le risque auquel elle alléguait être exposée. Je suis d’accord avec cette conclusion, et pour des motifs que j’expliquerai ci‑dessous, je suis d’avis que l’agent a interprété de façon raisonnable, sur le fondement des observations écrites, tant la preuve que les dispositions législatives qui sous‑tendaient sa décision, sans qu’il ait été nécessaire de tenir une audience.

1) La connaissance du divorce par la famille

[27] La demanderesse soutient qu’il était déraisonnable que l’agent conclue à partir de la preuve que la famille de la demanderesse avait appris son divorce en 2015. À son avis, la conclusion de l’agent constitue une mauvaise interprétation des faits lourde de conséquences puisque l’agent a ensuite accordé peu de poids à ses prétentions voulant qu’elle risque d’être persécutée par sa famille en raison de son divorce. Selon la demanderesse, les observations présentées par son conseil à l’appui de sa demande d’ERAR laissent entendre que la demanderesse et sa famille ont appris son divorce après 2017, et que ni elle ni sa famille n’étaient au courant du divorce lorsqu’elle est retournée au Pakistan en 2016 et 2017.

[28] Je ne suis pas convaincu par les prétentions de la demanderesse. Ses arguments contredisent directement tant l’affidavit de sa mère que les conclusions factuelles de la SAI, sur lesquelles l’agent s’est fondé et selon lesquelles la demanderesse a appris le divorce lorsqu’elle s’est vu signifier des documents au Pakistan alors qu’elle y séjournait en 2013. En conséquence, il est sans importance que le conseil qui la représentait lors de la procédure d’ERAR ait fait valoir qu’elle et sa famille ignoraient tout du divorce jusqu’en 2017 au moins. En l’absence de preuve des faits, l’agent ne pouvait s’appuyer sur de simples affirmations contenues dans les observations de la demanderesse, car il ne disposait d’aucune preuve émanant de la demanderesse elle-même, au moyen d’un affidavit ou d’une déclaration, pour les étayer.

[29] Deuxièmement, il était raisonnable de conclure après la simple lecture de l’affidavit souscrit par la mère de la demanderesse en août 2019, sur lequel l’agent s’est probablement fondé, que la famille avait appris le divorce en 2015:

[TRADUCTION]

Mubaraka est retournée au Canada en 2015 dans l’espoir de se réconcilier avec son mari. Pendant son séjour au Canada, elle a appris qu’il avait en fait divorcé d’elle. Elle nous a dit qu’elle n’était pas au courant de ce divorce et qu’elle avait espéré se réconcilier avec son mari à son retour au Canada.

Maintenant que ma fille est revenue, elle est durement stigmatisée par la société de sorte que ni moi ni mon mari ne souhaitons qu’elle fasse partie de la famille.

[Non souligné dans l’original.]

[30] Bien qu’il manque des dates qui apporteraient des précisions à la déclaration, l’auteur de l’affidavit (la mère de la demanderesse) affirme donc ici que sa fille (la demanderesse) est revenue au Canada en 2015 et a appris son divorce lors de son séjour, ce dont elle a informé sa famille. Je conclus que l’agent a raisonnablement interprété l’affidavit comme indiquant que la famille était au courant du divorce dès 2015, et l’était certainement avant le séjour de la demanderesse au Pakistan en 2016 et 2017; il n’y a pas eu mauvaise interprétation de la preuve.

2) Évaluation de la preuve

[31] La demanderesse fait valoir qu’en qualifiant les affidavits de sa mère et sa sœur d’« intéressés », et en décidant de ne pas leur accorder de valeur probante, l’agent a omis, de manière déraisonnable, de tenir compte d’éléments de preuve importants, notamment des autres affidavits et des coupures de presse corroborantes. En outre, elle affirme que la conclusion de l’agent au sujet des affidavits de sa mère et de sa sœur était déraisonnable étant donné son autre conclusion selon laquelle la famille entretenait des relations harmonieuses avec elle avant le mois d’août 2019. Elle soutient que les relations familiales et la perception que sa famille avait d’elle ont changé à partir de ce moment.

[32] La demanderesse affirme que les conclusions de l’agent relatives à (i) l’absence de menaces depuis 2019 de la part de sa famille et (ii) son omission de déposer sa propre description des risques sous forme de déclaration ne sont ni intelligibles ni claires. Elle soutient que, comme elle n’est pas retournée au Pakistan, sa famille n’a eu aucune raison de réitérer ses menaces. Quant à sa déclaration, la demanderesse explique qu’elle aurait été inutile vu les conclusions de l’agent selon lesquelles la mention même des risques constituait un acte intéressé.

