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Date : 20231206


Dossier : T-906-19

Référence : 2023 CF 1631

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 6 décembre 2023

En présence de madame la juge Turley

ENTRE :

DWIGHT CREELMAN

demandeur

et

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

JUGEMENT ET MOTIFS

I. Aperçu

[1] Le demandeur, un détenu qui agit pour son propre compte, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision, issue d’un nouvel examen, rendue par le commissaire adjoint, secteur des politiques [le commissaire adjoint] du Service correctionnel du Canada [le SCC], qui a rejeté le grief du demandeur concernant un changement de la politique du SCC relative au traitement des chèques du Régime de pensions du Canada [le RPC] [la directive].

[2] Pour les motifs qui suivent, je rejette la demande de contrôle judiciaire. Le commissaire adjoint a tenu compte des arguments du demandeur selon lesquels la directive était arbitraire et discriminatoire, et le rejet du grief est fondé sur des motifs intelligibles, justifiés et transparents.

II. Contexte

A. La directive

[3] En 2013, l’administration centrale du SCC a publié la directive selon laquelle le dépôt des chèques du RPC de tous les délinquants devait être effectué au moment où le service des finances de l’établissement les recevait, et non pas réparti sur plusieurs périodes de paie, comme c’était le cas auparavant.

[4] Le demandeur a choisi de commencer à recevoir ses prestations du RPC à l’âge de 60 ans en avril 2015. En août 2015, le demandeur a reçu du service des finances de l’Établissement de Warkworth une lettre l’informant qu’à compter du 1er septembre 2015, le dépôt des montants de ses chèques mensuels du RPC ne serait plus effectué au cours de périodes de paie de deux semaines, mais plutôt une fois par mois, soit au moment de leur réception. Le demandeur a été informé que l’administration centrale avait demandé à l’Établissement de Warkworth de mettre en œuvre ce changement comptable conformément à la directive, étant donné que c’était le seul établissement qui ne s’y conformait pas à l’époque.

[5] Tous les détenus des établissements fédéraux disposent d’un fonds de fiducie des détenus, composé d’un compte courant et d’un compte d’épargne : Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620, art 111(2) [le RSCMLC]. Des retenues sont effectuées sur le revenu des délinquants (y compris le revenu payé par une source gouvernementale comme les prestations du RPC) avant que leurs gains ne soient déposés dans leur compte : Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, LC 1992, c 20, art 78(2)a) [la LSCMLC]; RSCMLC, art 104.1(3).

[6] Conformément à la Directive du commissaire 860, « Argent des délinquants » [la DC 860], le montant maximal pouvant être déposé dans le compte courant d’un détenu est de 69 $ par période de paie. La somme restante doit être déposée dans le compte d’épargne du détenu.

[7] Avant que la directive ne soit appliquée, le montant de 69 $ était déposé dans le compte courant du demandeur toutes les deux semaines au titre de ses prestations du RPC. Après que l’Établissement de Warkworth eut appliqué la directive, un seul paiement mensuel de 69 $ était déposé dans le compte courant du demandeur pour la période de paie au cours de laquelle son chèque de prestations du RPC était traité.

B. Le grief du demandeur

[8] Voulant contester la directive, le demandeur a déposé un grief auprès du SCC. Il a fait valoir que la directive était arbitraire parce que le chèque du RPC était censé couvrir un mois entier alors que le SCC traitait les prestations du RPC comme si elles ne couvraient que la période de paie de deux semaines au cours de laquelle les fonds étaient versés. Le demandeur a également fait valoir que la directive constituait une discrimination fondée sur l’âge, en violation de la Loi canadienne sur les droits de la personne, LRC 1985, c H-6 [la LCDP], parce que le traitement de son revenu de pension était différent de celui d’autres sources de revenu. Le grief du demandeur a été rejeté.

[9] Le demandeur a contesté la décision relative au grief avec succès devant notre Cour dans le cadre d’un contrôle judiciaire. Dans une décision datée du 14 mai 2018, le juge Favel a conclu que la décision était déraisonnable pour plusieurs motifs. Premièrement, le juge Favel a jugé que le décideur avait omis d’examiner si la directive avait des effets discriminatoires. Plus particulièrement, il n’avait pas examiné la question de savoir si les paiements de pension étaient, comme le soutenait le demandeur, le seul type de revenu qui ne pouvait pas être traité afin que des sommes soient déposées toutes les deux semaines dans le compte courant du détenu. Deuxièmement, la Cour a conclu que la décision ne tenait compte d’aucun des arguments du demandeur relatifs au caractère arbitraire de la directive : Creelman c Canada (Procureur général), 2018 CF 507.

