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Date : 20231110


Dossier : IMM-10031-22

Référence : 2023 CF 1500

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 10 novembre 2023

En présence de monsieur le juge Régimbald

ENTRE :

AYMAN YOUSSEF FARES FARES

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 22 septembre 2022 par laquelle la Section d’appel des réfugiés [la SAR] a conclu que le demandeur n’a pas qualité de réfugié au sens de la Convention en vertu de l’article 96 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2002, c 27 [la LIPR] ni celle de personne à protéger en vertu de l’article 97 de la LIPR.

[2] Le demandeur, Ayman Youssef Fares Fares, est citoyen de la Colombie et du Venezuela, deux pays dans lesquels il affirme être exposé à une menace à sa vie et dans lesquels il dit craindre les Forces armées révolutionnaires de Colombie [les FARC]. Le demandeur a également résidé au Panama, mais il ne peut pas y retourner, car son statut de résident permanent dans ce pays est expiré.

[3] Le demandeur est le fils de parents libanais et a donc automatiquement droit à la nationalité libanaise. Il affirme ne pas craindre de retourner au Liban, mais soutient que ses parents sont décédés et qu’il ne peut obtenir les documents nécessaires pour obtenir la citoyenneté libanaise.

[4] La SAR a rejeté la demande d’asile du demandeur parce qu’elle a conclu qu’il n’avait pas établi une possibilité sérieuse de persécution au sens de l’article 96 ou un risque au sens du paragraphe 97(1) au Liban, et qu’il n’avait pas fait d’efforts raisonnables pour obtenir la citoyenneté libanaise.

[5] Après avoir examiné le dossier soumis à la Cour, y compris les observations écrites et orales des parties ainsi que le droit applicable, le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de démontrer que la décision de la SAR est déraisonnable. Pour les motifs qui suivent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

II. Exposé des faits

[6] Le demandeur est né en Colombie de parents qui, selon lui, sont nés au Liban. Il est citoyen colombien et vénézuélien. Il a également résidé au Panama lorsqu’il avait le statut de résident permanent, mais ce statut est maintenant expiré et il ne peut pas retourner au Panama.

[7] Le demandeur craint les FARC.

[8] Le demandeur n’invoque aucun problème avec le Liban. Ses parents étant nés au Liban, il a droit à la nationalité libanaise. Cependant, il soutient que ses parents sont décédés et qu’il ne peut pas se procurer les documents nécessaires pour obtenir sa citoyenneté libanaise.

[9] La SPR a conclu que le demandeur n’était effectivement pas en mesure de retourner au Panama et qu’il serait exposé à une menace à sa vie au Venezuela et en Colombie. Elle a également conclu qu’il n’avait pas pu obtenir sa citoyenneté libanaise et que le Liban n’était pas un pays de référence dans sa demande d’asile.

[10] Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration [le ministre] a interjeté appel de la décision de la SPR et, le 22 septembre 2022, la SAR a accueilli l’appel, jugeant que la SPR avait mal interprété la preuve et qu’elle avait commis une erreur dans sa conclusion selon laquelle le Liban n’était pas un pays de référence.

[11] La SAR a conclu que les parents du demandeur étaient originaires du Liban, que l’admissibilité à la citoyenneté libanaise est automatique (cette question a été admise à l’audition de l’appel), que le demandeur n’a pas déployé des efforts raisonnables pour obtenir sa citoyenneté libanaise et qu’il ne craignait pas d’être persécuté au Liban.

III. Question à trancher et norme de contrôle

[12] La seule question que doit trancher la Cour est celle de savoir si la décision de la SAR, selon laquelle le demandeur n’a pas déployé des efforts raisonnables pour obtenir la citoyenneté libanaise, est raisonnable.

[13] La norme de contrôle applicable à la décision de la SAR est celle de la décision raisonnable (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65) [Vavilov] aux para 10, 25; Mason c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CSC 21 [Mason] aux para 7, 39-44). Le contrôle en fonction de la norme de la décision raisonnable « doit s’intéresser à la décision effectivement rendue par le décideur, notamment au raisonnement suivi et au résultat de la décision » (Vavilov, au para 83). Une décision raisonnable doit être « fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » (Vavilov, au para 85; Mason, au para 8). Pour qu’une décision soit à l’abri d’une intervention de la Cour, elle doit posséder les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité (Vavilov, au para 99; Mason, au para 59). Le contrôle selon la norme de la décision raisonnable n’est pas une « simple formalité »; il demeure un contrôle rigoureux (Vavilov, au para 13; Mason, au para 63). Une décision peut être déraisonnable si le décideur s’est mépris sur la preuve qui lui a été soumise (Vavilov aux para 125-126; Mason, au para 73). Il incombe à la partie qui conteste la décision d’en démontrer le caractère déraisonnable (Vavilov, au para 100).

