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Date : 20051124

Dossier : IMM-286-05

Référence : 2005 CF 1593

Toronto (Ontario), le 24 novembre 2005

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE JOHN A. O'KEEFE

ENTRE :

ALEJANDRO FLORES MONTERO

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision, datée du 17 décembre 2004, par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention ou une personne à protéger.

[2]                Le demandeur sollicite une ordonnance annulant la décision de la Commission et renvoyant l'affaire à la Commission afin qu'une formation différemment constituée rende une nouvelle décision.

Le contexte

[3]                Alejandro Flores Montero (le demandeur) est citoyen du Mexique. Il prétendait que, en tant que membre du parti Frente Cardenista de Reconstrucion Nacional (le parti Cardenista), il livrait des articles de charité aux habitants du Chiapas, ce qui a fait en sorte que des agents fédéraux au Mexique l'ont soupçonné de fournir des armes aux zapatistes.

[4]                Le demandeur a allégué les faits ci-après exposés dans la portion narrative de son formulaire sur les renseignements personnels (FRP). En 1994, le demandeur a joint le parti Cardenista, qui est l'un des plus petits partis d'opposition au Mexique. Le parti Cardenista recueillait de l'argent, des vêtements, de la nourriture et des jouets pour les donner aux habitants de la province du Chiapas.

[5]                Le 18 mars 2000, le demandeur et un autre membre du parti, Virgilio Sanchez (Sanchez), ont quitté Mexico dans le camion de Sanchez pour livrer au Chiapas des biens donnés. Ils sont arrivés le lendemain à Tuxtla Gutierrez, au Chiapas. Ils étaient dans un restaurant lorsque cinq agents fédéraux sont entrés et ont exigé qu'on leur dise qui était le propriétaire du camion stationné à l'extérieur. Les agents ont fait monter de force le demandeur et Sanchez dans un véhicule, les ont conduits dans un entrepôt et les ont placés dans des pièces séparées. Les agents ont battu et interrogé le demandeur et l'ont accusé d'apporter des armes à l'armée zapatiste de libération nationale (EZLN). Le demandeur a nié ces accusations et a expliqué qu'ils apportaient des articles de charité aux habitants du Chiapas. Sanchez a également été battu.

[6]                Les deux hommes ont été libérés le lendemain parce que les agents fédéraux n'ont pas trouvé d'armes dans le camion. Ils sont retournés à Mexico le 20 mars 2000. Le demandeur a consulté un médecin privé pour soigner les blessures subies en raison des coups reçus. Il s'est de plus rendu au bureau du parti Cardenista pour signaler l'incident et le coordonnateur de la direction du parti Cardenista lui a conseillé de déposer un rapport auprès du ministère public à Mexico. Le ministère public n'a pas enregistré la plainte du demandeur étant donné que l'incident s'était produit hors de sa juridiction. On lui a dit qu'il devrait faire un rapport à Tuxtla Gutierrez. Cependant, il avait trop peur de retourner au Chiapas pour y faire un rapport.

[7]                Le 8 mai 2000, le demandeur a été enlevé par des hommes dans un véhicule de couleur foncée avec des vitres tintées dans lequel il a été battu et accusé d'apporter une autre cargaison d'armes au Chiapas. Il s'est débattu, a donné des coups de pied et a mordu les hommes, et lorsque le véhicule s'est arrêté à un feu rouge, il a ouvert la portière du véhicule, a sauté du véhicule et il s'est enfui dans la foule pendant que les hommes tiraient sur lui avec une arme de poing. Après cet incident, le demandeur a déménagé avec son épouse et ses enfants à Cuernavaca où ils ont habité chez sa tante et il vendait des articles de ménage au marché.

[8]                En juin 2000, le demandeur a remarqué qu'il était surveillé par les occupants d'un véhicule stationné et il a reconnu l'un des hommes qui l'avaient enlevé. Les hommes l'ont poursuivi, mais il a réussi à s'échapper. Au cours du même après-midi, il a déménagé avec sa famille à Ecatepec où ils ont vécu avec son beau-frère.

[9]                Deux semaines plus tard, le père du demandeur lui a téléphoné pour lui dire que les agents fédéraux étaient à sa recherche. Suivant le conseil de son père, le demandeur a quitté le Mexique le 8 octobre 2000 avec son épouse et ses enfants, et ils sont arrivés à Toronto le même jour.

