Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20230131


Dossier : IMM‑2090‑21

Référence : 2023 CF 146

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 31 janvier 2023

En présence de monsieur le juge McHaffie

ENTRE :

SYED KHALID AHSAN,

SAMINA KHALID,

SYED HASSAN ALI AHSAN,

SYED ASAD AHSAN, et

SYED HAMZA AHSAN,

représenté par son tuteur à l’instance

SYED KHALID AHSAN

demandeurs

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Les demandeurs sollicitent le contrôle judiciaire de la décision par laquelle leur demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire a été rejetée. Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’agent principal ayant rejeté la demande a effectivement commis les mêmes erreurs dans son appréciation de la preuve psychologique que celles que la Cour suprême du Canada avait jugées déraisonnables dans l’arrêt Kanthasamy c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2015 CSC 61. La décision doit donc être annulée et l’affaire doit être renvoyée pour qu’une nouvelle décision soit rendue.

II. Questions en litige et norme de contrôle

[2] La norme de contrôle qui s’applique aux décisions des agents d’immigration concernant les demandes fondées sur des motifs d’ordre humanitaire est celle de la décision raisonnable : Kanthasamy, au para 44; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 aux para 16‑17, 23‑25. La norme de la décision raisonnable exige de la Cour qu’elle examine la décision dans son ensemble avec une attention respectueuse, eu égard aux observations des parties et au dossier, afin de déterminer si elle possède les caractéristiques essentielles de la justification, de la transparence et de l’intelligibilité, et si elle est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur elle : Vavilov, aux para 84‑86, 99‑101, 103, 125‑128. Il incombe à la partie qui conteste la décision de démontrer que celle-ci souffre de lacunes graves à un point tel qu’elle en est déraisonnable : Vavilov, au para 100.

[3] Les demandeurs contestent le caractère raisonnable de la décision de l’agent à plus d’un égard, alléguant que celui-ci n’a pas utilisé la bonne approche dans le cadre de son examen et qu’il a commis une erreur dans son appréciation des difficultés auxquelles ils seraient exposés s’ils retournaient au Pakistan, de leur degré d’établissement au Canada et de l’intérêt supérieur des enfants.

[4] À mon avis, la façon dont l’agent a apprécié la preuve psychologique est déterminante en l’espèce. Je n’ai donc pas à me pencher sur les autres questions soulevées.

III. Analyse

A. La demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée par les demandeurs

[5] Les demandeurs forment une famille de citoyens pakistanais. Ils ont demandé l’asile en 2018 au motif qu’ils étaient exposés à des menaces et à des actes de violence de la part d’islamistes de Karachi en raison de leur foi musulmane barelvie et du soutien financier qu’ils offraient à la communauté musulmane barelvie. La Section de la protection des réfugiés [la SPR] a admis les allégations des demandeurs, mais a conclu qu’ils disposaient d’une possibilité de refuge intérieur à Islamabad ou à Lahore. La demande d’asile des demandeurs a donc été rejetée. L’appel que les demandeurs ont interjeté devant la Section d’appel des réfugiés a été rejeté pour défaut de compétence, et la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire présentée devant notre Cour a également été rejetée.

[6] En février 2020, les demandeurs ont présenté une demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire au titre du paragraphe 25(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR]. La demande était accompagnée d’une lettre d’observations rédigée par un consultant en immigration et d’une abondante preuve documentaire. D’autres observations et documents justificatifs ont été déposés à l’appui de la demande en février 2021. Dans leur demande, les demandeurs exposaient un certain nombre de faits et de facteurs à prendre en considération, notamment les difficultés auxquelles ils seraient exposés s’ils retournaient au Pakistan, en particulier en tant que musulmans barelvis, leur degré d’établissement au Canada, l’intérêt supérieur des enfants ainsi que l’état de santé actuel de trois des membres de la famille, à savoir M. Syed Khalid Ahsan, son épouse Mme Samina Khalid et leur fils aîné.

