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Date : 20220511


Dossier : T-2030-19

Référence : 2022 CF 693

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 11 mai 2022

En présence de madame la juge Aylen

ENTRE :

THOMAS DELIVA

demandeur

et

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Le demandeur est un ancien membre stagiaire de la Gendarmerie royale du Canada [la GRC]. Il sollicite le contrôle judiciaire d’une décision d’appel rendue aux termes de l’alinéa 20(1)b) des Consignes du commissaire (exigences d’emploi), DORS/2014-292 et de la partie 3 des Consignes du commissaire (griefs et appels), DORS/2014-289 [la décision de dernier niveau]. Dans cette décision, l’arbitre [l’arbitre de dernier niveau] a conclu que le demandeur n’avait pas démontré que la conclusion tirée par l’arbitre de premier niveau [l’arbitre de premier niveau] selon laquelle le demandeur n’avait pas les compétences requises pour être membre de la GRC était manifestement déraisonnable, avait été rendue de manière inéquitable sur le plan de la procédure ou était entachée d’une erreur de droit. L’arbitre de dernier niveau a rejeté l’appel du demandeur et a confirmé la décision de l’arbitre de premier niveau.

[2] Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur fait valoir que la décision de dernier niveau était déraisonnable, que l’arbitre de dernier niveau n’a pas examiné adéquatement l’allégation du demandeur selon laquelle l’arbitre de premier niveau a fait preuve de partialité et que le demandeur a été privé de son droit à l’équité procédurale, tant devant l’arbitre de premier niveau que devant l’arbitre de dernier niveau. Pour les motifs qui suivent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

I. Contexte

[3] En 2016, le demandeur a terminé le Programme d’instruction des cadets de l’École de la GRC, Division Dépôt, en Saskatchewan. Après avoir obtenu son diplôme de l’École de la GRC, le demandeur a été nommé membre de la GRC conformément à l’article 9.3 de la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, LRC 1985, c R-10 [la Loi sur la GRC], pour la période de stage de deux ans prévue dans les Consignes du commissaire (exigences d’emploi).

[4] Le demandeur a été affecté au Programme de formation pratique de la GRC d’une durée de six mois, au détachement de Wood Buffalo, division « K ».

[5] Le Programme de formation pratique, que le demandeur a commencé le 25 octobre 2016, est conçu pour permettre aux nouveaux membres de se préparer à leurs futurs rôles et de développer les compétences requises pour réussir, avec l’aide d’un moniteur de formation pratique et d’autres ressources complémentaires. Pour réussir le Programme de formation pratique, le nouveau membre doit obtenir la cote « professionnel » à toutes les compétences.

[6] Le demandeur n’a pas satisfait aux exigences du Programme de formation pratique, ayant reçu la cote « inacceptable » dans les domaines suivants : [traduction] « préoccupations en matière de sécurité », « capacité de conduite », « prise en charge, manipulation, arrestation et libération de suspects et de prisonniers » et « développement personnel ».

[7] Le 26 avril 2017, le demandeur s’est vu accorder une prorogation de trois mois pour lui permettre de réussir le Programme de formation pratique.

[8] Le 19 mai 2017, le demandeur a reçu un avis de non-respect des normes requises, l’informant qu’il devait obtenir la cote « professionnel » à toutes les compétences requises d’ici le 25 juillet 2017.

[9] Pendant la prorogation, le demandeur a reçu une formation complémentaire visant à améliorer ses performances de conduite. Cependant, ses moniteurs ont continué de signaler d’importantes préoccupations en matière de sécurité concernant sa façon de conduire, y compris des inquiétudes pour leur propre sécurité et des difficultés à effectuer plusieurs tâches à la fois.

[10] Le 28 août 2017, le demandeur a reçu un deuxième avis de non-respect des normes requises et s’est vu accorder une deuxième prorogation de trois mois pour terminer le Programme de formation pratique. Pendant cette prorogation, le demandeur a reçu une formation complémentaire visant à améliorer ses compétences.

[11] Le 8 septembre 2017, le demandeur a été retiré des tâches opérationnelles et a été affecté à des tâches administratives en raison de préoccupations liées à la sécurité des agents.

[12] Le 25 septembre 2017, le demandeur a reçu signification d’un avis d’interruption de la période de stage, qui indiquait que sa période de stage était interrompue parce qu’il avait été affecté à des tâches administratives.

[13] Il a été établi que le demandeur était médicalement apte à effectuer toutes les tâches avant d’être affecté à des tâches administratives. Cependant, après avoir été affecté à des tâches administratives, le profil médical du demandeur a changé.

[14] Un processus a été amorcé par la GRC conformément aux Consignes du commissaire (exigences d’emploi) afin de déterminer si le demandeur avait les compétences pour continuer à travailler pour la GRC, processus ayant abouti à une recommandation de licenciement du demandeur, le 20 août 2018. Un avis d’intention de licencier un membre stagiaire a été signifié au demandeur le 11 septembre 2018.

[15] Conformément à l’article 13 des Consignes du commissaire (exigences d’emploi), le surintendant principal Raj Gill, l’officier de l’Administration et du Personnel de la division « K », s’est vu attribuer l’autorité nécessaire pour rendre une décision concernant la recommandation de licenciement du demandeur, et est désigné aux présentes comme l’arbitre de premier niveau.

[16] Le demandeur a reçu signification d’une copie de la recommandation de licenciement et des documents justificatifs, et il a eu la possibilité de fournir une réponse écrite à l’avis d’intention de licencier un membre stagiaire. Le demandeur a présenté plusieurs observations écrites à l’arbitre de premier niveau.

II. Décision de l’arbitre de premier niveau

[17] La question dont le décideur est saisi dans le cadre d’un processus de licenciement d’un membre stagiaire est de savoir si un problème est survenu au cours de la période de stage du membre, qui démontre que ce dernier n’a pas les compétences requises pour faire carrière comme agent de la GRC. Aux termes du paragraphe 24.4.1.6 du Manuel d’administration, des facteurs peuvent être pris en compte dans cette analyse des compétences :

1.6 L’évaluation des compétences d’un membre stagiaire (voir le paragraphe 27-4-1), y compris, sans toutefois s’y limiter, une évaluation du membre stagiaire :

1.6.1 la fiabilité, y compris l’assiduité au travail;

1.6.2. la compatibilité avec les collègues ou les clients;

1.6.3. la capacité de répondre aux exigences du travail, y compris celles liées à la charge de travail et à la capacité de suivre le Programme de formation pratique;

1.6.4. la capacité de se conformer aux politiques, aux procédures, aux pratiques et au code de déontologie applicables;

1.6.5. la personnalité, l’intégrité et l’attitude.

[18] Dans une décision datée du 4 février 2019, l’arbitre de premier niveau a conclu qu’il ressortait clairement de la preuve que le demandeur n’avait pas les compétences requises pour continuer d’être membre de la GRC et qu’il devrait être licencié à compter du 26 février 2019.

[19] Dans sa décision, l’arbitre de premier niveau a précisé ce qui suit sous la rubrique « Équité procédurale » :

[traduction]
Conformément aux Consignes du commissaire (exigences d’emploi), le gend. Deliva a eu l’occasion de fournir une réponse écrite. Le 20 septembre 2018, le gend. Deliva a présenté une demande écrite par courriel en vue d’obtenir une prorogation du délai qui lui avait été accordé pour répondre à l’avis, demandant « au moins deux autres semaines supplémentaires ». Le 24 septembre 2018, conformément à l’alinéa 16(5)b) des Consignes du commissaire (exigences d’emploi), j’ai accordé au gend. Deliva une prorogation jusqu’au 17 octobre 2018 pour qu’il présente sa réponse écrite.

