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Date : 20220211


Dossier : IMM‐2465‐17

Référence : 2022 CF 191

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 11 février 2022

En présence de monsieur le juge McHaffie

ENTRE :

HENDRICK MUKENDI TSHISUMPA

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Pour des raisons inconnues, le conseil de Hendrick Mukendi Tshisumpa n’a reçu l’avis d’intervention du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration et les documents connexes que le jour de l’audience devant la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada (la CISR). Le conseil a demandé l’ajournement de l’audience puisqu’il n’avait pas reçu les documents en question, qui comprenaient les notes d’un entretien entre M. Tshisumpa et un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC). La SPR a rejeté la demande d’ajournement et a tenu l’audience; elle a essayé de remédier au préjudice potentiel causé à M. Tshisumpa en évitant de poser des questions sur les nouveaux documents et en décidant de lui poser ces questions à une autre date. La SPR a néanmoins posé à M. Tshisumpa des questions sur le fond de sa demande d’asile, y compris sur des points soulevés dans les notes de l’agent de l’ASFC.

[2] À la reprise de l’audience, on a posé des questions à M. Tshisumpa au sujet d’une incohérence perçue entre le témoignage qu’il a livré au cours de la première journée d’audience et un point soulevé dans les notes de l’agent de l’ASFC. La SPR n’a pas été satisfaite de l’explication; par conséquent, elle a tiré une inférence défavorable quant à la crédibilité de M. Tshisumpa. Cette conclusion a été déterminante dans sa décision de rejeter la demande d’asile de M. Tshisumpa.

[3] Je conviens avec M. Tshisumpa que le rejet de la demande d’ajournement et l’interrogation subséquente sur le fond des questions soulevées dans les nouveaux documents au cours de la première journée d’audience ont entraîné un manquement important à l’équité procédurale. Les efforts de la SPR, qui a décidé de reporter les questions sur les documents à la deuxième journée d’audience, n’ont pas eu pour effet d’éviter le manquement à l’équité. Il était inéquitable sur le plan procédural pour M. Tshisumpa qu’on exige qu’il témoigne sur le fond de sa demande d’asile sans avoir la possibilité d’examiner d’abord les documents du ministre qui s’y rapportaient, dont notamment les notes de l’agent de l’ASFC. Contrairement à ce qu’affirme le ministre dans ses observations, je juge que la conclusion quant à la crédibilité découlant de ce manquement à l’équité était suffisamment déterminante dans les conclusions de la SPR pour annuler la décision.

[4] La demande de contrôle judiciaire sera donc accueillie et la demande d’asile de M. Tshisumpa sera renvoyée à la SPR pour nouvelle audience.

II. Les questions en litige et la norme de contrôle applicable

[5] M. Tshisumpa soutient qu’il était inéquitable sur le plan procédural de la part de la SPR de refuser sa demande d’ajournement. Il remet également en question le bien‐fondé des conclusions de la SPR quant à la crédibilité. Compte tenu de mes conclusions sur la question de l’équité, il n’est pas nécessaire que je traite des allégations de M. Tshisumpa par lesquelles il conteste les conclusions quant à la crédibilité elles‐mêmes.

[6] Les questions d’équité procédurale sont examinées par la Cour. Pour examiner les questions d’équité procédurale, la Cour évalue « si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances » : Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 au para 54 [Canadien Pacifique]; Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2020 CAF 196 au para 35 [ACAADR]. Cette évaluation peut être considérée comme étant semblable à un contrôle selon la norme de la « décision correcte » ou comme une analyse dans laquelle aucune norme de contrôle n’est appliquée : Canadien Pacifique, aux para 34 et 54; ACAADR au para 35.

III. Analyse

A. La demande d’asile de M. Tshisumpa

[7] L’essentiel de la demande d’asile de M. Tshisumpa se rapporte au fait qu’il est menacé par l’agence de renseignements de la République démocratique du Congo (l’Agence nationale de renseignements ou l’ANR). M. Tshisumpa est propriétaire d’une petite entreprise de transport. Il affirme qu’il se trouvait en RDC le 19 septembre 2016, après le décès de sa nièce lorsque lui et un chauffeur ont croisé un groupe de manifestants qui avaient été blessés lors d’une manifestation contre l’administration Kabila. Lui et le chauffeur ont emmené 26 des manifestants blessés dans un hôpital de Kinshasa.

