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                                                                                                                                 Date : 20040203

                                                                                                                    Dossier : IMM-5134-02

                                                                                                                  Référence : 2004 CF 161

ENTRE :

                                               SANAYAIMA LOURENBAM MIETEI

                                                                                                                                           demandeur

                                                                             et

                                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                         ET DE L'IMMIGRATION

                                                                                                                                             défendeur

                                                  MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

[1]                Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission), datée du 19 septembre 2002, qui lui refuse le statut de réfugié au sens de la Convention ou la qualité de _ personne à protéger _, au sens des articles 96 et 97 respectivement de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.


[2]                La Cour a entendu la demande de contrôle judiciaire en même temps que les demandes de contrôle judiciaire dans les dossiers IMM-5132-02, IMM-5133-02, IMM-5135-02 et IMM-5136-02 et elle a été saisie des mêmes éléments de preuve dans tous ces dossiers. Les présents motifs de l'ordonnance s'appliquent à toutes les demandes et ci-après, le terme « demandeurs » englobe chacun des demandeurs dans chacune des demandes.

[3]                Les demandeurs sont des citoyens indiens originaires de la région du Manipur. Ils allèguent craindre avec raison d'être persécutés du fait de leur race, de leur nationalité, des opinions politiques qu'on leur impute et de leur appartenance à un groupe social, celui des jeunes hommes du Manipur.

[4]                La Commission a conclu que les demandeurs n'étaient pas des réfugiés au sens de la Convention ni des personnes à protéger puisqu'ils n'avaient pas réussi à démontrer qu'ils seraient persécutés dans des régions de l'Inde autres que le Manipur et parce qu'ils avaient une possibilité de refuge intérieur (PRI) raisonnable en Inde.

[5]                Il incombe au demandeur de prouver qu'il ne dispose d'aucune PRI dans son pays de résidence ou qu'il ne tentera pas de trouver une PRI, et l'existence d'une PRI raisonnable met en doute les arguments du demandeur (Thirunavukkarasu c. Canada (M.E.I.), [1994] 1 C.F. 589 (C.A.), et Rasaratnam c. Canada (M.E.I.), [1992] 1 C.F. 706 (C.A.)). La Cour d'appel fédérale a exposé le critère qui doit s'appliquer à l'appréciation de l'existence d'une PRI, aux pages 597 et 598 de l'arrêt Thirunavukkarasu :

[...] le demandeur du statut est tenu, compte tenu des circonstances individuelles, de chercher refuge dans une autre partie du même pays pour autant que ce ne soit pas déraisonnable de le faire. Il s'agit d'un critère souple qui tient compte de la situation particulière du demandeur et du pays particulier en cause. C'est un critère objectif et le fardeau de la preuve à cet égard revient au demandeur tout comme celui concernant tous les autres aspects de la revendication du statut de réfugié. Par conséquent, s'il existe dans leur propre pays un refuge sûr où ils ne seraient pas persécutés, les demandeurs de statut sont tenus de s'en prévaloir à moins qu'ils puissent démontrer qu'il est objectivement déraisonnable de leur part de le faire.


[6]                Les demandeurs font valoir que la Commission a commis une erreur en exigeant une preuve, sous forme de mandat d'arrestation, que les demandeurs risquaient d'être persécutés partout en Inde. Toutefois, j'estime que la conclusion de la Commission sur ce point est raisonnable. Premièrement, la Commission a conclu que la preuve ne permettait pas de dire que les Manipuris étaient ciblés du simple fait qu'ils étaient des Manipuris dans une autre région de l'Inde. Par conséquent, les demandeurs n'ont pas démontré qu'ils seraient visés par la police pour des motifs strictement raciaux. Dans ce type d'affaire, il n'est pas déraisonnable que la Commission exige une preuve supplémentaire à l'appui de l'allégation selon laquelle les demandeurs étaient à risque d'être ciblés par la police partout en Inde.

[7]                Les demandeurs prétendent également que la décision de la Commission doit être annulée parce que la Commission a caractérisé la preuve documentaire de façon erronée. Toutefois, un examen de la preuve documentaire présentée à la Commission m'amène à conclure que la Commission a examiné et caractérisé correctement la preuve au dossier. La preuve documentaire examinée par la Commission confirme les allégations des demandeurs qui soutiennent l'existence d'un très grave conflit dans le Manipur. D'ailleurs, la population civile du Manipur est très souvent prise entre les rebelles et les forces de l'ordre. Toutefois, aucun élément de preuve ne permet de dire que le conflit se soit propagé dans d'autres régions de l'Inde. L'article produit par les demandeurs n'appuie pas les allégations selon lesquelles les demandeurs seraient persécutés dans tout le pays puisque leur situation est bien différente de celle dont on parle dans le document.

[8]                Enfin, dans la deuxième partie de son analyse, la Commission a examiné à fond la question de savoir si les demandeurs disposaient d'une PRI raisonnable.


[9]                Compte tenu de la preuve et du témoignage des demandeurs, je conclus que la Commission n'a pas commis une erreur en décidant que les demandeurs disposaient d'une PRI en Inde et que la conclusion qu'elle a tirée était conforme aux principes énoncés dans l'arrêt Thirunavukkarasu, précité.

[10]            Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

                                                                                                                                    « Yvon Pinard »             

                                                                                                                                                     Juge                      

OTTAWA (ONTARIO)

Le 3 février 2004

Traduction certifiée conforme

Suzanne M. Gauthier, trad. a., LL.L.


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                                        IMM-5134-02

INTITULÉ :                                                       SANAYAIMA LOURENBAM MIETEI

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                                 MONTRÉAL (QUÉBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                               LE 17 DÉCEMBRE 2003

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :                  LE JUGE PINARD

DATE DES MOTIFS :                                      LE 3 FÉVRIER 2004

COMPARUTIONS :

William Sloan                                        POUR LE DEMANDEUR

Michel Pépin                                                        POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

William Sloan                                        POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

Morris Rosenberg                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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