IV. Analyse

A. La SAR a raisonnablement conclu que les parents du demandeur sont nés au Liban et qu’aucun élément de preuve ne montre que leurs naissances n’ont pas été enregistrées

[14] Tout d’abord, la SAR était d’avis que la SPR avait mal interprété la preuve en concluant que le demandeur ne savait pas si ses parents étaient nés au Liban. Au contraire, dans tous ses formulaires d’immigration, le demandeur mentionne que ses parents sont nés à Maroun, au Liban.

[15] Ainsi, la conclusion de la SAR selon laquelle les parents du demandeur sont nés au Liban est fondée sur la preuve présentée par le demandeur et est donc raisonnable.

[16] Le demandeur fait valoir que ses parents étant décédés, il lui est impossible de prouver qu’ils sont nés au Liban. Il a tenté d’établir le lieu de naissance de ses parents en envoyant des lettres aux autorités libanaises. Le demandeur affirme avoir reçu des lettres indiquant que les noms de ses parents ne figuraient pas sur les listes électorales ou dans les registres des naissances et soutient que la SAR a conclu de manière déraisonnable que rien ne permettait de conclure que ses parents n’étaient pas inscrits dans les registres du Liban.

[17] La SAR a examiné une lettre des autorités libanaises et a jugé que la lettre ne confirmait ni ne niait que les parents du demandeur étaient des citoyens libanais, et qu’elle n’indiquait pas non plus que les parents n’étaient pas inscrits dans le registre des naissances. La lettre envoyée par le demandeur indiquait son nom et le nom de ses parents pour prouver son identité. Dans cette lettre, le demandeur demandait aux autorités libanaises si son nom figurait sur la liste électorale et s’il était inscrit dans le registre des naissances. De toute évidence, son nom ne l’était pas.

[18] Toutefois, la SAR a également conclu que, dans sa lettre, le demandeur ne cherchait pas à savoir s’il était possible de trouver les documents confirmant l’enregistrement de la naissance de ses parents. La lettre du Liban ne concerne que le demandeur lui-même et non la question de savoir si ses parents étaient ou non des citoyens libanais. Cette lettre ne contenait aucune preuve de l’enregistrement de ses parents.

[19] En effet, la lettre de septembre 2017 du ministère de l’Intérieur et des Municipalités de la République du Liban est ainsi libellée :

[traduction]

Objet de la déclaration : Une personne non enregistrée dans les dossiers municipaux.

Nous soussignés, préfet de la ville de Maroun Al‐Ras et certains membres du conseil,

déclarons que M. Ayman Youssef Fares est né à Manori (Colombie) le 3 mars 1973.

Nom de la mère : Latife Fares

Nom du père : Youssef Fares

Le nom ci-dessus et les renseignements connexes ne figurent pas sur nos listes électorales.

Il ne figure pas non plus dans les registres de naissance de la ville.

[Non souligné dans l’original.]

[20] À mon avis, la conclusion de fait tirée par la SAR, selon laquelle rien dans la lettre n’indiquait que les parents du demandeur ne figuraient pas dans le registre des naissances, est raisonnable. Le demandeur conteste expressément la conclusion de fait tirée par la SAR. Malheureusement, sa demande consiste essentiellement à ce que la Cour procède à un nouvel examen des éléments de preuve et à ce qu’elle apprécie à nouveau la preuve prise en compte par la SAR. Malheureusement, ce n’est pas là le rôle de la Cour en matière de contrôle judiciaire (Zhang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 1308 au para 36; Vavilov, aux para 124‐125).

B. La SAR a raisonnablement conclu que le demandeur n’a pas démontré qu’il a fait des efforts raisonnables pour exercer son droit à la citoyenneté libanaise

[21] Le demandeur affirme que des éléments de preuve documentaire montrent que l’octroi de la nationalité libanaise est « automatique », mais il soutient qu’en pratique, dans les circonstances actuelles, le processus administratif de demande de citoyenneté libanaise est alambiqué et nébuleux.

