Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20060629

Dossier : IMM-7008-05

Référence : 2006 CF 829

Ottawa (Ontario), le 29 juin 2006

En présence de Monsieur le juge Shore

ENTRE :

HARDISH SINGH NIJJAR

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

INTRODUCTION

[1]                Une décision de décideur de fait de première instance ne doit pas être disséquée morceau par morceau mais elle doit plutôt être examinée dans son ensemble. Si l'ensemble se tient dû à une logique inhérente, la décision de décideur de fait de première instance demeure.

NATURE DE LA PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (Loi) à l'encontre de la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Commission), rendue le 27 octobre 2005, selon laquelle le demandeur n'a pas la qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger.

FAITS

[3]                Le demandeur, M. Hardish Singh Nijjar, est un citoyen de l'Inde qui demande la protection du Canada sur la base des mauvais traitements dont il aurait fait l'objet pour avoir participé à plusieurs manifestations.

[4]                M. Nijjar et ses deux frères étaient membres du parti politique Shiromani Akali Dal. En septembre 2000, après plusieurs arrestations et incidents au cours desquels il aurait été torturé, son frère aîné aurait quitté l'Inde. M. Nijjar et sa famille n'auraient eu aucun contact avec son frère aîné depuis ce temps.

[5]                Le 15 avril 2003, M. Nijjar aurait participé à une manifestation revendiquant une augmentation du prix du blé et une réduction du prix du fumier. Le 20 août 2004, M. Nijjar aurait participé à une manifestation revendiquant une augmentation des pensions pour les veuves et les personnes âgées. Au cours de ces deux manifestations, plusieurs personnes, incluant M. Nijjar, auraient été arrêtées, détenues et torturées. Grâce à l'aide de certaines personnes influentes, M. Nijjar aurait été libéré après deux ou trois jours. Il a eu besoin de traitement médical pour ses blessures.

[6]                La police aurait continué à harceler la famille de M. Nijjar concernant l'endroit où se trouvait son frère aîné. M. Nijjar aurait participé à des manifestations visant à empêcher la construction d'un canal qui aurait pour effet de diminuer l'approvisionnement en eau pour les récoltes des fermiers.

[7]                Plus tard, un ami de M. Nijjar serait disparu après avoir été arrêté par la police. En août 2004, M. Nijjar, craignant pour sa vie, serait déménagé chez sa tante dans le village de Diwali. La police aurait fait une descente chez sa tante le 25 septembre 2004 mais M. Nijjar se serait échappé parce qu'il était dans les champs. Il serait ensuite allé chez un oncle à Pandheran où on aurait refusé de l'héberger de façon permanente. Il aurait alors décidé de quitter l'Inde.

[8]                Avec l'aide d'un agent, il a quitté l'Inde le 16 octobre 2004 et est arrivé à Toronto le lendemain, où il a immédiatement réclamé le statut de réfugié. Il a été détenu jusqu'en novembre 2004 pour des questions d'identité.

[9]                Après son arrivée au Canada, il aurait appris, en parlant à sa famille, que son père et son frère cadet avaient été arrêtés et torturés par la police parce que son père avait cherché à intenter une action contre la police.

DÉCISION CONTESTÉE

[10]            La Commission a conclu que M. Nijjar n'est ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger puisque son retour en Inde ne le soumettrait pas à une sérieuse possibilité de persécution ni à un risque à sa vie ou à un traitement cruel et inusité. La Commission base cette conclusion sur le fait qu'elle est satisfaite de l'existence d'une possibilité de refuge interne (PRI).

[11]            La Commission n'a pas mis en doute le fait que M. Nijjar ait été arrêté, détenu et maltraité par la police. Par contre, elle n'était pas convaincue que M. Nijjar était visé de façon particulière par la police ou que la police aurait toujours un intérêt particulier pour sa famille.

QUESTIONS EN LITIGE

[12]            La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en rejetant la demande d'asile de M. Nijjar?

ANALYSE

Cadre législatif

[13]            Selon l'article 96 de la Loi, une personne est un réfugié si elle craint d'être persécutée en raison de sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un groupe social ou ses opinions politiques :

96.        A qualité de réfugié au sens de la Convention - le réfugié - la personne qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

b) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

96.       A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

[14]            Le paragraphe 97(1) de la Loi se lit comme suit :

97.        (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n'a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

a) soit au risque, s'il y a des motifs sérieux de le croire, d'être soumise à la torture au sens de l'article premier de la Convention contre la torture;

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(i)                   elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(ii)                 elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d'autres personnes originaires de ce pays ou qui s'y trouvent ne le sont généralement pas,

