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Date : 20231201


Dossier : IMM-619-22

Référence : 2023 CF 1614

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 1er décembre 2023

En présence de madame la juge Turley

ENTRE :

MASIH ALLAHBAKHSHIHAFSHEJANI

demandeur

et

LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS DU JUGEMENT

I. Aperçu

[1] Citoyen iranien, le demandeur sollicite le contrôle judiciaire d’une décision, rendue par un agent principal d’immigration [l’agent], portant rejet de la demande d’examen des risques avant renvoi [ERAR] présentée conformément à l’article 112 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c 27 [la LIPR].

[2] J’accueille la demande en raison du caractère déraisonnable de l’analyse réalisée par l’agent quant au risque auquel le demandeur affirme être exposé en Iran, du fait de son refus de communiquer des données confidentielles à SADRA, une entreprise établie en Iran. L’agent a conclu que les éléments de preuve présentés n’établissaient pas le risque prospectif et personnalisé que le refus de communiquer les données fait courir au demandeur, ce faisant il a omis de considérer l’ensemble de la preuve, a mal interprété cette dernière et a tiré des conclusions irrationnelles et illogiques. Cette conclusion étant tirée, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres questions soulevées par le demandeur.

II. Contexte

[3] Le demandeur est entré au Canada en septembre 2016 muni d’un visa d’études à titre de candidat au doctorat en ingénierie offert par l’Université Memorial de Terre-Neuve à St. John’s (Terre-Neuve). Son directeur de thèse était résident permanent au Canada et citoyen iranien [le superviseur].

[4] Le demandeur travaillait avec son superviseur à un projet de recherche financé par Wood Group, une des firmes multinationales de conseil et d’ingénierie de premier plan. Le projet consistait à [traduction] « développer des infrastructures pétrochimiques en eau profonde, telles que des pipelines sous-marins » : exposé circonstancié de la demande d’ERAR du demandeur, du 4 juin 2021, au par. 9 [l’exposé circonstancié]. Le demandeur était le seul membre de l’équipe de recherche doté de l’expérience nécessaire afin d’opérer une pièce d’équipement stratégique appelée centrifugeuse.

[5] En avril 2017, le demandeur a d’abord été accusé d’agression, puis de tentative de meurtre. En décembre 2020, il a été déclaré coupable de tentative de meurtre. Le demandeur a été jugé interdit de territoire au Canada en conséquence de cette condamnation et conformément à l’alinéa 36(1)a) de la LIPR.

[6] En mai 2021, le demandeur a sollicité un ERAR. Il affirme que l’une des principales raisons pour lesquelles son renvoi vers l’Iran lui ferait courir le risque d’être soumis à la torture et l’exposerait à une menace à la vie ou à des peines cruelles et inusitées tient à son refus d’acquiescer à la demande de son superviseur de transmettre des données de recherche confidentielles à SADRA.

[7] Selon le demandeur, le superviseur a exercé sur lui d’énormes pressions pour qu’il transmette des données de recherche sensibles à SADRA, laquelle est sous le contrôle du Corps des Gardiens de la Révolution islamique [le CGRI] et est visée par des sanctions internationales sous le régime de la Loi sur les mesures économiques spéciales, LC 1992, c 17. Le superviseur avait travaillé pour SADRA de 2000 à 2005, notamment à titre d’ingénieur supérieur de projet de 2003 à 2005. Le demandeur allègue que le superviseur entretient toujours des liens avec SADRA.

[8] Le demandeur affirme qu’il a à plusieurs reprises refusé d’acquiescer à la demande de communication de données formulée par son superviseur, car SADRA ne prenait pas part au projet de recherche universitaire. Le demandeur affirme également qu’il croit que le fait de communiquer ces données aurait contrevenu à l’entente de recherche conclue avec l’université et à l’application des sanctions canadiennes et internationales en vigueur.

[9] Le 30 décembre 2021, l’agent a rejeté la demande d’ERAR du demandeur. L’agent a conclu que des éléments de preuve manquaient pour conclure que le demandeur courait le risque prospectif et personnalisé d’être soumis à la torture ou d’être exposé à une menace à la vie ou à des peines ou des traitements cruels et inusités au sens du paragraphe 97(1) de la LIPR s’il devait être renvoyé en Iran : notes du 30 décembre 2021, à la p. 9 du dossier de l’agent [les notes au dossier de l’agent].

