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Date : 20060602

Dossier : IMM-4866-05

Référence : 2006 CF 692

Ottawa (Ontario), le 2 juin 2006

En présence de Monsieur le juge Blais

ENTRE :

BACHAN SINGH, SOGI

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]      Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de l'immigration concernant la détention du demandeur, laquelle est datée du 26 juillet 2005 dans le dossier IMM-4866-05.

[2]      Une demande de non divulgation de certains documents secrets avait été présentée et acceptée par la Cour, relativement à une partie de la preuve dans le présent dossier.

[3]      Avant de décider si la preuve secrète devait être admise en preuve dans le présent dossier, la Cour a examiné en détail la preuve et interrogé l'employé du Service canadien de renseignements et de sécurité qui était signataire de l'affidavit.

[4]      Il appert des informations reçues que le membre Dubé qui a rendu la décision datée du 26 juillet 2005, n'a pas consulté les documents au soutien du rapport de sécurité qui avait été remis par le Service.

[5]      À la lumière des décisions rendues par la Cour fédérale dans trois récentes décisions qui sont Jaballah(Re), 2005 CF 399, Mahjoub c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration et al, 2005 CF 156, Almrei c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, 2005 CF 355, la Cour arrive à la conclusion qu'il s'agit d'une erreur de droit importante qui justifie à elle seule l'intervention de la Cour. Dans Jaballah, le juge Andrew W. MacKay observe ce qui suit aux paragraphes 34 à 36:

Dans le cas qui nous occupe, il est devenu évident que le dossier dont disposait le représentant du ministre contenait le Rapport sur les renseignements de sécurité (RRS), à savoir un rapport circonstancié du SCRS faisant état des motifs portant à croire que M. Jaballah doit être interdit de territoire, sans les documents de référence et les annexes à l'appui mentionnés dans les notes en base de page du rapport ...

La décision Mahjoub a depuis été appliquée par le juge Blanchard à l'égard de la même question de preuve dans Almrei c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, 2005 CF 355 (voir les paragraphes 14 et 86).

Je remarque que dans les décisions Mahjoub et Almrei la Cour examinait une décision rendue en vertu du paragraphe 115(2) de la Loi, qui s'applique aux réfugiés au sens de la Convention, puisque messieurs Mahjoub et Almrei étaient tous deux des réfugiés et qu'à ce titre ils étaient déjà reconnus comme des personnes ayant besoin de la protection prévue dans la Loi. Dans la présente instance, la décision en cause a été rendue en vertu de l'alinéa 113d)(ii) de la Loi, s'agissant de l'examen d'une demande de protection déposée par un ressortissant étranger, le statut que possède M. Jaballah.

Bien que les deux dispositions visent des personnes possédant un statut différent, l'essence même des deux décisions mentionnées est la même, à mon avis. Les irrégularités de procédure à l'égard d'une décision prise en vertu du paragraphe 115(2) revêtent la même importance que pour la procédure en vertu de l'alinéa 113d)(ii). Je suis d'accord avec l'argument de M. Jaballah lorsqu'il soutient que dans Mahjoub et Almrei, la procédure a été jugée insuffisante pour garantir l'indépendance de l'évaluation faite par le représentant du ministre, en ce qui concerne le danger que représentait la personne en cause pour la sécurité du Canada. Dans le cas qui nous occupe, la procédure serait donc insuffisante pour garantir une évaluation indépendante.

[6]      Bien que le rapport circonstancié du SCRS fasse état en détail des motifs justifiant la détention du demandeur, il apparaît évident que le membre de la Commission qui doit décider du bien-fondé de la prolongation de la détention, s'il examine le dossier pour la première fois, a une obligation de vérifier les documents de référence, les annexes et les informations sur les sources à l'origine du rapport avant de prendre sa décision.

[7]      Je suis d'accord avec les conclusions de mes collègues dans les dossiers mentionnés précédemment, soit Mahjoub, Almrei et Jaballah, que la procédure suivie doive être suffisante pour garantir l'indépendance de l'évaluation faite par le décideur, et que les mêmes principes s'appliquent au dossier de M. Sogi.

[8]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire de la décision du membre Louis Dubé, datée du 26 juillet 2005, est cassée et annulée et le dossier est retourné à la Commission pour réexamen à la lumière des présents motifs.

[9]      À cet effet, la Commission devra s'assurer que lors de la révision de la détention qui se tient mensuellement, le membre qui entend la demande s'assure qu'il est au courant de façon efficace de l'ensemble du dossier, y inclus les annexes et les informations quant aux sources du dit rapport. Le membre devra également s'assurer qu'il a accès aux informations quant à la personne visée par la détention, qui sont les plus à jour possible par le Service canadien de renseignements et de sécurité.

[10]     Les parties ont informé la Cour qu'elles n'avaient pas de questions sérieuses à suggérer, donc aucune question ne sera certifiée.

JUGEMENT

La présente demande de contrôle judiciaire de la décision datée du 26 juillet 2005 est annulée et le dossier est retourné à la Commission pour reconsidération par un autre membre de la Commission à la lumière des présents motifs.

« Pierre Blais »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIERS :                                       IMM-4866-05 et IMM-7355-05

INTITULÉ :                                        BACHAN SINGH, SOGI

                                                           

                                                            c.

                                                           

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                30, 31 mai et 1er juin 2006

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE :             LE JUGE BLAIS

DATE DES MOTIFS :                       2 juin 2006

COMPARUTIONS:

Me Johanne Doyon

POUR LE DEMANDEUR

Me François Joyal

Me Ian Demers

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Doyon & Associés

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

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