[10]            Le demandeur a présenté une demande d'asile le 2 novembre 2000. Sa demande a été entendue le 12 décembre 2003 et le 11 mars 2004. La Commission a rejeté sa demande par une décision datée du 17 décembre 2004. La présente demande est le contrôle judiciaire de cette décision.

Les motifs de la Commission

[11]            La Commission a accepté l'identité personnelle et nationale du demandeur. Toutefois, la Commission a tiré plusieurs conclusions quant à la crédibilité défavorables à l'égard de la crainte du demandeur d'être persécuté par des agents fédéraux au Mexique.

[12]            Premièrement, le demandeur alléguait dans son FRP qu'il était membre du parti Cardenista, mais dans un formulaire de demande d'asile, il a déclaré ce qui suit : [traduction] « Je n'ai jamais été membre d'une organisation » . Lors de l'audience, lorsqu'on a questionné le demandeur à l'égard de cette déclaration, il a expliqué qu'il ne parlait pas anglais. Il a expliqué que l'interprète lui avait demandé s'il était membre d'un syndicat et qu'il avait répondu qu'il ne l'était pas. La Commission n'a pas accepté cette explication. La Commission a mentionné que le formulaire de demande rempli avait été communiqué à l'avocat longtemps avant l'audience et que le demandeur n'avait pas contesté l'exactitude des renseignements jusqu'à ce que la contradiction lui soit signalée lors de l'audience.

[13]            Deuxièmement, la Commission estimait peu vraisemblable que les agents fédéraux s'intéressent encore au demandeur étant donné qu'ils l'avaient libéré en mars 2000 après qu'ils n'eurent trouvé aucune arme dans le camion. La Commission a mentionné que le demandeur était simplement un chauffeur de camion bénévole pour le parti Cardenista, non un militant politique très en vue ayant un dossier d'activités contre le gouvernement. La preuve documentaire énonçait qu'on n'avait pas pu trouver de signalement de cas où les autorités fédérales avaient arrêté des gens à l'extérieur du Chiapas en raison de leur appui aux zapatistes dans le passé.

[14]            Troisièmement, la Commission estimait peu vraisemblable que le demandeur ait été enlevé dans un véhicule le 8 mai 2000, et battu par des agents fédéraux armés, et que malgré cela ces agents aient été incompétents et mal préparés au point de le laisser s'échapper si facilement. La Commission a déclaré ce qui suit à la page sept de ses motifs :

Seul, battu, en désavantage numérique et non armé, le demandeur d'asile a lutté contre les agents fédéraux en leur donnant des coups de pied et en les mordant pendant qu'il était tenu en otage dans leur véhicule; pourtant, il a réussi à échapper à ses assaillants. Le tribunal trouve ce récit peu crédible. Il était facile pour eux de l'abattre sur-le-champ.

[15]            Quatrièmement, la Commission a souligné que le demandeur avait omis de mentionner dans son FRP des renseignements importants à l'égard de la surveillance des membres de sa famille exercée par les agents fédéraux au Mexique. Le demandeur a témoigné lors de l'audience qu'il craignait d'être persécuté par les agents fédéraux parce qu'ils continuaient à rendre visite à son père, sa tante et son beau-frère, à les menacer et à les surveiller après qu'il eut quitté le pays. Lorsque la Commission a demandé au demandeur lors de l'audience pourquoi ces renseignements n'étaient pas inclus dans son FRP qu'il avait signé le 18 décembre 2001, le demandeur a expliqué qu'il s'était concentré principalement sur le problème qu'il avait à ce moment et sur les questions posées par le service de l'Aide juridique. La Commission n'a pas accepté cette explication. La Commission estimait que les prétendues visites et menaces faites aux parents du demandeur au Mexique étaient des événements importants qui l'avaient amené à solliciter une protection. Par conséquent, il aurait dû fournir ces renseignements lors de l'entrevue avec l'agent d'immigration ou les inclure dans son FRP ou dans la modification subséquente du document que la Commission a reçue le 28 novembre 2003. De plus, la Commission a mentionné que les lettres de recommandation de ses parents ne mentionnaient pas que leurs maisons faisaient l'objet de surveillance ou que les agents fédéraux leur rendaient visite. La Commission avait de sérieuses préoccupations à l'égard de cette omission de renseignements et elle a conclu que cette omission viciait la crédibilité de la preuve du demandeur.