[8] M. Tshisumpa allègue que le 6 octobre 2016, l’ANR a intercepté son camion alors qu’il était conduit par le même chauffeur. L’ANR a saisi le camion et a sommé le chauffeur de dire à M. Tshisumpa de se présenter en personne le jour suivant. L’avocat de M. Tshisumpa a découvert que l’ANR voulait lui parler de l’aide qu’il avait apportée aux manifestants le 19 septembre 2016. Craignant que le demandeur soit arrêté et maltraité par l’ANR, l’avocat a conseillé à M. Tshisumpa de fuir la RDC. M. Tshisumpa a quitté la RDC pour les États‐Unis le 20 octobre 2016, muni d’un faux passeport angolais et d’un visa pour les États‐Unis qu’il avait obtenu quelque temps auparavant. Il s’est ensuite rendu au Canada en janvier 2017 et a présenté une demande d’asile.

[9] La demande d’asile de M. Tshisumpa pouvait être déférée à la SPR malgré qu’il soit arrivé en provenance des États‐Unis, puisque son neveu est citoyen canadien : Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‐227, art 159.5b)(ii). Toutefois, il n’avait pas le droit d’interjeter appel devant la Section d’appel des réfugiés; il sollicite donc le contrôle judiciaire du rejet de sa demande d’asile par la SPR : Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR], art 110(2)d)(ii). Par souci d’exhaustivité, je souligne que la demande de contrôle judiciaire de M. Tshisumpa a été mise en suspens pendant environ 20 mois, en attendant l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Kreishan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CAF 223, et l’issue de la demande d’autorisation d’interjeter appel de cet arrêt auprès de la Cour suprême du Canada.

B. Le refus de la SPR d’ajourner l’audience

[10] L’audience relative à la demande d’asile de M. Tshisumpa a été fixée au 14 mars 2017. Le ministre est intervenu dans la demande d’asile au titre de l’alinéa 170e) de la LIPR et de l’article 29 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2012‐256 [les Règles de la SPR]. Au début de cette audience, après que le ministre eut commencé à renvoyer aux documents, le conseil de M. Tshisumpa a informé la SPR qu’il n’avait reçu ni l’avis d’intervention du ministre ni les documents du ministre, bien que la SPR l’ait informé par téléphone de l’intervention. Cela signifiait également que certains documents de M. Tshisumpa n’avaient pas été transmis au ministre.

[11] Les deux conseils ont demandé un ajournement de l’audience. Le conseil du ministre a demandé du temps pour analyser l’authenticité des documents d’identité de M. Tshisumpa, en précisant que la question de l’identité était la principale raison justifiant l’intervention du ministre. Le conseil de M. Tshisumpa a soutenu qu’il n’avait pas vu l’avis d’intervention comprenant les arguments du ministre et qu’il n’avait pas reçu, notamment, les notes rédigées par l’agent de l’ASFC lors de son entretien avec M. Tshisumpa. Il a souligné l’importance de trancher la question de savoir si son client avait entièrement préparé son dossier. Le conseil a également soulevé la possibilité de convoquer des témoins supplémentaires, compte tenu de l’intervention du ministre.

[12] La SPR a rejeté les deux demandes d’ajournement. La SPR a rejeté la demande de M. Tshisumpa. Ses motifs de rejets, qu’elle a livrés de vive voix, sont les suivants :

Malgré l’avis de signification que nous avons de l’avis d’intervention des pièces du ministre, on nous dit que ces pièces et cet avis d’intervention n’ont pas été reçus. C’est plutôt surprenant, mais ceci étant dit, je pense que je me dois de procéder à l’audience aujourd’hui sur le fond et aucune question ne sera posée sur l’avis d’intervention ou sur les documents qui sont joints. Et par conséquent, il n’y aura aucun préjudice pour le demandeur.

