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Date : 20211008


Dossier : IMM‐4411‐20

Référence : 2021 CF 1058

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 8 octobre 2021

En présence de monsieur le juge Brown

ENTRE :

DANIEL ALAN BAHENA OCAMPO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Nature de l’affaire

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] de la Commission de l’immigration et du statut du réfugié a confirmé la décision rendue par la Section de la protection des réfugiés [la SPR]. La SPR a statué que le demandeur n’avait ni la qualité de réfugié au sens de la Convention ni celle de personne à protéger au sens de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

II. Faits

[2] Le demandeur est un citoyen du Mexique âgé de 27 ans. Il craint d’être persécuté par les membres d’un cartel dans ce pays.

[3] Le 5 juillet 2017, le demandeur se rendait au travail avec un collègue lorsque des membres du cartel l’ont abordé sous la menace d’une arme à feu. Après avoir appris où il travaillait, les malfaiteurs l’ont placé dans un véhicule et ont exigé qu’il leur procure des renseignements personnels de diverses personnes, dont des collègues de travail, auxquels il pouvait avoir accès dans le cadre de son emploi.

[4] Lorsqu’il est arrivé au travail, le demandeur a abordé l’un des coordonnateurs et lui a raconté ce qui venait de se passer. Par la suite, il a été décidé qu’il devait quitter son emploi. Le demandeur n’a pas sollicité de protection policière parce qu’il croyait que les forces de l’ordre étaient de connivence avec les cartels.

[5] Après cet incident, le demandeur s’est mis à couvert. Lorsqu’un collègue de travail l’a avisé qu’on le recherchait, il s’est sauvé aux États‐Unis avec l’aide d’un proche. Le demandeur affirme que les membres du cartel ont continué de le pourchasser après son départ.

[6] Le demandeur n’a pas présenté de demande d’asile aux États‐Unis en raison du climat d’immigration, mais est resté sur place pour prendre soin d’un proche. Puis, il est arrivé au Canada en 2018. Il a alors rempli et signé son formulaire Fondement de la demande d’asile [le formulaire FDA] qu’il a ensuite modifié plusieurs fois en 2019. Son audience relative à la demande d’asile s’est tenue en 2019 et la SPR a prononcé le rejet de la demande le même jour.

III. Décision faisant l’objet du contrôle

[7] La SAR a rejeté l’appel. La SAR a confirmé la décision de la SPR de refuser au demandeur la qualité de réfugié au sens de la Convention parce qu’il bénéficie d’une possibilité de refuge intérieur [la PRI] ailleurs au Mexique.

A. Les nouveaux éléments de preuve

[8] Le demandeur a produit une lettre de son épouse et une lettre d’un collègue comme nouveaux éléments de preuve. Cependant, la SAR les a rejetés parce que la teneur des deux lettres ne se rapportait pas à la catégorie des éléments de preuve qui seraient survenus depuis le rejet de la demande. En outre, le demandeur n’a fourni aucune explication sur ce qui l’aurait empêché de donner les lettres à la SPR au moment où elle se penchait sur son dossier.

B. Le critère de la PRI

[9] Le critère à deux volets permettant d’apprécier une PRI est établi dans l’arrêt Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706 où le juge Mahoney énonce au paragraphe 10 ce qui suit :

10 À mon avis, en concluant à l’existence d’une possibilité de refuge, la Commission se devait d’être convaincue, selon la prépondérance des probabilités, que l’appelant ne risquait pas sérieusement d’être persécuté à Colombo et que, compte tenu de toutes les circonstances, dont celles lui étant particulières, la situation à Colombo était telle qu’il ne serait pas déraisonnable pour l’appelant d’y chercher refuge.

C. L’existence d’une possibilité sérieuse de persécution ou d’un risque de préjudice au Mexique

[10] Premier volet : La SAR a conclu que le demandeur disposait d’une PRI viable où il n’était pas exposé à une possibilité sérieuse de persécution ou à un risque de préjudice. La preuve n’établissait pas que les agents du préjudice avaient les moyens ou la motivation de chercher et de retrouver le demandeur aux quatre coins du Mexique et, plus précisément, dans la région de la PRI proposée.