[16]            Finalement, la Commission estimait qu'il y avait quant au demandeur un manque général de crédibilité qui s'étendait au reste de la preuve provenant de son témoignage. Ainsi, la Commission n'a accordé aucune importance aux lettres de recommandation de ses parents qui confirmaient qu'il avait vécu chez eux à certaines périodes. De plus, la Commission n'a accordé aucune importance au certificat de membre du parti Cardenista du demandeur ou à son certificat médical daté du 20 mars 2000.

[17]            Par conséquent, la Commission a conclu que le demandeur n'avait pas raison de craindre d'être persécuté s'il retournait au Mexique. La Commission a en outre conclu qu'il n'était pas une personne à protéger, étant donné qu'il n'existait pas de motifs importants qui indiquaient qu'il serait exposé à la torture, à une menace à sa vie ou à un risque de traitements ou peines cruels et inusités s'il retournait au Mexique.

La question en litige

[18]            Le demandeur a soulevé la question suivante :

            La conclusion du manque de crédibilité du demandeur tirée par la Commission est-elle abusive ou arbitraire ou a-t-elle été tirée sans tenir compte des éléments dont elle disposait.

Les prétentions du demandeur

[19]            Le demandeur prétendait que la Commission, lorsqu'elle s'est fondée sur la déclaration contradictoire contenue sur un formulaire de demande d'asile ([traduction] « Je n'ai jamais été membre d'une organisation » ), a tiré une conclusion abusive lorsqu'elle a décidé que les allégations du demandeur relatives aux événements n'étaient que des inventions. Le demandeur prétendait qu'il n'était pas logique que la Commission rejette son explication selon laquelle l'interprète lui avait demandé s'il était membre d'un syndicat. Le demandeur prétendait que cette explication était appuyée par les déclarations écrites sur le formulaire qui donnaient à penser que l'interprète avait des difficultés avec la langue anglaise. Elle avait écrit des phrases grammaticalement incorrectes en anglais, comme : « I was charge for my wife with assault offence » ([traduction] « J'ai été accusé pour ma femme d'agression » ), et elle avait épelé erronément à deux reprises le mot anglais « unemployed » .

[20]            Le demandeur prétendait que la conclusion précédemment énoncée entachait le reste de l'évaluation faite par la Commission à l'égard de sa crédibilité. Par conséquent, la Commission n'a pas accordé d'importance aux lettres de recommandation de ses parents, à son certificat de membre du parti Cardenista ou à son certificat médical.

[21]            Le demandeur prétendait que la conclusion de la Commission selon laquelle les agents fédéraux ne s'intéressaient plus au demandeur avait été tirée en faisant un examen sélectif de la preuve documentaire. Le demandeur prétendait que la Commission disposait de preuve documentaire sur le conflit continu et sur l'augmentation d'activités militaires et paramilitaires au Chiapas, qui maintiendrait un intérêt à l'endroit de ceux qui, à l'instar du demandeur, sont perçus par les agents fédéraux comme des individus qui fournissent des armes aux zapatistes au Chiapas. Par conséquent, le demandeur prétendait que la Commission a commis une erreur importante en concluant qu'il n'y avait pas de preuve objective démontrant que la vie du demandeur serait menacée.

[22]            Le demandeur prétendait qu'il était manifestement déraisonnable pour la Commission de ne pas croire à l'enlèvement du 8 mai 2000. Bien que, lors de l'audience, on ait posé au demandeur des questions à l'égard de certains aspects de l'incident, on ne lui a pas dit qu'il était peu vraisemblable que les agents fédéraux aient été incompétents ou mal préparés au point de le laisser s'échapper.

Les prétentions du défendeur

[23]            Le défendeur prétendait que les conclusions quant à la crédibilité tirées par la Commission ne peuvent être annulées que si elles sont manifestement déraisonnables.

[24]            Le défendeur prétendait que la Commission peut tirer une inférence défavorable d'incohérences entre les déclarations faites au point d'entrée et le contenu d'un témoignage subséquent (voir la décision Mongu c. Canada (Solliciteur général) (1994), 86 F.T.R. 59, [1994] A.C.F. no 1526 (1re inst.)). De plus, la Commission peut vérifier la crédibilité du demandeur en comparant le FRP avec le témoignage de vive voix (voir la décision Basseghi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 1867 (1re inst.) (QL)).

