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Date : 20230829


Dossier : IMM-9483-22

Référence : 2023 CF 1169

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 29 août 2023

En présence de monsieur le juge Fothergill

ENTRE :

ALI ABESHLI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

[1] Le demandeur, Ali Abeshli, a présenté une demande de permis d’études en vue de faire des études secondaires dans une école privée, à Toronto. Au moment où il a présenté sa demande, il était âgé de 12 ans. Il a expliqué qu’il souhaitait améliorer ses compétences en anglais et, éventuellement, faire des études postsecondaires en animation.

[2] Un agent des visas [l’agent] a rejeté la demande. Il n’était pas convaincu que M. Abeshli quitterait le Canada à la fin de son séjour autorisé. Le doute principal de l’agent portait sur les renseignements financiers présentés à l’appui de la demande.

[3] L’article 220 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227, prévoit ce qui suit :

À l’exception des personnes visées aux sous-alinéas 215(1)d) ou e), l’agent ne délivre pas de permis d’études à l’étranger à moins que celui-ci ne dispose, sans qu’il lui soit nécessaire d’exercer un emploi au Canada, de ressources financières suffisantes pour :

a) acquitter les frais de scolarité des cours qu’il a l’intention de suivre;

b) subvenir à ses propres besoins et à ceux des membres de sa famille qui l’accompagnent durant ses études;

c) acquitter les frais de transport pour lui-même et les membres de sa famille visés à l’alinéa b) pour venir au Canada et en repartir.

An officer shall not issue a study permit to a foreign national, other than one described in paragraph 215(1)(d) or (e), unless they have sufficient and available financial resources, without working in Canada, to

 

(a) pay the tuition fees for the course or program of studies that they intend to pursue;

(b) maintain themself and any family members who are accompanying them during their proposed period of study; and

(c) pay the costs of transporting themself and the family members referred to in paragraph (b) to and from Canada.

[4] Dans sa lettre de refus, l’agent a mentionné ce qui suit :

[traduction]

Vos biens et votre situation financière sont insuffisants pour étayer le but déclaré de votre propre voyage (et de celui de tout membre de la famille qui vous accompagnerait, le cas échéant).

Le but de votre visite au Canada ne concorde pas avec un séjour temporaire compte tenu des détails que vous avez fournis dans votre demande.

[5] Dans les notes qu’il a consignées dans le Système mondial de gestion des cas [le SMGC], l’agent a écrit ce qui suit :

[traduction]

J’ai examiné la demande. J’ai tenu compte des facteurs suivants pour prendre ma décision. Je souligne que le demandeur a fourni un relevé bancaire indiquant que le solde du compte de ses parents à la banque Melli s’élève à six milliards de rials. Le relevé bancaire est pris en compte. Les actes notariés et les titres de propriété sont pris en compte comme preuve des fonds. Le relevé de la banque Melli montre des soldes relativement faibles jusqu’à ce qu’un important dépôt forfaitaire inexpliqué de six milliards de rials soit fait, ce qui donne à penser que le solde du compte a été gonflé en vue de la demande de visa, de façon à satisfaire aux exigences relatives à l’établissement financier et à la viabilité pour la première année d’études et les années subséquentes. Le dépôt forfaitaire inexpliqué ne me convainc pas que le demandeur aura accès aux fonds indiqués dans le relevé fourni à l’appui de la demande. Le demandeur est un mineur qui présente une demande en vue de venir faire des études secondaires au Canada. Il a payé ses frais de scolarité pour étudier à l’établissement d’enseignement désigné prévu et il a fourni un plan d’études. J’ai examiné le plan d’études du demandeur et j’estime que les explications ou les détails donnés concernant les avantages qu’il pourra tirer des études envisagées au Canada à cette étape de sa vie sont insuffisants. Le plan contient des commentaires généraux vantant les mérites de l’éducation internationale au Canada et des affirmations générales sur la façon dont cette éducation améliorera la situation du demandeur en Iran. Bien que les frais de scolarité aient été payés, le degré d’établissement de la famille du demandeur ne permet pas de croire que les fonds déclarés suffiront à financer à long terme une éducation au Canada. Après avoir soupesé les facteurs à prendre en considération dans le cadre de la présente demande, je ne suis pas convaincu que le demandeur quittera le Canada à la fin de la période de séjour autorisée. Pour les motifs qui précèdent, je rejette la demande.

