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Date : 20221027


Dossier : IMM-5589-21

Référence : 2022 CF 1475

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 27 octobre 2022

En présence de madame la juge Go

ENTRE :

ADENIKE PRINCESS ARULEBA

demanderesse

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La demanderesse, Mme Adenike Princess Aruleba, est une citoyenne du Nigéria qui est entrée au Canada le 19 novembre 2010 et qui a demandé l’asile pour fuir la famille de son ex‑conjoint qui l’accusait d’être une sorcière. Le 8 mai 2012, la Section de la protection des réfugiés [la SPR] a rejeté sa demande en raison de réserves quant à sa crédibilité et de l’absence de preuve objective.

[2] Le 30 juillet 2019, la demanderesse a présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (ERAR).

[3] Le 6 août 2019, la demanderesse a présenté une demande de résidence permanente fondée sur des considérations d’ordre humanitaire au titre du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

[4] Dans une décision du 8 juillet 2020, un agent principal [l’agent] a refusé d’accorder à la demanderesse une dispense fondée sur des considérations d’ordre humanitaire [la décision]. L’agent a accordé du poids à l’établissement de la demanderesse en raison de ses liens dans la communauté, de ses antécédents professionnels et de sa situation financière. Il a également accordé du poids aux liens de la demanderesse avec le Nigéria. Il n’a pas accordé de poids au risque et aux conditions défavorables dans le pays et a conclu que la demanderesse ne serait pas exposée à un risque si elle retournait au Nigéria et que sa famille et son expérience professionnelle l’aideraient dans sa réintégration. Le 16 août 2021, la décision a été communiquée par courriel à la demanderesse.

[5] La demanderesse sollicite le contrôle judiciaire de la décision au motif qu’elle est déraisonnable et que l’agent a enfreint l’équité procédurale.

[6] Pour les motifs exposés ci‑après, je conclus que la décision est raisonnable et qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale. Je rejette donc la demande.

II. Les questions en litige et les normes de contrôle

[7] La demanderesse soulève les questions suivantes : a) la décision est-elle déraisonnable? et b) l’agent a‑t‑il manqué à son obligation d’équité procédurale en ne communiquant pas la décision en temps opportun et en ne demandant pas de renseignements à la demanderesse?

[8] Les parties conviennent que la décision est susceptible de contrôle selon la norme de la décision raisonnable, conformément à l’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov].

[9] Selon la demanderesse, la norme de contrôle qu’il convient d’appliquer à la question de l’équité procédurale est celle de la décision correcte.

[10] La norme de la décision raisonnable est une norme de contrôle empreinte de déférence, mais rigoureuse : Vavilov, aux para 12-13. La cour de révision doit déterminer si la décision faisant l’objet du contrôle, y compris son raisonnement et son résultat, est transparente, intelligible et justifiée : Vavilov, au para 15. Une décision raisonnable doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et être justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti : Vavilov, au para 85. Le caractère raisonnable d’une décision dépend du contexte administratif pertinent, du dossier dont le décideur était saisi et de l’incidence de la décision sur les personnes visées : Vavilov, aux para 88-90, 94, 133-135.

[11] Pour qu’une décision soit jugée déraisonnable, le demandeur doit démontrer qu’elle comporte des lacunes suffisamment capitales ou importantes : Vavilov, au para 100. Les erreurs que comporte une décision ou les doutes qu’elle soulève ne justifient pas toutes une intervention. La cour de révision doit s’abstenir d’apprécier à nouveau la preuve prise en compte par le décideur et, à moins de circonstances exceptionnelles, elle ne doit pas modifier les conclusions de fait de celui-ci : Vavilov, au para 125. Les lacunes ou insuffisances reprochées ne doivent pas être simplement superficielles ou accessoires par rapport au fond de la décision, ou constituer une « erreur mineure » : Vavilov, au para 100.

[12] En ce qui a trait à l’équité procédurale, la question fondamentale est celle de savoir si la procédure était équitable eu égard à l’ensemble des circonstances, notamment si le demandeur connaissait la preuve à réfuter et s’il a eu une possibilité complète et équitable d’y répondre : Chemin de fer Canadien Pacifique Limitée c Canada (Procureur général), 2018 CAF 69 aux para 54-56.