[33] La demanderesse invoque Rahman c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 941 [Rahman] aux para 22‑29, où la juge Walker a conclu qu’un agent avait déraisonnablement écarté des lettres uniquement parce qu’elles avaient été présentées par des parties intéressées, et que l’omission d’analyser le contenu de ces lettres constituait une erreur susceptible de révision. La demanderesse s’appuie également sur un passage de Magonza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 14 [Magonza] au para 44, cité par la juge Walker dans Rahman. Comme l’indique le juge Grammond dans Magonza, même si les décideurs sont autorisés à prendre en considération l’intérêt personnel, le rejet total d’éléments de preuve provenant d’amis et de membres de la famille d’un demandeur pour l’unique motif de l’intérêt personnel constitue une erreur susceptible de contrôle.

[34] Encore une fois, je ne peux convenir que l’agent est arrivé à une conclusion déraisonnable. L’agent n’a pas rejeté les affidavits en raison de leur absence de valeur probante, ni n’a omis de s’intéresser à leur contenu, ou d’ailleurs à celui de tout autre élément de preuve présenté. Au contraire, l’agent a d’abord détaillé tout le contenu pertinent de chaque affidavit. De plus, les affidavits n’ont pas été écartés parce qu’ils n’avaient aucune valeur probante. À l’inverse, bien que l’agent leur ait finalement attribué peu de poids, il les a admis et les a mentionnés pour expliquer en quoi les observations du conseil qui représentait la demanderesse lors de la procédure d’ERAR étaient contradictoires.

[35] À la différence de la situation dans les affaires Rahman et Magonza, la demanderesse interprète à tort la conclusion de l’agent comme un rejet de la preuve uniquement fondé sur le fait qu’il s’agit de déclarations « intéressées » de membres de la famille. En l’espèce, l’agent a expliqué les diverses raisons pour lesquelles il a accordé peu de poids aux affidavits, notamment le moment où ils ont été présentés, ainsi que leur contenu contraire à d’autres éléments de preuve, comme le fait que la demanderesse a séjourné au Pakistan en 2016 et 2017, après que son divorce ait été connu et qu’elle y ait vécu une expérience très positive, exempte de problèmes, comme elle l’a indiqué à la SI.

[36] Il en va de même pour le témoignage de la demanderesse devant la SAI, selon lequel les difficultés découlant de son départ du Canada se résumeraient à des problèmes liés à sa relation avec son petit ami musulman, à son établissement au Canada et aux difficultés subies par les femmes célibataires au Pakistan. La demanderesse n’a fait aucune allusion à des tensions familiales, encore moins à un désaveu ou à des menaces de mort, même si la décision de la SAI n’a été rendue que lorsque les événements évoqués sont devenus imminents, et qu’elle aurait eu amplement le temps de présenter des preuves corroborant les difficultés familiales qu’elle invoque dans sa demande d’ERAR devant le tribunal qui était saisi de cette question, à qui elle a pourtant présenté d’autres observations.

[37] Troisièmement, il était tout à fait raisonnable que l’agent conclue de la preuve que les menaces représentaient un événement unique, qu’elles avaient été rapportées par des tiers qui en avaient une connaissance indirecte, et qu’elles n’étaient corroborées par aucune déclaration ni aucun témoignage de la demanderesse, alors qu’elle était la mieux placée pour expliquer sa propre évaluation subjective du risque de persécution par les membres de sa famille, en particulier après qu’elle eut passé des mois avec eux au Pakistan alors qu’ils la savaient divorcée.

3) La protection de l’État

[38] La demanderesse soutient que l’agent a omis d’examiner convenablement les preuves objectives sur la situation dans le pays présentées par le conseil qui la représentait lors de la procédure d’ERAR. À l’appui de son argument, la demanderesse résume une série d’observations tirées de la preuve dont disposait l’agent et lui reproche d’avoir à plusieurs occasions omis [traduction] « d’examiner, de mettre en balance et d’évaluer la preuve dans son intégralité ». En outre, la demanderesse soutient que l’agent a retenu sélectivement les éléments de preuve qui lui convenaient et qu’il ne peut bénéficier de la présomption légale selon laquelle il a soupesé et examiné l’ensemble de la preuve alors qu’il a omis d’analyser convenablement des preuves contraires à ses conclusions, citant Babai c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1341 aux para 35‑36.

[39] La demanderesse avance également que l’agent n’a pas appliqué le critère approprié à l’évaluation de la protection offerte par l’État, selon lequel la protection doit être réellement efficace. À l’appui de son argument, la demanderesse cite Mata c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 1007 [Mata] aux para 11‑13, et Hercegi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 250 au para 5. Dans Mata, la Cour a expliqué que, bien qu’il existe une présomption selon laquelle l’État est en mesure de protéger ses citoyens, un demandeur peut la réfuter en présentant une preuve claire et convaincante démontrant qu’il ne lui est pas possible d’obtenir la protection de l’État ou qu’il ne peut ou ne veut pas la réclamer en raison d’une crainte fondée de persécution. Lorsqu’il s’agit d’évaluer l’efficacité réelle de la protection, les « efforts déployés » ou de meilleures intentions de l’État ne suffisent pas.