C. La décision du commissaire adjoint

[10] Le 8 avril 2019, le commissaire adjoint a rendu une nouvelle décision sur le grief du demandeur. C’est cette nouvelle décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

[11] Le commissaire adjoint, après avoir examiné les arguments du demandeur selon lesquels la directive était arbitraire et discriminatoire, a rejeté son grief en déclarant ceci :

[traduction]

Compte tenu de ce qui précède, l’examen de l’administration centrale a permis de conclure que la décision du SCC de traiter les chèques au cours de la période de paie où ils sont reçus est conforme à la législation et à la politique relatives à la gestion de l’argent des délinquants en vue de leur mise en liberté, ainsi qu’au principe de la sécurité des personnes et des établissements. Par ailleurs, il a été jugé que le SCC ne s’est pas livré à une pratique discriminatoire, étant donné que les autres types de paiements sont traités une fois par mois et ne peuvent donc pas être répartis sur différentes périodes de paie. Par conséquent, votre grief est rejeté.

Réponse du délinquant au grief final datée du 8 avril 2019, p. 4 [décision].

III. Question en litige et norme de contrôle

[12] La question à trancher en l’espèce est de savoir si le commissaire adjoint a commis une erreur en rejetant le grief du demandeur. Dans son grief, le demandeur a soutenu que la directive était arbitraire et discriminatoire.

[13] Dans son mémoire des faits et du droit, cependant, le demandeur présente des observations détaillées sur une question qui n’a pas été soulevée dans son grief. Il affirme plus particulièrement que le SCC agit de manière discriminatoire en retenant un pourcentage plus élevé (30 %), au titre des frais de nourriture et d’hébergement, sur les sources de revenu visées par le règlement, y compris les prestations du RPC, que sur la rémunération des détenus (22 %) : mémoire des faits et du droit du demandeur aux par 26-32, 63-66, 85, 92(2).

[14] Je l’ai expliqué au cours de l’audience : lors d’un contrôle judiciaire devant notre Cour, le demandeur ne peut soulever aucune question qui n’a pas été soumise au décideur : Nation Tsleil‐Waututh c Canada (Procureur général), 2017 CAF 128 aux para 86, 98. Par conséquent, je n’ai pas examiné cette question juridique car le demandeur n’en a pas fait le motif d’un grief, et le commissaire adjoint ne l’a par conséquent pas examinée. En outre, bien qu’il ait soulevé une question d’équité procédurale dans son avis de demande, le demandeur ne l’a pas abordée dans les observations qu’il a présentées par écrit ou de vive voix. Je n’ai donc pas non plus examiné cette question.

[15] La norme de contrôle applicable aux décisions du SCC est celle de la décision raisonnable : Ewert c Canada (Procureur général), 2018 CF 47 au para 15; McMaster c Canada (Procureur général), 2017 CF 25 au para 21; Skinner c Canada (Procureur général), 2016 CF 57 au para 21; Fischer c Canada (Procureur général), 2013 CF 861 au para 22. Une décision raisonnable « doit être fondée sur une analyse intrinsèquement cohérente et rationnelle et est justifiée au regard des contraintes juridiques et factuelles auxquelles le décideur est assujetti » : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au para 85 [Vavilov].

[16] Par ailleurs, notre Cour a jugé que le SCC a droit à un degré élevé de retenue judiciaire en matière de griefs en raison de son expertise en gestion des détenus et des établissements : Ewert c Canada (Procureur général), 2019 CF 733 au para 29 [Ewert 2019]; Johnson c Canada (Procureur général), 2018 CF 582.

IV. Analyse

A. La décision du commissaire adjoint est raisonnable

[17] Il appert d’une lecture globale des motifs avancés par le commissaire adjoint que la décision est raisonnable. La décision traite des deux motifs soulevés dans le grief du demandeur, à savoir que la directive est arbitraire et discriminatoire. Après avoir examiné les facteurs pertinents, le commissaire adjoint a rejeté le grief.