III. L’analyse

A. La décision est‑elle raisonnable?

[13] La demanderesse prétend que la décision est déraisonnable parce qu’elle est fondée sur un raisonnement intrinsèquement incohérent qui n’est pas étayé par les éléments de preuve et qu’elle est indéfendable à la lumière des contraintes juridiques et factuelles de l’espèce. La demanderesse affirme en outre que l’agent a mal interprété les éléments de preuve qui contredisaient sa conclusion et en a fait abstraction.

[14] Plus précisément, la demanderesse conteste les conclusions tirées par l’agent quant à son établissement et à ses liens au Canada, à ses liens au Nigéria, ainsi qu’au risque et aux conditions défavorables dans le pays.

La conclusion tirée par l’agent concernant l’établissement et les liens de la demanderesse au Canada est raisonnable

[15] La demanderesse fait valoir que l’agent n’a pas expliqué en quoi le degré d’établissement au Canada de la demanderesse ne suffisait pas à justifier une dispense fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Elle soutient également que le raisonnement de l’agent concernant son établissement était contradictoire. D’une part, l’agent a conclu que la demanderesse avait démontré le degré d’établissement type d’une personne se trouvant dans une situation semblable au Canada. Mais d’autre part, il l’a félicitée pour son degré d’établissement au Canada tout en concluant que son expérience en tant que propriétaire de restaurant il y a plus de 10 ans l’aiderait à se réinstaller au Nigéria.

[16] Dans ses observations écrites, la demanderesse soutient que, dans son raisonnement, l’agent applique la même logique erronée que celle jugée déraisonnable dans la décision Sebbe c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 813 [Sebbe]. Elle soutient que, dans la décision Sebbe, le juge Zinn a conclu qu’il était déraisonnable pour l’agent de faire abstraction des mesures prises par les demandeurs et d’en attribuer le mérite au régime canadien de l’immigration et de la protection des réfugiés; l’agent devait reconnaître l’initiative dont les demandeurs avaient fait preuve à cet égard : Sebbe, au para 21.

[17] La demanderesse, à mon avis, a mal interprété l’observation faite par le juge Zinn dans la décision Sebbe. Contrairement à ce que soutient la demanderesse, le juge Zinn n’a pas conclu qu’il était déraisonnable de faire abstraction des réalisations d’un demandeur et d’en attribuer le mérite au régime canadien de l’immigration et de la protection des réfugiés. Il a plutôt remis en doute le commentaire de l’agent selon lequel le demandeur [traduction] « a bénéficié de l’application régulière de la loi dans le cadre des programmes pour les réfugiés et qu’on lui a donc offert les outils et les possibilités nécessaires pour acquérir un certain degré d’établissement au sein de la société canadienne » : Sebbe, au para 21.

[18] En l’espèce, l’agent n’a pas tenté d’attribuer le mérite de l’établissement de la demanderesse à ses antécédents en matière d’immigration, et il a en fait accordé un certain poids à sa résidence et à ses liens communautaires au Canada. Je conclus par conséquent que l’argument de la demanderesse n’est pas fondé et que la décision Sebbe n’aide aucunement sa cause. De plus, comme le souligne le défendeur, l’établissement n’était qu’un facteur parmi d’autres que l’agent devait prendre en considération. Ce n’est pas parce que l’agent a donné un poids favorable à ce facteur qu’une dispense est justifiée : Perez Fernandez c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 628 au para 18.

La conclusion tirée par l’agent concernant le soutien dont bénéficie la demanderesse au Nigéria et les liens qu’elle y a est raisonnable

[19] Encore là, je rejette l’argument de la demanderesse selon lequel la conclusion de l’agent quant à sa capacité à s’adapter au Nigéria était fondée sur une prémisse erronée et ne tenait pas compte des éléments de preuve qui démontraient les souffrances qu’elle avait éprouvées avant de s’enfuir au Canada.

