Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20220218


Dossier : IMM-800-21

Référence : 2022 CF 225

Ottawa (Ontario), le 18 février 2022

En présence de monsieur le juge Pamel

ENTRE :

Elizabeth Barbara DE OLIVEIRA GONCALVES &

Leticia Oliveira ESPERANCA GONCALVES

demanderesses

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Contexte et décision sous-jacente

[1] Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision d’un agent principal d’immigration [l’agent], en date du 20 janvier 2021, refusant la demande de résidence permanente des demanderesses pour des motifs d’ordre humanitaire [demande CH].

[2] Les demanderesses, Elizabeth Barbara de Oliveira Goncalves [Mme de Oliveira] et sa fille de 12 ans, Leticia sont citoyennes brésiliennes. Mme de Oliveira est née dans le Nord-Est du Brésil et a terminé des études universitaires, y compris une maîtrise; elle détient une expérience à titre d’avocate, de gérante d’artistes et de professeure au Brésil. Cependant, Mme de Oliveira a vécu plusieurs événements stressants et violents au Brésil: son père a été tué en 1984 dans des circonstances nébuleuses; elle a été victime d’un vol à main armée durant l’été 2011; elle a divorcé le père de Leticia en juin 2012 alors que Leticia avait 2 ans; et le frère de Mme de Oliveira a été tué par balle en 2014. Entre‐temps, Mme de Oliveira a présenté plusieurs demandes d’immigration au Canada, soit une demande de visa de résident temporaire refusée en 2011, une demande de visa de visiteur accueillie en 2013 et une demande de visa étudiant accueillie en 2014. Mme de Oliveira est entrée au Canada avec Leticia en juillet 2014 avec le statut de résident temporaire et un permis de travail; elles ont vécu au Canada pendant 17 mois, jusqu’en décembre 2015, date à laquelle Mme de Oliveira est retournée au Brésil pour prendre soin de sa mère. Mme de Oliveira est revenue au Canada avec sa fille en mai 2016 à l’aide d’un visa temporaire étudiant, renouvelé jusqu’au 13 avril 2019; Mme de Oliveira a également obtenu un permis de travail temporaire, aussi renouvelé jusqu’au 14 avril 2019. Le père de Leticia a autorisé qu’elle vive avec sa mère au Canada.

[3] Leticia fréquente le même milieu scolaire depuis qu’elle est revenue au Canada en 2016 et Mme de Oliveira a occupé plusieurs emplois jusqu’à l’échéance de son permis de travail en avril 2019; elle a notamment travaillé à titre de surveillante scolaire au primaire pour le Centre de services scolaire de Montréal et à titre de brigadière scolaire pour la ville de Montréal. Mme de Oliveira a également fait du bénévolat pour plusieurs organismes. Les demanderesses ont toutes les deux appris le français et l’anglais depuis leur arrivée au Canada. De plus, Mme de Oliveira s’est mariée de nouveau le 2 septembre 2017, mais le couple a divorcé en août 2019. Elle affirme avoir été victime de violence verbale de la part de son ex-mari. Ce dernier avait présenté une demande de parrainage pour regroupement familial, mais il l’a retirée lorsque la relation s’est terminée. Dans les dernières années, Mme de Oliveira a cherché à régulariser sa situation au Canada. Le 18 juin 2018, sa demande de prolongation de permis de travail a été refusée et Citoyenneté et Immigration Canada a reçu la demande CH de Mme de Oliveira en mars 2019. Le 10 novembre 2019, sa nouvelle demande de permis de travail a été refusée. Le 19 novembre 2019, Mme de Oliveira a traversé la frontière américaine dans le but d’obtenir un document valide. Les douanes canadiennes lui ont octroyé un permis de séjour et de travail temporaire de 6 mois, valide jusqu’au 19 mai 2020. Par la suite, elle a déposé une demande de fiche de visiteur ainsi que des demandes de permis de séjour temporaire et de travail; ces demandes étaient toujours en attente d’une décision lorsque l’agent a rejeté la demande CH de Mme Oliveira. Le 4 janvier 2021, Mme de Oliveira aurait soumis une demande de permis de séjour temporaire pour victime de violence familiale; sa demande serait également toujours en attente d’une décision.

[4] Le 20 janvier 2021, l’agent a rejeté la demande CH concluant que les facteurs invoqués par Mme de Oliveira et sa fille n’étaient pas suffisants pour justifier une exemption pour motifs d’ordre humanitaire en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [LIPR]. L’agent a pris en considération l’établissement de Mme de Oliveira et de sa fille au Canada, les difficultés qu’elles subiraient advenant un renvoi au Brésil et l’intérêt supérieur de Leticia. En soutien de leur demande, Mme de Oliveira et Leticia ont notamment présenté des lettres dans lesquelles elles décrivent leur établissement au Canada, ainsi que des lettres de recommandation provenant d’amis, d’employeurs, de collègues et de leur député. Mme de Oliveira a également présenté une preuve d’emploi et des déclarations de revenus et des lettres confirmant son implication auprès de divers organismes communautaires.