Là, cela n’empêchera pas que le tribunal pose des questions sur l’identité. L’identité fait toujours partie des questions déterminantes. Par contre, l’utilisation de documents relatifs à l’identité sera limitée à ceux qui étaient dans la trousse remis au demandeur lorsqu’il a demandé l’asile. Toutes questions relatifs [sic] à des documents additionnels qui sont dans les pièces du ministre ou dans les pièces C‐6 et suivantes seront reportées à une date ultérieure.

[Non souligné dans l’original.]

[13] Je m’arrête à ce point‐ci pour formuler deux observations. Premièrement, je conviens avec le ministre que la transcription des motifs exposés de vive voix par la SPR relativement au refus de la demande d’ajournement constitue les motifs de décision de la SPR. La SPR n’était pas tenue de traiter à nouveau de la question dans sa décision par écrit par laquelle elle rejetait la demande d’asile. Deuxièmement, l’audience de la SPR s’est déroulée en français et la décision de la SPR a été rendue dans cette langue. Devant la Cour, les parties ont présenté leurs observations écrites et orales en anglais.

C. La preuve qui en découle

[14] Comme l’a précisé la SPR, l’audience s’est déroulée de la façon suivante : M. Tshisumpa a présenté son témoignage en réponse aux questions du tribunal, suivies de celles du conseil du ministre et des questions de son propre conseil. La SPR n’a posé aucune question portant directement sur les documents du ministre ou sur les documents que le ministre n’avait pas reçus de la part de M. Tshisumpa. Toutefois, parmi les questions posées par la SPR, il y avait une série de questions portant sur les mesures prises par M. Tshisumpa entre les événements du 6 octobre 2019 et son départ le 20 octobre 2019. La SPR a notamment posé des questions sur ce que M. Tshisumpa avait fait pour obtenir de faux timbres d’entrée dans son faux passeport angolais avec l’aide d’un ancien camarade de classe qui travaillait au service de l’immigration.

[15] Les réponses à ces questions ont eu une incidence importante sur les conclusions défavorables de la SPR quant à la crédibilité de M. Tshisumpa. Lorsque l’audience a repris six semaines plus tard en vue d’examiner d’autres éléments de preuve et de poser des questions sur les documents, la SPR a interrogé M. Tshisumpa au sujet des notes rédigées par l’agent de l’ASFC lors de son entretien avec lui en février 2017. D’après les notes, rédigées en anglais lors de l’entretien qui se déroulait en français, M. Tshisumpa [traduction] « a donné [son] passeport à un “service express” qui se spécialise dans l’obtention de visas ». Le ministre a considéré qu’il s’agissait d’une incohérence avec le témoignage de M. Tshisumpa selon lequel un ami l’avait aidé à obtenir le passeport. Le ministre a soulevé l’incohérence dans ses observations finales, en précisant que la mention « an express service », que l’agent de l’ASFC avait employée, se traduisait par « un service express ». La SPR a jugé que cela justifiait la tenue d’un interrogatoire plus poussé et a fait part de l’incohérence soulevée par le ministre à M. Tshisumpa. Ce dernier a déclaré qu’il n’y avait pas de « service express » qui s’occupe de ce genre de choses et a répété qu’il avait fait appel à un ami pour l’aider à quitter le pays. Il a déclaré qu’il ne savait pas pourquoi il y avait mention d’un « service express » dans les notes, mais que, comme il devait quitter le pays rapidement, il avait dû recourir à une personne qui devait lui rendre un service express pour l’aider à partir, s’exprimant ainsi : « c’est recourir à une personne, une personne qui devait me rendre un service express pour me faire partir ».