Le 9 octobre 2018, le gend. Deliva a envoyé par courriel sa réponse à l’avis et a indiqué qu’elle serait également envoyée par la poste. Dans sa réponse, le gend. Deliva a déclaré que « s’il disposait de plus de temps, [il] pourrait fournir un peu plus de contexte et d’informations utiles à ce processus ». Il a également déclaré que le processus d’exigences d’emploi devrait être suspendu en attendant que la GRC s’acquitte de ses tâches concernant ses mesures d’adaptation. J’étais préoccupé par le manque de renseignements fournis par le gend. Deliva. Je ne voulais pas qu’il rate l’occasion de fournir des éléments de preuve ou des observations qui, selon lui, étaient nécessaires pour répondre pleinement aux réserves mentionnées dans la recommandation, y compris une preuve médicale à jour à l’appui de ses exigences en matière de mesures d’adaptation. Par conséquent, le 17 octobre 2018, j’ai signé une note informant le gend. Deliva que je prorogeais le délai jusqu’au 1er novembre 2018 afin qu’il puisse fournir d’autres observations écrites.

Le 29 octobre 2018, le gend. Deliva a présenté des observations supplémentaires dans lesquelles les questions de fond n’étaient pas abordées, et, encore une fois, il a demandé que l’affaire soit mise en suspens. Il a également présenté une demande visant ma récusation comme décideur dans ce processus. Il a ensuite présenté une deuxième réponse le 1er novembre 2018, en joignant des documents.

Le 15 novembre 2018, j’ai signé une note informant le gend. Deliva que, bien que les Consignes du commissaire (exigences d’emploi) ne précisent pas le droit de demander la récusation d’un décideur par un membre stagiaire, la Loi sur la GRC exige que tous les membres remplissent leurs fonctions avec impartialité (alinéa 37c)). Il est de mon devoir, en tant que décideur, de garder l’esprit ouvert et de ne rendre ma décision qu’après avoir obtenu les renseignements suffisants visés au paragraphe 17(1) des Consignes du commissaire (exigences d’emploi). À ce moment-là, je n’avais pas encore rendu ma décision sur la question de fond relative aux compétences, car je voulais m’assurer que le gend. Deliva avait eu la possibilité raisonnable de présenter ses observations écrites. Je n’avais pas à ma disposition ses observations portant sur les questions de fond.

J’ai également informé le gend. Deliva que, s’il estimait que des renseignements ou des observations auraient une incidence sur l’évaluation de ses compétences ou pourraient avoir des conséquences sur mon évaluation de ses compétences, il devait me les présenter. Même si le gend. Deliva n’avait pas demandé une autre prorogation de délai, j’ai estimé qu’il devait bénéficier d’un délai supplémentaire pour présenter des observations écrites sur les questions de fond. Je lui ai accordé jusqu’au 29 novembre 2018 pour ce faire.

Le 29 novembre 2018, le gend. Deliva a présenté sa réponse à ma note ainsi que des pièces qui y étaient jointes, et a indiqué que son médecin avait fourni certains renseignements médicaux au médecin-chef de la Division « K » le 9 novembre 2018. Le gend. Deliva a déclaré qu’il n’avait pas encore été mis au courant du contenu du document ni de ce que le médecin-chef comptait faire de ce document. Il a indiqué qu’il espérait que d’autres documents médicaux soient fournis sous peu.

Le 10 décembre 2018, le gend. Deliva m’a envoyé un courriel m’informant qu’il avait récemment reçu les documents qu’il attendait de son médecin, et que ces documents avaient été transmis au médecin-chef pour examen. Il m’a demandé de m’adresser au médecin-chef pour obtenir les renseignements médicaux pertinents pour que je puisse prendre une décision éclairée. Le 21 décembre 2018, j’ai reçu de nouveaux renseignements médicaux du médecin-chef. Pour m’assurer que le gend. Deliva était au courant de tous les renseignements dont je disposais, je lui ai transmis ces nouveaux renseignements les 24 et 27 décembre 2018, et je lui ai accordé jusqu’au 10 janvier 2019 pour présenter ses observations écrites.

Le 7 janvier 2019, le gend. Deliva m’a envoyé un courriel m’informant qu’il avait reçu de nouveaux renseignements qui, selon lui, avaient une grande importance pour le processus d’exigences d’emploi (EE), mais qu’il lui fallait quelques jours pour les obtenir par écrit avant de pouvoir me les transmettre. Il a également déclaré qu’il attendait toujours de recevoir d’autres renseignements de la part du médecin-chef. Le gend. Deliva a ensuite envoyé un courriel le 10 janvier 2019, dans lequel il m’a fourni ces renseignements. Il a cependant de nouveau déclaré qu’il attendait toujours certains renseignements du médecin-chef et m’a demandé d’attendre la réception de ces renseignements.

Le 17 janvier 2019, le médecin-chef a envoyé un courriel au gend. Deliva indiquant qu’il ne pouvait pas ajouter d’autres commentaires aux renseignements qu’il avait fournis ou à la correspondance ultérieure du gend. Deliva. Ensuite, le 21 janvier 2019, le gend. Deliva m’a envoyé un courriel indiquant que la GRC est tenue de renoncer au processus d’exigences d’emploi pour suivre le processus relatif à la prise de mesures d’adaptation.

Le 24 janvier 2019, j’ai transmis une note au gend. Deliva l’informant que j’avais recueilli suffisamment de renseignements pour rendre ma décision sur la question de ses compétences.

Le gend. Deliva a disposé de plus de quatre mois pour me fournir des renseignements, et il a présenté des observations importantes au cours de cette période.

[20] En ce qui concerne la question de savoir si le demandeur avait les compétences requises pour continuer d’être membre de la GRC, l’arbitre de premier niveau a conclu que, selon la prépondérance des probabilités, le demandeur n’avait pas été en mesure de démontrer qu’il pouvait satisfaire de façon constante aux exigences de rendement et de travail de la GRC. L’arbitre de premier niveau est parvenu aux conclusions suivantes :

[traduction]

  1. Le demandeur a bénéficié d’une supervision et d’une formation directes et continues pendant onze mois au cours desquels il a eu quatre moniteurs de formation pratique et a reçu une formation supplémentaire à l’extérieur de son détachement.

  2. Pour remédier à la conduite problématique et dangereuse du demandeur, celui-ci a été envoyé à la division Dépôt de la GRC pour suivre une formation complémentaire sur la conduite sur autoroute, la conduite de véhicules d’urgence et la conduite de voitures de patrouilles. À l’issue de cette formation, le demandeur s’est vu attribuer la cote « inacceptable » pour la conduite sur autoroute et la conduite de véhicules d’urgence.

  3. Pour répondre aux préoccupations liées à la sécurité des agents, le demandeur a été envoyé à la section de la formation de la Division « K », où il a travaillé avec des instructeurs tactiques sur le modèle de recours à la force, les mises en situation et les exposés sur la sécurité, ainsi que sur les tactiques relatives aux bâtiments et aux véhicules. À la fin de cette formation, un rapport a été rédigé et le demandeur s’est vu attribuer la cote « inacceptable » pour avoir omis de soumettre un sujet à une fouille, d’utiliser l’option d’intervention de correction, d’arrêter un sujet pour avoir proféré des menaces et de dégainer son pistolet pendant l’arrêt d’un véhicule. Le rapport indiquait cependant que son rendement s’était amélioré au fur et à mesure de la formation.

