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Date : 20060314

Dossier : IMM-1930-05

Référence : 2006 CF 323

Ottawa (Ontario), le 14 mars 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

 

 

ENTRE :

ARROYO BENAVIDES, LIMAN

ALTAMIRANO CARRASCO, LIZETTE et

ARROYO ALTAMIRANO, KIMBERLY J.

demandeurs

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]        La Cour statue sur une demande de contrôle judiciaire d'une décision en date du 15 mars 2005 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que les demandeurs n’avaient pas qualité de réfugiés au sens de la Convention ni celle de personnes à protéger.

 

[2]        Les demandeurs sollicitent une ordonnance annulant la décision de la Commission et renvoyant l'affaire à un tribunal différemment constitué pour qu'il rende une nouvelle décision.

 

Contexte

 

[3]        Le demandeur principal, Liman Arroyo Benavides, sa femme, Lizette Altamirano Carrasco, et leur fille âgée de cinq ans, Kimberley J. Arroyo Altamirano (les demandeurs), sont des citoyens du Costa Rica qui demandent l’asile au Canada au motif qu'ils craignent d'être persécutés par des trafiquants de drogue au Costa Rica. Ils affirment qu'ils ne peuvent être assurés d'une protection adéquate de la part de la police au Costa Rica.

 

[4]        Dans l'exposé circonstancié de leur formulaire de renseignements personnels (FRP), les demandeurs racontent qu'en octobre 2003, alors qu'ils se trouvaient à la ferme du père de la femme du demandeur principal, ils ont rencontré par hasard un groupe d'hommes armés dans un secteur boisé de la propriété. Le demandeur principal a confronté les hommes, qui lui ont répondu qu’ils cultivaient de la marijuana et qui l'ont menacé de mort s'il révélait à qui que ce soit leurs activités. Le demandeur principal a affirmé qu’il avait reconnu l’un des hommes comme étant un trafiquant de drogues connu qui avait échappé à la police à la suite d'une vaste enquête menée sur les stupéfiants. Le demandeur a par la suite croisé à quelques reprises le même trafiquant, qui a réitéré les mêmes menaces.

 

[5]        Le demandeur principal n’a pas eu d’autres problèmes jusqu’au moment où il est retourné à la ferme, en avril 2004, et s'est rendu dans une ville voisine pour se procurer des  approvisionnements. Il a croisé des cavaliers qui avaient l'air étrange et a entendu tirer des coups de feu derrière lui. Il a signalé l'incident à la police et a parlé des menaces qu'il avait reçues. Les policiers lui ont dit qu’il leur fallait davantage de renseignements et qu'il fallait des témoins. La police n’a pas fait de rapport. Les demandeurs sont partis pour le Canada peu de temps après cet incident.

 

[6]        La Commission a examiné la demande d'asile des demandeurs le 16 septembre 2004 et le 8 mars 2005. La Commission a rejeté leur demande dans une décision datée du 15 mars 2005. La Cour est saisie d'une demande de contrôle judiciaire de cette décision.

 

Motifs de la décision de la Commission

 

[7]        La Commission a déclaré que la question déterminante était celle de savoir si les demandeurs pouvaient se réclamer de la protection de l’État au Costa Rica. La Commission a expliqué que, pour savoir si les demandeurs d'asile peuvent compter sur une protection adéquate de l'État, il n'est pas nécessaire que celui-ci soit en mesure de leur offrir une protection parfaite; il suffit que l'État fasse de sérieux efforts pour protéger ses citoyens.

 

[8]        La Commission a examiné la preuve documentaire relative à la situation au Costa Rica. Elle a constaté que le Costa Rica est une démocratie constitutionnelle stable et fonctionnelle qui dispose d’un corps de police fonctionnel et d’institutions judiciaires indépendantes. Elle a ajouté que le gouvernement du Costa Rica faisait de sérieux efforts pour protéger ses citoyens contre le crime et qu'il avait mis sur pied en 2003 un programme de protection des témoins, ainsi que d'autres mesures pour protéger les témoins. La Commission a signalé que le demandeur principal ne s'était pas prévalu du programme de protection des témoins avant de quitter le Costa Rica et qu'il n’avait pas démontré, selon la prépondérance des probabilités, qu’il ne pourrait bénéficier de cette protection si les circonstances le justifiaient.