(1) 1) Caractère raisonnable de la décision selon laquelle la directive n’est pas arbitraire

[18] Pour commencer, il est utile de définir le terme « arbitraire », dans son acception courante. Voici une définition proposée du terme « arbitraire » : [traduction] « pris sans tenir compte des faits, des circonstances, des règles fixes ou des procédures » : Black’s Law Dictionary, 11e édition. Le dictionnaire anglais Oxford le définit en des termes similaires : [traduction] « [t]iré d’une simple opinion ou d’une préférence; non fondé sur la nature des choses » : Oxford English Dictionary, 3e édition. Ces définitions nous aident à déterminer si l’évaluation du caractère arbitraire de la directive par le commissaire adjoint est raisonnable.

[19] Je conclus que le commissaire adjoint a raisonnablement justifié la raison d’être de la directive en se référant à des objectifs législatifs et à des objectifs de politique générale pertinents. Dans cette optique, il est raisonnable de conclure que la directive n’est pas arbitraire. Notre Cour a notamment jugé que les mesures gouvernementales qui ont un fondement législatif sont justifiées et non arbitraires : Fortune Dairy Products Limited c Canada (Procureur général), 2020 CF 540 aux para 108-109.

[20] Dans son grief, le demandeur a allégué que la directive était [traduction] « arbitraire étant donné que les chèques du RPC sont censés couvrir l’équivalent d’un mois de dépenses ». Le demandeur a également affirmé que la nouvelle méthode de traitement des chèques du RPC avait [traduction] « entraîné le versement de moins d’argent dans [son] compte courant » : décision, à la p 1.

[21] En réponse aux allégations du demandeur, le commissaire adjoint a d’abord examiné les dispositions législatives touchant le SCC, et les politiques de ce dernier, relatives à la gestion et au traitement de l’argent des délinquants. L’alinéa 5c) de la LSCMLC précise qu’il « incombe » au SCC d’assumer la tâche suivante : « la préparation des détenus à la libération ». Le commissaire adjoint a expliqué que cette disposition législative [traduction] « doit être lue conjointement avec la DC 860 » : décision, à la p 2.

[22] L’un des principaux objectifs de la DC 860 est d’« [e]ncourager les délinquants à établir un budget de manière à disposer de fonds pour leurs dépenses autorisées et pour leur mise en liberté ». Le commissaire adjoint l’a indiqué : conformément à la DC 860, un maximum de 69 $ par période de paie de deux semaines peut être déposé dans le compte courant d’un délinquant. La somme restante – 10 % ou l’excédent de 69 $, selon le montant le plus élevé – est déposée dans le compte d’épargne du délinquant : décision, à la p 2.

[23] Grâce à la directive, les délinquants qui reçoivent des prestations du RPC verront moins d’argent déposé dans leur compte courant que lorsque les chèques étaient répartis sur les périodes de paie, mais plus d’argent sera déposé dans leur compte d’épargne, ce qui leur permettra d’en disposer à leur libération.

[24] Un autre objectif de la DC 860 est de « [c]ontrôler la circulation de l’argent au sein des établissements dans le but d’assurer la sécurité des personnes et des établissements ». Le commissaire adjoint a expliqué qu’en déposant les montants des chèques du RPC au moment de leur réception, le SCC [traduction] « réduit le nombre de délinquants qui touchent le maximum de 69 $ par période de paie » : décision, à la p 3.

[25] Le commissaire adjoint a également expliqué que la directive était conforme à la pratique du SCC concernant les dépôts en argent, en ce sens que [traduction] « tous les types de paiements sont traités au cours de la période de paie pendant laquelle ils sont reçus » : décision, à la p 2.

[26] Enfin, le commissaire adjoint a traité de l’argument du demandeur selon lequel les chèques du RPC sont censés couvrir un mois de dépenses et qu’il a maintenant moins d’argent dans son compte courant. Il a fait remarquer que les frais de subsistance des délinquants, qui permettent de couvrir le logement, les vêtements, la nourriture, les soins de santé, les soins dentaires et les besoins essentiels, sont [traduction] « en grande partie pris en charge par le gouvernement fédéral » : décision, à la p 3.

[27] Le commissaire adjoint a également fait remarquer que le SCC reconnaît que les délinquants peuvent avoir besoin de fonds supplémentaires. C’est pourquoi la DC 860 prévoit ce qui suit : i) le transfert de fonds du compte d’épargne d’un délinquant à son compte courant au cas par cas, jusqu’à concurrence d’un montant annuel maximal; ii) dans certaines circonstances, des demandes de sortie de fonds directement à partir du compte d’épargne d’un délinquant au-delà de la limite annuelle; iii) une sortie de fonds supplémentaire annuelle à partir du compte d’épargne pour la cantine des Fêtes : décision, à la p 3.