[11] La SAR a examiné les éléments de preuve au dossier concernant l’identité des agents du préjudice et a conclu qu’ils n’étaient pas suffisants pour établir que ces agents appartenaient aux cartels mentionnés par le demandeur. Le simple fait que ce dernier a été intercepté ou menacé n’établit pas que les agents du préjudice appartiennent à ces groupes.

[12] Lorsque la SPR a demandé au demandeur comment il avait pris connaissance de l’identité des agents de persécution, il a répondu que les hommes lui avaient indiqué le nom de leur bande. Par contre, la lettre de son collègue signalait que « pendant [leur] retour, [ils avaient] été interceptés par un groupe armé qui ne s’est pas identifié ». De plus, selon la lettre d’un autre collègue, un homme était venu sur les lieux de travail pour s’informer du demandeur, mais il « ne s’[était] pas identifié ». D’autres lettres ont été mises à la disposition de la SPR, mais aucune ne mentionnait les cartels dont l’appelant a parlé. Par conséquent, la SAR a conclu que l’identité des agents du préjudice n’avait pas été établie.

[13] Lorsque la SPR s’est penchée sur la motivation et les ressources des agents du préjudice pour retrouver le demandeur dans la région de la PRI proposée, ce dernier a témoigné qu’il n’était pas certain qu’il serait encore pourchassé s’il retournait dans son pays. De plus, la SAR a fait observer que les parents du demandeur vivent dans la même ville que celle où les incidents se sont produits, mais qu’il n’y a aucun élément de preuve selon lequel les agents du préjudice ont communiqué avec eux.

[14] La SAR a passé en revue les éléments de preuve relatifs à la situation au Mexique et n’en a repéré aucun qui établit que le cartel est particulièrement actif dans la région de la PRI proposée. En outre, la preuve a montré que dans l’État concerné, le taux de violence était relativement peu élevé.

[15] Deuxième volet : La SAR a convenu que la SPR avait correctement conclu que le demandeur n’était pas parvenu à s’acquitter du fardeau de prouver que la PRI n’est pas objectivement raisonnable. Au vu de la preuve au dossier, la SAR a conclu que le demandeur possède les compétences personnelles et professionnelles qui lui permettent de décrocher un emploi et de dénicher un logement dans la région de la PRI proposée et qu’il s’agit d’une situation qui se distingue de celle de la personne moyenne.

[16] La SAR a reconnu que le demandeur avait peur d’aller dans un endroit où il ne connaît personne. Or, la SAR a conclu que l’absence d’amis ou de membres de la famille dans l’emplacement proposé à titre de PRI ne suffit pas à établir que cette PRI est déraisonnable. Le demandeur avait le fardeau d’établir que la PRI proposée était déraisonnable ou excessivement difficile dans sa situation. Cependant, le demandeur n’a pas été en mesure de produire des observations selon lesquelles la PRI proposée serait déraisonnable par rapport à d’autres facteurs, comme la langue, le logement ou les soins médicaux.

IV. Questions en litige

[17] La seule question en l’espèce est de savoir si la conclusion de la SAR quant à la PRI est raisonnable.

V. Norme de contrôle

[18] Dans l’arrêt Société canadienne des postes c Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes, 2019 CSC 67 [Société canadienne des postes] — qui a été rendu en même temps que l’arrêt Vavilov de la Cour suprême du Canada — le juge Rowe, s’exprimant au nom de la majorité, explique comme suit les attributs que doit présenter une décision raisonnable, et, point pertinent au regard de l’espèce, les exigences imposées à la cour de révision qui contrôle une décision selon la norme de la décision raisonnable :

[31] La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, par. 85). Par conséquent, lorsqu’elle procède au contrôle d’une décision selon la norme de la décision raisonnable, « une cour de révision doit d’abord examiner les motifs donnés avec “une attention respectueuse”, et chercher à comprendre le fil du raisonnement suivi par le décideur pour en arriver à [l]a conclusion » (Vavilov, par. 84, citant Dunsmuir, par. 48). Les motifs devraient être interprétés de façon globale et contextuelle afin de comprendre « le fondement sur lequel repose la décision » (Vavilov, par. 97, citant Newfoundland Nurses).

