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Date : 20220204

Dossier : IMM-828-21

Référence : 2022 CF 138

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 4 février 2022

En présence de madame la juge Aylen

ENTRE :

LIQING QIU

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] La demanderesse conteste une décision défavorable datée du 22 janvier 2021 par laquelle un agent principal [l’agent] a rejeté sa deuxième demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Cette demande avait été présentée au titre de l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

[2] La demanderesse affirme que l’agent : a) a commis une erreur en adoptant un raisonnement sans issue, car il s’est servi de facteurs favorables pour discréditer la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire; b) a commis une erreur en appliquant le critère des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées, plutôt qu'en suivant la démarche plus large et équitable établie par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61; c) a commis une erreur en ne tenant pas compte des difficultés associées à la pratique du Falun Gong par la demanderesse.

[3] Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

I. Le contexte

[4] La demanderesse est une citoyenne chinoise âgée de 35 ans. Elle a accumulé douze années de scolarité en Chine et détient un diplôme d’études secondaires. Elle affirme qu’en 2009, elle a distribué deux exemplaires de dépliants du Falun Gong à un ami et que la même journée, cet ami a été détenu par la police. La demanderesse s’est donc cachée. Selon ses dires, la police s’est ensuite mise à sa recherche.

[5] En janvier 2010, la demanderesse est venue au Canada et a présenté une demande d’asile, qui a finalement été rejetée en 2011. Elle a ensuite demandé l’autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire du rejet de sa demande d’asile, mais cette demande a également été rejetée. En février 2012, la demanderesse a obtenu un permis de travail. Elle a présenté sa première demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire en avril 2012, mais celle-ci a été rejetée en avril 2013. La demanderesse a demandé l’autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire du rejet de sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, autorisation qui lui a été refusée en septembre 2013.

[6] En mars 2019, la demanderesse a présenté sa deuxième demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire et a demandé à l’agent de tenir compte des facteurs suivants : a) son établissement au Canada; b) les difficultés, la discrimination et les risques auxquels elle serait confrontée en Chine en raison de sa pratique du Falun Gong; et c) les conditions défavorables en Chine.

II. La décision contestée

[7] Le 22 janvier 2021, l’agent a rejeté la deuxième demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire de la demanderesse. Il a examiné tour à tour chacun des facteurs qu’elle avait soulevés.

[8] En ce qui concerne l’établissement, l’agent a conclu que la demanderesse était au Canada depuis longtemps (11 ans); qu’elle travaillait pour son employeur actuel depuis 2018; qu’elle avait payé des impôts de 2010 à 2012, mais qu’il ne pouvait conclure qu’elle en payait actuellement puisqu’il ne disposait pas de suffisamment de documents à ce sujet, et qu’elle avait certaines économies. L’agent a ensuite accordé un certain poids favorable au fait que la demanderesse avait suivi des cours d’anglais langue seconde et de garde d’enfants pendant son séjour au Canada afin d’améliorer ses compétences en matière d’employabilité, et qu’elle faisait du bénévolat depuis 2018. Il a également accordé un certain poids favorable au fait qu’elle avait noué des amitiés au Canada et que ces amis la décrivent comme étant digne de confiance, gentille et travaillante. L’agent a souligné que, même si cela n’est pas une solution parfaite, la demanderesse pouvait tout de même conserver ces amitiés à l’étranger. Il a conclu que la demanderesse avait maintenu un dossier civil sans tache, mais a souligné que c’était ce que l’on attend de tous les Canadiens, résidents permanents et visiteurs au Canada.

[9] L’agent a poursuivi en concluant que la demanderesse entretenait toujours des liens familiaux étroits avec la Chine (ses parents et sa sœur y résident) et qu’elle y avait résidé pendant la majeure partie de sa jeunesse et de sa vie d’adulte. Bien que la demanderesse puisse éprouver des difficultés à se réadapter au début, l’agent a conclu que le soutien de sa famille l’aiderait à se réinsérer dans la société chinoise. De plus, compte tenu de la personnalité chaleureuse de la demanderesse, l’agent a conclu qu’il était raisonnable de conclure qu’elle pouvait obtenir des résultats semblables dans le pays où elle a passé la majeure partie de sa jeunesse et rétablir un cercle social en Chine, et qu’il y avait peu d’éléments de preuve laissant présager le contraire.

