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TRÈS SECRET

Date : 20231010

Dossier : CSIS-3-21

Référence : 2023 CF 1341

Ottawa (Ontario), le 10 octobre 2023

En présence du JUGE EN CHEF

ENTRE :

DANS L’AFFAIRE CONCERNANT LA DEMANDE PRÉSENTÉE PAR [_..._] EN VUE D’OBTENIR DES MANDATS AU TITRE DES ARTICLES 16 ET 21 DE LA LOI SUR LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ, LRC 1985, c C-23

 

ET DANS L’AFFAIRE VISANT [_..._]

MOTIFS

I. Introduction

[1] Le 22 janvier 2021, le procureur général du Canada [PGC] a transmis à la Cour une copie d’un rapport préparé par l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement [OSSNR]. Le rapport fait état d’occurrences de communication, par le Centre de la sécurité des télécommunications [CST], d’informations confidentielles identifiant des Canadiens. Plus particulièrement, le rapport porte sur la communication de l’information nominative sur un Canadien [INC], notamment obtenue par le CST lorsqu’il prête assistance au Service canadien du renseignement de sécurité [SCRS ou Service] dans l’exécution de mandats décernés par la Cour au titre des articles 16 ou 21 de la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, LRC 1985, c C-23 [Loi sur le SCRS]. Les présents motifs intéressent uniquement la communication de cette dernière catégorie de renseignements par le SCT.

[2] À la lumière de plusieurs constatations préoccupantes, l’OSSNR a conclu que [traduction] « le CST a communiqué de l’information recueillie par suite de mandats décernés par la Cour suivant une procédure qui n’est pas conforme aux grands principes que le SCRS a présentés antérieurement à la Cour »[1]. Il a donc recommandé que le PGC « informe pleinement la [Cour] des pratiques du CST en matière de communication d’INC et des pratiques connexes découlant de mandats décernés par la Cour, plus particulièrement s’ils concernent des représentants officiels canadiens, des dirigeants autochtones ou des Premières Nations et tout autre groupe sensible décrit dans le présent rapport ».

[3] Saisie d’une demande en vue d’obtenir des mandats décernés au titre de l’article 16 présentée peu après, la Cour a entendu des témoignages sur l’emploi et la communication, par le SCRS et le CST, d’INC recueillie dans l’exécution de tels mandats. En résumé, cette preuve corroborait la conclusion de l’OSSNR mentionnée plus haut. Ce qui étonne davantage, c’est que le SCRS – ou du moins sa direction – semblait ignorer ce que le CST faisait de l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 pour le compte du SCRS. Ce fait contredit les affirmations du SCRS présentées antérieurement à la Cour, suivant lesquelles le CST [traduction] « applique les mêmes politiques et procédures internes strictes » que le SCRS à la communication d’INC : voir le paragraphe 38 des présents motifs [non souligné dans l’original].

[4] Suivant la preuve présentée à la Cour, le CST suivait certes ses propres normes lorsqu’il évaluait les demandes de communication d’INC. Heureusement, en règle générale, il n’en a pas communiqué dont le SCRS aurait protégé la confidentialité, à quelques exceptions près, qui ont été réglées ou n’étaient pas importantes. Ce qui importe davantage, c’est que la Cour a obtenu l’assurance que le CST ne communique plus l’INC recueillie par suite de mandats décernés par la Cour au titre de l’article 16 sans avoir obtenu l’approbation du directeur général [DG] de [_la division responsable_] du SCRS.

[5] À titre de partie qui fait une demande de mandats entendue ex parte et qui sollicite des pouvoirs de perquisition intrusive, le SCRS est responsable de tous les renseignements qui sont recueillis en vertu des mandats décernés par la Cour et doit rendre des comptes. Il lui échoit donc d’agir de manière proactive et avec toute la diligence voulue pour faire en sorte que ces renseignements soient traités conformément (i) au mandat et à toute condition dont il est assorti ; (ii) à toute affirmation faite à la Cour; et (iii) aux lois du Canada. C’est le cas, et ce même lorsque le SCRS fait appel à des tiers, comme le CST, pour l’exécution des mandats.

[6] Autrement dit, le SCRS doit faire en sorte que ces tiers respectent les normes auxquelles le SCRS est lui-même assujetti, notamment celles qui concernent l’INC recueillie de manière incidente en vertu des mandats décernés par la Cour. Comme il est expliqué ci-après, le SCRS a manqué à ses responsabilités et aux attentes de la Cour à cet égard.