[32] La cour de révision devrait se demander si la décision dans son ensemble est raisonnable : « ce qui est raisonnable dans un cas donné dépend toujours des contraintes juridiques et factuelles propres au contexte de la décision particulière sous examen » (Vavilov, par. 90). Elle doit se demander « si la décision possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‐ci » (Vavilov, par. 99, citant Dunsmuir, par. 47 et 74, et Catalyst Paper Corp. C. North Cowichan (District), 2012 CSC 2, [2012] 1 R.C.S. 5, par. 13).

[33] Lors d’un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, « [i]l incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable » (Vavilov, par. 100). La partie qui conteste la décision doit convaincre la cour de justice que « la lacune ou la déficience [invoquée] [...] est suffisamment capitale ou importante pour rendre [la décision] raisonnable » (Vavilov, au par. 100).

[Non souligné dans l’original.]

[19] Comme l’a déclaré la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Vavilov, la cour de révision doit être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient » :

[104] De même, la logique interne d’une décision peut également être remise en question lorsque les motifs sont entachés d’erreurs manifestes sur le plan rationnel — comme lorsque le décideur a suivi un raisonnement tautologique ou a recouru à de faux dilemmes, à des généralisations non fondées ou à une prémisse absurde. Il ne s’agit pas d’inviter la cour de révision à assujettir les décideurs administratifs à des contraintes formalistes ou aux normes auxquelles sont astreints des logiciens érudits. Toutefois, la cour de révision doit être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient ».

[105] En plus de la nécessité qu’elle soit fondée sur un raisonnement intrinsèquement cohérent, une décision raisonnable doit être justifiée au regard de l’ensemble du droit et des faits pertinents : Dunsmuir, par. 47; Catalyst, par. 13; Nor‐Man Regional Health Authority, par. 6. Les éléments du contexte juridique et factuel d’une décision constituent des contraintes qui ont une influence sur le décideur dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont délégués.

[Non souligné dans l’original.]

[20] Au paragraphe 86 de l’arrêt Vavilov, la Cour suprême du Canada affirme « [qu’]il ne suffit pas que la décision soit justifiable. Dans les cas où des motifs s’imposent, le décideur doit également, au moyen de ceux‐ci, justifier sa décision auprès des personnes auxquelles elle s’applique » et donne la directive selon laquelle la cour de révision doit en arriver à une décision au vu du dossier porté devant elle :

[126] Cela dit, une décision raisonnable en est une qui se justifie au regard des faits : Dunsmuir, par. 47. Le décideur doit prendre en considération la preuve versée au dossier et la trame factuelle générale qui ont une incidence sur sa décision et celle‐ci doit être raisonnable au regard de ces éléments : voir Southam, par. 56. Le caractère raisonnable d’une décision peut être compromis si le décideur s’est fondamentalement mépris sur la preuve qui lui a été soumise ou n’en a pas tenu compte. Dans l’arrêt Baker, par exemple, le décideur s’était fondé sur des stéréotypes dénués de pertinence et n’avait pas pris en compte une preuve pertinente, ce qui a mené à la conclusion qu’il existait une crainte raisonnable de partialité : par. 48. En outre, la démarche adoptée par le décideur permettait également de conclure au caractère déraisonnable de sa décision, car il avait démontré que ses conclusions ne reposaient pas sur la preuve dont il disposait en réalité : par. 48.

[Non souligné dans l’original.]