(iii)                la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes - sauf celles infligées au mépris des normes internationales - et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iv)               la menace ou le risque ne résulte pas de l'incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

97.        (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i)                   the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii)                 the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii)                the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv)               the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

Norme de contrôle

[15]            Lorsqu'il s'agit d'une question de crédibilité, la norme de contrôle applicable est celle de la décision manifestement déraisonnable. Cette Cour ne peut intervenir que si la décision est manifestement déraisonnable, même si elle n'est pas d'accord avec la conclusion ou les inférences du tribunal de première instance. (Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (F.C.A.), [1993] A.C.F. no 732, au paragraphe 4; Thamotharem, c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 16, [2006] A.C.F. no 8 (QL), au paragraphe 16; Umba c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 25, [2004] A.C.F. no 17 (QL), au paragraphe 31; Kathirgamu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 300, [2005] A.C.F. no370 (QL), au paragraphe 41; Trujillo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 414, [2006] A.C.F. no 595 (QL), au paragraphe 12; Chowdhury c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 139, [2006] A.C.F. no187 (QL), au paragraphe 12; N'Sungani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 1759, [2004] A.C.F. no 2142 (QL), aux paragraphes 6 et 12; Bankole c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 1581, [2005] A.C.F. no 1942 (QL), au paragraphe 6.)

[16]            Quant à la question de la possibilité de refuge interne (PRI), il s'agit d'une question de fait et la norme de contrôle appropriée est aussi celle de la décision manifestement déraisonnable (Chorny c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CF 999, [2003] A.C.F. no 1263 (QL), au paragraphe 5).

La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de contrôle judiciaire en rejetant la demande d'asile de M. Nijjar?

[17]            La Commission a identifié M. Nijjar au parti Shiromani Akali Dal (Motifs de la décision, aux pages 1 et 2). Si elle a ensuite utilisé l'expression « Akali Dal » , c'est vraisemblablement une erreur d'inattention. Dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP), M. Nijjar a clairement identifié le parti politique auquel il allègue appartenir, soit le Shiromani Akali Dal. Par contre, plus tard, il réfère au parti par d'autres noms, surtout « Mann party » . Dans les articles qui sont inclus dans le Dossier du tribunal, les appellations données aux deux partis politiques ne sont pas constantes.

[18]            Ce qui importe plus que l'appellation précise donnée au parti par la Commission est la question à savoir si M. Nijjar était membre d'un parti politique dissident en Inde et si cette appartenance le mettrait à risque à son éventuel retour en Inde. La Commission a examiné cette question attentivement et semble avoir conclu que M. Nijjar était membre d'un parti politique dissident. Par contre, elle est d'avis qu'il n'était pas un membre haut placé et que son appartenance comme simple membre et sa participation dans certaines manifestations ne font pas de lui une personne recherchée qui serait à risque de persécution, torture ou traitement cruel et inusité.

[19]            L'erreur de la Commission sur le nom du parti n'affecte pas la conclusion finale. Elle ne rend pas la décision manifestement déraisonnable. Tel qu'énoncé par M. le juge François Lemieux, dans Anandasivam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 1106, [2001] A.C.F. no 1519 (QL), au paragraphe 25, il ne faut pas examiner trop minutieusement les motifs de la décision de la Commission; les motifs de la Commission seront adéquats s'ils démontrent un bon examen des questions en litige et de la preuve :

Il est également bon de rappeler l'avertissement qu'a lancé le juge Laskin, tel était alors son titre, dans l'arrêt Boulis c. Le ministre de l'Emploi et de l'Immigration, [1974] R.C.S. 875 à la p. 885, lorsqu'il a déclaré : « Il ne faut pas examiner ses motifs [ceux de la Commission] à la loupe, il suffit qu'ils laissent voir une compréhension des questions... et de la preuve qui porte sur ces questions, sans mention détaillée. Le dossier est disponible pour fin de contrôle des conclusion de la Commission » .

[20]            De même, dans Jarada c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 409, [2005] A.C.F. no 506 (QL), au paragraphe 22, M. le juge Yves de Montigny dit ce qui suit :

[...] Il est bien établi dans la jurisprudence que les motifs du tribunal administratif doivent être évalués dans leur ensemble pour évaluer le caractère raisonnable de sa décision, et que l'analyse ne consiste pas à déterminer si chaque élément de son raisonnement satisfait au critère du caractère raisonnable (voir notamment Stelco Inc. c. British Steel Canada Inc., [2000] 3 C.F. 282 (C.A.F.); Yassine c. M.E.I., [1994] A.C.F. no 949 (C.A.F.)). [...]