[22] Le demandeur soutient que, si une personne est née à l’extérieur du Liban de parents libanais, la demande de citoyenneté libanaise doit être traitée par l’ambassade du Liban, dans le pays où elle est née, en l’occurrence la Colombie. Cependant, le demandeur ne peut pas retourner en Colombie en raison d’un risque établi de persécution.

[23] Le demandeur déclare également qu’il n’a aucun moyen de prouver que ses parents sont nés au Liban ou qu’ils ont la citoyenneté libanaise. Il s’appuie sur les articles 2.7 et 10.2 du cartable national de documentation [le CND] pour affirmer qu’il existe des obstacles pratiques importants qui l’empêchent même de demander les certificats de naissance et de mariage de ses parents, dont le dernier est nécessaire pour qu’il puisse exercer son droit à la citoyenneté. Il fait également valoir que les lois sur la protection de la vie privée et l’accès à l’information lui interdisent de demander les certificats de naissance ou de mariage de ses parents, ce qui représente un « obstacle important dont on pourrait raisonnablement croire qu’il l’empêche d’exercer son droit à la protection de l’État que lui confère la citoyenneté » (Tretsetsang c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2016 CAF 175 au para 72 [Tretsetsang]).

[24] Le demandeur fait valoir qu’en raison des circonstances entourant le décès de ses parents il y a plus de 40 ans, et selon le CND, une demande d’accès à l’information soumise au Liban ou en Colombie pour demander les certificats de mariage et de naissance de ses parents l’obligerait probablement à obtenir le consentement de l’exécuteur ou du fiduciaire testamentaire de ses parents, dont l’identité est inconnue du demandeur.

[25] Enfin, le demandeur soutient que la SAR n’a pas correctement appliqué le critère établi dans les arrêts Williams c Canada (Ministre de la Citoyenneté et l’Immigration), 2005 CAF 126 [Williams] et Tretsetsang et n’a pas dûment examiné les faits concernant le « pouvoir » du demandeur d’acquérir la citoyenneté libanaise.

[26] À mon avis, la décision de la SAR est raisonnable. Le principal problème lié aux arguments du demandeur est que la SAR a conclu qu’il n’avait pas fait d’efforts raisonnables pour obtenir la citoyenneté libanaise. Dans l’arrêt Williams, la Cour d’appel fédérale a déclaré ce qui suit :

[22] [...] Le fait de ne pas avoir de nationalité ne doit pas relever du contrôle d’un [demandeur].

Le véritable critère est, selon moi, le suivant : s’il est en son pouvoir d’obtenir la citoyenneté d’un pays pour lequel il n’a aucune crainte fondée d’être persécuté, la qualité de réfugié sera refusée au demandeur. [...]

[27] [...] Le principe qui a été établi par la jurisprudence, c’est que lorsque la citoyenneté d’un autre pays peut être réclamée, le demandeur est censé entreprendre des démarches pour l’obtenir et qu’il se voit refuser la qualité de réfugié s’il est démontré qu’il était en son pouvoir d’acquérir cette autre citoyenneté. Or, en l’espèce, l’intimé a la faculté de renoncer à sa citoyenneté rwandaise pour obtenir la citoyenneté ougandaise. Il lui est loisible d’acquérir cette autre citoyenneté s’il a la volonté de l’obtenir. [...]

[Non souligné dans l’original.]

[27] Ensuite, dans l’arrêt Tretsetsang, la Cour d’appel fédérale a précisé que seul un obstacle important à la tentative d’un demandeur d’obtenir la citoyenneté est suffisant pour exclure ce pays comme pays de référence :

[72] Par conséquent, le demandeur qui invoque un obstacle à l’exercice de son droit à la citoyenneté dans un pays donné doit établir selon la prépondérance des probabilités :

(a) qu’il existe un obstacle important dont on pourrait raisonnablement croire qu’il l’empêche d’exercer son droit à la protection de l’État que lui confère la citoyenneté dans le pays dont il a la nationalité;

(b) qu’il a fait des efforts raisonnables pour surmonter l’obstacle, mais que ces efforts ont été vains et qu’il n’a pu obtenir la protection de l’État.

[73] Ce qui constitue des efforts raisonnables pour surmonter un obstacle important (établi par le demandeur) dans une situation donnée ne peut être déterminé qu’au cas par cas. Le demandeur ne sera pas tenu de faire des efforts pour surmonter ces obstacles s’il démontre qu’il serait déraisonnable d’exiger pareils efforts.