[6] La décision de l’agent est susceptible de contrôle par la Cour selon la norme de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 [Vavilov] au para 10). La Cour n’interviendra que si la décision « souffre de lacunes graves à un point tel qu’on ne peut pas dire qu’elle satisfait aux exigences de justification, d’intelligibilité et de transparence » (Vavilov, au para 100).

[7] Ces exigences sont satisfaites si les motifs permettent à la Cour de comprendre le raisonnement qui a mené à la décision et d’établir si la décision appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Vavilov, aux para 85-86, citant Dunsmuir c Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 au para 47).

[8] Les notes consignées par l’agent dans le SMGC font partie des motifs de la décision faisant l’objet du contrôle (Ebrahimshani c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 89 au para 5).

[9] M. Abeshli soutient que l’agent n’a pas dûment examiné la preuve portant sur la situation financière de la famille. Selon lui, sa famille disposait de fonds suffisants pour subvenir à ses besoins durant sa première année d’études au Canada, même sans l’important dépôt forfaitaire inexpliqué fait dans le compte bancaire de son père. Les frais de sa première année d’études, d’un montant de 14 500 $ CA, avaient déjà été payés. En outre, il existait une preuve de l’emploi qu’occupait son père en tant qu’agent de bord auprès d’Iran Air, ainsi qu’une preuve de titres de propriété. Sans tenir compte de l’important dépôt forfaitaire, le compte bancaire de son père contenait tout de même l’équivalent de 10 000 $ CA.

[10] M. Abeshli invoque la décision Henry c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2017 CF 1039, dans laquelle le juge Michel Shore a conclu qu’un agent des visas avait déraisonnablement écarté le revenu important de l’amie de la demanderesse. Cependant, dans cette affaire, la demanderesse avait fourni la preuve du revenu annuel de son amie, étayée par des déclarations solennelles (au para 31). Cette preuve établissait que les fonds étaient suffisants pour financer le programme d’études envisagé par la demanderesse. Elle ne montrait aucun virement forfaitaire d’origine inconnue et ne soulevait aucun doute évident concernant l’accès de la demanderesse aux fonds déclarés.

[11] En l’espèce, la lettre d’Iran Air concernant le revenu du père n’était pas claire. Elle contenait deux colonnes de renseignements financiers dont les totaux étaient considérablement différents. Le relevé bancaire montrait des dépôts de salaire de montants différents, faits à des intervalles irréguliers. Il semblait que le père avait été embauché dans le cadre d’un contrat de deux ans. Aucune directive n’avait été donnée à l’agent quant à la façon d’interpréter les renseignements financiers présentés à l’appui de la demande.

[12] Il était raisonnable pour l’agent de rejeter la demande de permis d’études de M. Abeshli au motif que la preuve ne suffisait pas à établir que [traduction] « les fonds déclarés suffir[aient] à financer à long terme une éducation au Canada ». Comme l’a fait observer le juge Henry Brown dans la décision Bestar c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 483, il incombait au demandeur d’établir le bien-fondé de sa demande, et les questions concernant l’origine des fonds dont disposait la famille auraient dû être anticipées et traitées (au para 19). Il est raisonnable pour un agent des visas de tenir compte du montant et de la provenance des fonds au moment de décider si un demandeur quittera le Canada à la fin de son séjour (Kita c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 1084 au para 20).

[13] M. Abeshli a formulé [traduction] « des commentaires généraux vantant les mérites de l’éducation internationale au Canada ». S’il peut être irréaliste de s’attendre à ce qu’un jeune garçon explique de façon détaillée les raisons pour lesquelles il souhaite faire des études au Canada, l’observation de l’agent selon laquelle M. Abeshli n’avait fait que des [traduction] « affirmations générales sur la façon dont cette éducation améliorer[ait] [sa] situation en Iran » était fondée. L’agent a raisonnablement conclu que [traduction] « les explications ou les détails donnés concernant les avantages [que le demandeur] pourr[ait] tirer des études envisagées au Canada à cette étape de sa vie [étaient] insuffisants ».

[14] Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Aucune des parties n’a proposé de question à certifier en vue d’un appel.


JUGEMENT

LA COUR REND LE JUGEMENT suivant : La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

« Simon Fothergill »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


Dossier :

IMM-9483-22

 

INTITULÉ :

ALI ABESHLI c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE ENTRE TORONTO ET OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 16 août 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE FOTHERGILL

 

DATE DES MOTIFS :

Le 29 août 2023

 

COMPARUTIONS :

Anna Davtyan

 

Pour le demandeur

 

Laoura Christodoulides

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

EME Professional Corp.

Avocats

Toronto (Ontario)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

Pour le défendeur

 

 

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