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Date : 20211008


Dossiers : IMM-7639-19

IMM-7643-19

Référence : 2021 CF 1051

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 octobre 2021

En présence de madame la juge Fuhrer

Dossier : IMM-7639-19

ENTRE :

SHAHIL ANWARALI ISRANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET L’IMMIGRATION

défendeur

Dossier : IMM-7643-19

ET ENTRE :

SHARON SHAHIL ISRANI

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Les demandeurs sont des citoyens de l’Inde et forment un couple marié. En 2018, Mme Israni a demandé un permis de travail après que Subway Restaurants eut obtenu une étude d’impact sur le marché du travail [EIMT] favorable. M. Israni a lui aussi demandé un permis de travail et a été ajouté, à titre de personne à charge accompagnant son épouse, à la demande que Mme Israni a présentée dans le cadre du programme des travailleurs étrangers temporaires. Les demandeurs ont répondu à une lettre d’équité procédurale, et, sur la base de leur réponse, la Section de l’immigration du haut-commissariat du Canada à New-Dehli, en Inde, les a déclarés interdits de territoire pour une période de cinq ans parce qu’ils avaient fait une fausse déclaration ou fait preuve de réticence à l’égard d’un fait important [la décision] aux termes de l’alinéa 40(1)a) et du paragraphe 40(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2011, c 27 [LIPR].

[2] Les deux affaires ont été entendues simultanément. À l’audience, les demandeurs ont informé la Cour qu’étant donné l’expiration de l’EIMT, survenue longtemps auparavant, ils sollicitaient le contrôle de la décision uniquement à l’égard de la conclusion de fausse déclaration qui emportait interdiction de présenter une nouvelle demande pendant cinq ans. Nul ne conteste qu’en l’espèce la norme de contrôle qui est présumée s’appliquer quant au bien-fondé de la décision est celle de la décision raisonnable : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 10. Compte tenu des observations écrites des parties, des plaidoiries et des dispositions applicables, je ne suis pas convaincue que les demandeurs se sont acquittés du fardeau qui leur incombait de démontrer que la décision était déraisonnable : Vavilov, au para 100. En conséquence, je rejette les demandes de contrôle judiciaire pour les motifs qui suivent.

II. Analyse

[3] Les demandes de permis de travail contiennent la question normalisée suivante : « Vous a‑t‑on déjà refusé un visa ou un permis, interdit l’entrée ou demandé de quitter le Canada ou tout autre pays ou territoire? » [non souligné dans l’original] Les demandeurs ont répondu : « Non ». Or, les États-Unis avaient précédemment refusé de leur délivrer des visas. En application du paragraphe 16(1) de la LIPR, la lettre d’équité procédurale a mis en doute la véracité de leurs demandes étant donné leur omission de mentionner les refus de visa américain.

[4] Les demandeurs ont répondu par une lettre rédigée par leur consultant et un courriel de Mme Israni. Dans ces deux documents, on avance deux explications possibles, qui sont à mon avis quelque peu contradictoires, pour justifier l’omission. Premièrement, les demandeurs affirment qu’ils n’ont pas vu la question, ou que le volet de la question portant sur d’autres pays ou territoires a échappé à leur attention, lorsqu’ils ont rempli le formulaire. Deuxièmement, ils soutiennent qu’ils n’ont pas songé à mentionner les refus de visa américain parce qu’ils n’ont reçu aucune lettre de refus officielle et que leurs passeports n’ont pas été estampillés. Le consultant a toutefois confirmé que les demandeurs ont déclaré un voyage à Dubaï dans leurs antécédents de voyage. Je suis d’avis que la deuxième explication indique que les demandeurs ont vu la question, mais n’ont pas songé au refus de visa américain, ce qui contredit la première explication voulant que les demandeurs n’aient pas vu la question.

[5] Selon moi, les éléments qui précèdent servent de toile de fond aux déclarations suivantes (de l’agent chargé de l’examen) tirées des notes consignées dans le SMGC concernant la demande de M Israni : [traduction] « Les demandeurs affirment qu’ils n’ont pas délibérément tenté de cacher cette information. Les renseignements des partenaires […] indiquent le contraire. » Compte tenu de ce contexte, et comme le décideur ou l’agent a fondé la décision (qui vise les deux demandeurs) sur [traduction] « les informations contenues dans le dossier », je juge que les brefs motifs suivants sont suffisants pour permettre à la Cour de comprendre le raisonnement qui sous-tend la décision : [traduction] « [l]e DP s’est vu offrir la possibilité de répondre à cette préoccupation et n’a fourni aucune information permettant de la dissiper ».