[7] À l’appui de leur état de santé, les demandeurs ont produit les rapports d’un psychothérapeute, d’un psychologue et de leur médecin de famille.

[8] Dans son rapport, le psychothérapeute a indiqué que M. Ahsan souffrait de symptômes de stress post-traumatique et d’une humeur dépressive grave en raison de sa crainte de devoir quitter le Canada pour retourner au Pakistan. Il y précise que l’état de M. Ahsan continuerait de s’améliorer si celui-ci était autorisé à demeurer au Canada sans craindre d’être renvoyé au Pakistan, et qu’il bénéficierait d’une psychothérapie et de séances de consultation clinique. La médecin de famille de M. Ahsan a également fourni un bref rapport indiquant que ce dernier souffrait d’anxiété grave et d’un trouble de stress post-traumatique, lui recommandant également de suivre des séances de consultation et une thérapie de groupe.

[9] La même médecin de famille a rédigé un rapport semblable à l’égard de Mme Khalid, lequel indiquait que celle-ci souffrait aussi d’anxiété grave et d’un trouble de stress post-traumatique et recommandait également des séances de consultation et une thérapie de groupe.

[10] Le rapport du psychologue concernait le fils. Il y est indiqué que celui-ci souffrait d’un [traduction] « trouble dépressif majeur » en raison de l’incertitude liée à son statut d’immigration et de la crainte pour sa sécurité au Pakistan. Le psychologue a précisé que l’état dépressif du fils était préoccupant sur le plan clinique et que le fonctionnement psychologique de ce dernier se détériorerait s’il devait retourner au Pakistan.

[11] Dans leur première lettre d’observations, les demandeurs renvoient à ces rapports et soulignent qu’ils souffrent d’un certain nombre de troubles psychologiques en raison des [traduction] « circonstances stressantes de leur statut d’immigration et de la possibilité de renvoi du Canada ». La lettre indique également que, d’après ces rapports, un retour au Pakistan serait susceptible d’entraîner une détérioration de leur santé mentale. Les demandeurs n’ont déposé aucun autre rapport médical à l’appui des observations supplémentaires qu’ils ont présentées en février 2021, mais ont fourni les antécédents pharmaceutiques de M. Ahsan et de Mme Khalid ainsi que des observations sur l’indisponibilité de leurs médicaments au Pakistan.

B. La décision de l’agent

[12] L’agent a pris note de la décision de la SPR et de la conclusion selon laquelle les demandeurs disposaient d’une possibilité de refuge intérieur, et a accordé un poids considérable aux conclusions de la SPR. Il a examiné les divers motifs d’ordre humanitaire invoqués par les demandeurs avant de conclure que ces motifs ne suffisaient pas à justifier une dispense de l’obligation de présenter une demande de résidence permanente depuis l’étranger.

[13] En ce qui concerne la préoccupation soulevée au sujet de la santé mentale de trois des demandeurs, l’agent a résumé les observations, puis a écrit ce qui suit :

[traduction]

Bien que je reconnaisse que les membres de la famille nommés précédemment souffrent d’insomnie, de dépression, d’anxiété et d’un TSPT, je ne suis pas convaincu que ces derniers n’auraient pas accès à un traitement approprié au Pakistan s’ils en faisaient la demande. Les rapports médicaux indiquent tous que les symptômes dont souffrent les demandeurs sont attribuables à l’incertitude quant à la possibilité de demeurer au Canada. Dans sa lettre du 30 septembre 2019, la Dre Asma Manzar indique que l’épouse du demandeur aurait besoin de suivre des séances de consultation et une thérapie de groupe. Dans son rapport médical du 9 janvier 2020, le psychothérapeute agréé Tahir Iqbal Malik recommande que le demandeur principal bénéficie d’une psychothérapie et de services de consultation clinique. Je remarque que la recommandation visant à soulager les troubles du demandeur consiste en des séances de consultation et de thérapie de groupe. Toutefois, l’avocat n’a présenté aucun élément de preuve objectif démontrant que de tels soins ne sont pas accessibles au Pakistan. De plus, je ne dispose pas d’assez d’éléments de preuve pour confirmer que les demandeurs suivent actuellement une quelconque forme de traitement au Canada.

