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     IMM-2720-95

OTTAWA (ONTARIO), le 24 octobre 1997

EN PRÉSENCE DE M. LE JUGE PINARD

Entre :

     TUNCER AVCI,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     O R D O N N A N C E

     La demande de contrôle judiciaire de la décision de l'agent des visas Umit Ozguc de l'Ambassade du Canada à Ankara (Turquie), en date du 29 mai 1995, dans laquelle il a refusé la demande de droit d'établissement du requérant au Canada, est rejetée.

                             YVON PINARD

                        

                         Juge

Traduction certifiée conforme         

                             F. Blais, LL.L.

     IMM-2720-95

Entre :

     TUNCER AVCI,

     requérant,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

     ET DE L'IMMIGRATION,

     intimé.

     MOTIFS DE L'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD

     Le requérant demande le contrôle judiciaire d'une décision de l'agent des visas Umit Ozguc de l'Ambassade du Canada à Ankara (Turquie), en date du 29 mai 1995, dans laquelle l'agent des visas a refusé la demande de droit d'établissement du requérant, y compris une demande de prorogation ou de renouvellement de son visa d'immigrant qui était expiré.

     Le père du requérant, Mehmet Avci, a obtenu un visa d'immigrant de la Section d'immigration à l'Ambassade du Canada à Ankara (Turquie), à titre d'immigrant indépendant le 28 septembre 1993. L'épouse et les enfants de M. Avci ont également obtenu des visas en qualité de personnes à charge. Les parents du requérant sont arrivés au Canada le 12 novembre 1993, date à laquelle ils sont devenus résidents permanents.

     Le requérant, qui est né le 3 mars 1973, a obtenu un visa d'immigrant comme personne à la charge de son père en même temps que le reste de sa famille. Ce visa était valide du 28 septembre 1993 au 21 décembre 1993. Toutefois, il a dû s'enrôler en mars 1993 dans les Forces armées turques pendant 15 mois, et il n'a donc pu rejoindre sa famille au Canada avant d'avoir accompli son service militaire obligatoire. Son père a écrit à l'Ambassade du Canada à Ankara le 20 octobre 1993 pour les informer de cette situation et pour demander une prorogation du visa. Le père déclare que ses conversations avec les représentants de l'Ambassade lui ont donné l'impression que le visa de son fils pourrait facilement être prorogé une fois que le temps serait venu pour lui de rejoindre sa famille.

     Le requérant a terminé son service militaire le 1er octobre 1994 et il a déposé sa demande de résidence permanente en février ou mars 1995.

     La décision de l'agent des visas est rédigée dans les termes suivants :

     [TRADUCTION]         

     Ambassade du Canada (Sceau)

     NENEHATUN CAD. No : 75
     GAZIOSMANPASA, ANKARA
     TURQUIE
     le 29 mai 1995
     Tuncer Avci
     Village de Yakatarla
     Gulsehir, Nevsehir
     Objet: Dossier no : B 0305 14514
     Pour ce qui a trait à la demande de résidence permanente au Canada que vous avez présentée, nous avons le regret de vous informer qu'il ne nous est pas possible de proroger le visa que nous vous avons déjà délivré en tant que personne à la charge de votre père. Malheureusement, nous ne pouvons délivrer de nouveaux visas pour les enfants qui sont tenus de faire leur service militaire et qui sont dans l'impossibilité de terminer leur service militaire pendant la durée de validité de leur visa.         
     Par ailleurs, la nouvelle demande que vous avez présentée a été soigneusement examinée au regard des qualités exigées de personnes telles que vous au Canada.         
     Dans le cadre de cette évaluation, nous avons tenu compte de votre âge, de vos études, de votre profession, de votre expérience professionnelle et de la demande pour des personnes ayant les qualités que vous possédez.         
     Nous avons le regret de vous informer qu'à l'issue de cette évaluation il a été établi qu'il n'est pas possible de vous autoriser à immigrer au Canada.         
     Nous sommes désolés de ne pouvoir vous donner une réponse positive; et nous vous remercions de l'intérêt que vous avez manifesté.         
     Veuillez croire à l'expression de nos sentiments distingués.         
     [Signature]
     UMIT OZGUC
     Section d'immigration