[25]            Le défendeur prétendait que la Commission doit pouvoir appliquer sa compréhension du comportement humain lorsqu'elle établit si le récit du demandeur est vraisemblable (voir la décision Gonzalez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 805, au paragraphe 27 (1re inst.) (QL)). Le défendeur prétendait qu'il appartenait au demandeur de fournir des éléments de preuve dignes de foi et fiables au soutien du prétendu enlèvement du 8 mai 2000.

[26]            Le défendeur prétendait que le critère à l'égard du statut de réfugié au sens de la Convention exige une preuve de l'éventuel risque de persécution si le demandeur retourne dans son pays de nationalité (voir l'arrêt Mileva c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1991] 3 C.F. 398, à la page 404 (C.A.)). Par conséquent, la Commission n'a pas commis d'erreur lorsqu'elle a pris en compte l'omission dans la preuve du demandeur de la prétendue surveillance continue de ses parents.

[27]            Le défendeur prétendait que la Commission peut se fonder sur de la preuve documentaire objective à l'égard du pays de préférence au témoignage fourni par le demandeur (voir l'arrêt Zhou c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 1087 (C.A.) (QL)).

[28]            Le défendeur prétendait que la Commission a pris en compte l'ensemble de la preuve et qu'elle n'a tiré aucune conclusion de fait manifestement déraisonnable. La Commission n'a par conséquent commis aucune erreur dans son appréciation de la preuve.

Les dispositions pertinentes de la loi

[29]            L'alinéa 95(1)b) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, prévoit que l'asile est la protection conférée à toute personne lorsque la Commission lui reconnaît la qualité de réfugié ou celle de personne à protéger.

95. (1) L'asile est la protection conférée à toute personne dès lors que, selon le cas :

95. (1) Refugee protection is conferred on a person when

[...]

. . .

b) la Commission lui reconnaît la qualité de réfugié ou celle de personne à protéger; [...]

(b) the Board determines the person to be a Convention refugee or a person in need of protection; or . . .

[30]            L'article 96 et le paragraphe 97(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés définissent les expressions « réfugié au sens de la Convention » et « personne à protéger » comme suit :

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention - le réfugié - la personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

b) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n'a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

a) soit au risque, s'il y a des motifs sérieux de le croire, d'être soumise à la torture au sens de l'article premier de la Convention contre la torture;

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d'autres personnes originaires de ce pays ou qui s'y trouvent ne le sont généralement pas,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes - sauf celles infligées au mépris des normes internationales - et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l'incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

La norme de contrôle

[31]            Les conclusions quant à la crédibilité tirées par la Commission font l'objet d'un contrôle suivant la norme de la décision manifestement déraisonnable. Elles ne peuvent être annulées que si elles ont été tirées de manière abusive ou arbitraire ou si elles sont fondées sur des conclusions de fait erronées (voir la décision Sivanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CFPI 500, au paragraphe 13, et la décision Anthonimuthu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 141, au paragraphe 45).

Analyse et décision

[32]            La Commission a conclu que le demandeur n'était pas digne de foi pour de nombreux motifs, mais le principal motif semblait être la différence entre les déclarations contenues dans un formulaire d'immigration et une autre preuve présentée dans son FRP et lors de l'audience. Dans le formulaire d'immigration, qui a été rempli avec l'aide d'une interprète, les renseignements suivants ont été fournis :

[traduction]

Énumérez toute organisation de laquelle, depuis votre 18e anniversaire de naissance, vous avez été (ou êtes encore) membre ou à laquelle vous avez été associé ou que vous avez appuyée, y compris des organisations politiques, sociales, de jeunes, étudiantes ou professionnelles. Si vous n'avez jamais été membre d'une organisation, ou n'avez jamais été associé à une organisation, écrivez : « JE N'AI JAMAIS ÉTÉ MEMBRE D'UNE ORGANISATION » .

RÉPONSE :             Je n'ai jamais été membre d'une organisation.

[33]            Le demandeur dans un autre document présenté en preuve a déclaré qu'il faisait l'objet de persécution parce qu'il était membre du parti Cardenista et qu'il était soupçonné de livrer des armes aux zapatistes au Chiapas.

