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Date : 20041115

Dossier : T-1805-98

Référence : 2004 CF 1600

Ottawa (Ontario), le 15 novembre 2004

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE HENEGHAN                                     

ENTRE :                                                        

              RÉVÉREND FRÈRE WALTER A. TUCKER et

                                   RÉVÉREND FRÈRE MICHAEL J. BALDASARO

demandeurs

                                                                             et

                                                        SA MAJESTÉ LA REINE

                                                                                                                                      défenderesse

                                MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

INTRODUCTION

[1]                Le révérend frère Walter A. Tucker (demandeur) est l'un des demandeurs dans la présente action. Il sollicite un ajournement du procès devant commencer à Hamilton (Ontario) le lundi 29 novembre 2004.


PRÉTENTIONS

[2]                Le demandeur fait valoir qu'un ajournement est nécessaire parce qu'il doit attendre le prononcé de la décision de la Cour d'appel fédérale relativement à une demande pendante devant cette même instance, et visant à obtenir une prorogation du délai imparti pour déposer un avis d'appel concernant l'ordonnance rendue par le juge Gibson le 29 avril 2003, laquelle a rejeté sa demande à l'encontre de la validité constitutionnelle des interdictions de trafic de marijuana prévues par la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, L.C. 1996, ch. 19, modifiée.

[3]                Sa Majesté la Reine (la défenderesse) conteste la présente requête en ajournement. Elle plaide que la requête est prématurée étant donné que la Cour d'appel fédérale n'a pas encore tranché la requête en prorogation du délai pour interjeter appel de l'ordonnance du juge Gibson. De plus, elle avance que la Cour n'a pas été adéquatement saisie de la preuve par affidavit présentée au soutien de la présente requête en « ajournement » puisqu'il n'y a pas de preuve que l'affidavit a été reçu par une personne autorisée à attester des affidavits en Ontario. De la même façon, la défenderesse allègue qu'elle est prête à procéder, et qu'elle subirait un préjudice si le procès était ajourné. Il n'y a pas de preuve que les demandeurs subiraient un préjudice si le procès n'a pas lieu comme prévu.


EXAMEN

[4]                L'article 36 des Règles de la Cour fédérale (1998), DORS/98-106, modifiées (les Règles), qui régit les ajournements, est ainsi rédigé :


36. (1) La Cour peut ajourner une audience selon les modalités qu'elle juge équitables.

(2) Lorsqu'une audience est ajournée pour reprendre à une date déterminée, toutes les parties qui ont comparu à l'audience sont réputées en avoir été avisées.

(3) Nul n'est tenu de donner avis de l'ajournement d'une audience à une partie qui n'a pas comparu à celle-ci.                                                   

36. (1) A hearing may be adjourned by the Court from time to time on such terms as the Court considers just.

(2) Where a hearing is adjourned to a fixed day, a party who appeared at the hearing is deemed to have had notice of the adjournment.

(3) Where a party has failed to appear at a hearing, that party need not be served with notice of an adjournment of the hearing.


[5]                Quelques facteurs entrent en ligne de compte lorsque la cour examine une demande d'ajournement. Premièrement, il y a la question du préjudice causé à l'une ou plusieurs des parties; voir Martin c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1999), 162 F.T.R. 127 (1re inst.). Deuxièmement, il faut tenir compte de la question du préjudice causé à la cour vu la perte du temps autrement dévolu à l'audience; voir Ismail c. Canada (Procureur général) (1999), 177 F.T.R. 156 (C.F. 1re inst.). Un troisième facteur veut qu'il soit dans l'intérêt public d'arriver à une conclusion diligente du litige et de faire une utilisation rationnelle des ressources judiciaires; voir Markestyn c. Canada, [2001] 1 C.F. 345.


[6]                Par ailleurs, la question de l'ajournement pour permettre la tenue d'une audience à une certaine date a été étudiée par l'ancien juge en chef adjoint Jerome dans une directive de pratique datée du 17 février 1993. Selon cette directive, un ajournement ne sera accordé qu'en présence de circonstances exceptionnelles.