[10] Bien que la demanderesse ait affirmé qu’elle aurait des difficultés à se séparer de son petit ami (qui était au Canada grâce à un permis de travail), l’agent a conclu qu’il était plus probable qu’improbable que son petit ami retourne en Chine à l’expiration de son permis et qu’ils seraient ainsi réunis, car, au moment où la décision a été rendue, le permis de travail du petit ami était expiré et l’agent ne disposait d’aucune preuve démontrant qu’il avait fait des efforts pour le renouveler.

[11] En ce qui concerne l’établissement de la demanderesse, l’agent a conclu que, bien qu’un certain poids favorable y ait été accordé, il n’est pas rare que les demandeurs occupent un emploi, se fassent des amis et participent à des activités communautaires pendant leur séjour au Canada. Dans l’ensemble, l’agent n’était pas convaincu que le degré d’établissement de la demanderesse était plus grand que celui dont on pourrait s’attendre d’autres personnes qui sont au Canada depuis plus de 10 ans.

[12] En ce qui concerne le facteur de risque et de discrimination, l’agent a d’abord souligné qu’il ne pouvait pas tenir compte des facteurs énoncés aux articles 96 et 97 de la LIPR, mais qu’il devait plutôt tenir compte d’éléments liés aux difficultés auxquelles l’étranger fait face. Il a donc mentionné qu’il ne pouvait pas évaluer les facteurs de risque invoqués par la demanderesse concernant la persécution. Cependant, l’agent a déclaré qu’il tiendrait compte de l’adversité à laquelle la demanderesse pourrait être exposée si elle retournait en Chine afin de présenter une demande de résidence permanente à partir de ce pays.

[13] L’agent a examiné les observations présentées par la demanderesse et a conclu que peu d’éléments de preuve indépendants et corroborants avaient été présentés pour démontrer que : a) la demanderesse était recherchée par la police en Chine; b) la police cherchait à savoir où se trouvait la demanderesse quelque 10 ans et demi après l’incident, et c) la demanderesse serait, selon la prépondérance des probabilités, victime de discrimination ou de préjudice du fait qu’elle aurait pu distribuer deux dépliants du Falun Gong il y a plus de 10 ans. Bien qu’il ait reconnu que la demanderesse s’était jointe à un groupe de Falun Gong à Toronto et qu’elle continuait de pratiquer le Falun Gong au Canada, l’agent a conclu que peu d’éléments de preuve donnaient à penser que les autorités chinoises étaient au courant de la situation personnelle de la demanderesse ou que cette dernière était recherchée par les autorités en Chine. Compte tenu de l’insuffisance de la preuve, l’agent n’a pas été en mesure de conclure que la demanderesse serait confrontée à des difficultés en raison de son appartenance à un groupe de Falun Gong au Canada. Il a donc accordé peu de poids à ce facteur.

[14] Enfin, l’agent a répondu à l’affirmation de la demanderesse selon laquelle, si elle était forcée de quitter le Canada, elle serait confrontée à la difficulté de vivre séparément de son petit ami et de devoir recommencer à zéro. Dans son analyse, l’agent a mis en évidence ses conclusions antérieures concernant le petit ami de la demanderesse et sa capacité de se réinstaller en Chine avec l’aide de sa famille, soulignant que, dans tous les cas, le fait de devoir quitter le Canada entraînera inévitablement des difficultés.

III. Analyse

[15] Le paragraphe 25(1) de la LIPR confère au ministre le pouvoir discrétionnaire de dispenser les étrangers des exigences habituelles de la Loi et de leur accorder le statut de résident permanent au Canada, s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire justifient une telle dispense. L’examen des considérations d’ordre humanitaire sous le régime du paragraphe 25(1) de la LIPR est un examen global, dans le cadre duquel toutes les considérations pertinentes doivent être soupesées cumulativement pour établir si la dispense est justifiée dans les circonstances. Une dispense est considérée comme étant justifiée si les circonstances sont de nature à inciter tout homme raisonnable d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne [voir Kanthasamy, précité, aux para 13 et 28; Caleb c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1018 au para 10].