[Non souligné dans l’original.]

[28] En outre, dans la décision Naz c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 1074, la Cour a clarifié les décisions rendues dans les affaires Williams et Tretsetsang, et a formulé deux questions à trancher pour établir si un demandeur a le droit d’obtenir la citoyenneté :

[21] En résumé, je conviens avec M. Naz que deux questions découlent essentiellement des arrêts Williams et Tretsetsang : (1) Le demandeur d’asile a-t-il actuellement la citoyenneté, ou un droit légal à la citoyenneté qu’il lui incombe de faire valoir et qui n’est pas à la discrétion des autorités? (2) Le cas échéant, le demandeur d’asile a-t-il établi a) qu’il existe un obstacle important l’empêchant d’exercer son droit à la protection de l’État que lui confère la citoyenneté et b) qu’il a fait des efforts raisonnables pour surmonter l’obstacle, mais que ces efforts ont été vain?

[29] À mon avis, la SAR a raisonnablement appliqué ce cadre juridique dans son analyse et a conclu que le demandeur a un droit légal à la citoyenneté libanaise dépendant de sa volonté et qu’il n’a pas fait d’efforts raisonnables pour obtenir la citoyenneté.

[30] Le demandeur devait s’acquitter du fardeau qui lui incombait d’établir qu’il existait un obstacle important l’empêchant d’exercer son droit à la citoyenneté ou, à tout le moins, qu’il avait fait des efforts raisonnables pour surmonter cet obstacle. Il ne s’est pas acquitté de son fardeau.

[31] Comme l’a déclaré la SAR, le demandeur a fait les efforts suivants pour exercer son droit à la citoyenneté libanaise :

• Il a obtenu une lettre du ministère de l’Intérieur et des Municipalités de la République du Liban confirmant que son propre nom ne figure pas sur la liste électorale ni dans le registre des naissances;

• Il a obtenu une lettre du ministère de l’Intérieur et des Municipalités de la République du Liban et du maire de Maroun Al-Ras confirmant que son propre nom ne figure pas sur la liste électorale ni dans le registre des naissances;

• Le cabinet de son conseil a communiqué avec l’ambassade du Liban à Ottawa pour se renseigner sur le processus relatif à l’exercice de son droit à la citoyenneté libanaise.

[32] La SAR a conclu que ces efforts n’étaient pas suffisants et que le demandeur aurait dû, en plus de ses « efforts » :

  • -communiquer avec l’ambassade du Liban en Colombie pour mener à bien le processus de demande de citoyenneté;

  • -retenir les services d’un conseil en Colombie pour qu’il l’aide à mener à bien le processus dans ce pays et à trouver des documents concernant le certificat de mariage de ses parents;

  • -tenter d’obtenir les documents de ses parents en Colombie et au Liban, malgré les prétendues lois sur la protection des renseignements personnels;

  • -faire le suivi auprès de la ville natale de ses parents, ou au Liban en général, pour demander des éléments de preuve concernant la citoyenneté ou le mariage de ses parents.

[33] Il n’a toutefois entrepris aucune de ces démarches. Je suis d’accord avec la conclusion de la SAR au paragraphe 33 de ses motifs selon laquelle il est faux de dire qu’il a échoué dans ses tentatives; il n’a rien tenté du tout. Le demandeur n’a donc pas satisfait au deuxième volet du critère établi dans l’arrêt Tretsetsang.

[34] Le demandeur cite également l’affaire Dolker c Canada, 2015 CF 124 au paragraphe 27 dans laquelle la Cour a déclaré ce qui suit :

« [...] que rien dans le droit canadien ne prévoit qu’un demandeur doit d’abord demander la citoyenneté, puis se la faire refuser, dans un pays sûr lorsqu’il a un droit de présenter une telle demande avant de se réclamer de la protection du Canada. »

[35] Avec égards pour le demandeur, j’estime que son argument fondé sur cette affaire est incomplet. Comme l’a soutenu le défendeur dans son mémoire des arguments, la Cour a également conclu dans cette affaire que le fait de négliger de prendre des mesures pour se réfugier dans un pays sûr ne doit pas servir d’invitation à demander la citoyenneté canadienne :

[29] Avec égards au juge Russell, il n’y a rien dans l’arrêt Williams qui appuie la thèse selon laquelle il n’est pas nécessaire qu’un demandeur ait présenté une demande de citoyenneté. Le paragraphe 22 de cet arrêt traite de la question de savoir s’il relève du pouvoir, de la faculté ou du contrôle d’une personne d’acquérir la citoyenneté. Il n’y a rien dans cette affaire qui encourage un demandeur à ne pas déployer des efforts raisonnables pour obtenir sa citoyenneté.