[Non souligné dans l’original.]

[14] L’agent a poursuivi son examen en se penchant sur l’argument de l’indisponibilité des médicaments des demandeurs au Pakistan et a conclu que la preuve n’étayait pas cet argument. Les demandeurs ne contestent pas la conclusion de l’agent sur ce point.

C. L’appréciation de la preuve par l’agent était déraisonnable

[15] Dans l’arrêt Kanthasamy, la Cour suprême du Canada a énoncé l’approche à adopter à l’égard des demandes de dispense fondées sur des motifs d’ordre humanitaire présentées au titre du paragraphe 25(1) de la LIPR. Au nom de la majorité, la juge Abella s’en est remis à l’interprétation adoptée par la Commission d’appel de l’immigration de l’époque dans la décision Chirwa, selon laquelle le paragraphe 25(1) a pour objet d’offrir une mesure à vocation équitable lorsque les faits sont « de nature à inciter [une personne] raisonnable d’une société civilisée à soulager les malheurs d’une autre personne » : Kanthasamy, aux para 13‑21, citant Chirwa c Canada (Ministre de la Main-d’œuvre et de l’Immigration), [1970] DCAI no 1 au para 27. Ce qui justifie une dispense dépendra des faits et du contexte du dossier, mais, selon l’approche établie dans la décision Chirwa, l’agent appelé à se prononcer sur l’existence de considérations d’ordre humanitaire doit véritablement examiner tous les faits et les facteurs pertinents portés à sa connaissance et leur accorder du poids : Kanthasamy, au para 25.

[16] La juge Abella a conclu que l’agente qui avait examiné la demande de M. Kanthasamy n’avait pas appliqué cette approche et que, de ce fait, l’agente avait traité de façon déraisonnable la preuve psychologique dont elle disposait. À l’appui de sa demande fondée sur des considérations d’ordre humanitaire, M. Kanthasamy avait déposé le rapport d’une psychologue ayant conclu qu’il souffrait d’un trouble de stress post-traumatique et d’un trouble d’adaptation avec anxiété et humeur dépressive, et que son état se détériorerait s’il était renvoyé du Canada : Kanthasamy, au para 46. Bien que l’agente eut admis le diagnostic, elle a écarté le rapport au motif que M. Kanthasamy n’avait pas fourni une preuve suffisante pour démontrer qu’il subissait ou avait subi des traitements pour ses problèmes, ou qu’il ne pourrait obtenir les traitements éventuellement nécessaires dans son pays d’origine, le Sri Lanka, ou encore que cela lui occasionnerait des difficultés inhabituelles et injustifiées ou démesurées : Kanthasamy, au para 46.

[17] La juge Abella a conclu que cette analyse était déraisonnable, et a particulièrement critiqué le fait que l’agente avait exigé des éléments de preuve quant aux traitements suivis par M. Kanthasamy ou alors l’accès à des traitements au Sri Lanka :

On comprend mal que, après avoir fait droit au diagnostic psychologique, l’agente exige quand même de Jeyakannan Kanthasamy une preuve supplémentaire quant à savoir s’il a ou non cherché à obtenir des soins ou si de tels soins étaient même offerts, ou quant aux soins qui existaient ou non au Sri Lanka. Une fois reconnu qu’il souffre d’un trouble de stress post-traumatique, d’un trouble d’adaptation et de dépression en raison de ce qu’il a vécu au Sri Lanka, exiger en sus la preuve de l’existence de soins au Canada ou au Sri Lanka met à mal le diagnostic et a l’effet discutable d’en faire un facteur conditionnel plutôt qu’important.

[En italique dans l’original, soulignement ajouté; Kanthasamy, au para 47.]

[18] De l’avis de la juge Abella, le fait même que M. Kanthasamy verrait, selon toute vraisemblance, sa santé mentale se détériorer s’il était renvoyé au Sri Lanka constituait une considération pertinente qui devait être retenue puis soupesée, peu importe la possibilité d’obtenir ou non des soins au Sri Lanka : Kanthasamy, au para 48.