[7] Il semble qu’un tel manquement ne soit pas le fait d’une ou plusieurs personnes, mais se soit produit à l’échelle organisationnelle. Il touche au cœur des rapports du SCRS avec la Cour et intéresse la confiance organisationnelle. Il incombe au SCRS de poursuivre ses efforts récents en la matière.

[8] Le SCRS a empiré la situation en négligeant d’informer la Cour des conclusions de l’OSSNR, et ce dès qu’il a su que ce dernier avait soulevé une question importante concernant le pouvoir discrétionnaire conféré par la loi à la Cour qui l’habilite à décerner des mandats.

[9] La Cour s’attend à ce que le SCRS l’informe dès qu’il prend connaissance de tout renseignement concernant les mandats décernés par la Cour et dont elle peut raisonnablement s’attendre à être informée. Il s’agit notamment de renseignements susceptibles d’avoir trait au cadre dans lequel la Cour a décerné des mandats en vertu de son pouvoir discrétionnaire.

[10] Malgré ses assurances antérieures à la Cour à cet égard, le SCRS a, à plus d’une reprise, transmis tardivement de tels renseignements à la Cour. Pendant tout ce temps, la Cour a continué à décerner des mandats sans savoir qu’il lui manquait des renseignements importants à cet effet. Encore une fois, il s’agit d’une question de confiance organisationnelle.

[11] Les attentes de la Cour sont consistantes à l’engagement communiqué par Michel Coulombe, qui a précédé le directeur actuel du SCRS, sur les questions susceptibles de ressortir d’un examen par le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, qui a précédé l’OSSNR. Tout particulièrement, il s’était engagé à informer la Cour [traduction] « dès qu’une question surgit » dans le cadre d’un examen par le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, et ce « même si le rapport n’est pas final » (transcription de l’audience en formation plénière du 10 juin 2016, à la p 55). Le directeur actuel du SCRS a répété l’esprit de cet engagement devant moi en 2018. Heureusement, il appert dorénavant que la Cour soit mise au courant plus rapidement.

II. Contexte

[12] En 2019 et 2020, l’OSSNR a procédé à un examen sous le régime des alinéas 8(1)a) et b) de la Loi sur l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement, LC 2019, c 13, art. 2. L’examen portait sur la communication d’INC par le CST. Par conséquent, l’OSSNR n’a pas examiné en détail les occurrences de communication, par le SCRS, de telles informations recueillies en vertu de mandats décernés au titre de l’article 16. Or, il a examiné les politiques, procédures et données statistiques du SCRS dans l’optique de savoir si le CST, en communiquant les informations, avait respecté les normes internes du SCRS. Quoi qu’il en soit, l’OSSNR a indiqué que, pendant l’examen, [traduction] « le SCRS n’a communiqué que deux identités à deux ministères outre les demandeurs habituels que sont le [Bureau du Conseil privé] et [Affaires mondiales Canada] » : rapport d’examen de l’OSSNR no 08-501-3 [le rapport d’examen], au para 105.

[13] Le rapport d’examen devait être terminé au printemps 2020. Toutefois, l’éclosion de la pandémie de la COVID-19 au cours des dernières étapes de l’examen l’a retardé. Il a finalement été transmis le 25 novembre 2020 au ministre de la Défense nationale, qui l’a transmis à son tour au PGC en janvier 2021. Peu après, la Cour en a obtenu copie.

[14] Le rapport d’examen porte sur trois sujets généraux. En premier lieu, il touche au cadre juridique et opérationnel du régime de communication d’INC mis en place par le CST, ainsi qu’aux paramètres et politiques qui en circonscrivent l’exécution. En deuxième lieu, il examine les constatations, conclusions et recommandations de l’OSSNR sur le régime de communication du CST, dont ses pratiques organisationnelles. En troisième lieu, il concerne la communication par le CST d’INC recueillie lorsqu’il prête assistance au SCRS dans l’exécution de mandats décernés au titre de l’article 16. De tels mandats sont en règle générale décernés à un employé du SCRS à titre de demandeur dans une instance tenue ex parte. Les présents motifs ne portent que sur les conclusions et recommandations concernant ce troisième sujet du rapport d’examen.