[16] L’octroi d’une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire est réputé être une mesure de nature exceptionnelle, qui « mérite donc une déférence considérable de la part de la Cour » [voir Qureshi c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2012 CF 335, au para 30]. Aucun « algorithme rigide » ne détermine l’issue [voir Sivalingam c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1185 au para 7].

[17] Dans le contexte des demandes fondées sur des considérations d’ordre humanitaire, il incombe au demandeur d’inclure les renseignements et les éléments de preuve pertinents à l’appui de ses observations. Le demandeur qui ne présente pas de preuve ou qui omet de produire des renseignements pertinents à l’appui de sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire le fait à ses risques et périls [voir Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189 aux para 35, 45 et 61; Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38 aux para 5, 8 et 9].

[18] La norme de contrôle applicable à la décision d’accorder ou non une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire est celle de la décision raisonnable [voir Kanthasamy, précité, au para 44]. Lorsqu’elle effectue un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, la cour de révision doit tenir compte du résultat de la décision administrative eu égard au raisonnement sous-jacent à celle-ci afin de s’assurer que la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée [voir Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 15].

[19] La seule question dont la Cour est saisie est celle de savoir si la décision de l’agent est raisonnable. Pour trancher cette question, il faut examiner les trois motifs de contrôle invoqués par la demanderesse.

A. L’agent a-t-il adopté un raisonnement sans issue?

[20] La demanderesse affirme que l’agent a adopté à tort un raisonnement sans issue dans son évaluation du facteur d’établissement lorsqu’il a reconnu que la demanderesse avait des antécédents professionnels favorables et qu’il l’a félicitée d’avoir suivi des cours d’anglais langue seconde et de garde d’enfants pour améliorer ses compétences professionnelles, mais qu’il a ensuite conclu que l’expérience de travail et la scolarité de la demanderesse au Canada pourraient l’aider à s’établir de nouveau en Chine. Elle soutient également que l’agent a commis une erreur semblable lorsqu’il a conclu que, grâce à sa personnalité chaleureuse (qui l’a aidée à s’établir et à s’intégrer au Canada), la demanderesse pourrait obtenir des résultats similaires en Chine et se bâtir un nouveau cercle social.

[21] Je suis d’accord avec la demanderesse pour dire que la Cour a conclu à maintes reprises qu’il est déraisonnable de dénaturer les facteurs favorables liés à l’établissement et de les faire jouer contre un demandeur, en s’en servant comme d’une épée plutôt que comme un bouclier [voir Alghanem c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 1137 au para 39; Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration Canada), 2019 CF 1633 au para 23]. Cependant, je ne suis pas convaincue que la demanderesse a démontré que c’est ce qui s’est produit en l’espèce.

[22] Un examen des motifs révèle que l’agent a attribué un certain poids favorable aux onze années que la demanderesse a passées au Canada, à son emploi, à ses modestes économies, à ses études pendant son séjour au Canada et à ses activités bénévoles. L’agent a également accordé un faible poids à ses relations au Canada et à son bon dossier civil.

[23] L’agent a ensuite procédé à un exercice de mise en balance, bien que sous la rubrique de l’établissement. Il a évalué les facteurs favorables mentionnés ci-dessus par rapport au fait que la demanderesse avait passé sa jeunesse en Chine, qu’elle y avait de la famille proche qui pourrait l’aider à se réinsérer dans la société chinoise et que sa personnalité chaleureuse (comme en attestent ses lettres de soutien) pouvait l’aider à se rebâtir un cercle social en Chine. Bien que l’on puisse normalement s’attendre à ce qu’un tel exercice de mise en balance soit effectué dans la dernière section des motifs où l’agent expose son appréciation globale des considérations d’ordre humanitaire, la Cour doit examiner les motifs de l’agent dans leur ensemble et les préoccupations relatives à la forme ne l’emportent pas sur le fond des motifs. Je conclus que l’agent n’a pas incorrectement utilisé les facteurs d’établissement favorables de la demanderesse contre elle. À cet égard, il faut se rappeler qu’il a accordé un poids favorable à son degré d’établissement. C’est plutôt lors du dernier exercice de mise en balance que l’agent a conclu que la demanderesse n’avait pas établi qu’il était justifié de lui accorder une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire.