[5] L’agent a accordé une « importance favorable » à la fréquentation scolaire de Leticia ainsi qu’à l’emploi, l’expérience de bénévolat et la bonne gestion des finances de Mme de Oliveira. Cependant, il a souligné « que la question qui se pose dans la présente évaluation n’est pas de savoir si les demandeures apporteraient à la société canadienne une contribution appréciée, mais plutôt de savoir si leur retour au Brésil constitue une difficulté telle qu’une exemption est justifiée ». Après avoir examiné les preuves, l’agent a déterminé que le degré d’établissement de Mme de Oliveira et sa fille n’était pas exceptionnel par rapport à des personnes se trouvant dans une situation semblable et ayant vécu au Canada pendant une période comparable. Dans son évaluation des difficultés que rencontreraient les demanderesses advenant un renvoi au Brésil, l’agent a considéré le rapport d’évaluation psychologique de Mme de Oliveira qui aborde la question de l’assassinat de son père et de son frère, mais a constaté que peu de preuves ou de renseignements concernant leur assassinat et leur incidence sur la vie de Mme de Oliveira n’ont été soumis à l’appui de sa demande CH. L’agent a également constaté qu’aucune preuve n’a été soumise concernant le vol à main armée dont elle a été victime en 2011. Ainsi, au sujet du « vol à main armée » en 2011, selon l’agent, la preuve ne permettait pas de conclure que les demanderesses faisaient l’objet de discrimination au Brésil ni que le gouvernement brésilien « ne pourrait pas ou ne voudrait pas » protéger Mme de Oliveira ou sa fille, et ne permettait pas de conclure que les conditions difficiles au Brésil auraient sur Mme de Oliveira une incidence directe et négative. L’agent a également considéré les perspectives d’emploi de Mme de Oliveira ainsi que le soutien familial dont les demanderesses bénéficieraient advenant un retour au Brésil. Dans l’analyse de l’intérêt supérieur de Leticia, l’agent a accordé un poids favorable à la relation de l’enfant avec un ami de la famille, un dénommé M. Keable, mais la preuve au dossier n’était pas suffisante pour démontrer que Leticia subirait des répercussions négatives sur le plan social et culturel ou que son bien-être serait compromis advenant un retour au Brésil. Enfin, l’agent a conclu que les difficultés liées à l’obligation de quitter le Canada que Mme de Oliveira et sa fille subiraient sont une conséquence de l’application normale et prévisible de la LIPR.

[6] N’ayant pas été informée du rejet de sa demande CH, Mme de Oliveira a déposé de nouvelles observations le 4 février 2021. Ainsi, l’agent a considéré les soumissions supplémentaires qui comprenaient une lettre des ressources humaines de la ville de Montréal affirmant que son dossier d’employé était toujours actif en attente d’une décision relativement à son permis de travail. Dans un addenda, l’agent est arrivé à la même conclusion que la décision du 20 janvier 2021. L’agent conclut que, suite à son évaluation de tous les faits et facteurs pertinents dont il dispose, ceux-ci « ne permettent pas de justifier la dispense de l’obligation de présenter une demande de résidence permanente depuis l’étranger en l’espèce ». La présente demande de contrôle judiciaire ne vise que la décision du 20 janvier 2021.

II. Régime législatif

Séjour pour motif d’ordre humanitaire à la demande de l’étranger

Humanitarian and compassionate considerations – request of foreign national

25(1) Sous réserve du paragraphe (1.2), le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui demande le statut de résident permanent et qui soit est interdit de territoire – sauf si c’est en raison d’un cas visé aux articles 34, 35 ou 37 –, soit ne se conforme pas à la présente loi, et peut, sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada – sauf s’il est interdit de territoire au titre des articles 34, 35 ou 37 – qui demande un visa de résident permanent, étudier le cas de cet étranger; il peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des considérations d’ordre humanitaire relatives à l’étranger le justifient, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché.

25(1) Subject to subsection (1.2), the Minister must, on request of a foreign national in Canada who applies for permanent resident status and who is inadmissible – other than under section 34, 35 or 37 – or who does not meet the requirements of this Act, and may, on request of a foreign national outside Canada – other than a foreign national who is inadmissible under section 34, 35 or 37 – who applies for a permanent resident visa, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligations of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to the foreign national, taking into account the best interests of a child directly affected.

