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Date : 20060331

Dossier : IMM-6688-04

Référence : 2006 CF 417

Ottawa (Ontario), le 31 mars 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’REILLY

 

 

ENTRE :

AHED AHMED SALEH AL-BAHRI

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               M. Ahed Ahmed Saleh Al-Bahri a déposé une demande d’asile au Canada, déclarant qu’il craignait des représailles de la part des frères de sa petite amie, en Jordanie. Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande de M. Al-Bahri en raison d’un manque de preuves crédibles. M. Al-Bahri allègue que la Commission a commis une erreur dans le traitement de la preuve et l’a privé d’une possibilité raisonnable de présenter sa preuve. Il me demande d’ordonner la tenue d’une nouvelle audience devant un tribunal différemment constitué.

[2]               Je ne vois aucune raison d’annuler la décision de la Commission et je devrai, par conséquent, rejeter la demande de contrôle judiciaire.

 

I.  Les questions en litige

 

1.         La Commission a-t-elle traité M. Al-Bahri de façon injuste en tenant l’audience en l’absence de son avocat?

 

2.         La Commission a-t-elle mal interprété la preuve qui lui a été présentée?

 

3.         La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant une conclusion défavorable au sujet du fait que M. Al-Bahri avait tardé à déposer sa demande d’asile?

 

II.  Analyse

 

[3]               Je ne peux annuler la décision de la Commission que si elle n’était pas fondée sur la preuve ou si la Commission a injustement traité M. Al-Bahri.

 

A.  La Commission a-t-elle traité M. Al-Bahri de façon injuste en tenant l’audience en l’absence de son avocat?

[4]               M. Al-Bahri n’était pas représenté par un avocat à l’audience. Il allègue que ceci l’a empêché de présenter sa preuve de façon pleine et entière. Plus particulièrement, il soutient qu’il n’a pas pu présenter à la Commission une preuve corroborante, qu’il possède maintenant.

 

[5]               Rien au dossier n’indique que M. Al-Bahri ait demandé un ajournement afin de se trouver un avocat. Le demandeur ne mentionne pas non plus une telle demande d’ajournement dans son affidavit. Par conséquent, il n’y a aucun fondement permettant de conclure que la Commission a traité M. Al-Bahri de façon injuste. Qu’il ait été représenté ou non, M. Al-Bahri devait persuader la Commission du mérite de sa demande. Il n’a obtenu la preuve corroborante qu’il souhaitait présenter à la Commission, soit une lettre d’une personne qui aurait été témoin de l’agression contre lui, qu’après que la Commission eut entendu l’affaire et qu’elle eut rendu sa décision. Il n’a donné aucune explication pour le temps qui s’est écoulé. M. Al-Bahri était au courant du fonctionnement du régime de protection des réfugiés du Canada, parce qu’il avait déjà déposé une demande d’asile en 1991. Dans ces conditions, je ne peux pas conclure que la Commission ait traité M. Al-Bahri de façon injuste.

 

B.  La Commission a-t-elle mal interprété la preuve qui lui a été présentée?

[6]               M. Al-Bahri a déclaré que les frères de sa petite amie l’ont agressé et menacé parce qu’il avait compromis l’honneur de leur famille. L’agression et les menaces auraient eu lieu après que M. Al-Bahri eut étreint et embrassé sa petite amie en public.

 

[7]               La Commission doutait du fait que M. Al-Bahri ait eu une relation sérieuse avec une femme en Jordanie. Elle a noté qu’il en savait très peu sur elle et qu’il ne s’était pas renseigné à son sujet depuis son arrivée au Canada. De plus, la Commission n’a pas cru que M. Al-Bahri avait été agressé. Il n’a pas présenté de preuve corroborante ni de rapport de la police.

 

[8]               De plus, la Commission n’était pas convaincue que le récit des faits de M. Al‑Bahri était plausible. Il n’y avait aucune preuve que sa petite amie appartenait à une famille conservatrice sur le plan religieux. Il n’y avait pas non plus de preuve que des représailles étaient exercées contre des hommes qui auraient compromis l’honneur d’une famille. Généralement, ce sont les femmes qui en subissent les conséquences.

 

[9]               Je ne peux pas conclure que la décision de la Commission allait à l’encontre de la preuve dont elle disposait.

 

C.  La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant une conclusion défavorable au sujet du fait que M. Al-Bahri avait tardé à déposer sa demande d’asile?

[10]           La Commission a noté que M. Al-Bahri était resté un mois aux États-Unis avant de venir au Canada et qu’il n’y avait pas déposé de demande d’asile. De plus, M. Al-Bahri n’avait déposé sa demande au Canada que trois semaines après son arrivée.

 

[11]           M. Al-Bahri soutient que la Commission aurait dû comprendre qu’une personne venant du Moyen-Orient ne pouvait pas obtenir l’asile aux États-Unis pendant la période précédant l’invasion de l’Iraq. Il ajoute que la Commission n’a pas tenu compte de sa justification pour son retard à demander l’asile au Canada. Il a expliqué que ce retard était attribuable à son consultant en immigration, et non à l’absence d’une réelle crainte de retourner en Jordanie.

 

[12]           La Commission a le droit de prendre en compte le comportement d’un demandeur d’asile, y compris le fait qu’il ait tardé à déposer sa demande d’asile, et de se demander s’il est compatible avec une crainte subjective de persécution dans son pays d’origine. En l’espèce, la Commission avait déjà conclu que la version des faits de M. Al‑Bahri n’était pas crédible et elle a ajouté que son comportement ne correspondait pas à ses allégations d’être en danger imminent, en particulier parce que M. Al-Bahri savait comment déposer une demande d’asile, puisqu’il l’avait déjà fait auparavant.

 

[13]           Par conséquent, je ne peux pas conclure que la Commission ait mal traité la question du retard.

 

III.  Décision

[14]           La demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Aucune question de portée générale n'a été proposée par les parties et aucune ne sera énoncée.

 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que :

 

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée;
  2. Aucune question de portée générale n’est énoncée.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6688-04

 

INTITULÉ :                                       AL-BAHRI c. MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 18 janvier 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’REILLY

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 31 mars 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ahed Ahmed Saleh Al-Bahri

 

POUR SON PROPRE COMPTE

 

 

Claire Le Riche

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ahed Ahmed Saleh Al-Bahri

 

POUR SON PROPRE COMPTE

 

 

John H. Sims, c.r.

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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