 

[9]        La Commission a expliqué que le demandeur principal n’avait pas communiqué avec les autorités quant à d’éventuelles activités illégales du groupe de narcotrafiquants ou quant aux menaces dont il avait fait l'objet. Il n'avait donc pas aidé les autorités d’une manière qui leur aurait permis de le protéger. La Commission a affirmé que, comme le trafiquant que le demandeur principal avait croisé était l’un des individus recherchés par la police et qu'il était connu de celle-ci, il était raisonnable de s’attendre à ce que la police ouvre une autre enquête si le demandeur principal lui avait signalé les faits dont il avait été témoin.

 

[10]      La Commission a expliqué que, compte tenu de ce qu'il affirmait avoir vécu et de sa crainte des trafiquants de drogues, il n'était pas plausible que le demandeur principal s'adresse à la police simplement pour se plaindre vaguement du fait que des coups de feu avaient été tirés dans les montagnes. La Commission a signalé qu'il ne s’était rien passé à la ferme à la suite du signalement du demandeur principal. La Commission a déclaré, en conséquence, qu'elle n'était pas convaincue que le fait que le demandeur principal se soit adressé à la police et qu’il lui ait dit ce qu’il avait vu dans les montagnes lui aurait fait courir un plus grand danger.

 

[11]      La Commission a estimé que la réaction de la police n’était pas déraisonnable, compte tenu du fait que le signalement du demandeur était extrêmement vague.

 

[12]      La Commission a rappelé que les demandeurs avaient affirmé que la police était corrompue. La Commission a estimé que cette affirmation ne démontrait pas l’existence d’un fondement raisonnable justifiant le fait que les demandeurs ne s'étaient pas adressés à la police pour demander à être protégés, étant donné que l’État disposait de mécanismes permettant de porter plainte pour inconduite policière et qu'il existait aussi des recours adéquats en cas de violation.

 

[13]      La Commission a estimé que l'État avait mis en place des mécanismes dans le but d’offrir aux demandeurs d’asile une protection adéquate contre la menace que représentent les criminels, y compris les trafiquants de drogue, et que les demandeurs n'avaient pas maximisé la protection qui leur était ainsi offerte. La Commission a conclu que les demandeurs n’avaient pas présenté d’éléments de preuve clairs et convaincants pour réfuter la présomption selon laquelle un pays est capable de protéger ses citoyens. En conséquence, leur demande d’asile a été rejetée.

 

Question en litige

 

[14]      Les demandeurs soulèvent les questions suivantes :

            1.         La Commission a-t-elle tiré, au sujet de la protection de l'État, une conclusion manifestement déraisonnable en ignorant des éléments de preuve pertinents portant sur des personnes se trouvant dans une situation semblable au Costa Rica?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en mettant la volonté de l'État de protéger ses citoyens sur le même pied que la suffisance de la protection de l'État?

            3.         Le défaut de la Commission de fournir un compte rendu intégral de ses débats a‑t‑il entraîné un manquement aux principes de justice naturelle?

 

[15]      Voici comment je formulerais les questions en litige :

            1.         L'absence de transcription intégrale a-t-elle entraîné un manquement aux principes de justice naturelle?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant que l'État pouvait assurer une protection adéquate aux demandeurs?

 

Prétentions et moyens des demandeurs

 

[16]      Suivant les demandeurs, il est possible de réfuter la présomption relative à la protection de l'État en présentant des éléments de preuve relatifs à des personnes qui sont dans une situation semblable à la leur et que les dispositions prises par l'État pour les protéger n'ont pas aidé (voir l'arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, au paragraphe 50). Les demandeurs soutiennent que la Commission disposait d'éléments de preuve documentaires tendant à démontrer que le Costa Rica n'était pas en mesure d'assurer une protection adéquate aux personnes se trouvant dans une situation semblable à celle des demandeurs et qui auraient besoin du programme de protection des témoins s'ils devaient fournir aux autorités des renseignements permettant de poursuivre des criminels. Les demandeurs affirment que la Commission a commis une erreur en ignorant ces éléments de preuve ou en ne tenant pas compte de la situation particulière des demandeurs.