  4. Malgré la formation mentionnée plus haut, le demandeur a démontré qu’il était incapable de suivre le Programme de formation pratique. Il n’avait pas démontré qu’il était en mesure d’en arriver à un point où il serait apte à fonctionner par lui-même, en l’absence d’un moniteur de formation pratique, et il n’avait pas réglé les problèmes importants relatifs à la conduite et à la sécurité des agents lors de l’arrestation et de la fouille de suspects.

  5. Bien que le demandeur ait affirmé qu’on l’a laissé tomber pendant la formation pratique (il a affirmé que ses moniteurs de formation pratique n’avaient pas consigné des commentaires exacts, que des plans de perfectionnement adéquats ne lui avaient pas été fournis, que ses moniteurs de formation pratique ne possédaient pas les compétences nécessaires pour lui fournir les conseils et l’orientation dont il avait besoin et qu’il n’avait pas eu suffisamment de temps pour mettre en pratique les techniques qu’il avait apprises dans la formation de rattrapage avant d’être affecté à des tâches administratives), les éléments de preuve présentés à l’arbitre de premier niveau n’étayaient pas cette affirmation. Il ressort des éléments de preuve que les moniteurs de formation pratique ont consigné des commentaires positifs et négatifs, que des plans de perfectionnement ont été fournis au demandeur, et que tous ses moniteurs de formation pratique ont reçu une formation adéquate et affichaient un solide rendement au détachement. De plus, l’arbitre de premier niveau a fait remarquer que, dès que le demandeur est revenu de sa formation de rattrapage, son moniteur de formation pratique a constaté qu’il n’avait pas procédé à la fouille d’une personne arrêtée qu’il avait installée à l’arrière d’un véhicule de police et qui était clairement en possession d’un couteau.

  6. Le demandeur s’est vu attribuer la cote « inacceptable » aux compétences suivantes : i) planification et organisation; ii) gestion des dossiers et de l’information; iii) préoccupations en matière de sécurité; iv) capacités de conduite; v) prise en charge, manipulation, arrestation et libération de suspects et de prisonniers; vi) développement personnel.

  7. Le demandeur n’a pas démontré sa capacité à respecter les politiques, procédures et pratiques établies de la GRC.

  8. Le demandeur a démontré de façon constante, tant à l’interne avec ses moniteurs de formation pratique et ses superviseurs qu’à l’externe avec les facilitateurs de formation supplémentaire, qu’il n’était pas en mesure de satisfaire aux normes de la GRC par lui-même.

[21] En ce qui concerne la question des mesures d’adaptation, l’arbitre de premier niveau a fait remarquer ce qui suit :

[traduction]

  1. Le 6 juin 2017, le conseiller en renouvellement et en perfectionnement professionnel, le sergent York, a mené une entrevue avec le demandeur au sujet de ses problèmes de rendement, plus précisément ses pratiques de conduite et de sécurité des agents. Pendant cette entrevue, le demandeur a mentionné qu’il allait consulter un spécialiste, car il pensait être atteint d’un trouble déficitaire de l’attention [TDA] qui influait sur sa capacité à effectuer plusieurs tâches à la fois et à comprendre tout ce qui se disait à la radio lorsqu’il se concentrait sur un rapport ou qu’il s’entretenait avec une personne. Le demandeur a déclaré que, s’il recevait un diagnostic de TDA, il serait en mesure de traiter ce trouble avec des médicaments.

  2. Le médecin-chef de la Division « K » a dirigé le demandeur vers un spécialiste pour une évaluation indépendante et, en se fondant sur le rapport du spécialiste, le 5 juillet 2017, le demandeur a été jugé apte à assumer des fonctions opérationnelles sans restriction. Le demandeur n’a pas soulevé d’objection à l’égard de cette évaluation et a poursuivi ses activités sans restriction, limitation ou mesures d’adaptation.

  3. À l’automne 2017, et seulement après que le demandeur a été affecté à des tâches administratives, celui-ci a produit de nouveaux renseignements médicaux qui indiquaient qu’il avait des ennuis de santé exacerbés par le stress. Les renseignements ont révélé qu’il pouvait retourner au travail si des mesures d’adaptation étaient prises, et être muté à l’extérieur de son lieu de travail actuel, puisqu’il a affirmé qu’il subissait du stress en raison de prétendus conflits et harcèlements sur le lieu du travail, dans son poste actuel.

  4. Le 30 juin 2018, le demandeur a présenté une demande de mesures d’adaptation. Les mesures d’adaptation demandées comprenaient : a) permettre l’utilisation d’un enregistreur audio pendant les réunions; b) avoir recours à un moniteur de formation pratique expérimenté, dont les capacités ont été démontrées et ayant une expérience en enseignement ou une connaissance de son état; c) lui accorder une période de formation supplémentaire pour s’adapter aux nouvelles tâches; d) rencontrer les superviseurs à l’occasion (une ou deux fois par semaine) pour discuter de l’établissement de l’ordre de priorité des tâches; e) il arrive souvent que les superviseurs et les moniteurs demandent des rapports d’étape pour faire le point; f) bénéficier d’un horaire variable afin d’éviter de se laisser distraire au travail; g) avoir un poste de travail informatique quelque peu isolé des distractions inutiles; h) bénéficier de plus de temps avec un moniteur dans une voiture pour travailler sur des enjeux précis avec en tête des stratégies d’apprentissage spécifiques, y compris des délais et des objectifs pertinents et quantifiables; i) profiter de pauses structurées dans ses quarts de travail pour lui permettre de bouger et de faire de l’exercice pendant les pauses du dîner; j) pouvoir consulter un psychiatre et un psychologue pour recevoir des traitements habituels, y compris une thérapie cognitivo-comportementale.

[22] L’arbitre de premier niveau a soulevé trois réserves quant au moment auquel les nouveaux renseignements médicaux ont été fournis par le demandeur. Tout d’abord, il a souligné que ce n’est qu’après avoir été retiré des tâches opérationnelles et après avoir été informé du début du processus de licenciement d’un membre stagiaire que les renseignements médicaux du demandeur ont changé, de sorte qu’une partie de son incapacité à exécuter ses tâches découlait du stress causé par les conflits et harcèlements sur le lieu du travail allégués, exacerbant un état préexistant. L’arbitre de premier niveau a fait remarquer que ses renseignements médicaux avaient été modifiés à partir d’une autodéclaration faite à ses médecins, ce qui nous rend « perplexes ».

[23] Deuxièmement, l’arbitre de premier niveau a noté que les documents fournis par le demandeur, combinés à l’absence de rapports rédigés à la même époque au sujet des prétendus conflits ou harcèlement sur le lieu de travail, transmis à ses fournisseurs de soins de santé ou à la GRC, l’ont amené à conclure que le stress auquel faisait face le demandeur était un stress normal par rapport au stress subi par les membres stagiaires. Bien que l’arbitre de premier niveau ait reconnu que le demandeur était susceptible d’avoir un handicap qui avait probablement nui à son rendement et à sa capacité à démontrer ses compétences, il n’a pas retenu que des problèmes interpersonnels auraient exacerbé son état.

[24] Troisièmement, l’arbitre de premier niveau a indiqué que les notes des conversations entre le demandeur et le médecin-chef, et entre le demandeur et un expert en sinistres de la Great-West, compagnie d’assurance-vie ont révélé que le demandeur serait en mesure de retourner au travail s’il était transféré dans une autre unité et si on lui fournissait les mesures d’adaptation demandées. Cependant, l’arbitre de premier niveau a souligné qu’il ne reconnaissait pas l’existence d’un conflit sur le lieu de travail qui aurait créé un plus grand stress pour le demandeur et que, par conséquent, une mutation ne réduirait pas le stress qu’il subirait dans un nouveau cadre.