 

III. Question en litige et norme de contrôle

[7] La présente demande de contrôle judiciaire soulève une question : la décision de l’agent principal d’immigration est-elle raisonnable? Les demanderesses soutiennent que l’agent a commis une erreur dans son analyse de leur établissement en exigeant un degré extraordinaire d’établissement au Canada, que l’agent n’a pas adéquatement considéré le rapport d’évaluation psychologique de Mme de Oliveira, que l’agent a confondu l’analyse de l’intérêt supérieur de Leticia avec une analyse des difficultés et, enfin, que l’agent a seulement tenu compte des facteurs traditionnels des difficultés et non des facteurs humanitaires au sens plus élargi.

[8] Les parties s’entendent sur le fait que la norme de contrôle applicable à la révision d’une décision portant sur une demande CH est celle de la décision raisonnable (Garcia Diaz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 321 au para 49; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 16-17 [Vavilov]; Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61 au para 44 [Kanthasamy]). Lorsqu’elle procède au contrôle selon la norme de la décision raisonnable, la Cour doit examiner les motifs rendus par l’agent principal d’immigration afin de déterminer si la décision est fondée sur « une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle » et si la décision dans son ensemble est transparente, intelligible et justifiée (Vavilov aux para 85-86). Une exemption pour motifs d’ordre humanitaire en vertu du paragraphe 25(1) de la LIPR est une mesure d’exception et discrétionnaire qui exige que la Cour fasse preuve de déférence (Sun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 206 au para 16; Qureshi c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 335 au para 30).

IV. Analyse

A. L’agent n’a pas commis d’erreur dans son analyse du degré d’établissement des demanderesses au Canada

[9] L’agent a déterminé que les demanderesses ne présentaient pas un degré d’établissement exceptionnel par rapport à des personnes se trouvant dans une situation similaire :

Les demandeures ont résidé au Canada pendant une période relativement courte, d’après les éléments de preuve qu’elles ont présentés, mais je ne trouve pas leur degré d’établissement exceptionnel par rapport à des personnes se trouvant dans une situation semblable et ayant vécu au Canada pendant une période comparable. Leur témoignage ne confirme pas que leur intégration dans la société canadienne est telle que leur départ causerait des difficultés indépendantes de leur volonté qui ne sont pas envisagées dans la LIPR.

[10] Les juges majoritaires dans l’arrêt Kanthasamy ont adopté l’approche de la décision Chirwa c Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration) (1970), 4 AIA 338, [1970] DCAI no 1 (QL), voulant qu’un agent ne doit pas appliquer un seuil plus élevé de manière à restreindre sa faculté d’examiner et de soupeser toutes les considérations d’ordre humanitaire pertinentes. Les demanderesses soutiennent que l’agent a commis une erreur dans son analyse de leur établissement en exigeant un degré extraordinaire d’établissement au Canada. Les demanderesses soulèvent également que l’agent a omis de mentionner ce qui pourrait être considéré comme un établissement exceptionnel.

[11] Premièrement, je ne suis pas convaincu que l’agent ait appliqué, dans son analyse de l’établissement des demanderesses au Canada, un seuil plus élevé que celui prévu dans l’approche adoptée par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Kanthasamy. Je partage les propos du juge McHaffie dans l’affaire Damian c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 1158, voulant que dans la mesure où le terme « exceptionnel » est utilisé de façon descriptive, comme c’est le cas ici, il ne crée pas un seuil plus élevé que celui prévu par le paragraphe 25(1) :

[21] Ainsi, dans la mesure où des termes tels qu’« exceptionnelle » ou « extraordinaire » sont utilisés de façon purement descriptive, leur utilisation semble être conforme à celle qu’en fait la majorité dans l’arrêt Kanthasamy, bien que cette utilisation puisse ne pas ajouter grand-chose à l’analyse. Toutefois, si tant est que ces termes visent à importer, dans l’analyse des motifs d’ordre humanitaire, une norme juridique différente de celle établie dans les décisions Chirwa et Kanthasamy (qui suppose l’existence de faits « de nature à inciter [toute personne] raisonnable d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne — dans la mesure où ses malheurs “justifient l’octroi d’un redressement spécial” »), cela semble contraire aux motifs énoncés par la majorité. Étant donné la possibilité que des termes tels qu’« exceptionnelle » et « extraordinaire » soient utilisés au-delà du simple descriptif pour entraîner l’application d’une norme juridique plus stricte, il serait peut-être plus utile de s’en tenir à l’approche adoptée dans l’arrêt Kanthasamy, plutôt que d’ajouter des qualificatifs supplémentaires.

[12] Seule une analyse des motifs de l’agent, considérés dans leur ensemble, permet de déterminer si l’utilisation du terme « exceptionnel » crée un seuil plus élevé que celui prévu au paragraphe 25(1) de la LIPR (Jaramillo Zaragoza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 879 au para 22 [Jaramillo Zaragoza]), et dans ce cas, je trouve que l’utilisation du mot est simplement descriptive.