[21]            Les conclusions de fait tirées par le tribunal répondent à toutes les autres préoccupations de M. Nijjar. Il ne faisait pas l'objet d'un mandat d'arrestation (Motifs de la décision, à la page 5). Un affidavit mentionnait bien que M. Nijjar était recherché peu après la disparition de son frère au mois de septembre 2000 et que son frère et son père auraient été arrêtés plus récemment. Toutefois, la Commission a considéré que M. Nijjar aurait dû amender son FRP pour inclure la visite qu'auraient fait les policiers à ses parents à son sujet (Motifs de la décision, à la page 4). Cette visite que M. Nijjar a mentionné dans son témoignage lors de l'audience indiquerait que les autorités le recherchent toujours et était donc importante. L'omission de M. Nijjar d'amender son FRP pour inclure cette visite était significative aux yeux de la Commission.

[22]            Il faut mentionner que M. Nijjar ne savait presque rien du parti politique dont il allègue faire partie et qu'il a admis n'en être qu'un simple membre. Sa seule appartenance ne peut lui avoir valu les ennuis qu'il a allégués (Motifs de la décision, aux pages 4-5). Si M. Nijjar a effectivement participé à deux manifestations réclamant une plus grande justice sociale, il a été arrêté au même titre que tous les autres participants dans les manifestations (Motifs de la décision, à la page 4). Le lien entre tous ces éléments forme le noeud de la décision de la Commission, qui a conclu que « [...] There I[sic], however, no reason to believe that the claimant was particularly targeted by the police. [...] » et que « [...] He has failed to credibly establish that he was singled out by the police - rather he was arrested along with many others and, while treated badly, not targeted. [...] » (Motifs de la décision, aux pages 4-5).

[23]            Appliquant les articles 96 et 97 de la Loi, la Commission a conclu que M. Nijjar n'avait pas établi l'existence d'un risque s'il retournait en Inde (Motifs de la décision, à la page 5). La Commission a, en plus des éléments que nous venons d'analyser, tenu compte de l'existence d'une PRI.

[24]            Dans Ahmad c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 808, [2004] A.C.F. no995 (QL), aux paragraphes 21-22, M. le juge Paul Rouleau dit ce qui suit au sujet du test pour l'article 97 de la Loi, qui doit considérer si le revendicateur sera personnellement exposé à un risque :

Tout d'abord, je tiens à souligner que le test pertinent en vertu de l'article 96 est effectivement bien distinct de celui en vertu de l'article 97. En effet, une revendication fondée sur l'article 97 appelle l'application par la Commission d'un critère différent, ayant trait à la question de savoir si le renvoi du revendicateur peut ou non l'exposer personnellement aux risques et menaces mentionnés aux alinéas 97(1)a) et b) de la Loi. Cependant, ce critère doit s'apprécier en tenant compte des caractéristiques personnelles du défendeur.[...]

Ainsi l'appréciation de la crainte chez le défendeur doit se faire in concreto, plutôt que dans une perspective abstraite et générale. Le fait que la preuve documentaire illustre de façon inéquivoque la violation systématique et généralisée des droits humains au Pakistan ne suffit absolument pas pour établir la crainte de persecution spécifique et individualisée chez le défendeur en particulier. En l'absence de la moindre preuve pouvant lier la preuve documentaire générale à la situation spécifique du demandeur, je conclus que la Commission n'a pas erré dans sa façon d'analyser la revendication du demandeur sous l'article 97.

[25]            Contrairement à ce qu'affirme M. Nijjar, la Commission a tenu compte des facteurs traditionnellement applicables, c'est-à-dire la possibilité sérieuse d'un risque dans d'autres parties du pays et le caractère raisonnable de la PRI (Motifs de la décision, à la page 5). Même si elle a constaté que le deuxième critère n'était pas exigé par le sous-alinéa 97(1)b)(ii) de la Loi, elle a conclu que la PRI était, dans le cas de M. Nijjar, tout à fait raisonnable (Motifs de la décision, aux pages 7-8).

[26]            Dans sa revue de la preuve documentaire pertinente, la Commission n'a pas été sélective. Elle n'avait pas à mentionner la partie de la preuve selon laquelle les Indiens soupçonnés de soulèvement ou d'encouragement au soulèvement contre l'État seraient persécutés, puisqu'elle avait déjà conclu que M. Nijjar n'était pas recherché par les autorités indiennes. La Commission n'avait pas non plus à examiner la situation des demandeurs d'asile déboutés recherchés qui retournent en Inde puisque ce n'est pas le cas de M. Nijjar. Que les postes de police indiens aient été reliés par un réseau électronique ou que la police indienne pratique le « tracking » des Sikhs est, pour les mêmes raisons, sans pertinence. Compte tenu à la fois de la preuve documentaire générale et de la situation particulière de M. Nijjar, la Commission a conclu qu'une PRI existait. Cette conclusion n'était pas manifestement déraisonnable.