[7]                En l'espèce, je ne suis pas convaincue que le demandeur ait établi l'existence de « circonstances exceptionnelles » justifiant l'ajournement du procès. Il n'est pas nécessaire que je me prononce sur la question du caractère approprié de l'affidavit et sur le statut du révérend frère Michael J. Baldasaro en tant que commissaire à l'assermentation ou à tout autre titre dans la province d'Ontario. La question à trancher n'a rien à voir avec le statut du révérend, et la preuve au procès sera présentée par l'intermédiaire de témoins entendus à l'audience, et non par voie d'affidavits.

[8]                La requête pendante devant la Cour d'appel fédérale n'est pas déterminante quant à la question soulevée par la présente requête en ajournement. Si la Cour d'appel fédérale accorde la prorogation de délai sollicitée par le demandeur pour interjeter appel de l'ordonnance du juge Gibson en date du 29 août 2003, le demandeur pourra poursuivre cet appel s'il le désire.

[9]                Je précise par ailleurs que le demandeur a toute liberté pour contester la constitutionnalité de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances, précitée, dans toute instance criminelle dont il pourrait faire l'objet sous le régime de cette loi. Toutefois, puisqu'il a choisi de contester certaines dispositions de cette loi en entamant une action devant la Cour, il doit être prêt à procéder en justice quant à cette contestation au moment et à l'endroit fixés par la Cour.


[10]            La Cour siège selon un rôle préétabli. La présente action a commencé le 16 septembre 1998 par le dépôt de la déclaration du demandeur, et il est temps que l'affaire procède en justice sur la question qui reste en litige, suivant la requête de la défenderesse en jugement sommaire.

[11]            Considérant la preuve présentée et les arguments des parties, je rejette la requête du demandeur en ajournement.

[12]            Le procès commencera à Hamilton (Ontario) le lundi 29 novembre 2004 à 9 h 30. Si le demandeur souhaite régler l'affaire, il peut en discuter avec l'avocat de la défenderesse.

[13]            La défenderesse a réclamé les dépens, payables sans délai, vu qu'elle a dû répondre à la présente requête alors qu'elle était occupée à préparer le procès. À mon avis, il s'agit d'une raison valable pour solliciter des dépens.

[14]            En exerçant mon pouvoir discrétionnaire suivant les Règles, j'adjuge des dépens pour un montant de 1 000 $ en faveur de la défenderesse, somme incluant la TPS et les débours, le tout à être versé quelque soit l'issue de l'affaire. Toutefois, ces dépens ne sont pas payables immédiatement.


                                                                ORDONNANCE

La requête du demandeur en ajournement du procès devant commencer à Hamilton (Ontario) le lundi 29 novembre 2004 est rejetée avec dépens en faveur de la défenderesse pour un montant de 1 000 $, somme incluant la TPS et les débours, le tout à être versé quelque soit l'issue de l'affaire.

                                                                                                                                « E. Heneghan »                 

                                                                                                                                                    Juge                             

Traduction certifiée conforme

Evelyne Côté


                                                             COUR FÉDÉRALE

                                              AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                            T-1805-98

INTITULÉ :                                           Révérend frère Walter A. Tucker et al c. Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                     Ottawa (Ontario)       

DATE DE L'AUDIENCE :                   12 novembre 2004

MOTIFS DE L'ORDONNANCE :     Madame la juge Heneghan

DATE DES MOTIFS :                          15 novembre 2004

COMPARUTIONS :

Révérend frère Walter Tucker

Révérend frère Michael Baldasaro

POUR LE DEMANDEUR / REQUÉRANT

James Gorham

POUR LA DÉFENDERESSE / INTIMÉE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Hamilton (Ontario)     

POUR LE DEMANDEUR / REQUÉRANT

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE / INTIMÉE


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