[10] En ce qui a trait au refus du demandeur de communiquer des données scientifiques à SADRA, l’agent a conclu que la preuve n’étayait pas suffisamment l’allégation du demandeur, à savoir que son superviseur tentait de fournir à SADRA des renseignements confidentiels. L’agent étaye cette conclusion ainsi : (i) il y a peu d’information ou d’éléments de preuve quant à la façon dont le superviseur a réagi au fait d’être ni plus ni moins accusé d’espionnage et de violation de sanctions internationales; (ii) le courriel du superviseur a été envoyé à partir de son compte courriel institutionnel plutôt qu’à partir d’un compte personnel et (iii) rien n’indique que le demandeur ou son superviseur aient tenté de faire intervenir des représentants de l’université : notes au dossier de l’agent, à la p. 6.

III. Norme de contrôle

[11] Nul ne conteste que la norme à appliquer est celle de la décision raisonnable. La décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 85 [Vavilov]; Mason c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CSC 21 au para 8 [Mason].

[12] Une décision ne peut être infirmée que si elle « souffre de lacunes graves », au point de ne plus satisfaire aux critères « de justification, d’intelligibilité et de transparence » : Vavilov, au para 100; Mason, aux para 59-61. De plus, la cour de révision doit « être convaincue que la lacune ou la déficience qu’invoque la partie contestant la décision est suffisamment capitale ou importante pour rendre cette dernière déraisonnable » : Vavilov, au para 100. En définitive, la cour doit se fonder sur les faits pertinents et le droit pour être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient » : Vavilov, au para 104.

[13] La cour de révision ne doit pas apprécier de nouveau la preuve. Toutefois, elle doit justifier la décision au regard des faits. Si le décideur s’est fondamentalement mépris sur la preuve qui lui a été soumise ou n’en a pas tenu compte, la décision est déraisonnable : Vavilov, aux para 125-126.

IV. Analyse

A. Conclusion erronée concernant le caractère insuffisant de la preuve

[14] Pour les motifs qui suivent, je conclus que l’analyse qu’a fait l’agent quant à la crainte du demandeur d’être exposé à des risques en Iran en raison de son refus de communiquer des données confidentielles à SADRA est déraisonnable. L’analyse que fait l’agent repose sur l’insuffisance de la preuve. Plus précisément, l’agent a conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour étayer l’allégation du demandeur selon laquelle son superviseur [traduction] « tentait de se soustraire au respect des sanctions internationales pour fournir des renseignements confidentiels à SADRA » : notes au dossier de l’agent, à la p. 6.

[15] S’il est vrai qu’il faut faire preuve d’une grande déférence à l’égard des conclusions tirées par les décideurs sur le caractère suffisant de la preuve, il n’en faut pas moins les expliquer, au vu des éléments de preuve figurant au dossier ou par la présentation de justifications : Ahmed c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 618 au para 35; Sarker c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 154 au para 11; Magonza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 14 au para 35 [Magonza]. En l’espèce, l’agent a conclu à l’insuffisance de la preuve sans avoir judicieusement tenu compte de tous les éléments de preuve.

[16] De plus, la Cour a déjà affirmé que, pour examiner une conclusion portant que la preuve est insuffisante, il est utile de se demander « quels autres éléments de preuve auraient raisonnablement pu être produits? » Bonilla Monge c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2023 CF 233 au para 22; Magonza, au para 58; Adeleye c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2020 CF 640 au para 15.

[17] La question à poser dans le présent dossier est de savoir quel autre type de preuve le demandeur aurait pu raisonnablement soumettre afin d’étayer ses allégations que le superviseur tentait de communiquer des données confidentielles en violation de sanctions internationales. À ce sujet, voici les conclusions tirées par l’agent quant au type de preuve à laquelle il se serait attendu : (i) une réaction de la part du superviseur qui soit plus explicite qu’une vague colère quant au refus du demandeur et (ii) l’implication d’autres représentants de l’université dans l’affaire : notes au dossier de l’agent, aux p. 6, 10.