[27]            La Commission peut déterminer qu'un demandeur n'est pas crédible sur la base de contradictions ou d'incohérences dans son témoignage. Dans Anandasivam, ci-dessus, au paragraphe 24, M. le juge Lemieux a affirmé :

La conclusion du tribunal selon laquelle le demandeur n'était pas recherché pour être interrogé se fondait, comme nous l'avons noté, sur ce que le tribunal a qualifié d'incohérence et de deux invraisemblances. Dans Aguebor c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration (1994), 160 N.R. 315, le tribunal a déclaré qu'un tribunal administratif spécialisé avait le pouvoir de se prononcer sur la vraisemblance d'un témoignage pourvu que ses conclusions sur ce point s'appuient sur les éléments de preuve présentés. Il est également incontestable qu'un tribunal administratif peut fonder ses conclusions sur les contradictions ou les incohérences internes des témoignages, aspect qui est au coeur du pouvoir discrétionnaire du juge des faits.

[28]            La Cour ne peut intervenir dans la décision de la Commission que si M. Nijjar démontre que la Commission a commis une erreur de droit ou de fait. La Cour ne peut intervenir simplement parce qu'elle (ou le demandeur) est en désaccord avec la décision de la Commission. Dans Nxumalo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CFPI 413, [2003] A.C.F. no 573 (QL), au paragraphe 7, M. le juge Simon Noël a dit :

Au sujet de la crédibilité du demandeur, je suis d'avis que ce dernier cherche à obtenir de la Cour qu'elle substitue son opinion à celle de la Commission. Comme le déclare le juge Blanchard dans Hosseini c. Canada (M.C.I.), [2002] A.C.F. no 509 (C.F. 1re inst.) :

L'appréciation de la valeur des explications du demandeur, tout comme celle des autres faits, est entièrement du ressort de la Section du statut qui, en outre, a une expertise reconnue pour apprécier la valeur des témoignages sur la situation dans les différents pays. Dans ce contexte, je suis en accord avec les prétentions du défendeur, à savoir que le demandeur ne peut se contenter de réitérer en contrôle judiciaire une explication qui a déjà été présentée au tribunal spécialisé et que celui-ci a rejetée. Dans l'arrêt Muthuthevar c. MCI, [1996] A.C.F. No. 207, en ligne : QL, le juge Cullen au paragraphe 7 de ses motifs a abondé dans le même sens...

Bien que le requérant cherche à clarifier cette partie du témoignage que la Commission a jugé invraisemblable, il ne faut pas oublier que les mêmes explications ont été fournies à la Commission et que celle-ci ne les a pas jugées crédibles. Le requérant n'a pas soumis à la présente Cour des éléments de preuve qui ont été ignorés ou mal interprétés et, pour cette raison, les conclusions de la Commission concernant la crédibilité doivent être confirmées.                        

CONCLUSION

[29]            M. Nijjar n'était membre actif d'aucun parti politique en Inde. Sa participation à des manifestations n'a pas fait de lui une personne d'intérêt pour les autorités indiennes. Il n'était pas recherché et il bénéficie d'une PRI s'il devait retourner en Inde malgré les événements qu'il aurait vécus et que la Commission a tenus pour avérés.

[30]            Les événements passés peuvent être pertinents dans l'évaluation du risque (Oyarzo c. Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1982] 2 C.F. 779 (C.A.), au paragraphe 5; Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration) c. Satiacum (1989), 99 N.R. 171 (C.A.F.), [1989] A.C.F. no 505 (QL)) mais ne sont pas déterminants puisque la crainte s'évalue prospectivement le jour de l'audience (Longia c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1990] 3 C.F. 288 (C.A.), [1990] A.C.F. no 425 (QL), au paragraphe 3).

[31]            La Commission a conclu que les faits de cette affaire ne donnaient pas ouverture à l'octroi de la protection du Canada et n'a pas commis d'erreur manifestement déraisonnable à cet égard. Cette Cour n'interviendra donc pas dans la décision de la Commission. Cette demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.


JUGEMENT

1.          La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2.          Aucune question grave de portée générale est certifiée.

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-7008-05

INTITULÉ :                                          HARDISH SINGH NIJJAR

                                                            c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  MONTREAL (QUEBEC)

DATE DE L'AUDIENCE :                le 20 juin 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :             LE JUGE SHORE

DATE DES MOTIFS :                       le 29 juin 2006

COMPARUTIONS:

Me Michel Le Brun

POUR LE DEMANDEUR

Me Ian Demers

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

MICHEL LE BRUN

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur general du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.