[6] L’omission de l’agent de mentionner expressément dans ses motifs la réponse des demandeurs à la lettre d’équité procédurale ne permet pas, à mon avis, de réfuter la présomption selon laquelle il a examiné tous les éléments du dossier et a simplement jugé que les renseignements fournis étaient insuffisants : Florea c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 598. Les notes du SMGC confirment comme suit la réception de la réponse à la lettre d’équité procédurale : [traduction] « RÉPONSE À LA LETTRE D’EP REÇUE ET TÉLÉVERSÉE DANS LES DOCUMENTS ÉLECTRONIQUES. » En outre, les motifs n’indiquent pas que les demandeurs ont omis de répondre à la lettre d’équité procédurale, mais plutôt qu’ils n’ont fourni aucune information susceptible de dissiper les préoccupations suscitées par leur défaut de mentionner le refus de visa américain dans leurs demandes de permis de travail.

[7] Je conviens avec le défendeur que les décideurs ne sont pas astreints à une obligation de perfection pour que leurs décisions résistent à un contrôle selon la norme de la décision raisonnable. Par ailleurs, « [o]n ne peut dissocier non plus le contrôle d’une décision administrative du cadre institutionnel dans lequel elle a été rendue ni de l’historique de l’instance » : Vavilov, précité, au para 91.

III. Conclusion

[8] Pour les motifs qui précèdent, et compte tenu de mon évaluation fondée sur « le bon sens et la logique ordinaire », je ne suis pas convaincue que « ce qui semble être une lacune des motifs […] constitue […] en définitive un manque de justification, d’intelligibilité ou de transparence » dans les circonstances de l’espèce : Vavilov, précité, aux para 88, 94. En conséquence, je rejette la demande de contrôle judiciaire présentée par les demandeurs.

[9] Aucune des parties n’a proposé de question grave de portée générale aux fins de certification, et je conclus que la présente affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans les dossiers IMM-7639-19 et IMM-7643-19

LA COUR STATUE que :

  1. les demandes de contrôles judiciaires présentées par les demandeurs sont rejetées;

  2. il n’y a aucune question à certifier.

« Janet M. Fuhrer »

Juge

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B
Annexe « A » : Dispositions pertinentes

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LC 2001, c 27)

Immigration and Refugee Protection Act, SC 2001, c 27

Immigration au Canada

Immigration to Canada

Obligation du demandeur

Obligation — answer truthfully

16 (1) L’auteur d’une demande au titre de la présente loi doit répondre véridiquement aux questions qui lui sont posées lors du contrôle, donner les renseignements et tous éléments de preuve pertinents et présenter les visa et documents requis.

16 (1) A person who makes an application must answer truthfully all questions put to them for the purpose of the examination and must produce a visa and all relevant evidence and documents that the officer reasonably requires.

Interdictions de territoire

Inadmissibility

Fausses déclarations

Misrepresentation

40 (1) Emportent interdiction de territoire pour fausses déclarations les faits suivants :

40 (1) A permanent resident or a foreign national is inadmissible for misrepresentation

a) directement ou indirectement, faire une présentation erronée sur un fait important quant à un objet pertinent, ou une réticence sur ce fait, ce qui entraîne ou risque d’entraîner une erreur dans l’application de la présente loi;

(a) for directly or indirectly misrepresenting or withholding material facts relating to a relevant matter that induces or could induce an error in the administration of this Act;

Application

Application

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent au paragraphe (1) :

(2) The following provisions govern subsection (1):

a) l’interdiction de territoire court pour les cinq ans suivant la décision la constatant en dernier ressort, si le résident permanent ou l’étranger n’est pas au pays, ou suivant l’exécution de la mesure de renvoi;

(a) the permanent resident or the foreign national continues to be inadmissible for misrepresentation for a period of five years following, in the case of a determination outside Canada, a final determination of inadmissibility under subsection (1) or, in the case of a determination in Canada, the date the removal order is enforced; and

b) l’alinéa (1)b) ne s’applique que si le ministre est convaincu que les faits en cause justifient l’interdiction.

(b) paragraph (1)(b) does not apply unless the Minister is satisfied that the facts of the case justify the inadmissibility.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-7639-19

 

INTITULÉ :

SHAHIL ANWARALI ISRANI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET L’IMMIGRATION

 

DOSSIER :

IMM-7643-19

 

INTITULÉ :

SHARON SHAHIL ISRANI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 6 OCTOBRE 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE FUHRER

 

DATE DU JUGEMENT ET DES MOTIFS :

LE 8 OctobrE 2021

 

COMPARUTIONS :

Lorne Waldman

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Kevin Doyle

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Lorne Waldman

Waldman et Associés

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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