[18] À mon avis, pour conclure à l’insuffisance de la preuve, l’agent (i) a omis de considérer tous les éléments de la preuve; (ii) a mal interprété et mal qualifié la preuve et (iii) a tiré des conclusions irrationnelles et illogiques. Ces trois vices rendent la décision de l’agent déraisonnable.

(1) L’agent a omis de considérer tous les éléments de la preuve

[19] Pour conclure à l’insuffisance de la preuve au soutien de l’allégation grave du demandeur à savoir que son superviseur [traduction] « tentait de se soustraire au respect des sanctions internationales et de fournir des renseignements confidentiels à SADRA », l’agent a omis de tenir compte de tous les éléments de preuve et d’expliquer en quoi ceux-ci ne suffisaient pas.

[20] L’agent a pris acte de l’antécédent d’emploi du superviseur au sein de SADRA de 2000 à 2005 et a reconnu que la demande du superviseur pouvait paraître [traduction] « suspecte ». Toutefois, à la lumière de son examen du courriel transmis par le superviseur au sujet de la communication des données, l’agent a conclu que les mots — [traduction] « pour le projet principal lié au plan stratégique de SADRA » — ne signifiaient pas nécessairement que la communication des données contreviendrait aux sanctions internationales : notes au dossier de l’agent, à la p. 6.

[21] Le courriel du superviseur est rédigé ainsi :

[traduction]

Prière d’extraire et de rassembler tous les schémas, les manuels, les graphiques, les registres et les logiciels. Analysez les informations demandées telles que les modèles, les technologies et les techniques. Prenez quelques photos détaillées des dessins, des prototypes, de l’information technique, du matériel du laboratoire principal de C-CORE et de la chambre de la centrifugeuse qui s’y trouve pour le projet principal lié au plan stratégique de SADRA. Organisons ensuite une rencontre pour échanger l’information demandée sur une clé USB. Il faudra m’expliquer comment cela fonctionne dès que vous serez aux faits de tout ce qui concerne notre plan à venir : notes au dossier de l’agent, à la p. 5.

[22] L’agent a conclu que hormis les « deux courriels et des déclarations formulées dans son exposé, le demandeur [avait] fourni peu d’information ou de mise en contexte quant à ces courriels et à ces demandes » : notes au dossier de l’agent, à la p. 6. Or, l’exposé du demandeur contient bel et bien de l’information et des éléments de contexte pertinents à l’examen et à l’analyse de ses allégations par l’agent. Fait à noter, ce dernier ne mentionne pas ces éléments de preuve dans sa décision, ne les a pas rejetés au motif qu’il les a jugés non crédibles, ni n’a expliqué pourquoi ils étaient insuffisants.

[23] La preuve du demandeur indiquait que ses travaux de recherche à l’Université Memorial de Terre-Neuve étaient de nature confidentielle et que SADRA ne prenait pas du tout part au projet. Selon l’exposé du demandeur, SADRA est sous le contrôle du CGRI, une organisation paramilitaire iranienne. En raison de ce contrôle, SADRA est sous le coup de sanctions appliquées par la communauté internationale : exposé circonstancié, au par. 14. L’agent n’a pas contesté cet élément de preuve.

[24] En outre, le demandeur a soumis des éléments de preuve parlants pour ce qui est de sa conversation avec son superviseur et des raisons pour lesquelles ce dernier lui demandait de communiquer les données à SADRA :

[traduction]

J’ai trouvé [la requête de mon superviseur] très troublante. Une fois au courant pour SADRA, j’ai demandé [à mon superviseur] pourquoi je devrais leur transmettre ces données. Il m’a dit que c’était très important pour l’Iran d’avoir ces renseignements parce que c’est un pays qui souffre sous le poids des sanctions imposées. Il a dit que SADRA et l’Iran ont besoin des renseignements obtenus des centrifugeuses en vue d’exploiter les réserves pétrolières marines dans le golfe Persique : exposé circonstancié, au par. 15.

