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     IMM-4788-96

ENTRE

     MARIA CECILIA ABARCA CORRALES,

     requérante

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE REED

         La requérante demande que soit annulée une décision de la section du statut de réfugié de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié. Il a été conclu dans cette décision qu'elle n'était pas une réfugiée au sens de la Convention.

         La requérante est originaire du Costa Rica. Elle revendique le statut de réfugié parce que l'État ne veut ni ne peut la protéger contre la violence de son conjoint. La Commission a conclu que la requérante avait été victime de la violence conjugale. L'interprétation des motifs de la Commission, après cette conclusion, est à l'origine du présent appel. Selon l'avocat de la requérante, la Commission a conclu que la revendicatrice avait raison de craindre d'être persécutée, que l'État ne pouvait ni ne voulait la protéger lorsqu'elle a quitté le Costa Rica en mai 1995, mais qu'il y avait eu changement de la situation du pays d'origine après cette date et avant l'audition tenue par la Commission le 3 juillet 1996 (ou la décision du 2 décembre 1996).

         La Commission a résumé le témoignage de la requérante, a conclu que celle-ci avait été victime de la violence conjugale, et a dit qu'elle devait déterminer ensuite la mesure dans laquelle faisait défaut la protection de l'État. Elle a fait état de la preuve documentaire dont elle disposait, tirant les conclusions de fait suivantes :

     -      des postes de police composées de femmes existent depuis 1987 pour prévenir la violence familiale;
     -      des bureaux de la femme au sein du gouvernement existent depuis 1990 pour promouvoir des mesures et des programmes en vue de faire face à la violence à l'égard de la femme;
     -      les victimes peuvent recourir à des services de police, à des organismes judiciaires, à des établissements tels le PANI et le Delegacion de la Mujer (bureau de la femme);
     -      Le mouvement costaricien femme-et-violence est de loin le plus avancé de la région;
     -      le droit du social réel et de l'égalité économique prévoit le cadre et le climat politique d'appui du secteur public en pleine expansion et des initiatives des ONG qui combattent la violence à l'égard de la femme;
     -      les femmes peuvent prendre leur initiative : demander des travailleuses familiales, déposer des accusations à la police composée de femmes, demander l'intervention policière et recevoir des renvois à des services juridiques, à la psychothérapie, au counseling de couple et à des groupes de soutien de la femme;
     -      les victimes peuvent obtenir une ordonnance de ne pas faire;
     -      il y a prévision des droits des enfants, la loi sur la pension alimentaire prise le 26 mars 1996, une loi qui a été prise contre la violence conjugale et qui a été considérée comme occupant le premier rang des mesures visant à résoudre le problème.

         Bien que l'avocat de la requérante ait, dans son mémoire écrit, soulevé l'argument selon lequel la décision de la Commission n'était pas étayée par la preuve documentaire, il s'est, dans son argumentation orale, concentré sur le fait que la Commission n'avait pas examiné la question de savoir s'il existait des raisons impérieuses de ne pas renvoyer la requérante au Costa Rica. La règle applicable se trouve au paragraphe 2(3) de la Loi sur l'immigration. Voir également Yong-Gueico et autres c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (IMM-3413-96, 14 juillet 1997) et Ministre de l'Emploi et de l'Immigration c. Obstoj, [1992] 2 C.F. 739 (C.A.F.).

         L'examen de la preuve documentaire explique pourquoi la décision semble quelque peu partiale et pourquoi des facteurs tels que l'existence des groupes de soutien, de la psychothérapie et des organismes de protection de la femme contre la violence sont inclus comme se rapportant à l'examen de la capacité de l'État de protéger. Une grande partie de la preuve documentaire versée au dossier est une autolouange du progrès qui a été fait par ceux qui tentent de combattre la tolérance de la violence à l'égard de la femme. De même, une majeure partie de la preuve documentaire est de nature très générale. La Commission n'a pas fait état des passages défavorables de la preuve documentaire, mais je ne saurais décider que les conclusions qu'elle a tirées n'étaient pas, dans l'ensemble, étayées par cette preuve documentaire.

         Je me penche maintenant sur l'argument de l'avocat portant sur les "raisons impérieuses". Pour qu'un examen sous le régime du paragraphe 2(3) soit fait, on doit tout d'abord trouver qu'il y a eu changement de la situation du pays d'origine en l'absence duquel le requérant serait réfugié au sens de la Convention. La Commission n'a pas tiré une telle conclusion en l'espèce. Elle a agi comme l'a indiqué la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Yusuf c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1995), 179 N.R. 11 :

         Un changement dans la situation politique du pays d'origine du demandeur n'est pertinent que dans la mesure où il peut aider à déterminer s'il y a, au moment de l'audience, une possibilité raisonnable et objectivement prévisible que le demandeur soit persécuté dans l'éventualité de son retour au pays.

         Puisque la Commission n'a jamais conclu que la requérante était une réfugiée au sens de la Convention, il n'y avait pas lieu pour elle d'examiner le paragraphe 2(3). Je dois noter que, en tout état de cause, je ne suis pas persuadée que le mal et le traumatisme dont souffre la requérante puissent, même si on faisait un effort d'imagination, être considérés comme constituant des "raisons impérieuses".

         Par ces motifs, la demande sera rejetée

                                 "B. Reed"

                                         Juge

Toronto (Ontario)

Le 3 octobre 1997

Traduction certifiée conforme

                         Tan Trinh-viet

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     Avocats et procureurs inscrits au dossier

No DU GREFFE :                      IMM-4788-96
INTITULÉ DE LA CAUSE :              Maria Cecilia Abarca Corrales

        

                             et

                             Le ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration
DATE DE L'AUDIENCE :              Le 2 octobre 1997
LIEU DE L'AUDIENCE :              Toronto (Ontario)

MOTIFS DE L'ORDONNANCE PAR :          le juge Reed

EN DATE DU                      3 octobre 1997

ONT COMPARU :

Byron M. Thomas              pour la requérante

Stephen Gold                  pour l'intimé

                    

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

J. Byron M. Thomas

402-5468, rue Dundas ouest

Etobicoke (Ontario)

M9B 6E3                      pour la requérante

George Thomson

Sous-procureur général du Canada

                             pour l'intimé

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     IMM-4788-96

ENTRE

     MARIA CECILIA ABARCA CORRALES,

     requérante

     et

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

        

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