[16] La SPR n’a pas accepté l’explication de M. Tshisumpa et a estimé que l’incohérence entre la référence dans les notes de l’agent de l’ASFC quant au passeport remis à un « service express » et son témoignage quant au passeport remis à un ami s’avérait une incohérence importante qui minait la crédibilité du demandeur. Malgré les observations des conseils concernant la langue dans laquelle les notes avaient été rédigées et la difficulté pour M. Tshisumpa de comprendre le français dans lequel l’agent de l’ASFC s’exprimait, la SPR a présumé, à défaut d’éléments de preuve contraires, que les agents de l’ASFC avaient bien fait leur travail et que M. Tshisumpa avait dû prononcer les mots « service express » pour que ceux‐ci figurent dans les notes.

[17] Cette incohérence a été un aspect central de la conclusion de la SPR selon laquelle les faits allégués par M. Tshisumpa n’ont pas eu lieu ainsi que du rejet de sa demande d’asile.

D. Le refus d’ajournement et la tenue de l’interrogatoire étaient inéquitables

[18] Les articles 33, 34 et 36 des Règles de la SPR traitent de la communication des documents au demandeur d’asile. L’article 34 prévoit notamment que les documents transmis par une partie doivent être fournis 10 jours avant la date fixée pour l’audience : Règles de la SPR, alinéa 34(3)a). Ces dispositions, comme toutes les dispositions relatives à la communication de documents, visent à éviter une embuscade au procès : Awan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1040 au para 6(2). De façon générale, à l’instar de l’obligation d’équité, ces dispositions permettent à un demandeur de prendre connaissance des éléments de preuve documentaires pouvant être invoqués à l’audience, de savoir ce qui lui est reproché et de se préparer à l’audience relative à sa demande d’asile conséquemment.

[19] Comme le souligne le ministre, les Règles de la SPR exigent également que les audiences relatives aux demandes d’asile aient lieu rapidement. L’article 54 prévoit que la SPR « ne peut accueillir » une demande de changement de date ou d’heure d’une procédure, y compris une demande d’ajournement faite oralement, sauf en cas de « circonstances exceptionnelles ». Les exemples de telles circonstances énoncés dans les Règles de la SPR comprennent l’accommodement d’une personne vulnérable et une « urgence ou [un] autre développement hors du contrôle de la partie, lorsque celle‐ci s’est conduite avec diligence » : Règles de la SPR, paragraphe 54(4). La CISR a publié des directives concernant la mise au rôle et les procédures d’ajournement, lesquelles confirment l’importance de l’article 54 ainsi que la nécessité de procéder à un ajournement lorsque cette mesure est nécessaire pour que la SPR se conforme aux principes de justice naturelle : Directives 6 du président : Mise au rôle et changement de la date ou de l’heure d’une procédure, modifié le 15 décembre 2012, au para 7.1 et 7.3.

[20] En l’espèce, la SPR avait affaire à une situation dans laquelle M. Tshisumpa, pour des raisons inconnues, n’avait pas reçu les documents du ministre. Il a demandé un ajournement pour lui permettre d’examiner ces documents avant l’audience. Il est clair que la SPR a tenté de remédier à la situation du mieux possible dans les circonstances, d’éviter tout retard inutile et de se conformer aux Règles de la SPR, notamment à l’article 54.

[21] Il est également manifeste que la SPR a reconnu qu’il serait injuste de procéder à l’interrogatoire de M. Tshisumpa relativement aux documents qu’il n’avait pas eu l’occasion d’examiner et qu’elle avait le pouvoir discrétionnaire d’ajourner l’audience pour répondre à la préoccupation en matière d’équité soulevée. La SPR a opté, en partie, pour cette approche, en ajournant la partie de l’audience qui portait directement sur les documents.

[22] Toutefois, il en résulte que la SPR a procédé à l’interrogatoire primaire de M. Tshisumpa concernant des faits substantiels qui sous‐tendaient sa demande d’asile à un moment où, à sa connaissance, M. Tshisumpa n’avait pas reçu ou n’avait pas eu l’occasion d’examiner les documents fournis par le ministre qui se rapportaient directement à ces faits, y compris un document censé consigner ses déclarations antérieures sur les points abordés. À mon avis, malgré les efforts de la SPR pour remédier à la préoccupation en matière d’équité soulevée en l’espèce, sa façon de procéder a mené à une injustice manifeste envers M. Tshisumpa.