[28] Le demandeur soutient que la directive est arbitraire car elle [traduction] « semble violer le paragraphe 78(1) (alinéa 78(1)b) dans la version anglaise) de la LSCMLC » : mémoire des faits et du droit du demandeur, au par 11. Ce paragraphe 78(1) indique que le SCC peut autoriser la rétribution des délinquants pour « favoriser leur réinsertion sociale » :

Rétribution

Payments to offenders

78 (1) Le commissaire peut autoriser la rétribution des délinquants, aux taux approuvés par le Conseil du Trésor, afin d’encourager leur participation aux programmes offerts par le Service ou de leur procurer une aide financière pour favoriser leur réinsertion sociale.

78 (1) For the purpose of

(a) encouraging offenders to participate in programs provided by the Service, or

(b) providing financial assistance to offenders to facilitate their reintegration into the community,

the Commissioner may authorize payments to offenders at rates approved by the Treasury Board.

 

 

 

[29] Ainsi que le demandeur le reconnaît, le paragraphe 78(1) concerne la rétribution des délinquants par le SCC : avis de demande, au par 20. À cet égard, cette disposition n’a aucun rapport avec le traitement des chèques du RPC, de sorte le commissaire adjoint n’en a, à juste titre, pas tenu compte. Cependant, comme nous l’avons indiqué ci-dessus, le commissaire adjoint a pris en considération l’objectif législatif et politique similaire et pertinent qui consiste à préparer les délinquants à leur libération : décision, à la p 2.

[30] Le commissaire adjoint a en définitive conclu que [traduction] « la décision du SCC de traiter les chèques au cours de la période de paie pendant laquelle ils sont reçus est conforme à la législation et à la politique relatives à la gestion de l’argent des délinquants en vue de leur mise en liberté, ainsi qu’au principe de la sécurité des personnes et des établissements » [non souligné dans l’original] : décision, à la p 4. Bien que le commissaire adjoint n’ait pas employé le terme [traduction] « arbitraire », ce dernier paragraphe de la décision donne néanmoins à penser que la directive n’est pas arbitraire parce qu’elle est conforme aux objectifs législatifs et politiques du SCC.

[31] La décision du commissaire adjoint aurait certes pu être plus claire, mais les motifs des décideurs administratifs n’ont pas à satisfaire à une norme de perfection : Vavilov, au para 91. La cour de révision doit plutôt être convaincue que le raisonnement du décideur « se tient » : Vavilov, au para 104. À mon avis, il ne fait aucun doute en l’espèce que le raisonnement du commissaire adjoint « se tient ».

[32] Compte tenu de ces éléments, les motifs du commissaire adjoint concernant le caractère arbitraire de la directive sont justifiés, transparents et intelligibles. Par conséquent, il n’y a pas lieu pour la Cour d’intervenir.

2) Caractère raisonnable de la décision selon laquelle la directive n’est pas discriminatoire

[33] Si le commissaire adjoint n’a pas expressément appliqué le cadre juridique pertinent pour décider si la directive constitue une discrimination fondée sur l’âge, sa démarche est conforme à la jurisprudence. Le critère de discrimination pertinent est énoncé dans l’arrêt Moore c Colombie-Britannique (Éducation), 2012 CSC 61 :

[33] Comme l’a à juste titre reconnu le Tribunal, pour établir à première vue l’existence de discrimination, les plaignants doivent démontrer qu’ils possèdent une caractéristique protégée par le Code contre la discrimination, qu’ils ont subi un effet préjudiciable relativement au service concerné et que la caractéristique protégée a constitué un facteur dans la manifestation de l’effet préjudiciable. Une fois la discrimination établie à première vue, l’intimé a alors le fardeau de justifier la conduite ou la pratique suivant le régime d’exemptions prévu par les lois sur les droits de la personne. Si la conduite ou pratique ne peut être justifiée, le tribunal conclura à l’existence de la discrimination.

[34] Pour décider du caractère discriminatoire ou non de la directive, le commissaire adjoint a suivi la méthode de traitement des allégations de discrimination énoncée dans la Directive du commissaire 081, « Plaintes et griefs des délinquants ». Comme le commissaire adjoint l’a expliqué, la première étape consiste à établir si les allégations, si elles étaient prouvées, répondraient à la définition prescrite de « discrimination ». La discrimination est définie en fonction des motifs de distinction illicite énoncés au paragraphe 3(1) de la LCDP : décision, à la p 2.