[25] L’arbitre de premier niveau a souligné que les mesures d’adaptation demandées par le demandeur posaient deux autres problèmes; le premier étant que la plupart de ces mesures étaient déjà offertes et le second, qu’il n’était pas convaincu que les mesures d’adaptation demandées aideraient le demandeur à démontrer ses compétences.

[26] L’arbitre de premier niveau a ainsi conclu son analyse relative à l’obligation de prendre des mesures d’adaptation :

[traduction]
Ma réserve la plus importante est que les mesures d’adaptation demandées ne peuvent pas être offertes au gend. Deliva sur le terrain. Les policiers doivent répondre à une grande variété d’appels. Ils doivent être en mesure de recevoir des renseignements et de s’adapter à des circonstances changeantes et potentiellement dangereuses. Ils doivent être en mesure de répondre et de réagir avec assurance et rapidité à chaque circonstance, au fur et à mesure qu’elle se présente. Ils doivent constamment se souvenir des protocoles de sécurité des agents et être capables de conduire un véhicule de police sans être distraits, sous peine de conséquences graves et potentiellement mortelles. Ils ne peuvent pas disposer de plus de temps pour examiner les circonstances ou avoir un environnement plus calme pour réfléchir, car les contrevenants et d’autres personnes pourraient profiter de leurs hésitations, erreurs ou lacunes, ce qui pourrait les mettre en danger et constituer un risque pour les autres bureaux et le public. Il ne serait pas non plus raisonnable d’intégrer des « pauses structurées » dans les quarts de travail du gend. Deliva puisqu’il est impossible de prévoir quand un appel de service peut être reçu.

Par conséquent, je conclus que les mesures d’adaptation demandées par le gend. Deliva lui ont déjà été offertes pour les activités qui se déroulent dans les environnements contrôlés du bureau. Je conclus également qu’il n’est pas possible d’offrir des mesures d’adaptation au gend. Deliva, sans que cela lui cause des difficultés excessives dans son rôle de policier opérationnel. Il serait trop dangereux pour le gend. Deliva et d’autres personnes de tenter de répondre à ses besoins tout en tenant compte des exigences de son rôle en tant que policier pleinement opérationnel. Bien que le gend. Deliva ait un handicap et qu’il ait subi des effets préjudiciables liés à ce handicap, une exigence professionnelle justifiée rendrait impossible que l’on réponde à ses besoins, sans que cela lui cause des difficultés excessives.

[27] L’arbitre de premier niveau a ensuite examiné la demande de mesures d’adaptation du demandeur visant à ce que des fonctions administratives lui soient attribuées à titre de membre régulier. L’arbitre de premier niveau a conclu que la jurisprudence actuelle indique que l’obligation de prendre des mesures d’adaptation n’oblige pas un employeur à envisager de prendre de telles mesures à l’égard d’un stagiaire pour lui offrir un poste modifié ou un autre poste. Comme le demandeur était un membre stagiaire, l’arbitre de premier niveau a conclu qu’il n’était pas nécessaire d’examiner d’autres postes ou fonctions potentielles au sein de la GRC.

[28] L’arbitre de premier niveau a fait remarquer que, selon la politique de la GRC, il n’était tenu que d’examiner si une mesure d’adaptation pouvait aider le demandeur à démontrer ses compétences. Comme le demandeur avait reçu une aide semblable à une mesure d’adaptation dans le cadre du Programme de formation pratique menant à l’exercice de fonctions administratives, mais sans obtenir la note de passage, et qu’on ne pouvait pas répondre à ses besoins sans que cela lui cause des difficultés excessives, l’arbitre de premier niveau a conclu qu’il était impossible d’en arriver à un compromis qui l’aiderait à démontrer ses compétences.

[29] Le 19 février 2019, le demandeur a interjeté appel de la décision de l’arbitre de premier niveau devant le Bureau de la coordination des griefs et des appels, affirmant dans son mémoire d’appel que la décision avait été rendue d’une manière qui contrevenait aux principes d’équité procédurale applicables, qu’elle était entachée d’une erreur de droit et qu’elle était manifestement déraisonnable. Plus précisément, le demandeur a affirmé que la décision [TRADUCTION] « a été rendue sans que tous les faits n’aient été examinés, qu’elle ne tient pas compte du besoin de mesures d’adaptation et qu’elle viole [ses] droits fondamentaux de la personne ».

III. Décision en cause

[30] L’appel du demandeur à l’encontre de la décision [la décision de premier niveau] devait être interjeté conformément aux Consignes du commissaire (griefs et appels).

[31] Le paragraphe 44(1) des Consignes du commissaire (griefs et appels) dispose que « [l]’arbitre rend une décision sur l’appel ou sur toute question s’y rattachant avec célérité et sans formalisme en tenant compte des principes d’équité procédurale ».

[32] Lors de l’examen d’un appel, il n’appartient pas à l’arbitre d’examiner l’affaire de novo. Plutôt, comme l’énonce le paragraphe 47(3), l’arbitre doit déterminer si le demandeur a démontré, selon la prépondérance des probabilités, que la décision de l’arbitre de premier niveau contrevient aux principes d’équité procédurale, est entachée d’une erreur de droit ou est manifestement déraisonnable.

[33] Le paragraphe 47(1) prévoit que l’arbitre qui dispose d’un appel peut rendre une décision rejetant l’appel et confirmant la décision portée en appel ou renvoyer l’affaire à un autre décideur et ordonner la réparation qui s’impose.

[34] L’arbitre de dernier niveau a rendu une décision de 135 pages, dans laquelle il a tranché les six questions suivantes soulevées par le demandeur, à savoir : 1) : si la décision de premier niveau était inéquitable sur le plan de la procédure parce que le demandeur n’a pas eu l’occasion de donner sa version des faits; 2) si la décision de premier niveau était inéquitable sur le plan de la procédure parce que l’arbitre de premier niveau a fait preuve de partialité; 3) si la décision de premier niveau était manifestement déraisonnable en ce que tous les faits n’ont pas été examinés et pris en compte; 4) si la décision de premier niveau était manifestement déraisonnable compte tenu du dossier examiné par l’arbitre de premier niveau; 5) si la décision de premier niveau était manifestement déraisonnable en ce que la demande de mesures d’adaptation du demandeur n’a pas été examinée adéquatement; 6) si la décision de premier niveau était entachée d’une erreur de droit.

[35] En ce qui concerne la première question, l’arbitre de dernier niveau a examiné toute la correspondance entre le demandeur et l’arbitre de premier niveau, les diverses prorogations de délai accordées au demandeur pour qu’il présente ses observations et ses éléments de preuve ainsi que les diverses demandes de l’arbitre de premier niveau portant sur des éléments de preuve précis au sujet desquels l’arbitre de premier niveau avait prévenu le demandeur qu’il n’avait pas fourni suffisamment de détails.