[13] De plus, les demanderesses citent l’affaire Chandidas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2013 CF 258 au para 80 [Chandidas], à l’appui de leur proposition selon laquelle l’agent avait l’obligation d’expliquer ce qui serait considéré comme un établissement exceptionnel (voir aussi Henson c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2018 CF 1218 au para 29 [Henson] et Ndlovu c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 878 aux para 14-15). Cependant, je ne suis pas convaincu que ces décisions viennent appuyer leur argument. J’ai déjà abordé cette question dans l’affaire Jaramillo Zaragoza dans laquelle je cite M. le juge Diner dans la décision Regalado c Canada (Immigration, Réfugiés et Citoyenneté), 2017 CF 540 :

[7] La demanderesse fait valoir qu’il était déraisonnable de la part de l’agent de ne pas expliquer quel [traduction] « degré d’établissement il jugeait nécessaire pour justifier l’exercice de son pouvoir discrétionnaire prévu en vertu de l’article 25 de la LIPR » parce qu’il a noté que le degré d’établissement de la demanderesse était [traduction] « celui attendu dans ses circonstances ».

[8] Cet argument fait fausse route : on ne peut attendre de l’agent qu’il détermine de façon arbitraire le degré d’établissement requis en vertu de l’article 25 puisque l’analyse variera nécessairement selon les faits de chaque affaire. De même, ce n’est pas le rôle d’un agent d’imaginer quels faits ou quelles circonstances supplémentaires pourraient déclencher l’application de l’exception de l’article 25. C’est plutôt à la demanderesse de démontrer l’existence de circonstances exceptionnelles et non des circonstances simplement usuelles, y compris pour l’établissement (Baquero Rincon c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2014 CF 194, au paragraphe 1).

[14] De plus, dans Chandidas, l’agent n’avait fourni aucune raison pour expliquer en quoi les éléments de preuve présentés au sujet du degré d’établissement étaient insuffisants; les décisions Henson et Ndlovu reprennent le raisonnement de la juge Kane dans Chandidas. Toutefois, et contrairement aux décisions Henson et Chandidas, dans le cas qui nous occupe, l’agent a en réalité défini la norme qu’il a appliquée dans le cadre de son évaluation du degré d’établissement des demanderesses et a expliqué son point de référence, à savoir qu’il « ne trouve pas leur degré d’établissement exceptionnel par rapport à des personnes se trouvant dans une situation semblable et ayant vécu au Canada pendant une période comparable » (voir également Osorio Diaz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CF 373 au para 17). En conséquence, je ne vois rien de déraisonnable dans la manière dont l’agent a évalué le facteur d’établissement de Mme de Oliveira.

B. L’agent n’a pas commis d’erreur dans son analyse du rapport d’évaluation psychologique

[15] Les demanderesses soutiennent que l’agent n’a pas adéquatement considéré le rapport d’évaluation psychologique de Mme de Oliveira démontrant les séquelles qu’ont laissées les meurtres de son père et son frère, ainsi que le vol armé dont elle a été victime et le sentiment d’insécurité causé par l’absence de recours ou d’identification des agresseurs par les autorités brésiliennes. Selon les demanderesses, ce rapport est particulièrement important, car il explique la relation entre Mme de Oliveira et son pays d’origine et l’agent n’a pas procédé à une analyse transparente et distincte de sa santé mentale à titre de facteur humanitaire.

[16] Elles soulèvent plus spécifiquement les commentaires de la Dre Cécile Marotte voulant que Mme de Oliveira présente un état d’anxiété générale se rapportant à l’attente d’un statut d’immigration légal au Canada. Elle ajoute :

La cliente a certainement pu développer une crainte excessive et persistante concernant la disparition de figures familiales d’attachement : son père, son frère, pour qui aucune explication ne semble avoir été fournie, à part l’absurdité et une fréquence regrettable de ce genre de situations de délinquance où l’identification des agresseurs et leur sanction juridique auraient dû et pu constitué [sic] une forme de recours.

[17] Cependant, je note la conclusion de la Dre Marotte comme suit :

Diagnostic clinique selon les critères du DSM V (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, American Psychiatric Association)

V71.09 (Z03.2) : absence de diagnostic se rapportant à un trouble de santé mentale de type clinique.

Séquelles psycho-traumatiques suite à plusieurs agressions violentes en cours de résolution.

En conclusion :

Mme E.B.de OLIVEIRA n’exprime aucun trouble de santé mentale de type clinique (pre-psychotique ou psychotique) mais des séquelles post-traumatiques durables suite à l’assassinat et de son père et de son frère, suite à sa propre agression, ce qui a contribué à une forme de dérégulation émotionnelle et peur [sic]permettre de mieux comprendre sa recherche d’un contexte de vie stable et sécuritaire.