[25] Pour conclure à l’insuffisance de la preuve, l’agent a omis de considérer ces éléments de preuve. L’agent s’est plutôt concentré sur un passage du courriel envoyé par le superviseur au demandeur. À mon avis, omettre de s’appuyer sur tous les éléments de la preuve pour exposer en quoi la preuve était insuffisante constituait une erreur de la part de l’agent.

(2) L’agent a mal interprété la preuve

[26] L’agent a mal interprété un élément clé de la preuve et s’est ensuite appuyé sur cette lecture erronée pour conclure que la preuve était insuffisante quant au risque couru par le demandeur en Iran du fait de son refus de communiquer l’information à SADRA. Comme le mentionne la Cour suprême, « le caractère raisonnable d’une décision peut être compromis si le décideur s’est fondamentalement mépris sur la preuve qui lui a été soumise ou n’en a pas tenu compte » : Vavilov, au para 126. Je suis d’avis que c’est précisément ce qui s’est produit en l’espèce.

[27] L’agent a fini par conclure qu’il n’y avait que [traduction] « peu d’éléments de preuve » quant à ce qui s’était passé après que le demandeur eut [traduction] « indirectement accusé » son superviseur de [traduction] « contrevenir aux contrats de l’université et aux sanctions internationales » : notes au dossier de l’agent, à la p. 10. Dans ses motifs, l’agent avait même eu recours à des termes plus durs pour traiter des accusations du demandeur : [traduction] « Il y a peu d’information ou d’éléments de preuve concernant la façon dont le professeur a réagi au fait d’être ni plus ni moins accusé d’espionnage et de violation de sanctions internationales » [non-souligné dans l’original] : notes au dossier de l’agent, à la p. 6.

[28] L’agent a estimé que la réaction du superviseur constituait un [traduction] « élément essentiel du contexte » aux fins de déterminer la nature de ses demandes et de ses [traduction] « liens avec des agents en Iran » : notes au dossier de l’agent, à la p. 10. Toutefois, ce qui constitue un vice fatal dans le raisonnement de l’agent, c’est qu’il part de la prémisse que le demandeur avait [traduction] « indirectement » ou [traduction] « ni plus ni moins » accusé son superviseur d’espionnage. Cette erreur d’interprétation a teinté l’ensemble de l’analyse de l’agent eu égard à l’allégation de crainte du demandeur d’être victime de représailles en Iran, du fait d’avoir refusé de communiquer les renseignements.

[29] À l’évidence, l’agent s’attendait à ce que le superviseur du demandeur ait réagi d’une certaine façon à une accusation qui n’avait pourtant jamais été portée. Soulignons que l’agent a conclu que, selon lui, [traduction] « ces événements auraient probablement provoqué une réaction plus explicite qu’une vague colère » : notes au dossier de l’agent, à la p. 6.

[30] L’examen de la preuve offerte n’appuie pas la lecture faite par l’agent selon laquelle le demandeur aurait accusé son superviseur d’espionnage ou de manquement à l’obligation de confidentialité ou au respect des sanctions internationales. Je conviens avec le demandeur que, bien qu’il ait exprimé ces craintes et bien qu’elles soient à l’origine de sa demande d’ERAR, la preuve indique que ce n’est pas en ces termes qu’il a fait part de ses réserves à son superviseur. Dans le courriel qu’il a adressé à son superviseur, le demandeur a plutôt [traduction] « abrité ses réserves sous le couvert de la confidentialité prévue dans l’entente de participation du chercheur » qu’il avait signée : mémoire du demandeur, au par. 27.

[31] Le courriel envoyé par le demandeur à son superviseur est rédigé ainsi :

[traduction]

Pour faire suite à notre précédente discussion et à notre rencontre à votre bureau, je dois réitérer qu’en raison de l’entente de participation du chercheur et de son contenu, en particulier les articles 1, 3, 4 et 5, donner suite à votre demande sans en informer au préalable des membres du personnel de C-CORE et de l’université m’effraie. Veuillez trouver ci-joint l’entente de participation du chercheur que j’ai dû signer comme principal prérequis pour travailler au C-CORE Centrifuge Center.