[21] En outre, il ressort clairement de l’arrêt Vavilov que le rôle de la Cour n’est pas d’apprécier à nouveau la preuve, à moins de « circonstances exceptionnelles » :

[125] Il est acquis que le décideur administratif peut apprécier et évaluer la preuve qui lui est soumise et qu’à moins de circonstances exceptionnelles, les cours de révision ne modifient pas ses conclusions de fait. Les cours de révision doivent également s’abstenir « d’apprécier à nouveau la preuve examinée par le décideur »` : CCDP, par. 55; voir également Khosa, par. 64; Dr Q, par. 41‐42. D’ailleurs, bon nombre des mêmes raisons qui justifient la déférence d’une cour d’appel à l’égard des conclusions de fait tirées par une juridiction inférieure, dont la nécessité d’assurer l’efficacité judiciaire, l’importance de préserver la certitude et la confiance du public et la position avantageuse qu’occupe le décideur de première instance, s’appliquent également dans le contexte du contrôle judiciaire : voir Housen, par. 15‐18; Dr Q, par. 38; Dunsmuir, par. 53.

[Non souligné dans l’original.]

VI. Analyse

[22] Dans la décision Lawal c Canada (Sécurité publique et Protection civile), 2020 CF 301, j’ai passé en revue la jurisprudence relative au critère de la PRI :

[8] D’abord, il est établi en droit que le critère à deux volets à appliquer pour décider s’il existe une PRI provient des décisions Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706, et Thirunavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 CF 589. Dans la récente affaire Feboke c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 155, le juge Pamel a décrit ce critère de la façon suivante, au paragraphe 15 :

[traduction]

[15] Les décisions Rasaratnam c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 CF 706, et Thirunnavukkarasu c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 CF 589, ont établi un critère à deux volets à appliquer pour déterminer s’il existe une PRI : (i) il ne doit pas exister de possibilité sérieuse que l’individu soit persécuté dans la région de la PRI (selon la prépondérance des probabilités), et (ii) les conditions de la proposition de PRI sont telles qu’il n’est pas déraisonnable, compte tenu de toutes les circonstances, pour un individu d’y chercher refuge (Reci c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 833, au paragraphe 19; Titcombe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1346 au paragraphe 15). Pour conclure à l’existence d’une PRI, chacun des deux volets doit être rempli. Ce critère à deux volets garantit que le Canada se conforme aux normes internationales relatives aux PRI (directives du HCR, aux paragraphes 7 et 24 à 30).

[23] Il appartient aux demandeurs de démontrer que l’un des deux volets n’est pas rempli. Voir l’arrêt Ranganathan c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 2 CF 164 [le juge Létourneau] au para 13.

[24] Dans la décision Nimako c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2013 CF 540 au para 7, le juge Campbell a statué que le fait de déterminer s’il existe une possibilité sérieuse pour le demandeur d’être persécuté comprend la question de savoir si un agent de persécution a les moyens et la motivation de le pourchasser dans la région de la PRI proposée.

[25] Le demandeur allègue que la SAR n’a pas tenu compte des éléments de preuve corroborants ou qu’elle les a mal interprétés, plus particulièrement en ce qui concerne les documents sur la situation du pays, selon lesquels les agents de persécution ont les moyens et la motivation de le retrouver dans la région de la PRI proposée. Le demandeur se reporte à des extraits des documents sur la situation du Mexique. Or, les extraits mis en évidence restent cois quant à la région de la PRI proposée et n’indiquent pas si le cartel a les moyens ou la motivation d’y retrouver le demandeur.

[26] Par contre, en l’absence d’une preuve convaincante qu’un agent de persécution a l’intention de s’en prendre au demandeur, la pertinence des éléments de preuve sur les conditions du pays est négligeable : Abdullah c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 76 [la juge Walker] au para 17 :

[...] Le fait que les persécuteurs des demandeurs pourraient les trouver dans d’autres villes du Bangladesh n’infirme pas la conclusion de la SAR selon laquelle ils n’auraient pas la motivation de le faire (Essel c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1025 au para 13). La SAR a expliqué en détail et avec logique les motifs justifiant sa conclusion défavorable quant à la motivation des persécuteurs des demandeurs, et je ne relève aucune erreur susceptible de contrôle dans la conclusion du tribunal.