     Les faits de l'espèce ressemblent étroitement à ceux dont il était question dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Nikolova (1995), 31 Imm. L.R. (2d) 104 (C.F. 1re inst.). Dans la décision Nikolova, la mère du requérant avait déposé une demande de parrainage afin que son fils de 18 ans obtienne la résidence permanente. Il a eu 19 ans en mars 1992, et a dû s'enrôler dans l'armée bulgare pour faire son service militaire. Il a reçu son visa d'immigrant le 10 juin 1992 et celui-ci a expiré le 26 août 1992, alors qu'il avait encore 19 ans. Il n'a donc pu accompagner sa mère à ce moment. Sa mère a par la suite reçu une lettre l'informant qu'elle pourrait parrainer son fils une fois qu'il aurait terminé son service militaire. Le requérant avait 20 ans quand il a terminé son service militaire et il a donc présenté une deuxième demande parrainée de résidence permanente. L'agent des visas a refusé cette deuxième demande, mais la section d'appel a annulé la décision de l'agent des visas. Le juge Wetston a accueilli la demande de contrôle judiciaire du ministre, indiquant en partie ce qui suit aux pages 3 et 4 (Imm-16-95) :

         C'est, non pas la date de la demande de parrainage ou de l'engagement à fournir de l'aide, mais celle de la demande de résidence permanente présentée par le requérant parrainé qui est la date pertinente pour déterminer si une personne est membre de la catégorie de la famille : M.E.I. c. Lidder, [1992] 2 C.F. 621 (C.A.F.). En conséquence, la date permettant de déterminer l'âge de M. Kolev est la date de sa demande parrainée de résidence permanente. Au moment de sa demande, M. Kolev avait clairement 20 ans. Le requérant a tout à fait raison d'affirmer que M. Kolev ne remplissait pas les conditions d'âge posées au paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration précité. L'intimée a prétendu que son fils avait 18 ans lorsqu'elle avait présenté une demande parrainée pour le compte de celui-ci. Toutefois, ce témoignage se rapportait à la première demande de parrainage de l'intimée, qui avait été déposée en 1991, lorsque M. Kolev avait en fait 18 ans. Bien qu'un visa d'immigrant ait été délivré à M. Kolev, ce visa a en fin de compte expiré et n'a pas été prorogé.         
         Selon les faits de l'espèce, M. Kolev avait 20 ans lorsque l'intimée a présenté l'engagement à fournir de l'aide à l'égard de son fils. Ainsi donc, à l'une ou à l'autre date, l'âge de M. Kolev n'était pas visé par les conditions du paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration précité. De plus, M. Kolev ne remplissait pas les conditions de formation posées au paragraphe 2(1) du Règlement, puisque, lorsqu'il a atteint 19 ans, il n'était pas inscrit à un programme d'enseignement à plein temps.         
         Bien que je reconnaisse que M. Kolev ait été recruté dans l'armée bulgare, les conditions du Règlement ne sont pas, à l'évidence, remplies. J'ai également examiné la décision Mahida v. M.E.I. (1987), 5 Imm. L.R. (2d) 53 (C.F. 1re inst.), mais je n'ai pas modifié pour autant mon point de vue selon lequel M. Kolev ne remplissait pas les conditions du paragraphe 2(1) du Règlement sur l'immigration précité.         

                     (Non souligné dans l'original)

     Il est vrai qu'en l'espèce le requérant n'avait pas 19 ans au moment de sa première demande, et qu'il répondait aux conditions exigées pour la délivrance de son premier visa d'immigrant. Toutefois, malheureusement, ce visa a expiré et n'a pas été prorogé. Du fait des paragraphes 2(1)1 et 6(6)2 du Règlement sur l'immigration, la question pertinente est maintenant de savoir s'il avait moins de 19 ans au moment où cette deuxième demande parrainée a été présentée, et manifestement il avait plus de 19 ans.

     Quant à la déclaration du père du requérant qui affirme que ses conversations avec les responsables de l'Ambassade lui ont donné l'impression que le visa de son fils pourrait facilement être prorogé une fois que le temps serait venu pour lui de rejoindre sa famille, cela est une réponse suffisante pour réaffirmer que la théorie de l'expectative légitime n'est pas génératrice de droits fondamentaux3.

