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Date : 20011116

Dossier : IMM-389-01

Ottawa (Ontario), le vendredi 16 novembre 2001

EN PRÉSENCE DE Madame le juge Simpson

ENTRE :

AMIRHOSHANG GHODRATOLAPOUR HERABADI

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

ORDONNANCE

VU la demande de contrôle judiciaire d'une décision de la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) en date du 3 janvier 2001;

ET APRÈS audition des avocats des deux parties à Toronto le 31 octobre 2001;

ET AYANT ÉTÉ INFORMÉE qu'il n'y a aucune question à certifier;


LA COUR ORDONNE :

Pour les motifs prononcés ce jour, la demande est rejetée.

             « Sandra J. Simpson »                                                                                                                                       JUGE

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


Date : 20011116

Dossier : IMM-389-01

Référence neutre : 2001 CFPI 1228

ENTRE :

AMIRHOSHANG GHODRATOLAPOUR HERABADI

demandeur

- et -

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE SIMPSON

[1]         Ce demandeur est un ressortissant iranien qui s'est converti au christianisme. Durant son audience devant la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), il a affirmé avoir une crainte fondée de persécution en raison de ses croyances religieuses. Cependant, dans une décision en date du 2 janvier 2001 (la décision), la Commission a conclu que le demandeur n'était pas un réfugié au sens de la Convention. Les présents motifs portent sur la demande présentée par le demandeur en vue du contrôle judiciaire de la décision. Plusieurs points ont été soulevés, mais je n'examinerai en détail que celui qui a suscité chez moi un doute.


[2]         À la fin de son audience, la Commission avait informé l'avocat du demandeur que, s'il le souhaitait, il pouvait présenter d'autres documents concernant la crainte de persécution que suscitait chez le demandeur son retour en Iran. Deux semaines après l'audience, l'avocat du demandeur remettait quatre documents à la Commission. Les documents, qui étaient volumineux, exposaient les problèmes auxquels se heurtaient les Chrétiens en Iran. L'un des documents était la pièce R-2, présentée à l'audience. J'appellerai « documents postérieurs à l'audience » les trois autres documents.

[3]         Le problème se pose parce que, dans sa décision, la Commission a négligé de mentionner qu'elle avait reçu et examiné les documents postérieurs à l'audience et de faire état des éléments de preuve qu'ils renfermaient.

[4]         Naturellement, le demandeur doute que les documents postérieurs à l'audience aient été examinés et affirme que la Commission a commis une erreur de droit en ignorant la preuve pertinente. Selon l'argument du demandeur, la Commission n'aurait pu rendre la décision qu'elle a rendue si elle avait lu les documents postérieurs à l'audience.

[5]         Le point de départ d'un examen de cette question est le jugement rendu par le juge Muldoon dans l'affaire Iordanov c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 367, où il affirme, aux paragraphes 10 et 11 :


[10]       Dans Hassan c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.), la Section d'appel de la présente Cour a déclaré, à propos de la preuve documentaire, que la SSR n'est pas tenue de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve. S'exprimant au nom de la Cour unanime, le juge Heald a déclaré ce qui suit, à la page 318 du recueil :

À mon avis, la Commission pouvait raisonnablement tirer les conclusions auxquelles elle est parvenue, compte tenu de l'ensemble de la preuve soumise, et il s'ensuit donc qu'elle n'a pas commis d'erreur de droit. Le fait que la Commission n'a pas mentionné dans ses motifs une partie quelconque de la preuve documentaire n'entache pas sa décision de nullité. Les passages tirés de la preuve documentaire que l'appelant invoque font partie de l'ensemble de la preuve que la Commission est en droit d'apprécier sur le plan de la crédibilité et de la force probante. Après avoir examiné le dossier dont la Commission était saisie, je suis convaincu que celle-ci a effectivement examiné et apprécié l'ensemble de la preuve d'une façon appropriée.

[11]       Compte tenu de ce qui précède, il est possible de conclure que deux types d'éléments de preuve peuvent être présentés aux audiences de la SSR : les éléments qui sont propres à la prétention du revendicateur et qui corroborent son témoignage, et les éléments de nature générale (documentaires) et sans rapport précis avec la prétention du requérant, mais qui traitent de manière générale de la situation dans le pays en question. La Cour d'appel a clairement établi que, lorsque la SSR omet d'examiner les éléments du premier type, et d'y faire précisément référence dans ses motifs, cela peut avoir pour effet de vicier la décision. Toutefois, en ce qui concerne le second type d'éléments de preuve, la SSR n'est pas tenue de les mentionner tous. Il lui suffit d'apprécier l'ensemble de la preuve. Le fait de ne pas examiner la totalité des preuves du second type amènera la Cour à intervenir.

