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     Date: 20000929

     Dossier: IMM-4985-99


Entre :

     MBUYI KADIOSHA

     MADELEINE NGANDU

     CHARLENE NGANDU

     ANGELINA NGANDU

     LAETILIA NGANDU

     CHRISTELLE NGANDU

     LISE NGANDU

     Demanderesses

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Défendeur



     MOTIFS DE L'ORDONNANCE


LE JUGE PINARD :

[1]      La demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 28 septembre 1999 par la Section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié statuant que les demanderesses ne sont pas des réfugiées au sens de la Convention, tel que défini au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration, L.R.C. (1985), ch. I-2 (la Loi).

[2]      Les demanderesses, citoyennes de la République démocratique du Congo (RDC), allèguent avoir une crainte bien fondée de persécution en raison du fait que le 13 août 1998, le mari de la demanderesse principale a aidé un de ses amis d'enfance rwandais à fuir la RDC avec sa famille. Le lendemain, il appert que le mari fût arrêté par les militaires et accusé de trahison. La demanderesse principale allègue que lors de cette violence, les militaires ont émis des commentaires contre leur ethnie et l'Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS), promettant le même sort aux membres de l'UDPS qu'aux traîtres rwandais. Elle soutient que depuis son arrestation, son mari n'a pu être localisé.

[3]      Le 15 août 1998, la demanderesse principale indique que les militaires sont revenus. Elle indique avoir été interrogée, violentée et menacée. En conséquence, elle se serait rendue chez ses parents où il appert que des militaires se sont présentés pour l'interroger. Elle se serait cachée pour ensuite fuir la RDC, ce qu'elle aurait pu faire grâce à un ami de la famille.

[4]      La décision en cause est fondée sur l'absence de crédibilité de la demanderesse principale, plus particulièrement sur les points suivants :

-      Il est invraisemblable que le fait de connaître un Rwandais ait valu à son époux d'être persécuté.
-      Elle a indiqué que son mari aurait été enlevé le 14 août 1998 par des militaires de Kabila. Or, après avoir déclaré que c'était son mari qui était allé chercher les certificats de naissance, elle s'est amendée pour dire que c'était plutôt un ami de la famille.
-      Les attestations de naissance, qui vont de 1980 à 1994, ont toutes le même formulaire, le même papier et les mêmes défauts.
-      Le sceau sur l'attestation de mariage coutumier monogamique n'est pas bon et il y une correction au liquide correcteur blanc.
-      En ce qui concerne son voyage au Canada, il est invraisemblable qu'une personne instruite comme la demanderesse principale s'en soit remise au passeur au point d'ignorer de quel pays étaient les passeports utilisés.
-      Il est invraisemblable que Papa Patrick, un ami de la famille, ait payé pour les billets d'avions et les dépense de monsieur David.
-      Dans son Formulaire de renseignements personnels, l'UDPS est mentionnée comme étant cause de persécution, alors qu'au point d'entrée se sont les dix Tutsis.
-      Les déclarations de la demanderesse principale concernant le nombre de Tutsis impliqués dans son histoire sont contradictoires.

[5]      En ce qui concerne les questions de fait et, fondamentalement, l'appréciation de la crédibilité de la demanderesse principale, il est bien établi qu'il n'appartient pas à cette Cour de se substituer à la Section du statut lorsque, comme dans le présent cas, les personnes requérant le statut de réfugié font défaut d'établir que ce tribunal a rendu une décision fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments à sa disposition. Après révision de la preuve, je ne suis pas convaincu que les inférences tirées par le tribunal spécialisé que constitue la Section du statut ne pouvaient pas raisonnablement l'être (voir Aguebor c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315).

[6]      Par ailleurs, le tribunal a écrit, dans sa décision :

             Nous devons rendre une décision sur un point bien précis, êtes-vous persécutés dans votre pays pour des raisons d'opinions politiques, pour des raisons d'appartenance à un groupe social particulier, ou pour des raisons de race, de religion et/ou de nationalité?
             Nous devons malheureusement conclure que vous ne nous avez pas présenté une telle preuve. C'est à vous de nous faire la preuve que vous êtes persécutés et nous nous basons sur cette preuve là, au meilleur de notre connaissance, pour rendre la décision.


[7]      De toute évidence, le tribunal a énoncé incorrectement le critère applicable à la détermination du statut de réfugié. Le bon critère consiste non pas à déterminer si la personne revendiquant le statut de réfugié est persécutée dans son pays, mais bien si celle-ci craint avec raison d'y être persécutée. Cependant, ce qui importe c'est que le bon critère soit bien appliqué, non pas qu'il ait été énoncé correctement. Ce principe est souligné par la Cour d'appel fédérale dans Osei v. Canada (Minister of Employment and Immigration) (1990), 12 Imm.L.R. (2d) 49, où monsieur le juge Décary a écrit à la page 51 :

         [TRADUCTION]
             De la même façon que l'effet de l'énonciation incorrecte du critère par le tribunal peut être annulé si celui-ci est appliqué comme il convient, l'effet d'une énonciation correcte peut être annulé s'il est mal appliqué. . . .

[8]      Or, en l'espèce, la perception d'absence de crédibilité de la demanderesse principale, vu les nombreuses contradictions, invraisemblances et omissions émanant de la preuve, équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel fonder les demandes concernées (voir Sheikh c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1990] 3 C.F. 238, à la page 244).

[9]      Ainsi, bien que le tribunal ait techniquement commis une erreur de formulation du test applicable en la matière, cette erreur est sans conséquence, le manque de crédibilité de la demanderesse principale empêchant la preuve de démontrer une crainte raisonnable de persécution.

[10]      Pour toutes ces raisons, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.




                            

                                     JUGE

OTTAWA (ONTARIO)

Le 29 septembre 2000




     Date: 20000929

     Dossier: IMM-4985-99

Ottawa (Ontario), ce 29e jour de septembre 2000

En présence de l'honorable juge Pinard

Entre :

     MBUYI KADIOSHA

     MADELEINE NGANDU

     CHARLENE NGANDU

     ANGELINA NGANDU

     LAETILIA NGANDU

     CHRISTELLE NGANDU

     LISE NGANDU

     Demanderesses

     - et -


     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION

     Défendeur


     ORDONNANCE


     La demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 28 septembre 1999, statuant que les demanderesses ne sont pas des réfugiées au sens de la Convention, est rejetée.


                            

                             JUGE

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