     Finalement, pour ce qui a trait aux arguments subsidiaires du requérant, je suis d'avis que l'agent des visas a en fait procédé à une évaluation en s'appuyant sur les qualités personnelles du requérant, comme il ressort de ce qui suit :

     [TRADUCTION]         
     Par ailleurs, la nouvelle demande que vous avez présentée a été soigneusement examinée au regard des qualités exigées de personnes telles que vous au Canada.         
     Dans le cadre de cette évaluation, nous avons tenu compte de votre âge, de vos études, de votre profession, de votre expérience professionnelle et de la demande pour des personnes ayant les qualités que vous possédez.         
     Nous avons le regret de vous informer qu'à l'issue de cette évaluation il a été établi qu'il n'est pas possible de vous autoriser à immigrer au Canada.         

     Rien n'indique que l'agent des visas n'a pas agi de bonne foi dans l'examen des pièces dont il était saisi. Je suis également d'avis que l'agent des visas n'a pas refusé d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré au paragraphe 11(3)4. Bien que cela ne soit pas expressément énoncé dans la décision, j'estime suffisant que l'agent des visas ait déclaré qu'il "n'est pas possible de vous autoriser à immigrer au Canada".

     Pour les motifs précités, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

OTTAWA (Ontario)

le 24 octobre 1997

                             YVON PINARD

                        

                         JUGE

Traduction certifiée conforme         

                             F. Blais, LL.L.

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     SECTION DE PREMIÈRE INSTANCE     

     AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

NE DU GREFFE :              IMM-2720-95

INTITULÉ DE LA CAUSE :      TUNCER AVCI

                     c.

                     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
                     ET DE L'IMMIGRATION
LIEU DE L'AUDIENCE :      TORONTO (ONTARIO)
DATE DE L'AUDIENCE :      LE 21 OCTOBRE 1997

MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE PINARD

DATE :                  LE 24 OCTOBRE 1997

ONT COMPARU :

                     Alp Debreli

                     (416) 366-2084      Pour le requérant

                     Kevin Lunney

                     (416) 973-7524      Pour l'intimé

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER :

                     Alp Debreli

                     Avocat et procureur

                     80, rue Richmond ouest

                     Bureau 1505

                     Toronto (Ontario)

                     M5H 2A4

                                 Pour le requérant

                     George Thomson

                     Sous-procureur général

                     du Canada

                                 Pour l'intimé

__________________

1      2. (1) Dans le présent règlement,          "fils à charge" Fils :          a) soit qui est âgé de moins de 19 ans et n'est pas marié, [...]

2      6.(6) L'agent des visas ne peut délivrer un visa d'immigrant à un fils à charge ou à une fille à charge visé à l'alinéa b) de la définition de "parent" au paragraphe 2(1) ou à un fils à la charge ou à une fille à la charge d'un parent, que si :
         a) d'une part, au moment où l'agent d'immigration reçoit la demande de visa d'immigrant, le fils ou la fille répond aux critères concernant l'âge et l'état matrimonial ou le statut d'étudiant énoncés dans les définitions de "fils à charge" et "fille à charge" au paragraphe 2(1);          b) d'autre part, au moment où le visa est délivré, le fils ou la fille répond aux critères concernant l'état matrimonial ou le statut d'étudiant énoncés dans ces définitions.

3      Voir Renvoi relatif au Régime d'assistance publique du Canada) (C.-B.) [1991] 2 R.C.S. 525, suivi notamment dans Parmar c. Canada (M.C.I.) (26 juin 1997) IMM-1133 96, et Gonsalves c. Canada (M.C.I.) (9 mai 1997), IMM-1992-16.

4      11. (3) L'agent des visas peut          a) délivrer un visa d'immigrant à un immigrant qui n'obtient pas le nombre de points d'appréciation requis par les articles 9 ou 10 ou qui ne satisfait pas aux exigences du paragraphe 1 ou 2, ou          b) refuser un visa d'immigrant à un immigrant qui obtient le nombre de points d'appréciation requis par les articles 9 ou 10,      s'il est d'avis qu'il existe de bonnes raisons de croire que le nombre de points d'appréciation obtenu ne reflète pas les chances de cet immigrant particulier et des personnes à sa charge de s'établir avec succès au Canada et que ces raisons ont été soumises par écrit à un agent d'immigration supérieur et ont reçu l'approbation de ce dernier.

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