[36] Le demandeur a affirmé qu’il était injuste que l’arbitre de premier niveau rende une décision avant qu’une décision soit rendue sur l’ensemble des autres griefs et plaintes déposés par le demandeur au sujet de la conduite des personnes qui avaient fourni des renseignements dans le cadre du processus de licenciement d’un membre stagiaire. Le demandeur a fait valoir que le processus de licenciement d’un membre stagiaire aurait dû être mis en suspens jusqu’à ce que l’on ait tiré les conclusions relatives à ses autres griefs et plaintes. S’appuyant sur cette position, le demandeur n’a fourni à l’arbitre de premier niveau que des renseignements limités sur ces autres griefs et plaintes. L’arbitre de dernier niveau a fait remarquer que l’arbitre de premier niveau avait informé le demandeur que chaque processus était distinct et qu’il ne tiendrait compte que des éléments de preuve qu’il avait présentés dans le cadre du processus de licenciement d’un membre stagiaire. Le demandeur s’est ensuite vu accorder un délai supplémentaire pour présenter d’autres éléments de preuve et observations.

[37] L’arbitre de dernier niveau a déterminé que le demandeur avait eu de nombreuses occasions de fournir des renseignements qui, selon lui, auraient pu être examinés par l’arbitre de premier niveau. Si le demandeur n’a pas fourni ces renseignements, c’est qu’il a choisi de ne pas le faire.

[38] En ce qui concerne la deuxième question, le demandeur a affirmé que l’arbitre de premier niveau était également un « défendeur » (c.-à-d. un décideur) dans d’autres processus amorcés par le demandeur, et que l’arbitre de premier niveau était partial en raison de la relation qu’ils entretenaient dans le cadre de ces processus. Le demandeur a également affirmé que les décisions de l’arbitre de premier niveau dans d’autres affaires ainsi que ses actions et commentaires dans le cadre du processus de licenciement d’un membre stagiaire démontraient qu’il avait une opinion défavorable à son égard.

[39] L’arbitre de dernier niveau a souligné que, bien que le demandeur ait fait référence à d’autres processus qu’il avait amorcés dans lesquels l’arbitre de premier niveau prenait part, il n’avait pas précisé la nature de ces processus ou de la participation de l’arbitre de premier niveau dans ces processus ou encore les interactions ou les décisions attribuables à l’arbitre de premier niveau qui, selon lui, démontraient sa partialité.

[40] L’arbitre de dernier niveau a conclu que le fait que l’arbitre de premier niveau ait pu prendre part à plusieurs décisions contestées par un membre ne démontre pas en soi sa partialité. En outre, l’arbitre de dernier niveau a conclu qu’en l’absence de détails relatifs à la « relation » entre l’arbitre de premier niveau et le demandeur, ce dernier n’avait pas réussi à démontrer que l’arbitre de premier niveau était partial parce qu’il prenait part à d’autres processus amorcés par le demandeur.

[41] De plus, l’arbitre de dernier niveau a conclu que la décision de l’arbitre de premier niveau de mettre en suspens le processus de licenciement d’un membre stagiaire en attendant l’issue des autres processus ne démontrait pas de partialité à l’encontre du demandeur. En outre, les décisions de l’arbitre de premier niveau dans d’autres affaires concernant d’autres employés ont été jugées non pertinentes quant au processus de licenciement d’un membre stagiaire, et ne permettent pas de conclure à une quelconque partialité de la part de l’arbitre de premier niveau. L’arbitre de dernier niveau a également rejeté l’affirmation du demandeur voulant que l’arbitre de premier niveau ait déjà pris sa décision sur la question des mesures d’adaptation en se reportant à un document qui indiquait que la GRC s’était déjà efforcée de tenir compte des besoins du demandeur ou en attirant l’attention du demandeur sur certaines décisions rendues sur la question des mesures d’adaptation.

[42] En ce qui concerne la troisième question, le demandeur a affirmé devant l’arbitre de dernier niveau que la décision de l’arbitre de premier niveau était déraisonnable parce qu’elle a été rendue sans que tous les faits n’aient été examinés (sans attendre l’issue des autres griefs et plaintes). Le demandeur a soutenu que les autres processus qu’il avait amorcés étaient étroitement liés au processus de licenciement d’un membre stagiaire, et que le fait de fournir des renseignements relatifs à ce processus pourrait nuire aux autres processus. L’arbitre de dernier niveau a conclu que l’arbitre de premier niveau n’était pas tenu d’attendre l’issue des autres processus avant de rendre sa décision. Le demandeur a eu amplement l’occasion de présenter les éléments de preuve nécessaires pour étayer sa thèse et a reçu plusieurs avertissements l’invitant à le faire. Dans la mesure où le demandeur a choisi de ne pas fournir suffisamment de détails pour contester les faits présentés à l’arbitre de premier niveau, l’arbitre de dernier niveau a conclu que l’arbitre de premier niveau avait le droit de se fonder sur ces faits, comme étant non réfutés.

[43] Le demandeur a également affirmé devant l’arbitre de dernier niveau que sa capacité de satisfaire aux normes exigées par le Programme de formation pratique était compromise par son état de santé – à savoir son TDA – et que ce trouble aurait dû être pris en compte lors de la formation. L’arbitre de dernier niveau a conclu que le demandeur n’avait pas présenté la preuve médicale exigée à l’appui de ces prétentions, malgré les demandes répétées de l’arbitre de premier niveau à cet égard.

[44] L’arbitre de dernier niveau a exposé de façon très détaillée les éléments de preuve au dossier concernant les problèmes de rendement du demandeur, et a constaté une récurrence importante des problèmes constants et recensés sur le rendement du demandeur en matière de conduite et de manipulation des prisonniers.

[45] Le demandeur a soutenu que ses formateurs étaient responsables de son incapacité à acquérir les compétences nécessaires pour devenir un policier, et a exprimé diverses réserves au sujet de leur conduite. L’arbitre de dernier niveau a conclu que le dossier révélait que les préoccupations du demandeur avaient fait l’objet d’un examen par des parties externes et que l’arbitre de premier niveau en avait bien tenu compte. L’arbitre de dernier niveau a conclu que le dossier n’étayait tout simplement pas l’affirmation du demandeur.

[46] L’arbitre de dernier niveau a conclu que, compte tenu de la récurrence des problèmes de rendement importants qui ont été portés à la connaissance de l’arbitre de premier niveau, le demandeur n’avait pas démontré que la décision de licenciement rendue par l’arbitre de premier niveau était manifestement déraisonnable.

[47] En ce qui concerne la cinquième question, le demandeur a affirmé que la GRC avait fait preuve de discrimination à son égard en ne prenant pas de mesures d’adaptation relativement à son handicap. L’arbitre de dernier niveau a fait remarquer que cette affirmation partait du principe que le demandeur avait établi qu’il était atteint d’un handicap. L’arbitre de dernier niveau a toutefois conclu que le demandeur ne s’était pas acquitté de son fardeau de démontrer qu’il souffrait d’un handicap pendant la période où il était inscrit au Programme de formation pratique.

[48] L’arbitre de dernier niveau a conclu que le dossier démontrait que le profil médical du demandeur avait été évalué pendant le Programme de formation pratique, et qu’aucun problème de santé lié à la capacité du demandeur d’exercer ses fonctions de policier n’avait été relevé par les médecins spécialistes à ce moment-là. Au contraire, il a été expressément jugé apte à exercer ses fonctions, sans restriction ou exigence en matière de mesures d’adaptation, et le spécialiste qui a évalué le demandeur pour le TDA n’a pas diagnostiqué un tel trouble chez lui.

[49] L’arbitre de dernier niveau a ainsi poursuivi :

[traduction]
[172] Des problèmes de santé subséquents semblent avoir eu une incidence sur l’appelant, après l’interruption de sa période de stage, et il était limité à des tâches administratives en attendant l’issue du processus de licenciement d’un membre stagiaire. Sans fournir de tests médicaux ou d’éléments de preuve médicale pour étayer cette opinion, dans ses observations, l’appelant associe les problèmes de santé qu’il a connus – après avoir été limité à des tâches administratives – à un TDA. Je conclus que l’appelant n’a pas présenté une preuve médicale fiable permettant de déterminer ses problèmes de santé, qu’il n’a pas démontré que ces problèmes de santé ont joué un rôle dans ses problèmes de rendement et que ces problèmes de santé étaient même présents pendant son Programme de formation pratique.