 

[17]      Les demandeurs estiment qu'ils étaient justifiés de croire qu'il leur serait inutile de réclamer la protection des autorités en raison de la complicité de la police dans les activités criminelles en question.

 

[18]      Suivant les demandeurs, la Commission a mal interprété la preuve en affirmant que le gouvernement du Costa Rica avait pris d'autres mesures pour protéger les témoins en plus de celles prévues par le programme de protection des témoins.

 

[19]      Suivant les demandeurs, la Commission a commis une erreur en mettant la volonté de l'État de protéger ses citoyens sur le même pied que la suffisance de la protection de l'État. Le vrai critère consiste à se demander si l'État a effectivement offert sa protection et non seulement s'il s'est montré disposé à aider ses citoyens. À leur avis, les éléments de preuve cités par la Commission indiquent seulement les mesures prises par l'État pour protéger ses citoyens mais ne permettent pas de savoir si cette protection était adéquate dans le cas de personnes se trouvant dans une situation semblable.

 

[20]      Les demandeurs affirment que la Commission a commis une erreur en affirmant, dans ses motifs, que « le demandeur principal n’a jamais communiqué avec les autorités quant à d’éventuelles activités illégales du groupe susmentionné ou quant aux menaces qu’il aurait reçues ». Ils soulignent que, contrairement à cette affirmation, le demandeur principal a déclaré ce qui suit dans son FRP : [traduction] « Avant de quitter le village, je me suis rendu au poste de police pour signaler cet incident et pour leur faire part des menaces qui avaient été proférées à mon endroit. Aucune suite n'a été donnée à ce signalement ».

 

[21]      Suivant les demandeurs, le fait que la transcription soit incomplète constitue une injustice et entraîne un déni de justice naturelle parce que les parties manquantes de la transcription sont essentielles pour pouvoir trancher la question déterminante de la protection de l'État (voir le jugement Goodman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 185 F.T.R. 102, aux paragraphes 68 à 70 (C.F. 1re inst.)). Les demandeurs affirment que, si elle ne dispose pas du procès-verbal intégral des débats, la Cour ne sera pas en mesure de déterminer si la Commission a commis une erreur justifiant l'annulation de sa décision.

 

Prétentions et moyens du défendeur

 

[22]      Le défendeur soutient que la Commission n'a pas commis d'erreur en ne tenant pas compte des éléments de preuve relatifs aux personnes qui se trouvent dans une situation semblable à celle des demandeurs et qui n'ont pas bénéficié de la protection de l'État faute de programme de protection des témoins. Suivant le défendeur, la Commission a bel et bien abordé la question du programme de protection des témoins. La Commission a fait remarquer qu'il n'existait pas de programme formel de protection des témoins au Costa Rica mais elle a ajouté que le gouvernement était conscient de cette lacune et qu'il avait commencé à élaborer un tel programme.

 

[23]      Le défendeur a reconnu que la preuve était contradictoire sur la question de savoir jusqu'à quel point le demandeur avait effectivement signalé les incidents en question à la police. Le défendeur estime toutefois que les contradictions relevées dans la preuve ne constituent pas une erreur justifiant l'annulation de la décision de la Commission parce que l'analyse et la conclusion de la Commission au sujet de la protection de l'État ne reposaient pas sur la question de savoir si les demandeurs avaient signalé aux autorités les menaces dont ils avaient fait l'objet de la part des trafiquants. Le défendeur fait valoir que, malgré le fait qu'elle avait conclu que les demandeurs n'avaient pas signalé aux autorités les menaces que leur avaient adressées les trafiquants, la Commission a expressément envisagé cette possibilité dans ses motifs, de sorte que toute erreur de fait qu'elle avait pu commettre sur ce point n'est pas suffisamment grave pour constituer une erreur justifiant l'infirmation de sa décision (voir l'arrêt Rohm & Haas Canadian Ltd. c. Canada (Tribunal antidumping) (1978), 91 D.L.R. (3d) 212, 22 N.R. 175 (C.A.F.), dans lequel il a été jugé, au paragraphe 5, que pour pouvoir annuler une décision au motif qu'elle renferme une conclusion de fait erronée, il faut que cette décision soit « fondée » sur la conclusion erronée). Voici ce que la Commission a expressément dit :