[35] En l’espèce, le commissaire adjoint a jugé que l’allégation du demandeur selon laquelle la directive constituait une discrimination fondée sur l’âge correspondrait, si elle était prouvée, à la définition prescrite de discrimination. Le commissaire adjoint a donc cherché à établir s’il y avait eu discrimination : décision, à la p 2. En d’autres termes, il s’agissait d’examiner si le demandeur avait subi une discrimination fondée sur son âge.

[36] Dans son grief, le demandeur allègue que la directive constitue une pratique discriminatoire fondée sur l’âge parce que les paiements du RPC sont traités différemment des autres sources de revenu. Toutefois, en se fondant sur les éléments de preuve dont il disposait, le commissaire adjoint a déclaré que [traduction] « tous les types de paiements sont traités au cours de la période de paie pendant laquelle le service des finances de l’établissement les reçoit » [non souligné dans l’original] : décision, à la p 3.

[37] Quant à l’expression [traduction] « tous les types de paiements » employée par le commissaire adjoint, la preuve présentée à ce dernier confirme que d’autres types de paiements, tels que les pensions privées, les paiements de placement à l’extérieur, les profits tirés d’une entreprise amateur ou d’une entreprise de détenu, et les chèques de paie d’entreprises privées pendant le séjour d’un délinquant dans la collectivité, sont traités de la même façon : dossier certifié du Tribunal, à la p 52. Si les pensions privées peuvent faire l’objet d’un versement en fonction de l’âge, les autres types de versements ne sont pas fondés sur l’âge.

[38] Le commissaire adjoint a également fait remarquer que d’autres paiements, qu’ils soient reçus mensuellement ou moins fréquemment, comme les indemnités des accidentés du travail, sont traités dès leur réception, et non répartis sur des périodes de paie distinctes : décision, à la p 3. Comme le souligne le défendeur, les indemnités des accidentés du travail ne sont pas accordées en fonction de l’âge, mais sont plutôt versées à titre d’indemnisation aux travailleurs qui sont soit blessés au cours de leur emploi, soit atteints d’une maladie professionnelle : mémoire des faits et du droit du défendeur, au par 22.

[39] Je suis convaincue que le commissaire adjoint a procédé à un examen raisonnable du caractère discriminatoire de la directive. En particulier, le commissaire adjoint a examiné les effets du mode de traitement des chèques du RPC par rapport à d’autres types de revenus et a raisonnablement conclu que le SCC [traduction] « ne s’est pas livré à une pratique discriminatoire étant donné que d’autres types de paiements sont traités une fois par mois » : décision, à la p 4. Par conséquent, aucune erreur susceptible de contrôle n’a été commise.

B. Dépens

[40] Bien que le demandeur n’ait pas eu gain de cause dans la présente affaire, je refuse d’exercer le pouvoir discrétionnaire, que me confère la règle 400 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, d’adjuger les dépens à son encontre.

[41] Le demandeur demande à la Cour de lui accorder des dépens parce qu’il a obtenu gain de cause dans le cadre de sa demande initiale de contrôle judiciaire dans le dossier T-1323-17 : mémoire des faits et du droit du demandeur, aux par 33-35. Dans Ewert 2019, le juge Leblanc (alors juge à la Cour fédérale) a rejeté une demande similaire, concluant que la « demande ne peut être accueillie, car ce n’était qu’à l’occasion du règlement de cette autre affaire que la question des dépens de cette affaire pouvait être tranchée » : Ewert 2019, au para 55. Je souscris à cette analyse et, par conséquent, je rejette la demande de dépens du demandeur qui se rapporte à sa demande précédente. Il convient que ce soit plutôt le juge qui a rendu le jugement dans l’instance en question qui examine sa demande.


JUGEMENT dans le dossier T-906-19

LA COUR ORDONNE le rejet de la demande de contrôle judiciaire, sans dépens.

« Anne M. Turley »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

T-906-19

 

INTITULÉ :

DWIGHT CREELMAN c PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

VIDÉOCONFÉRENCE

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 26 OCTOBRE 2023

 

JUGEMENT ET MOTIFS :

LA JUGE TURLEY

 

DATE DES MOTIFS :

LE 6 DÉCEMBRE 2023

 

COMPARUTIONS :

Dwight Creelman

 

POUR LE DEMANDEUR

(POUR SON PROPRE COMPTE)

 

William Switzer

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE Défendeur

 

 

 

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