[50] L’arbitre de dernier niveau a conclu que, même si certains éléments de preuve indiquaient que le demandeur avait des problèmes de santé après avoir appris que le processus de licenciement d’un membre stagiaire avait été amorcé, le demandeur n’était pas d’accord avec le commentaire formulé par l’arbitre de premier niveau selon lequel il avait sans doute un handicap qui a probablement influé sur son rendement et sa capacité de démontrer ses compétences. L’arbitre de dernier niveau a conclu que ce commentaire était incompatible avec d’autres conclusions tirées dans la décision de l’arbitre de premier niveau et, plus important encore, qu’il contredisait directement la seule preuve médicale au dossier, à savoir la déclaration expresse du médecin-chef selon laquelle il n’y avait aucun lien de causalité entre l’état de santé pour lequel le demandeur avait été évalué et son rendement.

[51] L’arbitre de dernier niveau a conclu que les arguments avancés par le demandeur voulant qu’on ne lui ait pas offert de mesures d’adaptation n’étaient pas pertinents puisqu’il n’avait pas démontré qu’il souffrait d’une invalidité médicale et que cette invalidité jouait un rôle dans son incapacité à démontrer ses compétences à agir comme policier. L’arbitre de dernier niveau a toutefois poursuivi en concluant que, même si le demandeur avait présenté une preuve médicale de son handicap, ses observations ne suffisaient pas à démontrer que la décision de l’arbitre de premier niveau de ne pas tenir compte d’un handicap dans ces circonstances était manifestement déraisonnable.

[52] En ce qui concerne la sixième question, l’arbitre de premier niveau s’est reporté à l’arrêt de la Cour d’appel de l’AlbertaTWU v Telus, 2014 ABCA 154 et à d’autres décisions pour appuyer sa conclusion selon laquelle des mesures d’adaptation ne sont offertes à un employé en cours de stage que dans le cadre du poste pour lequel il a été embauché. Le demandeur a affirmé que l’arbitre de premier niveau a mal appliqué les dispositions législatives. L’arbitre de dernier niveau a conclu que le demandeur n’a mentionné aucune erreur dans la façon dont l’arbitre de premier niveau a interprété la jurisprudence, mais qu’il a plutôt simplement fait valoir que l’arrêt Telus ne s’appliquait pas dans son cas, sans fournir d’explications.

[53] L’arbitre de dernier niveau a conclu que le demandeur n’avait pas soumis de questions juridiques remettant en cause l’interprétation de la loi faite par l’arbitre de premier niveau concernant l’arrêt Telus, et que l’application, par le demandeur, de l’arrêt Telus était conforme à l’interprétation du droit par l’arbitre de dernier niveau en ce qui a trait aux mesures d’adaptation offertes aux membres stagiaires.

[54] L’arbitre de dernier niveau a conclu que le demandeur n’avait pas démontré que la conclusion tirée par l’arbitre de premier niveau selon laquelle le demandeur n’avait pas les compétences requises pour être membre de la GRC était manifestement déraisonnable, avait été rendue de manière inéquitable sur le plan de la procédure ou était entachée d’une erreur de droit. L’appel a donc été rejeté et la décision de l’arbitre de premier niveau a été confirmée.

IV. Questions en litige et norme de contrôle

[55] Les questions suivantes découlent de la présente demande :

  1. Y a-t-il eu manquement à l’équité procédurale?

  2. La décision de l’arbitre de dernier niveau était-elle raisonnable?

[56] En ce qui concerne la première question en litige, l’examen par la Cour des questions d’équité procédurale n’appelle aucune déférence de la part du décideur. La Cour doit chercher à savoir si la procédure était équitable compte tenu de l’ensemble des circonstances, en se concentrant sur la nature des droits en cause et les conséquences pour la personne concernée [voir Canadian Pacific Railway Company v Canada (Transportation Agency), 2021 FCA 69 aux para 46 et 47]. « La question, en définitive, est de savoir si le demandeur connaissait la preuve à réfuter et s’il a eu une possibilité complète et équitable d’y répondre. » [voir la décision Laag c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 890 au para 10].

[57] En ce qui concerne la deuxième question en litige, lorsque la Cour examine le bien-fondé d’une décision administrative, la norme de contrôle présumée s’appliquer est celle de la décision raisonnable. Aucune exception à cette présomption n’a été soulevée ni ne s’applique [voir l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 23 et 25].

[58] Lors de l’examen du caractère raisonnable d’une décision, la Cour doit déterminer si la décision faisant l’objet du contrôle, notamment son raisonnement et son résultat, est transparente, intelligible et justifiée. La décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti. Il incombe à la partie qui conteste la décision de démontrer qu’elle est déraisonnable [voir Vavilov, précité aux para 15, 83, 85, 99 et 100]. La Cour n’interviendra que si elle est convaincue que la décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » [voir la décision Adenjij-Adele c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2020 CF 418 au para 11].

V. Analyse

A. Le demandeur n’a pas été privé de son droit à l’équité procédurale

[59] Le demandeur fait valoir que, si l’on applique correctement les facteurs énoncés dans l’arrêt Baker c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 RCS 817, il avait droit à un niveau d’équité procédurale élevé dans le cadre du processus de licenciement d’un membre stagiaire, ce dont il a été privé. Il affirme plus précisément que : i) l’arbitre de dernier niveau n’a pas tenu compte correctement de son allégation voulant que l’arbitre de premier niveau ait fait preuve de partialité; ii) l’arbitre de premier niveau et l’arbitre de dernier niveau n’ont pas fait preuve de diligence en examinant tous les faits et éléments de preuve qui leur ont été présentés.

[60] S’agissant de la première question en litige, comme notre Cour l’a déclaré au paragraphe 39 de la décision Zhou c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 633, il incombe à la partie qui allègue une crainte raisonnable de partialité (réelle ou perçue) de faire la preuve qu’une personne raisonnable et bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, croirait que, selon toute vraisemblance, le décideur, consciemment ou non, ne rendrait pas une décision juste. En l’absence d’une telle preuve, les membres des tribunaux administratifs, comme les juges, sont présumés avoir agi de façon juste et impartiale. Le seuil à franchir pour conclure à une partialité est élevé et de simples soupçons sont insuffisants pour franchir ce seuil [voir la décision Première Nation Sagkeeng c Canada (Procureur général), 2015 CF 1113 au para 105 ainsi que l’arrêt Committee for Justice and Liberty c L’Office national de l’énergie, [1978] 1 RCS 369].

[61] Une allégation de crainte raisonnable de partialité doit être étayée par des preuves concrètes qui démontrent un comportement dérogeant à la norme. Elle ne peut reposer sur de simples soupçons, sur des insinuations ou encore sur de simples impressions d’une partie ou de son avocat (Arthur c Canada (Procureur général), 2001 CAF 223 au para 8; Trasvina Ramirez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 809 au para 11; Maxim c Canada (Citoyenneté et l’Immigration), 2012 CF 1029 au para 30).