L’anxiété éprouvée se rapporte principalement à l’attente d’un statut d’immigration canadien légal destiné à renforcer l’intégration personnelle de la cliente et à permettre à sa fille de s’épanouir dans sa scolarité et ses futurs choix de vie.

Mme E.B. de OLIVEIRA GONCALVEZ représente une excellente candidate à un emploi stable, ayant démontré une grande capacité à sa prise en charge complète ainsi qu’à celle de sa fille depuis son arrivée au Canada.

RECOMMANDATIONS

Que Mme E.B.de OLIVEIRA GONCALVEZ puisse être considérée comme une excellente candidate à l’emploi dans la mesure où elle a su démontrer ses capacités à être autonome et à assumer correctement toutes les responsabilités se rapportant à sa fillette (10) ans,

Que Mme E.B.de OLIVEIRA GONCALVEZ puisse continuer à démontrer l’ensemble de ses compétences et être considérée comme d’un apport positif dans le choix du contexte de vie pour lequel elle a opté et pour lequel elle n’a signalé aucune difficulté ou problème d’adaptation ni pour elle ni pour sa fillette.

[18] L’agent a considéré le rapport d’évaluation psychologique :

[Mme de Oliveira] a fourni une évaluation psychologique datée du 24 mai 2019. Il est question de l’assassinat du père de [Mme de Oliveira] ainsi que du décès de son frère. En outre, selon ce document, [Mme de Oliveira ] doute de la capacité du gouvernement brésilien de les protéger. Le rapport aborde également l’anxiété de [Mme de Oliveira] causée par le fait qu’elle n’a pas de statut au Canada. Il est souligné que le rapport ne mentionne pas que la demandeure principale a déjà demandé de l’aide ou qu’elle continue de le faire. Peu de renseignements et d’éléments de preuve ont été présentés à l’appui des décès du père et du frère de la demandeure et de l’incidence sur sa vie. En outre, les éléments de preuve présentés ne montrent pas que le gouvernement brésilien ne pourrait pas ou ne voudrait pas protéger les demandeures si elles en avaient besoin. La preuve ne permet pas de conclure que les demandeures ont fait l’objet de discrimination au Brésil. [Mme de Oliveira] affirme qu’en 2011, elle a été victime d’un « vol à main armé » au Brésil. Je constate que la demandeure n’a pas fourni de rapport de police ni de témoignage concernant l’événement.

[19] Mme de Oliveira prétend que son rapport psychologique contient des éléments pertinents qui n’ont pas reçu l’attention qu’ils méritaient par l’agent. Je suis d’accord que, comme le décrit le rapport psychologique, parfois l’impuissance de l’État à protéger les membres de la société contre les actes de délinquance criminelle, en l’occurrence les événements stressants et violents vécus par Mme de Oliveira au Brésil, sont susceptibles de générer des séquelles psycho-traumatiques durables et d’avoir une portée non négligeable, et que Mme de Oliveira souffre d’un état d’anxiété générale dû à l’attente de son statut d’immigration au Canada ainsi qu’à une crainte excessive et persistante concernant la disparition de son père et son frère. Cependant, selon moi, l’agent n’a pas commis d’erreur dans son analyse du rapport d’évaluation psychologique. Bien que l’agent ait considéré les conclusions du rapport de la Dre Marotte, il a noté que peu de renseignements et d’éléments de preuve ont été présentés pour démontrer les circonstances du décès du père et du frère de Mme de Oliveira ainsi que du vol à main armée dont elle a été victime. De plus, la preuve ne démontre pas que les demanderesses ne bénéficieraient pas de la protection du gouvernement brésilien. Les événements à l’origine de son état d’anxiété générale n’ayant pas été démontrés, l’agent ne pouvait accorder de poids à ce rapport; l’agent n’est pas tenu d’accepter l’avis de la Dre Marotte (Rainholz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 121 aux para 77-78 [Rainholz]).

[20] Comme l’a noté l’agent, le rapport ne mentionne pas que Mme de Oliveira est suivie par un psychologue, ou qu’elle a déjà demandé de l’aide ou qu’elle continue de le faire. Concernant son inquiétude au sujet de l’impuissance de protection de l’État, l’agent fait mention du fait que les éléments de preuve présentés ne montrent pas que le gouvernement brésilien ne pourrait pas ou ne voudrait pas protéger les demanderesses si elles en avaient besoin. De plus, il ne s’agit pas d’un cas similaire à Sutherland c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1212 [Sutherland], dans lequel les rapports psychologiques indiquent que la santé mentale des demandeurs s’aggraverait s’ils devaient être renvoyés du Canada; ici, aucune conclusion de ce genre n’existe. Il ne s’agit pas non plus d’un cas comme dans les affaires Apura c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 762, et Rainholz, où l’agent n’a fourni aucune explication sur la raison pour laquelle le rapport du psychiatre a reçu peu de poids; je trouve que l’analyse de la preuve au dossier en l’instance est raisonnable et l’explication fournie par l’agent est claire et cohérente (Sutherland au para 24; Jesuthasan c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 142 aux para 43-44).