[23] Cette préoccupation s’est accrue dans ce contexte par le fait que la SPR disposait des documents lors de son interrogation. En effet, il ressort de la transcription que la SPR elle‐même éprouvait parfois de la difficile à interroger M. Tshisumpa sur les faits sans renvoyer aux documents. Il faut notamment préciser que la SPR a commencé à poser des questions sur l’ami qui avait apposé des timbres dans le passeport angolais avant que M. Tshisumpa n’y fasse référence dans son témoignage, ce qui donne à penser que les questions de la SPR ont fait suite à son examen des notes de l’agent de l’ASFC selon lesquelles M. Tshisumpa avait obtenu de faux timbres d’entrée.

[24] Je conviens avec M. Tshisumpa que cette injustice n’a pas été corrigée par la reprise ultérieure de l’audience pour traiter des documents. Bien que le ministre ait raison de dire que les questions précises sur le « service express » n’ont pas été posées avant la deuxième journée d’audience, la conclusion de la SPR en matière de crédibilité reposait sur le témoignage présenté par M. Tshisumpa au cours de la première journée d’audience et sur une incohérence soulevée entre ce témoignage et les notes de l’agent de l’ASFC. L’injustice découlait du fait que le témoignage de M. Tshisumpa a été obtenu avant que ce dernier n’ait eu l’occasion d’examiner les documents.

[25] Je ne peux pas non plus conclure que la décision de la SPR était « inéluctable sur le plan juridique », indépendamment du manquement à l’équité : Canada (Procureur général) c McBain, 2017 CAF 204 aux para 9 et 12. Il se peut que le témoignage de M. Tshisumpa et sa réponse aux notes de l’agent de l’ASFC se seraient avérés inchangés. Dans de telles circonstances, le caractère raisonnable des conclusions en matière de crédibilité de la SPR, si ces dernières s’étaient également avérées inchangées, entrerait alors en ligne de compte. Toutefois, les principes d’équité ne permettent généralement pas à la Cour de se livrer en conjectures sur ce qui aurait pu se produire dans le cadre d’une instance équitable : Lin c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 1999 CanLII 8444 (CF) aux para 21‐23, citant Cardinal c Établissement de Kent, [1985] 2 RCS 643 à la p 661.

[26] Puisque je conclus que la décision de la SPR a été rendue en violation de l’obligation d’équité procédurale, je n’ai pas à me prononcer sur les arguments de M. Tshisumpa relativement au caractère raisonnable de la décision de la SPR et, en particulier, sur les conclusions en matière de crédibilité tirées par cette dernière.

IV. Conclusion

[27] Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie et la demande d’asile de M. Tshisumpa est renvoyée à la SPR pour nouvelle audience.

[28] Lors de l’audition de la présente affaire, on s’est demandé si la Cour devait expressément ordonner que les transcriptions de la première audience de M. Tshisumpa devant la SPR, y compris les transcriptions des témoignages, soient exclues des éléments de preuve présentés à la SPR lors de la nouvelle audience. Je suis convaincu qu’il est de pratique habituelle pour la SPR de reconnaître que les éléments de preuve découlant d’un processus inéquitable ne doivent pas être pris en compte lors d’une nouvelle audience, et qu’il n’est pas nécessaire d’inclure ce point dans l’ordonnance de la Cour.

[29] Aucune partie n’a soulevé de question à certifier. Je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM‐2465‐17

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision de la Section de la protection des réfugiés datée du 12 mai 2017 est annulée et la demande d’asile de M. Hendrick Mukendi Tshisumpa est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Section de la protection des réfugiés pour nouvelle audience.

« Nicholas McHaffie »

Juge

Traduction certifiée conforme

M. Deslippes


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‐2465‐17

 

INTITULÉ :

HENDRICK MUKENDI TSHISUMPA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 24 NovembRe 2021

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MCHAFFIE

 

DATE DES MOTIFS :

LE 11 FÉVRIER 2022

 

COMPARUTIONS :

Richard Wazana

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Melissa Mathieu

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

WazanaLaw

Cabinet d’avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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