[62] Le demandeur soutient que le fait que l’arbitre de premier niveau agissait comme arbitre nommé pour régler de nombreux autres griefs remet en question son impartialité. De plus, le demandeur affirme que l’arbitre de premier niveau a formulé des commentaires sur certains aspects de son dossier de [TRADUCTION] « manière hautement inappropriée », qu’il a indiqué quelle serait probablement sa décision avant l’issue du processus et qu’il s’est immiscé de façon inappropriée dans les autres procédures de règlement des griefs en encourageant le demandeur à ne pas poursuivre ces griefs tout en indiquant que ces griefs étaient censés rester distincts. Le demandeur affirme que l’arbitre de dernier niveau n’a pas reconnu que la décision rendue par l’arbitre de premier niveau était entachée de partialité et qu’il n’a pas adéquatement tenu compte de l’allégation de partialité formulée par le demandeur.

[63] Je conclus que le demandeur n’a pas réussi à établir que, de par son comportement, l’arbitre de premier niveau a fait preuve de partialité ou que sa conduite pouvait donner lieu à une crainte raisonnable de partialité. Le fait que l’arbitre de premier niveau participait à d’autres procédures de règlement des griefs déposées par le demandeur ne crée pas, en soi, une crainte raisonnable de partialité, et le demandeur n’a présenté aucune observation ou aucun élément de preuve précis visant à démontrer comment la participation de l’arbitre de premier niveau aux autres procédures de règlement des plaintes et griefs (dont les détails n’ont pas été décrits à la Cour) a nui à sa capacité de rendre une décision équitable sur le processus de licenciement d’un membre stagiaire.

[64] De plus, le demandeur n’a pas démontré en quoi les décisions de l’arbitre de premier niveau, dans d’autres affaires concernant d’autres employés (dont les détails n’ont pas été fournis), ont nui à sa capacité de trancher équitablement l’affaire du demandeur.

[65] De plus, bien que le demandeur affirme que l’arbitre de premier niveau a formulé des commentaires sur certains aspects de son dossier de [TRADUCTION] « manière hautement inappropriée » et qu’il a indiqué quelle serait probablement sa décision avant l’issue du processus, le demandeur n’a pas donné de détails à la Cour sur les commentaires précis sur lesquels il se fonde ou sur la manière dont l’arbitre de premier niveau a annoncé sa décision, et encore moins sur la façon dont une telle conduite satisferait au seuil élevé permettant d’établir une crainte raisonnable de partialité. Dans la mesure où le demandeur se fonde sur le fait que l’arbitre de premier niveau a mentionné que, dans la recommandation de licenciement du demandeur, il était indiqué que divers efforts avaient été déployés pour prendre des mesures d’adaptation à son égard, je conclus que le demandeur n’a pas réussi à démontrer comment cette affirmation satisferait au seuil en matière de partialité énoncé dans la décision Zhou. Au contraire, j’estime qu’il n’y avait rien d’inapproprié à ce que l’arbitre de premier niveau, après avoir conclu que le demandeur souffrait d’un handicap, se demande si des mesures d’adaptation avaient déjà été prises à son égard dans le cadre du Programme de formation pratique, ce qui était une question carrément mise en litige par le demandeur.

[66] Bien que le demandeur soutienne que l’arbitre de premier niveau a tenté de façon inappropriée de s’immiscer dans les autres procédures de règlement de griefs déposées par le demandeur, ce dernier n’a renvoyé la Cour à aucun élément de preuve à l’appui de cette affirmation, ni expliqué en quoi cette prétendue ingérence concerne l’impartialité de l’arbitre de premier niveau.

[67] Dans les circonstances, je conclus que le demandeur n’a pas satisfait au seuil élevé permettant d’établir une crainte raisonnable de partialité et, par conséquent, je conclus que la décision de l’arbitre de dernier niveau portant sur l’allégation de partialité formulée par le demandeur était correcte.

[68] S’agissant de la deuxième question en litige, le demandeur fait valoir que l’arbitre de premier niveau l’a privé de son droit à l’équité procédurale en poursuivant avec le processus de licenciement d’un membre stagiaire avant de statuer sur ses autres plaintes et griefs, et il affirme que les renseignements contenus dans ces plaintes et griefs étaient nécessaires pour statuer adéquatement sur le processus de licenciement d’un membre stagiaire. Cependant, après avoir examiné le dossier, je conclus que le demandeur n’a pas fourni à l’arbitre de premier niveau ou à l’arbitre de dernier niveau suffisamment de détails ou d’arguments pour expliquer la pertinence de ces autres processus et la raison pour laquelle ils justifieraient la mise en suspens du processus de licenciement d’un membre stagiaire en attendant leur décision. Le demandeur s’est vu accorder une prorogation de délai pour fournir ces renseignements, et il a décidé de ne pas les fournir. De même, dans la présente demande, le demandeur n’a donné aucune explication à la Cour sur la pertinence de ces autres processus par rapport au processus de licenciement d’un membre stagiaire. Dans ces circonstances, je conclus qu’il était approprié que le processus de licenciement d’un membre stagiaire se poursuive et que l’arbitre de premier niveau s’en remette aux faits dont il était saisi.

[69] Le demandeur affirme en outre que l’arbitre de dernier niveau n’a pas examiné attentivement tous les faits ni répondu à tous les arguments et questions qui lui ont été présentés, ce qui constitue une violation des droits du demandeur à l’équité procédurale. Le demandeur n’a toutefois pas précisé les faits qui, selon lui, n’ont pas été pris en compte par l’arbitre de dernier niveau ainsi que les arguments et questions qui n’auraient pas été examinés.

[70] Au cours de l’audition de la présente demande, le demandeur a affirmé qu’à au moins une occasion, l’arbitre de premier niveau s’est prononcé sur un point sans donner au demandeur l’occasion de se pencher d’abord sur la question. Cependant, là encore, aucun détail sur cette allégation n’a été fourni à la Cour.

[71] Il incombait au demandeur de démontrer que ses droits procéduraux ont été violés. Le simple fait d’affirmer qu’il y a eu divers manquements à l’équité procédurale, sans préciser les manquements allégués et sans les étayer par des éléments de preuve, ne suffit pas à décharger le demandeur du fardeau de la preuve [voir l’arrêt Contrevenant no 10 c Canada (Procureur général), 2016 CAF 42 au para 12].

[72] À la lumière du dossier qui m’a été présenté, je conclus qu’il n’y a eu aucun manquement au droit du demandeur à l’équité procédurale dans le cadre du processus de licenciement d’un membre stagiaire ni pendant l’appel devant l’arbitre de dernier niveau. Au contraire, le dossier révèle que l’arbitre de premier niveau et l’arbitre de dernier niveau ont déployé des efforts considérables pour veiller à ce que le demandeur ait la possibilité de présenter sa preuve, de répondre à la preuve de la GRC et de remédier aux lacunes relevées dans sa preuve; les arbitres ont fait preuve de beaucoup de patience et d’équité dans leurs rapports avec le demandeur.

B. La décision de l’arbitre de dernier niveau était raisonnable

[73] Il ressort du dossier que, pendant le Programme de formation pratique, les quatre moniteurs du demandeur ont relevé de nombreux problèmes importants au sujet du rendement du demandeur, ce qui leur a fait craindre pour la sécurité du public et leur propre sécurité. Ces problèmes comprenaient, entre autres : a) ne pas fouiller les prisonniers à la recherche d’armes; b) entrer dans une pièce d’une manière peu sécuritaire risquant de permettre à un prisonnier de s’emparer d’armes; c) ne pas reconnaître un danger et ne pas passer les menottes; d) ne pas réagir lorsqu’un suspect mis sous garde a laissé tomber un couteau de sa poche, l’a ramassé et l’a posé sur le capot d’une voiture; e) ne pas verrouiller deux fois les menottes et ne pas garder le contrôle sur un prisonnier; f) heurter le rétroviseur d’une voiture garée lors d’une formation de patrouille policière; g) conduire dans une voie de circulation opposée et ne pas s’en rendre compte avant que son moniteur le lui signale; h) conduire son véhicule dans une zone scolaire tout en regardant son téléphone portable et presque heurter un civil; i) être incapable de maintenir une vitesse appropriée ou rester dans sa propre voie en forçant les autres conducteurs à prendre des mesures d’évitement pour empêcher une collision.