[6]         Aucun des documents postérieurs à l'audience n'était mentionné dans la décision, mais l'avocat du défendeur a fait observer que ces documents se trouvent dans le dossier officiel du tribunal. Il a donc avancé, et j'accepte son affirmation, qu'il est raisonnable de conclure que les documents étaient en la possession de la Commission et ont été examinés. Il a dit aussi que, puisqu'aucun des documents postérieurs à l'audience ne contredisait la preuve produite durant l'audience, il n'était pas nécessaire d'en faire état dans la décision.


[7]         S'agissant de cet argument, j'ai remarqué que la Commission avait conclu que le demandeur professait la foi chrétienne, mais également qu'il était un « disciple » et non le genre de Chrétien évangélisateur très en vue qui attirerait probablement l'attention des autorités iraniennes par ses sermons, son enseignement ou son prosélytisme.

[8]         Se fondant sur la pièce R-2 durant l'audience, la Commission a fait observer qu'un nombre relativement modeste (15-22) de Chrétiens iraniens, qui semblent avoir été des « disciples » , avaient disparu au cours de 1997 et durant la première moitié de 1998. Cependant, elle n'a pas dit que la pièce R-2 ou la détention, le passage à tabac et la mise en liberté du demandeur lui-même laissaient voir une sérieuse possibilité qu'il serait choisi à l'avenir pour de mauvais traitements assimilables à persécution.

[9]         La preuve contenue dans les documents postérieurs à l'audience confirmait l'idée de la Commission selon laquelle ceux qui renient l'Islam pour embrasser une autre religion sont passibles d'arrestation et éventuellement d'exécution. Les documents postérieurs à l'audience faisaient état des arrestations de deux personnes de religion musulmane qui avaient embrassé le christianisme et qui n'avaient pas des rôles très en vue. Cependant, elles avaient été remises en liberté et il n'était pas établi qu'elles avaient eu d'autres ennuis.


[10]       La Commission n'a pas fait état des documents postérieurs à l'audience, mais je suis arrivée à la conclusion que ces documents ne contredisaient pas la preuve dont disposait la Commission durant l'audience. En conséquence, je ne suis pas disposée à dire que la Commission a commis une erreur de droit en ne mentionnant pas les documents en question. Je ferais observer cependant que, en pratique, il serait bon que la Commission mentionne dans ses motifs qu'elle a reçu et examiné tel ou tel document qui lui a été remis après une audience.

[11]       Le demandeur a aussi affirmé que :

a.         La Commission a agi au mépris des principes de justice naturelle parce qu'elle a indiqué que la crédibilité n'était pas en question durant l'audience; or, dans sa décision, elle s'est exprimée d'une manière défavorable ou a utilisé un ton négatif à propos de la crédibilité du demandeur. Sur ce point, je suis d'avis que la décision de la Commission ne concluait pas outre mesure à une absence de crédibilité.

b.         La Commission n'a pas cherché à savoir si le demandeur avait une crainte fondée de persécution parce qu'il avait quitté l'Iran illégalement. Cependant, après examen du FRP du demandeur, qui ne fait pas état d'une telle crainte, je ne suis pas convaincue que la Commission ait ici commis une erreur.


c.         La Commission a commis une erreur de fait lorsqu'elle a conclu que l'église à laquelle s'est joint le demandeur au Canada n'avait pas d'équivalent en Iran. Je suis d'avis que cette conclusion était techniquement exacte, en ce sens que l'Église de l'Alliance iranienne de Toronto n'existe pas en Iran. Cependant, selon le demandeur, la Commission était arrivée à la conclusion que, en raison de ce fait, il ne pouvait pas être un Chrétien protestant en Iran. À mon avis, cet argument ne peut réussir. La conclusion de la Commission sur l'absence d'églises équivalentes ne lui a pas fait oublier le point important. Elle a manifestement compris qu'il y avait en Iran de nombreuses églises chrétiennes où le demandeur pouvait faire ses dévotions.

Conclusion

[12]       Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

           « Sandra J. Simpson »             

JUGE

Ottawa (Ontario)

le 16 novembre 2001

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, LL.L., Trad. a.


                                              COUR FÉDÉRALE DU CANADA

                                       SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE

                                           AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

No DU GREFFE :                                             IMM-389-01

INTITULÉ :                                                     Amirhoshang Ghodratolapour Herabadi c. M.C.I.

LIEU DE L'AUDIENCE :                              Toronto (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                           le 31 octobre 2001

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DE MADAME LE JUGE SIMPSON

DATE DES MOTIFS :                                   le 16 novembre 2001

ONT COMPARU

M. Marc J. Herman                                            POUR LE DEMANDEUR

M. Jamie Todd                                                   POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Heman & Herman                                               POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

M. Morris Rosenberg                                        POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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