[40] Après avoir examiné la décision de l’agent et tous les éléments de preuve présentés, je ne suis pas convaincu que l’une ou l’autre des erreurs alléguées a été commise. L’agent a expliqué la protection lacunaire des femmes célibataires dans certaines régions du Pakistan, mais a cité plusieurs exemples de changements concrets qui avaient lieu dans les zones urbaines, y compris celle des villes jumelles où vivait la demanderesse. L’agent a également tenu compte dans son évaluation du milieu d’origine de la demanderesse, de sa religion (chrétienne), de son éducation et de sa situation socio-économique.

[41] De plus, l’agent a souligné de façon raisonnable que la demanderesse n’avait fourni aucun exemple de discrimination subie en raison de son statut de femme célibataire et divorcée au Pakistan, ni mentionné de tentative d’obtenir l’aide des organismes publics chargés de l’assistance aux femmes qui se sentent menacées, notamment des postes de police pour femmes (dont le personnel se compose de policières), des refuges, ou de divers autres services offerts aux femmes en situation de crise ou victimes de violence.

4) La tenue d’une audience

[42] En ce qui concerne la question du supposé manquement à l’équité procédurale, la demanderesse soutient que l’agent a formulé des conclusions déguisées sur la crédibilité des éléments de preuve présentés, et qu’en omettant de l’aviser de ses préoccupations et de lui fournir une possibilité réelle d’y répondre, il a enfreint son droit à l’équité procédurale. La demanderesse affirme que le risque auquel elle est exposée n’a jamais été évalué, et donc qu’elle aurait dû être convoquée à une audience, ou, que l’agent aurait dû à tout le moins la contacter pour lui donner l’occasion de répondre à ses préoccupations.

[43] La demanderesse soutient également que l’agent a rendu une décision défavorable au terme de l’ERAR parce qu’il doutait de la crédibilité des risques auxquels la demanderesse serait exposée advenant son retour au Pakistan. À l’appui de son argument, la demanderesse cite Ahmed c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 1207 aux para 31, 33, où la Cour a conclu que les raisons pour lesquelles l’agent avait rejeté la demande n’étaient compréhensibles que si l’agent avait des doutes qui avaient directement trait à la crédibilité du demandeur, plus précisément des doutes quant à la véracité d’énoncés qui figuraient dans les déclarations solennelles du demandeur et qui, s’ils étaient tenus pour avérés, justifieraient que l’on fasse droit à la demande.

[44] Comme la Cour l’a fait remarquer au paragraphe 22 de la décision Jystina, il peut être difficile de distinguer une conclusion d’insuffisance de la preuve d’une conclusion déguisée quant à la crédibilité, parce qu’un agent peut déguiser une conclusion sur la crédibilité en parlant de preuve insuffisante. L’inverse n’est pas toujours vrai, car la preuve peut être jugée insuffisante ou trop peu convaincante pour établir les faits allégués sans pour autant qu’une conclusion soit tirée quant à la crédibilité du demandeur ou à la véracité de son récit (voir aussi Mamand c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 818 au para 23; Ferguson c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1067 aux para 4, 27).

[45] En l’espèce, la distinction entre crédibilité et preuve a été clairement faite par le décideur : les deux tribunaux précédents avaient conclu que la demanderesse n’était pas crédible, comme l’a expliqué l’agent. Toutefois, en ce qui concerne l’ERAR proprement dit, l’agent a conclu que la preuve présentée par la demanderesse était insuffisante. L’agent a recensé les cas où la SI et la SAI n’ont pas cru la demanderesse, estimant qu’à la fois son récit et son témoignage étaient contradictoires et invraisemblables. Certes, l’agent a résumé les conclusions de ces deux tribunaux dans sa décision relative à l’ERAR, comme je l’ai indiqué plus haut, mais ni ces conclusions ni les questions de crédibilité qu’elles soulèvent n’en ont déterminé l’issue.

[46] Ces faits sont fort différents de ceux de l’affaire Ahmed. En l’espèce, Mme Arif n’a présenté aucune déclaration ni aucun affidavit. Elle a plutôt choisi de s’appuyer entièrement sur une demande reposant sur une preuve documentaire et des déclarations faites par des tiers. L’agent n’a donc remis en question aucune déclaration faite par la demanderesse dans le cadre de l’ERAR.