[20] Contrairement ce qu’affirme la demanderesse, l’agent n’a pas conclu qu’elle avait des [traduction] « liens solides » avec le Nigéria. Il a tout simplement écrit : [traduction] « J’ai évalué les liens de la demanderesse avec le Nigéria et j’accorde du poids à ce facteur. »

[21] Comme le soutient le défendeur, la preuve que la famille de l’ex‑conjoint de la demanderesse la cherchait toujours n’était pas suffisante, surtout que la demande d’asile de la demanderesse a été rejetée pour des raisons de crédibilité. Je ne suis donc pas d’accord avec la demanderesse lorsqu’elle affirme que l’agent n’a pas tenu compte de la preuve concernant ce qu’elle avait subi au Nigéria.

[22] À mon avis, l’agent n’a pas non plus commis d’erreur en concluant que la demanderesse recevrait du soutien de ses filles, puisque la demanderesse n’a pas clairement établi qu’elle n’avait plus de contact avec ses filles dans sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Devant la Cour, la demanderesse a soutenu qu’en affirmant qu’elle n’avait plus de contact avec sa [traduction] « famille », elle parlait entre autres de ses filles. Je rejette cet argument. Dans sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, la demanderesse a écrit ce qui suit au sujet de la rupture de ses liens familiaux :

[traduction] Avant mon arrivée au Canada, je n’avais plus aucun lien avec mon ex‑conjoint et sa famille parce que la famille a éclaté après que le père de mon ex‑conjoint, M. Oladipo, soit décédé en octobre 2010, ce qui fait que j’étais toute seule et que je n’avais plus aucun lien avec eux. En fait, pendant la dernière conversation que j’ai eue avec eux, mon ex‑conjoint et sa famille ont déclaré catégoriquement qu’à leurs yeux, j’étais morte, et que personne ne devait mentionner mon nom dans la maison…

[...]

Je suis divorcée, et mes enfants sont maintenant des adultes et ont leur propre vie. Je suis actuellement séparée de mon conjoint […] et je n’ai aucun contact avec lui.

[23] Dans l’ensemble, les observations de la demanderesse au sujet de sa rupture avec sa famille pourraient être interprétées comme s’appliquant uniquement à la famille de son ex‑conjoint et non à ses enfants. Je ne peux donc pas conclure que l’interprétation que l’agent a faite de ces observations, soit que la demanderesse n’avait pas de contact avec la famille de son ex‑conjoint, mais qu’elle en avait encore avec ses filles, était déraisonnable.

[24] La Cour a confirmé que l’agent pouvait prendre en considération les facteurs qui atténuent les difficultés auxquelles un demandeur serait exposé à son retour : voir Ramesh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 778 aux para 38-39. Je ne vois aucune erreur dans le fait que l’agent ait considéré que le soutien qu’offriraient les deux filles adultes de la demanderesse et l’expérience antérieure de cette dernière en tant que propriétaire de restaurant favoriseraient sa réintégration au Nigéria.

[25] La demanderesse soutient en outre qu’il était déraisonnable pour l’agent de conclure que ses liens avec le Nigéria étaient plus solides que ceux qu’elle avait avec le Canada et que la séparation lui ne causerait pas suffisamment de difficultés pour justifier l’octroi d’une dispense, bien qu’il ait tenu compte de son engagement dans la communauté, des lettres de soutien et du fait qu’elle avait poursuivi ses études. Je conviens avec le défendeur que les arguments de la demanderesse équivalent à demander à la Cour d’apprécier à nouveau la preuve, ce que je ne puis faire.

Le risque et les conditions défavorables dans le pays

[26] Selon la demanderesse, l’analyse des conditions défavorables dans le pays était déraisonnable, car l’agent n’a pas tenu compte de la preuve qui lui avait été fournie. La demanderesse invoque notamment le rapport sur le pays qui mentionne la question des accusations de sorcellerie au Nigéria, et elle fait valoir qu’elle a été forcée de quitter le pays en raison des menaces de violence faites à son endroit. Les allégations de sorcellerie ne disparaissent pas avec le temps, dit la demanderesse qui cite un article portant sur l’effet que peuvent avoir des accusations de sorcellerie sur les femmes âgées. Je fais remarquer que l’article en question ne figure pas dans le dossier certifié du tribunal et que la demanderesse n’a pas pu confirmer qu’il avait été soumis à l’agent. Pour cette raison, je ne tiendrai pas compte de cet article ni d’aucune observation qui pourrait en découler.