[21] Les demanderesses ont le fardeau d’établir que l’exemption pour motifs d’ordre humanitaire est justifiée en fournissant des preuves suffisantes à cet effet (Kisana c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2009 CAF 189 au para 45; Owusu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38 au para 5; Febrillet Lorenzo c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 925 au para 15). Selon moi, l’agent n’a pas commis d’erreur dans son analyse du rapport d’évaluation psychologique puisque les événements à l’origine de l’état d’anxiété générale de Mme de Oliveira n’avaient pas été démontrés et il était raisonnable pour l’agent de ne pas accorder de poids à ce rapport.

C. L’agent n’a pas commis d’erreur dans son analyse de l’intérêt supérieur de Leticia

[22] Les demanderesses soutiennent que l’agent a confondu l’analyse de l’intérêt supérieur de Leticia avec l’analyse des difficultés posées par leur éventuel retour au Brésil, et que l’agent a effectué une analyse des difficultés comme point de départ d’une analyse de l’intérêt supérieur de la jeune Leticia. Les demanderesses argumentent également que l’agent n’a pas défini l’intérêt supérieur de Leticia et que l’agent n’a pas déterminé en quoi le retour de la famille au Brésil affecterait la santé mentale de Mme de Oliveira et sa capacité de prendre soin de Leticia (Rainholz au para 91).

[23] Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a établi que l’agent doit être « réceptif, attentif et sensible » dans son analyse de l’intérêt supérieur « qui dépend fortement du contexte » en raison de « la multitude de facteurs qui risquent de faire obstacle à l’intérêt de l’enfant ». Dans ses motifs, l’agent doit démontrer que l’intérêt supérieur de l’enfant a été « bien identifié et défini » et examiné « avec beaucoup d’attention, eu égard à l’ensemble de la preuve » (Kanthasamy aux para 35, 38 et 39; Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817 au para 75).

[24] Dans la décision Osun c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 295, M. le juge Diner soulève au paragraphe 19 le risque de tenir compte exclusivement des difficultés dans l’évaluation des demandes CH :

Autrement dit, s’il est vrai que les agents peuvent considérer les difficultés comme un facteur dans leur évaluation de l’intérêt supérieur des enfants, l’analyse des difficultés ne peut remplacer une analyse complète et contextuelle de l’intérêt supérieur. Les cours de révision doivent avoir des motifs de croire que les agents « ont tenu compte, outre les difficultés, de facteurs humanitaires au sens plus élargi » (non souligné dans l’original; Marshall c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 72, au par. 33 [Marshall]).

[25] Il faut en outre que les motifs de l’agent contiennent une description explicite de ce qu’implique réellement l’intérêt supérieur de l’enfant (Rainholz au para 90; Francois c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 748 aux para 13, 16).

[26] Ici, je suis d’avis que l’agent a mené une analyse raisonnable de l’intérêt supérieur de Leticia. Premièrement, je ne suis pas convaincu que l’agent ait effectué une analyse des difficultés comme point de départ de l’analyse de l’intérêt supérieur de l’enfant. L’agent a évalué toute la preuve liée à la situation de Leticia au Canada (preuve d’inscription à l’école, relevés de notes de l’école, les récompenses scolaires qu’elle a obtenues, les lettres d’appui, dont la lettre de M. Keable) et a accordé un poids favorable à la relation entre M. Keable et Leticia. Ensuite, l’agent a évalué la situation de Leticia advenant un retour au Brésil et a conclu que la preuve au dossier n’était pas suffisante pour démontrer que Leticia subirait des répercussions négatives sur le plan social et culturel ou que son bien-être serait compromis :

Selon la preuve, il faut tenir compte du bien-être affectif, social, culturel et physique de [Leticia] en examinant l’information fournie. J’admets que le retour au Brésil aurait une certaine incidence sur [Leticia], mais la preuve n’indique pas qu’elle ne recevrait pas de soutien affectif de la part de sa famille au Brésil à son retour ni qu’elle subirait des répercussions négatives sur le plan social ou culturel. De plus, la preuve ne permet pas de conclure que le bien-être de [Leticia] serait compromis au Brésil. Je constate que la demandeure mineure maîtrise encore très bien l’espagnol, et les renseignements n’indiquent pas qu’à son retour en 2016, [Leticia] a subi des répercussions défavorables. À la lumière des éléments de preuve présentés par les demandeures, il est établi que l’intérêt supérieur de [Leticia] ou d’autres enfants qui vivent au Canada ne serait pas compromis si elles retournaient au Brésil dans la mesure où une exemption est justifiée. Les demandeures n’ont pas fourni d’éléments de preuve, tels que des lettres de médecins, de psychologues ou d’enseignants au Canada, indiquant qu’il serait contraire à l’intérêt supérieur de [Leticia] ou des autres enfants que les demandeures retournent au Brésil.