[47] S’agissant des arguments de la demanderesse au sujet de la possibilité de s’expliquer alors qu’elle ne s’est pas vu accorder une audience sur l’évaluation des risques, j’ai reconnu devant l’avocat compétent de la demanderesse à l’audience que de telles circonstances peuvent certainement se produire et se produisent effectivement, comme dans Abusaninah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 234 au para 57. Une fois encore, cependant, les faits dans cette affaire diffèrent de ceux de l’espèce, car M. Abusaninah avait déposé son propre affidavit et de solides preuves corroborantes, comme il est indiqué au paragraphe 61. Or, en l’espèce, la demanderesse, qui était représentée par un conseil et aurait donc dû être informée du fait qu’une audience n’est pas habituel dans le cadre d’un ERAR, n’a pas fourni sa propre déclaration; il lui incombait de présenter sa cause sous son meilleur jour et de produire des preuves objectives à l’appui de ses allégations : Ikeji c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1422 au para 47; Jystina, au para 14; Bahar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1640 au para 18.

[48] Les dispositions législatives qui énoncent le critère en trois volets donnant ouverture à la tenue d’une audience relative à un ERAR requièrent « l’existence d’éléments de preuve relatifs aux éléments mentionnés aux articles 96 et 97 de la Loi qui soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité du demandeur ». À mon avis, un demandeur ne peut choisir de garder le silence et se plaindre ensuite qu’il n’a pas été entendu; en l’espèce, l’agent a expliqué de manière raisonnable en quoi les éléments de preuve lacunaires ne permettaient d’établir aucun des risques allégués aux termes des articles 96 et 97. Il n’y donc pas eu manquement à l’équité procédurale.

V. Conclusion

[49] Les conclusions de l’agent sont fondées sur l’ensemble des circonstances, le témoignage antérieur de la demanderesse devant les deux tribunaux qui ont entendu sa cause et l’absence notée d’un témoignage personnel à l’appui de sa demande d’ERAR. Je conclus que ces observations et les conclusions tirées sont justifiables, intelligibles et transparentes et que la décision rendue répond tout à fait à la norme de la décision raisonnable. En conséquence, je rejette la demande.


JUGEMENT dans le dossier IMM-5851-20

LA COUR STATUE que :

  1. la demande de contrôle judiciaire est rejetée;

  2. aucune question de portée générale n’a été proposée aux fins de certification, et je conviens que l’affaire n’en soulève aucune;

  3. aucuns dépens ne seront adjugés.

« Alan S. Diner »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B
Annexe « A » – Dispositions pertinentes

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LC 2001, c 27)

Immigration and Refugee Protection Act, SC 2001, c 27

Personne à protéger

Person in need of protection

97 (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité… exposée :

97 (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality … would subject them personally

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

Personne à protéger

Person in need of protection

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

112 (1) La personne se trouvant au Canada et qui n’est pas visée au paragraphe 115(1) peut, conformément aux règlements, demander la protection au ministre si elle est visée par une mesure de renvoi ayant pris effet…

112 (1) A person in Canada, other than a person referred to in subsection 115(1), may, in accordance with the regulations, apply to the Minister for protection if they are subject to a removal order that is in force…

113 Il est disposé de la demande comme il suit :

113 Consideration of an application for protection shall be as follows:

c) s’agissant du demandeur non visé au paragraphe 112(3), sur la base des articles 96 à 98;

c) in the case of an applicant not described in subsection 112(3), consideration shall be on the basis of sections 96 to 98;

Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés (DORS/2002-227)

Immigration and Refugee Protection Regulations, SOR/2002-227

167 Pour l’application de l’alinéa 113b) de la Loi, les facteurs ci-après servent à décider si la tenue d’une audience est requise :

167 For the purpose of determining whether a hearing is required under paragraph 113(b) of the Act, the factors are the following:

a) l’existence d’éléments de preuve relatifs aux éléments mentionnés aux articles 96 et 97 de la Loi qui soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité du demandeur;

(a) whether there is evidence that raises a serious issue of the applicant’s credibility and is related to the factors set out in sections 96 and 97 of the Act;

b) l’importance de ces éléments de preuve pour la prise de la décision relative à la demande de protection;

(b) whether the evidence is central to the decision with respect to the application for protection; and

c) la question de savoir si ces éléments de preuve, à supposer qu’ils soient admis, justifieraient que soit accordée la protection.

(c) whether the evidence, if accepted, would justify allowing the application for protection.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5851-20

 

INTITULÉ :

MUBARAKA ARIF c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

audience TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 13 SEPTEMBRE 2021

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LE JUGE DINER

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 7 OctobRE 2021

 

COMPARUTIONS :

Gen Zha

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Galina Bining

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Gen Zha

Stewart Sharma Harsanyi

Calgary (Alberta)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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