[19] La juge Abella a également conclu que l’agente avait commis une erreur non seulement dans l’analyse du risque, pour M. Kanthasamy, d’être victime de discrimination et dans l’analyse de l’intérêt supérieur de l’enfant, mais aussi en omettant de se demander si la preuve considérée dans son ensemble justifiait une dispense : Kanthasamy, aux para 50‑60. Bien que la juge Abella n’ait pas précisé si chacune de ces erreurs suffisait à rendre la décision déraisonnable dans son ensemble, elle a clairement indiqué que l’approche adoptée à l’égard du rapport psychologique était déraisonnable : Kanthasamy, au para 60.

[20] En l’espèce, les demandeurs soutiennent que l’agent a également adopté la mauvaise approche aux fins de l’examen de leur demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire. Ils mentionnent tout particulièrement la façon dont l’agent a apprécié la preuve psychologique, jugeant leur situation analogue à celle de l’affaire Kanthasamy.

[21] Je suis d’accord avec les demandeurs pour dire que l’analyse par l’agent de la preuve psychologique est effectivement la même que celle qui a été jugée déraisonnable dans l’arrêt Kanthasamy. Comme l’indique le paragraphe [13] plus haut, l’agent a effectué une analyse de fond de la preuve psychologique qui consistait à accepter le diagnostic clinique, tout en faisant valoir que : i) le traitement était également offert au Pakistan; ii) tous les rapports mentionnaient que les symptômes des demandeurs découlaient de leur incertitude quant à la possibilité de rester au Canada; et iii) aucune preuve n’établissait que les services de consultation ou de thérapie recommandés n’étaient pas offerts au Pakistan ou que les demandeurs suivaient un traitement au Canada.

[22] Le premier et le troisième de ces points, qui ont trait à la possibilité de suivre un traitement au Pakistan et à la question de savoir si les demandeurs suivaient un traitement au Canada, traduisent un raisonnement identique à celui critiqué dans l’arrêt Kanthasamy. Bien que ces considérations soient effectivement pertinentes, il ne peut s’agir des seuls facteurs à prendre en compte : Akhtar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 856 aux para 25‑26; Tutic c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 800 aux para 23‑26, citant Esahak-Shammas c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 461 au para 26 et Jaramillo Zaragoza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 879 au para 54.

[23] En l’espèce, le seul autre facteur que l’agent a pris en compte concernait le fait que, selon les rapports, les symptômes des demandeurs étaient rattachés à l’incertitude quant à la possibilité de demeurer au Canada. Je ne puis admettre que cela crée une distinction par rapport aux faits de l’affaire Kanthasamy ou rend l’analyse raisonnable. Bien que les circonstances à l’origine de l’état psychologique d’un demandeur puissent se révéler pertinentes, c’est, en définitive, les répercussions du renvoi du Canada sur la santé mentale du demandeur qui constitue le facteur le plus important : Kanthasamy, au para 48. Comme le fait remarquer le ministre, il semble que l’agent ait implicitement conclu que, en retournant au Pakistan, les demandeurs ne seraient plus en proie à « l’incertitude », ce qui éliminerait la source de leur anxiété et de leurs autres difficultés psychologiques. Cela dit, même dans la mesure où une telle inférence était raisonnable en l’absence de preuve médicale à cet égard, en l’espèce, les rapports psychologiques indiquent clairement que l’incertitude liée au statut d’immigration des demandeurs n’étaient pas la seule source à l’origine de leur état. Au contraire, les rapports indiquent que les expériences vécues par les demandeurs et leur crainte de retourner au Pakistan ont également contribué à leur état actuel. L’agent n’a pas tenu compte de ces éléments, et il ne pouvait les rejeter simplement en invoquant la préoccupation liée à l’incertitude.

[24] Je conclus donc que l’évaluation effectuée par l’agent de la preuve psychologique souffre des mêmes lacunes analytiques que celles qui ont été jugées déraisonnables dans l’arrêt Kanthasamy.