 

Compte tenu de l’intérêt que les autorités avaient déjà démontré à l’égard du trafiquant, il est raisonnable de s’attendre à ce que la police ait mené une autre enquête qui aurait bien pu mener à l’arrestation de ce dernier, si le demandeur d’asile principal avait signalé à celle-ci les événements dont il avait été témoin.

 

 

[24]      Le défendeur affirme qu'il incombe aux demandeurs de démontrer que la police ne voulait pas intervenir. Les demandeurs ne pouvaient se contenter d'affirmer qu'ils ne savaient pas si la police avait donné suite au signalement. Le défendeur soutient que, bien que les demandeurs affirment que la police aurait refusé d'agir en raison de la corruption, la Commission a écarté cet argument en citant des éléments de preuve documentaire suivant lesquels il existe des mécanismes permettant de porter plainte pour inconduite policière et qu'il existe aussi des recours adéquats en cas de violation.

 

[25]      Suivant le défendeur, il y a lieu à annulation de la décision lorsque l'absence d'enregistrement des témoignages rend impossible d'invoquer un moyen de révision que les demandeurs auraient autrement pu faire valoir que cette absence constitue, par conséquent, un déni de justice naturelle (voir l'arrêt Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S 793, aux paragraphes 81 à 83). Les demandeurs n'ont produit aucun affidavit pour préciser les éléments de la transcription qui auraient pu appuyer leurs allégations d'erreur justifiant l'annulation de la décision en question. Suivant le défendeur, les demandeurs n'ont par conséquent pas démontré que le fait que la transcription était incomplète avait entraîné un déni de justice naturelle.

 

[26]      Le défendeur affirme que la Commission n'a pas fondé sa décision sur la question de savoir si les demandeurs avaient signalé ou non à la police les menaces proférées par les narcotrafiquants. Même sans ce signalement, la Commission a quand même conclu que les demandeurs n'avaient pas réfuté la présomption relative à la protection de l'État. La Commission a conclu que le gouvernement du Costa Rica disposait des institutions politiques et judiciaires, de l’infrastructure ainsi que des institutions permettant de faire appliquer la loi et de protéger ses citoyens contre les criminels.

 

[27]      Le défendeur estime qu'il était raisonnable de la part de la Commission de conclure que les demandeurs ne s'étaient pas déchargés du fardeau qui leur incombait de présenter des éléments de preuve clairs et convaincants démontrant que le Costa Rica n'était pas en mesure de les protéger contre les éléments criminels qu'ils craignaient.

 

Analyse et décision

 

[28]      La décision que la Commission a rendue en l'espèce reposait sur la capacité de l'État à assurer la protection de ses citoyens. Or, la partie de la transcription portant sur la protection de l'État manque. Le demandeur principal n'avait pas encore fini son témoignage à la fin de la partie de la transcription qui a été communiquée. Dans sa décision, la Commission a qualifié le témoignage du demandeur principal d’« extrêmement vague ».

 

[29]      Dans l'arrêt Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S. 793, la juge L’Heureux Dubé expose, au paragraphe 81, le critère permettant de déterminer si l'absence de transcription viole les règles de justice naturelle :

En l'absence d'un droit à un enregistrement expressément reconnu par la loi, les cours de justice doivent déterminer si le dossier dont elles disposent leur permet de statuer convenablement sur la demande d'appel ou de révision. Si c'est le cas, l'absence d'une transcription ne violera pas les règles de justice naturelle. Cependant, lorsque la loi exige un enregistrement, la justice naturelle peut nécessiter la production d'une transcription. Étant donné que cet enregistrement n'a pas à être parfait pour garantir l'équité des délibérations, il faut, pour obtenir une nouvelle audience, montrer que certains défauts ou certaines omissions dans la transcription font surgir une « possibilité sérieuse » de négation d'un moyen d'appel ou de révision. Ces principes garantissent l'équité du processus administratif de prise de décision et s'accommodent d'une application souple dans le contexte administratif.