[24] Par conséquent, je rejette l’affirmation de la demanderesse selon laquelle le raisonnement de l’agent constitue une erreur susceptible de contrôle.

B. L’agent a-t-il commis une erreur en appliquant le critère des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées?

[25] La demanderesse affirme que l’agent a commis une erreur en limitant son examen des considérations d’ordre humanitaire à une recherche de difficultés inhabituelles et démesurées et, ce faisant, il n’a pas suivi la démarche plus large et équitable établie dans l’arrêt Kanthasamy, où la Cour suprême du Canada a déclaré ce qui suit au paragraphe 33 :

L’expression « difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées » a donc vocation descriptive et ne crée pas, pour l’obtention d’une dispense, trois nouveaux seuils en sus de celui des considérations d’ordre humanitaire que prévoit déjà le par. 25(1). Par conséquent, ce que l’agent ne doit pas faire, dans un cas précis, c’est voir dans le par. 25(1) trois adjectifs à chacun desquels s’applique un seuil élevé et appliquer la notion de « difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées » d’une manière qui restreint sa faculté d’examiner et de soupeser toutes les considérations d’ordre humanitaire pertinentes. Les trois adjectifs doivent être considérés comme des éléments instructifs, mais non décisifs, qui permettent à la disposition de répondre avec plus de souplesse aux objectifs d’équité qui la sous‐tendent.

[26] La demanderesse affirme que, même s’il n’a pas eu tort de tenir compte de l’existence ou de l’absence de difficultés inhabituelles ou démesurées, l’agent a commis une erreur lorsqu’il a appliqué ce concept comme norme prépondérante afin de rejeter la demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. À l’appui de cette affirmation, la demanderesse attire l’attention sur la conclusion de l’agent selon laquelle son [traduction] « degré d’établissement n’était pas plus grand que celui dont on pourrait s’attendre d’autres personnes qui sont au Canada depuis plus de 10 ans ».

[27] Je rejette l’affirmation de la demanderesse. Il incombe à la personne qui demande une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire de démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles et non des circonstances simplement usuelles, y compris pour l’établissement [voir Baquero Rincon c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2014 CF 194, au para 1; Regalado c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 540 au para 8]. Il n’est donc pas rare de voir de telles mentions dans les décisions des agents. Je ne suis pas convaincue qu’à elle seule, la déclaration de l’agent dans laquelle il compare le degré d’établissement de la demanderesse à celui d’autres personnes au Canada sur une période de 10 ans équivaut à appliquer un critère inadmissible « des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées ». Au contraire, je suis convaincue qu’interprétés dans leur ensemble, les motifs de l’agent démontrent qu’il a tenu compte d’un large éventail de motifs pouvant justifier une dispense pour des considérations d’ordre humanitaire, comme l’exige l’arrêt Kanthasamy.

C. L’agent a-t-il commis une erreur en ne tenant pas compte des difficultés associées à la pratique du Falun Gong par la demanderesse?

[28] La demanderesse soutient que l’agent a commis une erreur en ne tenant pas compte de la simple réalité selon laquelle les pratiquants du Falun Gong sont confrontés à des difficultés lorsqu’ils retournent en Chine. Il importe peu qu’elle soit personnellement recherchée par les autorités chinoises à son retour. Elle soutient également que toute restriction significative de sa capacité à pratiquer sa religion comme elle l’entend peut constituer une persécution religieuse et qu’il est déraisonnable de restreindre l’analyse de la persécution religieuse à l’arrestation et à l’incarcération.