[32] De plus, le demandeur explique dans son exposé qu’il ne voulait pas mettre son superviseur plus en colère qu’auparavant, car il avait besoin de lui pour obtenir son diplôme. Il explique aussi avoir dit à son superviseur : [traduction] « comme je suis signataire des ententes de confidentialité encadrant ce projet de recherche, je ne pourrais pas transmettre ces renseignements à SADRA sans l’autorisation expresse de l’UMT et de l’entreprise subventionnaire du projet » : exposé circonstancié, au par. 16. Ces éléments corroborent également la position du demandeur à savoir que l’agent a commis une erreur dans l’interprétation de la preuve.

[33] Pour les motifs qui précèdent, je suis convaincue que l’agent a commis des erreurs fondamentales dans l’appréciation et la qualification de la preuve.

(3) L’agent a tiré des conclusions irrationnelles et illogiques

[34] Conformément à ce qui a été statué dans l’arrêt Vavilov, « une décision doit être fondée sur un raisonnement à la fois rationnel et logique » : Vavilov, au para 102. Dans la présente affaire, l’agent a fondé sa décision sur des conclusions irrationnelles et illogiques.

[35] L’agent a conclu que le fait que ni le demandeur ni son superviseur n’aient « tenté de faire intervenir des représentants de l’université » constitue un facteur pertinent pour évaluer si l’allégation du demandeur est fondée. Comme l’a fait remarquer le demandeur, si le superviseur incitait son étudiant à communiquer des données confidentielles en contravention de l’entente de recherche, il est déraisonnable de s’attendre à ce que le superviseur ait signalé le refus du demandeur à des représentants de l’université : mémoire du demandeur, au par. 30.

[36] Par ailleurs, pour conclure qu’il [traduction] « était raisonnable de s’attendre » à ce que le demandeur fasse intervenir d’autres professeurs ou d’autres représentants, il faut faire abstraction du fondement même de la thèse du demandeur. Le demandeur craignait des représailles conséquentes à son refus de communiquer les renseignements à SADRA et la preuve montre qu’il ne voulait pas mettre son superviseur en colère : exposé circonstancié, au par. 16. Saisir de l’affaire des représentants de l’université n’aurait probablement eu pour effet que d’accroître les risques qu’il prenait.

[37] En dernier ressort, l’agent s’est appuyé sur l’omission d’impliquer des représentants de l’université pour étayer sa conclusion selon laquelle il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour étayer que le superviseur du demandeur tentait de communiquer de l’information confidentielle à SADRA.

V. Conclusion

[38] Compte tenu de ce qui précède, l’analyse que l’agent fait de l’allégation du demandeur, à savoir qu’il s’expose à des risques en Iran en raison de son refus de communiquer des données de recherche confidentielles à SADRA comme le demandait son superviseur, présente de graves lacunes. La décision de l’agent est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent afin qu’il examine la preuve et l’évalue correctement.

[39] Les parties n’ont pas soulevé de question à certifier et la présente affaire n’en soulève aucune.

 


JUGEMENT dans le dossier IMM-619-22

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

  1. La demande est accueillie.

  2. La décision de l’agent, datée du 30 décembre 2021, est annulée et l’affaire est renvoyée à un autre agent pour nouvel examen.

  3. Il n’y a aucune question à certifier.

« Anne M. Turley »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-619-22

 

INTITULÉ :

MASIH ALLAHBAKHSHIHAFSHEJANI c LE MINISTRE DE L’IMMIGRATION, DES RÉFUGIÉS ET DE LA CITOYENNETÉ

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

vidéoconférence

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 16 novembre 2023

 

JUGEMENT et motifs du jugement :

LA JUGE TURLEY

 

DATE DES MOTIFS :

Le 1ER décembre 2023

 

COMPARUTIONS :

Lee Cohen

 

Pour le demandeur

 

Jack Townsend

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

M. Lee Cohen & Associates

Avocats

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

Pour le demandeur

 

Procureur général du Canada

Halifax (Nouvelle-Écosse)

 

Pour le défendeur

 

 

 

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