[74] Le demandeur n’a pas contesté devant la Cour l’existence de ces problèmes de rendement. Il affirme plutôt que ses erreurs faisaient partie de son processus d’apprentissage et qu’elles découlaient de son handicap ou étaient exacerbées par celui-ci, handicap à l’égard duquel il soutient qu’il était nécessaire de prendre des mesures d’adaptation. Le demandeur affirme qu’il a présenté des documents concernant ses problèmes de santé et son besoin de mesures d’adaptation avant que la décision de le licencier ne soit prise. Plus précisément, il a fait référence au formulaire 6470 (Plan des mesures d’adaptation du milieu de travail pour membres) soumis le 13 octobre 2017 et à un formulaire de plan de retour au travail soumis le 16 octobre 2017. Le demandeur affirme que, compte tenu de ces renseignements, il n’était pas raisonnable que l’arbitre de dernier niveau conclue que la GRC n’était pas au courant de son handicap et de son besoin de mesures d’adaptation. De plus, le demandeur fait valoir que la GRC aurait pu prendre d’autres mesures importantes pour répondre à ses besoins (y compris le transférer dans l’un des nombreux détachements de la GRC en Alberta pour qu’il suive une formation complémentaire) et que, par conséquent, la conclusion selon laquelle des mesures d’adaptation suffisantes avaient déjà été prises était incorrecte.

[75] Je rejette les affirmations du demandeur. Compte tenu de la preuve au dossier, je conclus que l’arbitre de dernier niveau a raisonnablement conclu que la preuve médicale ne suffisait pas à établir que le demandeur souffrait d’un handicap, que les problèmes de santé du demandeur ont joué un rôle dans ses problèmes de rendement ou que ses problèmes de santé étaient même présents pendant le Programme de formation pratique.

[76] Les éléments de preuve démontrent qu’en juillet 2017, le demandeur a été jugé apte à exercer ses fonctions, sans restriction ou exigence en matière de mesures d’adaptation, après que le demandeur a affirmé qu’il pensait être atteint d’un TDA et après qu’une évaluation indépendante a été réalisée par un spécialiste qui n’a pas diagnostiqué de TDA ni d’ailleurs un autre handicap chez le demandeur.

[77] Ce n’est qu’au moment de l’interruption de la période de stage du demandeur et de son affectation à des tâches administratives en attendant l’issue du processus de licenciement d’un membre stagiaire que les problèmes de santé semblent avoir eu une incidence sur le demandeur. L’arbitre de dernier niveau s’est livré à une analyse détaillée de la preuve médicale au dossier à partir de septembre 2017, et a souligné que, même si les documents versés au dossier n’indiquaient pas clairement la nature des problèmes de santé qui touchaient le demandeur, selon l’avis médical du médecin-chef, il n’y avait pas de lien de causalité entre l’état de santé du demandeur et son incapacité à exercer ses fonctions pendant le Programme de formation pratique. L’arbitre de dernier niveau a fait remarquer qu’aucune autre preuve médicale n’avait réfuté l’avis médical du médecin-chef.

[78] Je remarque que le demandeur n’a pas attiré l’attention de la Cour sur une quelconque preuve médicale qui n’aurait pas été prise en compte par l’arbitre de dernier niveau et, plus précisément, le demandeur n’a présenté à la Cour aucune preuve médicale établissant un diagnostic de TDA pendant la durée du Programme de formation pratique, ou indiquant que des problèmes de santé avaient nui à son rendement pendant le Programme de formation pratique. Les deux documents invoqués par le demandeur, mentionnés plus haut, ne sont pas des documents médicaux, mais plutôt des formulaires remplis par le demandeur lui-même.

[79] L’arbitre de dernier niveau a tenu compte du formulaire d’assurance-invalidité non daté, soumis par un psychologue et indiquant un diagnostic principal de [TRADUCTION] « TDAH sous-ensemble de TDA » et un diagnostic secondaire d’anxiété. L’arbitre de dernier niveau a accordé peu de poids au formulaire parce qu’il était incomplet; les parties du formulaire où le psychologue devait fournir des constatations et des observations cliniques et décrire les capacités fonctionnelles du demandeur n’étaient pas remplies, et aucun résultat de tests ou d’investigations n’était fourni, ce qui indiquait à première vue que le psychologue n’avait pas effectué de tels tests ou de telles investigations pour appuyer son diagnostic. De plus, l’arbitre de dernier niveau a fait remarquer que la demande de prestations d’assurance-invalidité du demandeur a finalement été refusée par la compagnie d’assurance parce que le demandeur n’avait pas fourni de preuve médicale établissant qu’il souffrait d’un handicap qui l’empêchait d’exercer les fonctions de policier. Je ne vois aucune erreur commise par l’arbitre de dernier niveau dans son évaluation de cette preuve.

[80] Par conséquent, je conclus que la décision de l’arbitre de dernier niveau selon laquelle le demandeur n’avait pas établi l’existence de discrimination à première vue, n’ayant pas démontré qu’il souffrait d’un handicap au cours de la période en cause, était raisonnable. Compte tenu de cette conclusion, je n’ai pas à examiner l’affirmation du demandeur selon laquelle des mesures d’adaptation supplémentaires, en plus de sa formation complémentaire, auraient dû être prises.

[81] Compte tenu du dossier dont je suis saisie et des arguments avancés par les parties, je conclus que le demandeur n’a pas établi de motifs justifiant de modifier la décision de l’arbitre de dernier niveau portant que le demandeur n’avait pas établi que la décision de l’arbitre de premier niveau selon laquelle le demandeur n’avait pas les compétences requises pour être membre de la GRC était manifestement déraisonnable.

VI. Conclusion

[82] Je conclus que la décision de l’arbitre de dernier niveau est raisonnable. Cette décision est fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des faits et des principes juridiques applicables. Je conclus en outre que le demandeur n’a pas démontré l’existence d’une crainte raisonnable de partialité de la part de l’arbitre de premier niveau ou un manquement à ses droits à l’équité procédurale. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

[83] Le défendeur demande que lui soient adjugés les dépens de la demande, fixés à 1 000 $. Le demandeur soutient qu’il serait inéquitable d’adjuger des dépens à son encontre. Je ne vois aucune raison de s’écarter du principe général voulant que, en sa qualité de partie ayant obtenu gain de cause, le défendeur ait droit au remboursement des dépens de la demande. Dans les circonstances de l’espèce, je conclus toutefois que seul un montant minime de dépens, fixé à 250 $, devrait être adjugé.


JUGEMENT DANS LE DOSSIER T-2030-19

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Le demandeur doit payer au défendeur les dépens afférents à la présente demande, fixés à 250 $, y compris les débours et les taxes.

« Mandy Aylen »

Juge

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-2030-19

 

INTITULÉ :

THOMAS DELIVA c LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 10 février 2022

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT :

LA JUGE AYLEN

 

DATE DES MOTIFS :

Le 10 mai 2022

 

COMPARUTIONS :

Thomas Deliva

 

LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

Maude Normand

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Le procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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