[34]            Lors de l'audience, on a posé au demandeur des questions à l'égard de sa réponse établissant qu'il n'était pas membre d'une organisation. L'échange suivant se trouve aux pages 46 et 47 de la transcription :

[traduction]

Q :            Très bien donc. Alors, Monsieur, pouvez-vous clarifier cette déclaration à l'Immigration : [traduction] « Je n'ai jamais été membre d'une organisation » ?

R :            Oui. Lorsque je suis allé à l'Immigration avec l'interprète, je ne parlais pas anglais. Je ne comprenais pas. Je ne pouvais rien lire. Mon interprète m'a demandé si j'avais été membre d'un syndicat. Un syndicat est très différent d'être membre d'un parti. Et c'est ce qu'il m'a demandé et c'est pourquoi j'ai répondu « non » .

[35]            La Commission n'a pas accepté cette explication parce que le demandeur avait reçu le document contenant la réponse longtemps avant l'audience et il n'a pas indiqué à qui que ce soit que les renseignements étaient incorrects jusqu'à ce qu'on le questionne à cet égard lors de l'audience. À mon avis, la conclusion de la Commission sur ce point n'était pas manifestement déraisonnable. De plus, je mentionnerais que la réponse inscrite sur le formulaire d'immigration selon laquelle le demandeur n'a jamais été membre d'une organisation ne semblerait pas être une réponse à la question [traduction] « Avez-vous été membre d'un syndicat? » .

[36]            La Commission a ensuite déclaré ce qui suit à la page six de sa décision :

La déclaration du demandeur d'asile selon laquelle il n'a jamais appartenu à une organisation est très significative parce que s'il n'a jamais appartenu à une organisation, alors sa prétendue appartenance au Partido Frente Cardenista de Reconstucion Nacional et sa prétendue persécution par des agents fédéraux à la suite de la livraison des articles donnés par le Parti à la population du Chiapas sont de simples inventions de sa part pour étayer sa demande d'asile. Dans Neame, la Cour a confirmé une décision de la SSR, qui a conclu que la demandeure d'asile manquait de crédibilité, uniquement sur une contradiction entre son FRP et les notes du PDE.

[37]            Je suis d'avis que la conclusion de la Commission, ci-dessus, n'était pas manifestement déraisonnable.

[38]            La Commission a en outre estimé qu'il était peu vraisemblable que le demandeur ait pu s'échapper des hommes (au moins un de ces hommes étant armé) qui l'avaient enlevé en mai 2000. Il s'agit d'une conclusion que la Commission pouvait tirer. Cette conclusion n'était pas manifestement déraisonnable.

[39]            La Commission a en outre estimé qu'il était peu vraisemblable que les agents fédéraux s'intéressent encore au demandeur alors qu'ils n'avaient trouvé aucune arme lorsqu'ils ont fouillé le camion de son ami en mars 2000. Compte tenu du fait que le demandeur n'était qu'un bénévole du parti Cardenista, je ne suis pas d'avis que cette conclusion quant à la vraisemblance tirée par la Commission est manifestement déraisonnable.

[40]            Les conclusions quant à la crédibilité tirées par la Commission déjà mentionnées sont suffisantes pour conclure que le récit du demandeur n'était pas digne de foi. Par conséquent, je n'ai pas l'intention de traiter de l'omission dans le FRP et des lettres de la famille à l'égard des menaces de violence et de la surveillance continues.

[41]            La demande de contrôle judiciaire est par conséquent rejetée.

[42]            Aucune des parties ne souhaitait me soumettre pour examen aux fins de la certification une question grave de portée générale.

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

« John A. O'Keefe »

Juge

Traduction certifiée conforme

Danièle Laberge, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-286-05

INTITULÉ :                                        ALEJANDRO FLORES MONTERO

demandeur

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

                                                            DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                  TORONTO (ONTARIO)

DATE DE L'AUDIENCE :                LE 27 OCTOBRE 2005

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                        LE JUGE O'KEEFE

DATE DES MOTIFS :                       LE 24 NOVEMBRE 2005

COMPARUTIONS :

Neil Cohen                                                                                POUR LE DEMANDEUR

Allison Phillips                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Neil Cohen

Toronto (Ontario)                                                                      POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada                                            POUR LE DÉFENDEUR

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