Je n’ai aucun doute que [Mme de Oliveira] veut seulement le bien de sa fille; cependant, je ne suis pas convaincu que leur retour au Brésil ait une incidence défavorable sur l’intérêt supérieur de [Leticia] ou des autres enfants en l’espèce. Au bout du compte et faute de preuve du contraire, il est dans l’intérêt supérieur de [Leticia] d’être auprès de ses deux parents, à l’abri des difficultés de la vie dans un contexte d’amour et de soutien. Le témoignage de la demandeure ne permet pas de conclure que les demandeures ne pourraient pas y parvenir si elles retournaient dans leur pays d’origine.

[Je souligne.]

[27] Selon moi, il ne s’agit pas d’une évaluation axée sur les difficultés de Leticia au Brésil, mais bien d’une évaluation de sa situation du point de vue de son intérêt supérieur.

[28] Deuxièmement, je suis d’avis que l’agent a bien défini l’intérêt supérieur de Leticia en affirmant qu’« [a]u bout du compte et faute de preuve du contraire, il est dans l’intérêt supérieur de [Leticia] d’être auprès de ses deux parents, à l’abri des difficultés de la vie dans un contexte d’amour et de soutien ». Enfin, selon moi, l’agent a effectué une analyse raisonnable de l’intérêt supérieur de l’enfant; l’agent n’avait pas à évaluer comment le retour de la famille au Brésil affecterait la santé mentale de Mme de Oliveira et sa capacité de prendre soin de Leticia puisque l’agent n’a pas accepté les conclusions du rapport d’évaluation psychologique de la Dre Marotte. La situation de Mme de Oliveira ne s’apparente pas à la situation de la mère dans Rainholz dont l’évaluation psychologique indiquait un diagnostic provenant d’un psychiatre et que ses problèmes de santé mentale nécessiteraient un suivi.

D. L’agent a pris compte des facteurs humanitaires au sens plus élargi

[29] Les demanderesses citent la décision Marshall c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 72, pour la proposition que les agents chargés des demandes pour motifs d’ordre humanitaire doivent non seulement tenir compte des facteurs traditionnels des difficultés, mais également les principes directeurs importants pour les évaluations liées aux motifs d’ordre humanitaire tels que décrit dans l’affaire Chirwa (voir Kanthasamy au para 13). Elles prétendent qu’on ne trouve pas dans la décision de leur demande CH d’appréciation de cette approche où l’accent est mis sur la compassion et le soulagement des malheurs des autres.

[30] Je partage les principes établis dans les arrêts Chirwa et Kanthasamy, mais je ne suis pas d’accord avec les demanderesses que l’approche énoncée dans ces décisions ne se retrouve pas dans la décision de leur demande CH. L’agent était manifestement conscient du fait que sa décision causerait de la peine aux demanderesses, mais en fin de compte, cela n’a pas suffi à surmonter le fardeau qui pesait sur elles dans ces circonstances. Après avoir exposé les questions et les constatations, l’agent a conclu comme suit :

À la lumière d’une évaluation cumulative des éléments de preuve présentés par les demandeures, j’ai examiné la mesure dans laquelle les demandeures, compte tenu de leur situation particulière, subiraient des difficultés si elles devaient quitter le Canada pour présenter une demande de résidence permanente à l’étranger. Comme il a été mentionné ci-dessus, même si l’obligation de quitter le Canada causera inévitablement certaines difficultés, cela ne suffira pas en soi à justifier la prise de mesures pour motifs d’ordre humanitaire en vertu du paragraphe 25(1). Avant de rendre la présente décision relative aux motifs d’ordre humanitaire, j’ai examiné à fond et évalué tous les faits et facteurs pertinents dont je dispose.

Les demandeures ne souhaitent pas retourner au Brésil. C’est peut-être facile à comprendre, mais ne pas vouloir retourner n’est pas une raison suffisante pour leur permettre de rester au Canada. Le droit canadien exige que les personnes qui cherchent à vivre au Canada de façon permanente « [...] doivent demander et obtenir un visa de résident permanent à l’étranger ».