[30] La négligence volontaire, ou même la négligence, de présenter une demande de citoyenneté dans le cas où une personne a le droit de présenter une telle demande ne devrait pas constituer une invitation pour cette personne à tenter sa chance au Canada. [...]

[Non souligné dans l’original.]

[36] La décision de la SAR, selon laquelle le demandeur n’a pas établi qu’il a déployé tous les efforts raisonnables pour établir si ses parents étaient libanais ou non et pour obtenir la citoyenneté libanaise, est raisonnable.

C. La SAR a raisonnablement conclu que le demandeur n’a pas besoin de retourner en Colombie

[37] Le demandeur soutient que la preuve objective indique de manière claire et non équivoque qu’étant donné qu’il est né en dehors du Liban, sa demande de citoyenneté libanaise doit être traitée par l’ambassade du Liban en Colombie.

[38] Le demandeur réitère que la SPR a conclu que la menace à sa vie en Colombie était considérée comme un obstacle important l’empêchant de retourner dans ce pays pour y exercer son droit à la citoyenneté. Il soutient que, puisque la SPR est l’organe administratif qui a examiné la preuve, entendu son témoignage et mené l’analyse de la menace dans le cadre de sa demande d’asile et qu’elle a conclu qu’il ne devrait pas être contraint de retourner en Colombie, il convient de faire preuve de retenue à l’égard de cette conclusion.

[39] Je ne suis pas d’accord avec le demandeur.

[40] Tout d’abord, c’est la décision de la SAR qui fait l’objet de la demande de contrôle judiciaire dont la Cour est saisie. La SAR a examiné la décision de la SPR selon la norme de la décision correcte en procédant à une évaluation indépendante de tous les éléments de preuve, ce qu’elle devait faire conformément à l’arrêt Canada (Citoyenneté et Immigration) c Huruglica, 2016 CAF 93 au para 103.

[41] Ensuite, la SAR a conclu que le demandeur n’a présenté aucune preuve démontrant qu’il aurait besoin de se rendre « physiquement » à l’ambassade du Liban en Colombie pour obtenir sa citoyenneté libanaise. En effet, le demandeur n’a pas tenté de poursuivre le processus, étant donné son argument selon lequel il lui était impossible d’obtenir une preuve établissant le lieu de naissance de ses parents. Il était loisible à la SAR de tirer cette conclusion en fonction des éléments de preuve présentés.

[42] Comme l’a déclaré la SAR, la preuve démontre uniquement que la demande de citoyenneté du demandeur serait traitée en Colombie. Toutefois, elle ne précise pas s’il doit ou non se rendre en Colombie pour le faire. Aucune autre preuve n’a été présentée à la SPR ou à la SAR indiquant qu’il devait se rendre en Colombie pour obtenir sa citoyenneté libanaise et qu’il n’y avait pas d’autre méthode (comme retenir les services d’un conseil ou d’un agent en Colombie) pour traiter sa demande.

V. Conclusion

[43] À mon avis, la décision de la SAR est intelligible, transparente et justifiée (Vavilov, aux para 15, 98). La SAR a dûment examiné l’ensemble de la preuve dont elle disposait et a conclu que le Liban est un pays de référence pour lequel le demandeur n’a démontré aucun effort raisonnable afin d’obtenir la citoyenneté. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

[44] Les parties n’ont proposé aucune question aux fins de certification, et je conclus que la présente affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT dans le dossier IMM-10031-22

LA COUR STATUE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

  2. Il n’y a pas de question à certifier.

« Guy Régimbald »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-10031-22

INTITULÉ:

AYMAN YOUSSEF FARES FARES c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 8 NOVEMBRE 2023

JUGEMENT ET MOTIFS :

LE JUGE RÉGIMBALD

DATE DES MOTIFS :

LE 10 NOVEMBRE 2023

COMPARUTIONS :

Luis Alberto Vasquez

POUR LE DEMANDEUR

Yamen Fadel

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Luis Alberto Vasquez

Avocat

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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