 

[30]      Dans le jugement Goodman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 185 F.T.R. 102 (C.F. 1re inst.), le juge Lemieux déclare ce qui suit, au paragraphe 75 :

Selon moi, en l'espèce, il faut prendre en compte les facteurs suivants pour déterminer si les omissions dans la transcription de la procédure de la SSR équivalent à une possibilité sérieuse que M. Goodman soit privé d'un moyen de contrôle :

     (1)      Quels moyens de contrôle ont été invoqués?

     (2)      Quelle est l'importance des conclusions contestées relativement à la revendication du statut de réfugié de M. Goodman?

     (3)      Quel est le fondement des conclusions et constatations de la SSR, et j'entends par là : « Est-ce que la SSR a fondé ses conclusions sur des constatations relatives à la crédibilité, ou sur des conclusions de fait ou sur l'interprétation d'une disposition législative? » 

     (4)      Sur quoi portait la partie de l'audience dont la transcription est manquante (s'agissait-il d'un témoignage direct ou d'un contre-interrogatoire ou, comme dans l'affaire Hayes, précitée, de conversations entre le juge du procès et les avocats ainsi que de l'exposé du juge au jury) et quelle était l'importance de l'omission dans la transcription relativement aux conclusions contestées, c'est-à-dire, la pertinence de l'objet ou de la teneur de la partie manquante de la transcription et la mesure dans laquelle le tribunal s'est appuyé sur elle?

     (5)      Quel autre moyen le tribunal a-t-il pris pour remédier à l'omission?

     (6)      De quels autres moyens la Cour disposait-elle pour déterminer ce qui s'est passé à l'audition?

 

[31]      Appliquant ces règles de droit au cas qui nous occupe, je suis d'avis que l'absence de transcription intégrale constitue un déni de justice naturelle. Je ne suis pas en mesure d'apprécier les éléments de preuve présentés par le demandeur sur la capacité de l'État à assurer la protection de ses citoyens et je ne dispose pas du procès-verbal intégral des débats.

 

[32]      La demande de contrôle judiciaire est par conséquent accueillie et l'affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu'il rende une nouvelle décision.

 

[33]      Vu ma conclusion sur la première question, je n'aborderai pas l'autre question.

 

[34]      Aucune des parties ne souhaite soumettre à mon examen une question grave de portée générale à certifier.

JUGEMENT

 

[35]      LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que l'affaire soit renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu'il rende une nouvelle décision.

 

 

    « John A. O’Keefe »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


ANNEXE

 

 

Dispositions législatives applicables

 

 

            L'alinéa 95(1)b) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR) définit l'asile comme la protection conférée à toute personne à qui la Commission reconnaît la qualité de réfugié ou celle de personne à protéger.

 

95. (1) L'asile est la protection conférée à toute personne dès lors que, selon le cas :

 

[. . .]

 

b) la Commission lui reconnaît la qualité de réfugié ou celle de personne à protéger;

95. (1) Refugee protection is conferred on a person when

 

 

. . .

 

(b) the Board determines the person to be a Convention refugee or a person in need of protection; or

 

 

            L'article 96 et le paragraphe 97(1) de la LIPR définissent comme suit le « réfugié au sens de la Convention » et la « personne à protéger » :

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n'a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s'il y a des motifs sérieux de le croire, d'être soumise à la torture au sens de l'article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d'autres personnes originaires de ce pays ou qui s'y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l'incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.


 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1930-05

 

INTITULÉ :                                       ARROYO BENAVIDES, LIMAN ALTAMIRANO

                                                            CARRASCO, LIZETTE, &

                                                            ARROYO ALTAMIRANO, KIMBERLY J.

                                                            et

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               LE 2 FÉVRIER 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 14 MARS 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jeinis S. Patel

 

POUR LES DEMANDEURS

Sally Thomas

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jeinis S. Patel

Toronto (Ontario)

 

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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