Les éléments de preuve des demandeures n’appuient pas l’existence d’une dépendance mutuelle entre elles et leurs relations personnelles au Canada qui ferait en sorte qu’elles subiraient des difficultés si ces liens étaient rompus. [...]

Même s’il y aura inévitablement des difficultés liées à l’obligation de quitter le Canada, le fait que les demandeures estiment que le Canada est un endroit où il est plus souhaitable de vivre que le Brésil n’est pas un facteur déterminant dans le cadre d’une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. J’accorde beaucoup de poids à l’idée selon laquelle l’exercice du pouvoir discrétionnaire pour des motifs d’ordre humanitaire devrait déborder du cadre des considérations inhérentes au renvoi d’une personne qui est dans un lieu depuis un certain temps. Le fait qu’une personne laisserait derrière elle des amis et peut-être des membres de la famille, un emploi ou une résidence ne suffit pas nécessairement à justifier l’exercice du pouvoir discrétionnaire.

J’estime que la prépondérance des facteurs invoqués dans la présente demande ne favorise pas les demandeures. J’accorde plus de poids dans la présente demande aux lois sur l’immigration telles qu’elles existent au Canada et je conclus que la situation personnelle des demandeures ne justifie pas une exception à la loi. Aucun pays, y compris le Canada, ne peut garantir que les personnes ne subiront pas de difficultés dans leur vie; d’ailleurs, l’objectif du droit et/ou de l’intérêt public n’est pas d’atténuer les difficultés inhérentes à un renvoi du Canada. Je suis convaincu que les difficultés que les demandeures pourraient éprouver en quittant le Canada sont une conséquence de l’application normale et prévisible de la loi.

Pour obtenir une mesure d’ordre humanitaire, il incombe à un demandeur de démontrer, compte tenu de l’ensemble des circonstances, que des Canadiens décents et honnêtes, conscients de la nature exceptionnelle des mesures d’ordre humanitaire, jugeraient simplement inacceptable un rejet de la demande. Tout bien pesé, selon l’évaluation des observations présentées par les demandeures dans leur ensemble, elles n’établissent pas que l’exemption de l’obligation de demander la résidence permanente de l’étranger est justifiée en l’espèce.

[Je souligne.]

[31] En conclusion, le paragraphe 25(1) ne crée pas un régime d’immigration parallèle, mais crée plutôt une exception souple et sensible à l’application habituelle de la LIPR (Kanthasamy aux para 15, 19; Yu c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1028 au para 11). Ici, la lecture de la décision de l’agent dans son ensemble permet de conclure que l’agent a appliqué l’analyse appropriée en évaluant si, compte tenu de l’établissement des demanderesses au Canada, un renvoi au Brésil serait source de difficultés telles qu’une exemption à la LIPR serait justifiée. Lorsque je considère les motifs de l’agent dans leur ensemble, je suis d’avis que l’agent n’a pas appliqué un seuil plus élevé que celui prévu au paragraphe 25(1) de la LIPR dans son analyse de l’établissement des demanderesses au Canada; la conclusion de l’agent au sujet de leur degré d’établissement a été adéquatement expliquée. L’agent a considéré les éléments de preuve démontrant leur établissement au Canada et a expliqué que, malgré certains éléments positifs démontrant leur établissement, la preuve ne confirme pas que leur intégration dans la société canadienne est telle que leur départ causerait des difficultés indépendantes de leur volonté qui ne sont pas envisagées dans la LIPR. Je ne vois rien de déraisonnable pour l’agent de conclure par la négative. L’agent a respecté les principes de l’arrêt Kanthasamy dans son évaluation de la demande CH des demanderesses, notamment le principe directeur voulant que le paragraphe 25(1) vise à « offrir une mesure à vocation équitable lorsque les faits sont de nature à inciter [une personne] raisonnable d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne » (Kanthasamy au para 21). Je suis d’avis de rejeter la demande de contrôle judiciaire.

 


JUGEMENT au dossier IMM-800-21

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. L’intitulé est modifié pour que le nom des demanderesses, Elizabeth Barbara de Oliveira Goncalves et Leticia Oliveira Esperanca Goncalves, soit correctement orthographié.

  3. Il n’y aucune question à certifier.

« Peter G. Pamel »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-800-21

 

INTITULÉ :

ELIZABETH BARBARA DE OLIVEIRA GONCALVES & LETICIA OLIVEIRA ESPERANCA GONCALVES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AFFAIRE ENTENDUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 27 janvier 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE PAMEL

 

DATE DES MOTIFS :

LE 18 février 2022

 

COMPARUTIONS :

Me Virginie Beaubien

Pour leS demanderESSES

Me Daniel Latulippe

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Me Virginie Beaubien, Avocate

Montréal (Québec)

 

Pour leS demanderESSES

Procureur général du Canada

Montréal (Québec)

Pour le défendeur

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.