[27] En l’espèce, le demandeur n’était pas en mesure de donner une réponse claire sur les raisons pour lesquelles il pourrait être ciblé dans le futur, ou sur la manière dont il le serait. Une lettre de son collègue informait que son lieu de travail était visé, mais le demandeur n’y travaille plus et il n’a plus accès aux renseignements personnels qui s’y trouvent. De plus, après son départ du Mexique, son employeur a embauché quelqu’un d’autre. Par conséquent, le demandeur n’a pas démontré que son persécuteur avait toujours la motivation nécessaire pour continuer de le pourchasser.

[28] Je remarque aussi que les membres du cartel n’ont pas communiqué avec les parents du demandeur, ce qui consolide davantage la conclusion de la SAR selon laquelle le demandeur n’est pas confronté à une possibilité sérieuse de persécution dans la région de la PRI proposée. Voir la décision Rodriguez Llanes c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 492 [la juge Mactavish, alors juge à la Cour fédérale] au para 10.

[29] Le demandeur fait valoir, au sujet de l’identité des agents de persécution, que la SAR a déraisonnablement écarté l’information sur le profil des agents de persécution en raison notamment des problèmes liés à sa crédibilité et de l’absence d’éléments de preuve. Le demandeur prétend que la SAR a agi d’une façon déraisonnable lorsqu’elle a fait observer qu’il ne nomme pas les agents de persécution dans son témoignage et que ceux‐ci n’avaient pas communiqué avec ses parents qui sont pourtant demeurés au même endroit. Le demandeur affirme que ces conclusions équivalent à des « inférences relatives à la crédibilité ».

[30] Le défendeur fait valoir, et je suis d’accord, que la croyance du demandeur, aussi sincère soit‐elle, n’est pas un substitut à la nécessité de produire un nombre suffisant d’éléments de preuve fiables relatifs à l’identité des agents de persécution. Voir Potes Mina c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 834 [le juge Russell] aux para 41, 43, 47.

[31] Le demandeur est aussi confronté au fait que son témoignage sur les membres du cartel rencontrés est contradictoire avec les déclarations de ses collègues.

[32] Dans ces circonstances, je conclus que la SAR a raisonnablement apprécié l’ensemble de la preuve, mais n’a « tout simplement pas été convaincue ». Sans remettre en cause la version des événements du demandeur, il était raisonnablement loisible à la SAR de conclure qu’il ne s’était pas acquitté de son fardeau de preuve. Voir Ferguson c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1067 [le juge Zinn] au paragraphe 20.

VII. Conclusion

[33] À mon humble avis, le demandeur n’a pas établi que la décision de la SAR était déraisonnable. Il incombait au demandeur de démontrer qu’il existait une possibilité sérieuse d’être persécuté dans la région de la PRI proposée, ou qu’il était déraisonnable pour lui, compte tenu de toutes les circonstances, de s’y réfugier. Selon moi, la décision est transparente, intelligible et justifiée au regard des faits et du droit.

VIII. Question aux fins de certification

[34] Aucune partie n’a proposé de question de portée générale, et l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM‐4411‐20

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée, qu’aucune question n’est certifiée et qu’aucuns dépens ne sont adjugés.

« Henry S. Brown »

Juge

Traduction certifiée conforme

Semra Denise Omer


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‐4411‐20

 

INTITULÉ :

DANIEL ALAN BAHENA OCAMPO c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 28 SEPTEMBRE 2021

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE BROWN

DATE DES MOTIFS :

LE 8 OCTOBRE 2021

COMPARUTIONS :

Omolola Fasina

POUR LE DEMANDEUR

Christopher Ezrin

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Michael Loebach

Avocat

London (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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