[29] La demanderesse affirme qu’il est bien connu que le Falun Gong est interdit en Chine et que les pratiquants du Falun Gong risquent d’être victimes d’une terrible persécution s’ils se font prendre. Elle fait valoir que l’agent a omis de tenir compte d’au moins trois aspects des difficultés auxquelles elle serait confrontée : (i) elle serait incapable de pratiquer le Falun Gong ouvertement et librement en Chine; (ii) elle risquerait d’être identifiée comme pratiquante du Falun Gong parce qu’elle a pratiqué le Falun Gong au Canada et qu’elle continuerait de le faire en Chine, et (iii) elle risquerait de subir des préjudices aux mains des autorités chinoises si celles-ci arrivaient à l’identifier. La demanderesse soutient que le défaut de l’agent de tenir compte de ces facteurs constitue une erreur susceptible de contrôle.

[30] Selon les éléments de preuve dont disposait l’agent, la demanderesse est membre d’un groupe de Falun Gong au Canada depuis 2010 et continue de pratiquer le Falun Gong au Canada. Elle a également déclaré qu’elle était recherchée par la police locale en Chine pour avoir distribué deux dépliants du Falun Gong en 2009. La demanderesse a présenté de nombreux documents provenant du cartable national de documentation à l’appui de sa demande, lesquels concernaient le traitement des pratiquants du Falun Gong en Chine. Elle a par ailleurs affirmé que si elle retournait en Chine, elle serait probablement arrêtée. Dans sa demande, elle a en outre déclaré [traduction] « [qu’]il était plus probable qu’improbable qu’elle soit poursuivie, rejetée arbitrairement, emprisonnée et maltraitée pour avoir pratiqué le Falun Gong au Canada et pour avoir distribué antérieurement des dépliants sur le Falun Gong en Chine ».

[31] La demanderesse se plaint maintenant que l’agent n’a pas tenu compte des difficultés qui découleraient de son incapacité à pratiquer ouvertement le Falun Gong en Chine, mais elle n’avait pas présenté d’observations à ce sujet à l’agent. Ses observations portaient plutôt sur son risque d’arrestation pour avoir distribué des dépliants en 2009 et avoir pratiqué le Falun Gong au Canada. L’agent a raisonnablement examiné ces observations et a finalement conclu que la preuve présentée par la demanderesse était insuffisante pour établir qu’elle était recherchée par les autorités chinoises ou qu’elle serait confrontée à des difficultés en raison de sa pratique du Falun Gong au Canada.

[32] La demanderesse ne peut pas reformuler ses observations dans le cadre d’un contrôle judiciaire afin de soulever une question qui n’avait pas été présentée à l’agent. Même si la Cour était disposée à examiner cette observation, je souligne que la demanderesse n’a attiré l’attention de la Cour sur aucun élément de preuve dans sa demande concernant son intention de continuer à pratiquer le Falun Gong en Chine et sur la façon dont ses projets particuliers seraient touchés. De plus, je tiens à souligner que, même si l’agent a conclu que la demanderesse n’avait pas présenté d’éléments de preuve suffisants à l’appui de ses affirmations, il a néanmoins accordé un certain poids à ce facteur.

[33] Par conséquent, je juge que la conclusion de l’agent relativement à ce facteur était raisonnable compte tenu de la preuve et des observations dont il disposait.

IV. Conclusion

[34] Pour les motifs exposés ci-dessus, je suis convaincue que la décision de l’agent était raisonnable. Elle reposait sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et se justifie au regard des faits et des principes de droit applicables. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-828-21

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Les parties n’ont proposé aucune question à certifier et l’affaire n’en soulève aucune.

« Mandy Aylen »

Juge

Traduction certifiée conforme

Mélanie Vézina


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-828-21

INTITULÉ :

LIQING QIU c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 27 JANVIER 2022

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE AYLEN

DATE DES MOTIFS :

LE 4 FÉVRIER 2022

COMPARUTIONS :

Allen Chang

POUR LA DEMANDERESSE

Monmi Goswani

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

EME Professional Corporation

North York (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

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