[27] De plus, j’estime que l’argument de la demanderesse n’est pas convaincant. Comme l’affirme le défendeur, la Cour n’a pas pour rôle de trancher à nouveau les conclusions tirées par la SPR. La SPR a déjà rejeté l’argument selon lequel la demanderesse était exposée à un risque de la part de son ex‑conjoint, pour des raisons de crédibilité et d’absence de preuve objective. Il n’était pas déraisonnable de la part de l’agent de se fonder sur cette conclusion : Uwase c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 515 au para 29.

[28] La demanderesse soutient en outre que, si elle retournait au Nigéria, elle ferait face à des difficultés en raison d’autres facteurs, tels que son âge et son statut de femme célibataire, qui rendraient difficile sa recherche d’emploi.

[29] Les conclusions de l’agent à cet égard sont les mêmes que celles qu’il a tirées à l’égard des autres facteurs, soit que l’expérience antérieure de la demanderesse en tant que propriétaire de restaurant au Nigéria et le soutien que lui donneraient ses deux filles l’aideraient dans sa réintégration. Pour les motifs déjà mentionnés ci‑dessus, je ne vois aucune raison d’infirmer les conclusions de l’agent.

B. L’agent a-t-il manqué à l’équité procédurale?

[30] La demanderesse soutient que l’agent a manqué à l’équité procédurale pour deux raisons. Premièrement, l’agent a commis une erreur en omettant de demander des renseignements supplémentaires à la demanderesse. Deuxièmement, il y a eu un délai injustifié dans la communication de la décision à la demanderesse après qu’elle eut été prise.

L’agent n’a pas tiré de conclusion déguisée quant à la crédibilité de la demanderesse

[31] La demanderesse soutient que l’agent a enfreint l’équité procédurale et les lignes directrices du manuel d’Immigration, des réfugiés et de Citoyenneté Canada [IRCC] sur les demandes présentées pour des considérations humanitaires en omettant de demander à la demanderesse de fournir une preuve du risque permanent auquel elle était exposée au Nigéria. Elle fait valoir que les motifs de l’agent à cet égard montrent clairement que celui‑ci a tiré une conclusion déguisée quant à sa crédibilité. Selon elle, elle aurait dû avoir l’occasion de répondre aux préoccupations qu’avait l’agent à l’égard de sa crédibilité.

[32] Je ne suis pas d’accord. Lorsqu’il a fait remarquer que la SPR avait entendu la demande d’asile de la demanderesse et qu’elle l’avait rejetée pour des raisons de crédibilité et d’absence de preuve objective, l’agent n’a pas tiré de conclusion déguisée quant à la crédibilité de la demanderesse, mais a simplement énoncé un fait.

[33] Le défendeur soutient qu’il incombe à la demanderesse de présenter des éléments de preuve pertinents. L’agent n’a pas l’obligation de demander des éléments de preuve additionnels, de mener ses propres recherches ou d’aviser le demandeur que sa demande comporte des lacunes : Arshad c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 510 au para 24.

[34] En l’espèce, je conviens avec le défendeur qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale parce que l’agent n’était pas tenu de demander d’autres éléments de preuve. C’est la demanderesse elle‑même qui a soulevé la question du risque en tant que motif justifiant une dispense fondée sur des considérations d’ordre humanitaire et elle était bien au courant de la décision défavorable rendue par la SPR. C’est pourquoi il lui incombait de fournir tous les éléments de preuve pertinents concernant le risque auquel elle serait exposée au Nigéria, y compris tout nouvel élément de preuve qui aurait permis de réfuter les conclusions défavorables tirées par la SPR.

Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale en raison du délai dans la communication de la décision

[35] La demanderesse soutient qu’en mettant plus d’un an pour lui communiquer sa décision, l’agent a manqué à l’équité procédurale. À l’appui de son argument, elle cite l’exigence de l’équité procédurale énoncée à la section 8.8 du document Chapitre IP 5 - Demandes d’établissement présentées au Canada pour des considérations humanitaires (CH) [Chapitre IP5] :

On doit informer un demandeur lorsque : il faut des renseignements supplémentaires; le ministère a des renseignements relatifs à la décision CH ou à l’admissibilité du demandeur qui n’ont pas été fournis par le demandeur lui-même; on a rendu la décision. Comme mentionné plus haut, voici les principales méthodes pour tenir informé le demandeur : système automatisé de lettres; appels téléphoniques; entrevues personnelles.