[25] Comme je le mentionne plus haut, dans l’arrêt Kanthasamy, la juge Abella n’a pas clairement indiqué que l’analyse déraisonnable du rapport psychologique suffisait, à elle seule, à rendre la décision déraisonnable dans son ensemble. Toutefois, notre Cour a conclu à plusieurs reprises qu’une analyse déraisonnable de la preuve relative à la santé mentale doit mener à un nouvel examen de la décision par laquelle une demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire a été rejetée, en particulier lorsque cette demande repose essentiellement sur des problèmes de santé mentale : voir, p. ex., Sutherland c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CF 1212, aux para 6, 32‑34; Akhtar, aux para 13, 27; Kadiravelupillai c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 962 aux para 17, 30‑34. Ce constat est conforme à la directive que donne la Cour suprême dans l’arrêt Vavilov selon laquelle les lacunes ou insuffisances de la décision ne doivent pas être simplement superficielles, mais plutôt « suffisamment capitale[s] ou importante[s] pour rendre cette dernière déraisonnable » : Vavilov, au para 100.

[26] En l’espèce, les problèmes de santé mentale de M. Ahsan, de Mme Khalid et de leur fils constituaient un élément important de la demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire des demandeurs, et ils étaient étayés par des observations et des rapports de professionnels. Par conséquent, je ne peux conclure que l’agent serait nécessairement parvenu à la même conclusion quant à la demande s’il avait analysé la preuve psychologique conformément aux principes de l’arrêt Kanthasamy. La demande fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée par les demandeurs doit donc être renvoyée pour nouvel examen.

[27] Par conséquent, je n’ai pas besoin d’examiner les autres arguments des demandeurs concernant l’évaluation par l’agent des difficultés, du degré d’établissement et de l’intérêt supérieur de l’enfant. Je constate toutefois, sans me prononcer, que certains aspects du raisonnement de l’agent sur ces questions soulèvent assurément des doutes. Parmi ceux-ci, on compte l’argument de l’agent selon lequel les demandeurs d’asile [traduction] « se voient accorder des outils comme un accès à l’emploi et aux études qui leur permettent d’être autonomes et de s’intégrer à la société canadienne »; la conclusion de l’agent selon laquelle le fils mineur ne serait pas privé [traduction] « des biens de première nécessité » si ce dernier devait retourner au Pakistan; et l’observation du demandeur selon laquelle le degré d’établissement des demandeurs ne correspondait à rien de [traduction] « plus que ce à quoi on s’attendrait de la part de personnes dans une situation semblable qui viennent au Canada et se voient accorder la possibilité de s’intégrer en attendant qu’il soit statué sur leur demande d’asile ». Cela étant dit, je réitère que je n’ai pas à déterminer si ces déclarations, lorsqu’interprétées à la lumière de l’ensemble de l’examen effectué par l’agent, montrent que l’analyse de ces points est déraisonnable.

IV. Conclusion

[28] La demande de contrôle judiciaire des demandeurs sera donc accueillie, et leur demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire sera renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision.

[29] Aucune des parties n’a proposé de question à certifier, et je conviens que l’affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM‑2090‑21

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant :

  1. La demande de contrôle judiciaire est accueillie. La décision du 12 mars 2021 par laquelle un agent principal a rejeté la demande de résidence permanente fondée sur des motifs d’ordre humanitaire présentée par les demandeurs est annulée, et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvelle décision.

« Nicholas McHaffie »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM‑2090‑21

 

INTITULÉ :

SYED KHALID AHSAN ET AUTRES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 29 SEPTEMBRE 2022

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE MCHAFFIE

 

DATE DES MOTIFS :

Le 31 JANVIER 2023

 

COMPARUTIONS :

Daniel Kingwell

Pour les demandeurs

Melissa Mathieu

Pour le défendeur

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Mamann, Sandaluk & Kingwell LLP

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour les demandeurs

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.