[36] La demanderesse soutient que, malgré cette exigence du guide, l’agent a refusé de lui communiquer sa décision en temps utile et qu’il s’est montré insensible aux difficultés auxquelles elle pourrait faire face. La demanderesse a pris divers moyens pour s’informer de l’issue de sa demande, sa dernière tentative ayant été faite le 29 juillet 2021. Elle a rempli un formulaire Web et elle a reçu une réponse l’informant que sa demande était encore en cours de traitement.

[37] La demanderesse affirme que, même en tenant compte de la pandémie, le délai a été plus long que ne le requiert la nature du processus.

[38] De plus, selon la demanderesse, ce délai lui a causé un préjudice puisqu’elle n’a pas été en mesure de présenter une demande dans le cadre du programme Voie d’accès de la résidence temporaire à la résidence permanente des travailleurs essentiels [le programme Voie d’accès] qui a récemment pris fin. Elle soutient qu’elle aurait été admissible à ce programme parce qu’elle occupait un poste essentiel dans une usine, mais qu’elle ne voulait pas présenter plus d’une demande en contravention du paragraphe 25(1.2) de la LIPR.

[39] J’estime que les observations de la demanderesse ne sont pas fondées.

[40] Bien qu’on ait tardé à lui communiquer la décision, la demanderesse l’a reçue 24 mois après avoir présenté sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire. Ce délai respecte le délai de traitement moyen des demandes fondées sur des considérations d’ordre humanitaire.

[41] Je suis également d’accord avec le défendeur pour dire que la demanderesse n’a pas démontré qu’elle avait subi un préjudice à cause de ce délai. Contrairement à ce que la demanderesse affirme, rien ne l’empêchait de présenter plus d’une demande de résidence permanente dans le cadre de programmes différents. Le paragraphe 25(1.2) de la LIPR prévoit qu’un demandeur ne peut pas présenter simultanément deux demandes fondées sur des considérations d’ordre humanitaire et qu’il ne peut pas présenter une demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire s’il a déjà présenté une demande d’asile et que celle‑ci est pendante devant la SPR ou la SAR. Aucun de ces cas ne s’applique ici puisque le programme Voie d’accès a été créé en vertu de l’article 25.2 de la LIPR.

[42] Comme le souligne le défendeur, le document Chapitre IP5 prévoit également la possibilité de multiples demandes, y compris, par exemple, les demandes de parrainage de conjoint. J’ajouterai également que rien n’empêchait la demanderesse de présenter à l’agent des observations supplémentaires sur le programme Voie d’accès en tant qu’autre motif pour lui accorder une dispense, pendant qu’elle attendait la décision.

[43] De plus, le défendeur soutient que la demanderesse ne semble pas admissible au programme Voie d’accès, car pour y être admissibles, les demandeurs doivent avoir le statut de résident temporaire (ou être autorisés à rétablir leur statut), et que les étrangers qui n’ont pas le statut de résident temporaire, comme les demandeurs d’asile, en sont donc exclus. La demanderesse a soumis une demande d’ERAR en juillet 2019 et ne semble donc pas être admissible au programme.

[44] Je ne tire aucune conclusion à l’égard de cette dernière observation. L’argument de la demanderesse au sujet du délai laisse supposer qu’elle était admissible au programme Voie d’accès. Toutefois, puisque la demanderesse n’a pas démontré pourquoi elle n’aurait pas pu présenter de demande dans le cadre du programme Voie d’accès pendant qu’elle attendait le résultat de sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, je conclus qu’il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale.

IV. Conclusion

[45] La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[46] Il n’y a aucune question à certifier.


JUGEMENT dans le dossier IMM-5589-21

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a aucune question à certifier.

« Avvy Yao-Yao Go »

Judge

Traduction certifiée conforme

Claudia De Angelis


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-5589-21

 

INTITULÉ :

ADENIKE PRINCESS ARULEBA c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 26 septembre 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS

LA JUGE GO

 

DATE DES MOTIFS :

Le 27 octobre 2022

 

COMPARUTIONS :

Reta Ghanim

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Nick Continelli

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Reta Ghanim

Globe Immigration

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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