[15] Pour nos fins, les conclusions pertinentes du rapport d’examen sont résumées aux paragraphes 9 à 11 du sommaire. Je souligne en particulier les conclusions suivantes de l’OSSNR :

[traduction]

  1. [I]l est peu probable que la Cour fédérale soit au courant de certaines caractéristiques de la communication par le CST d’INC recueillie en vertu de mandats décernés au titre de l’article 16 de la Loi sur le SCRS […] Cette communication emporte également l’emploi de renseignements recueillis sous le régime de l’article 16 à des fins probablement inconnues de la Cour et qui devraient être examinées dans le cadre des demandes de mandats.

  2. Le traitement et la communication par le CST de [INC] diffèrent sensiblement des normes strictes que le SCRS a présentées à la Cour, tout particulièrement en ce qui a trait à l’information concernant des représentants canadiens.

  3. […] la manière dont le CST a communiqué l’INC, y compris des informations sur des représentants officiels canadiens et d’autres groupes sensibles, ne respectait pas les procédures présentées à la [Cour] à l’appui des mandats obtenus par le SCRS au titre de l’article 16 de la Loi sur le SCRS.

[16] En guise de contexte, une brève discussion sur l’un des volets du mandat conféré au CST s’impose. Aux termes du paragraphe 15(2) de la Loi constituant le Centre de la sécurité des télécommunications, LC 2019, c 13, art 76 [Loi sur le CST], le mandat du CST est composé de cinq volets, à savoir, le renseignement étranger, la cybersécurité et l’assurance de l’information, les cyberopérations défensives, les cyberopérations actives ainsi que l’assistance technique et opérationnelle. L’analyse qui suit touche uniquement à la communication d’INC qui se produit dans l’exécution du dernier volet.

[17] L’INC revêt une importance particulière, car le CST n’est pas habilité à viser les Canadiens dans ses activités : Loi sur le CST, au para 22(1). Lorsqu’il fournit une assistance technique et opérationnelle au SCRS, le CST a les mêmes pouvoirs que le SCRS et est assujetti aux limites qui lui sont imposées : Loi sur le CST, au para 25(1). De plus, l’article 16 interdit au SCRS de procéder à la collecte d’informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités de Canadiens, sauf si de telles informations sont recueillies de manière incidente lors de l’exercice de pouvoirs conférés par des mandats visant des non-Canadiens : Loi sur le SCRS, au para 16(2); Renvoi relatif à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, 2012 CF 1437, aux para 5 et 106. Par exemple, l’interception de communications entre une cible étrangère et un Canadien constituerait une collecte incidente en ce qui a trait au Canadien.

[18] Le rapport d’examen définit l’INC en ces termes :

[traduction]

Par [INC] on entend toute information susceptible d’identifier une personne physique ou une entité canadienne, outre les étrangers se trouvant au Canada. Il peut s’agir notamment d’un nom ou d’une partie d’un nom, d’une date de naissance, d’un numéro de téléphone, d’une adresse de protocole Internet (PI), d’une adresse courriel, d’un numéro de passeport ou d’une adresse physique. Il n’est pas nécessaire que l’information permettant d’identifier une personne se rapporte à son nom pour constituer de l’[INC], car plusieurs types de renseignements, numéros, caractéristiques et codes consignés sont susceptibles de permettre l’identification d’un Canadien. [Notes de bas de page omises.]

[au para 5]

[19] Après avoir pris connaissance du rapport d’examen, j’ai délivré une directive exigeant la production de preuve sur l’emploi et la communication d’INC recueillie en vertu de mandats décernés au titre de l’article 16 par le SCRS et des tiers, comme le CST. Cette preuve devait accompagner la demande suivante visant à obtenir un tel mandat. J’ai également demandé qu’on explique la raison pour laquelle la Cour n’avait pas été informée plus tôt des questions importantes recensées par l’OSSNR quant à l’échange d’informations recueillies en vertu de mandats décernés au titre de l’article 16.

[20] Ayant reconnu que l’on demanderait à obtenir le renouvellement des mandats décernés au titre de l’article 16, j’ai précisé dans la directive que la Cour envisagerait le renouvellement à court terme le temps que les questions (essentiellement celles soulevées dans le rapport d’examen et décrites dans les présents motifs) soient réglées. J’ai précisé dans la directive que la Cour envisageait d’assortir de nouvelles conditions dans les mandats décernés au titre de l’article 16 et que ces derniers seraient modifiés une fois que la Cour aurait pris connaissance des observations, notamment celles d’un amicus curiae. En l’espèce, Maître Christine Mainville [l’amicus] a été nommée à ce titre par la suite.[2]

[21] La preuve décrite plus haut est ressortie en grande partie d’affidavits et des audiences tenues en juillet 2021 ainsi que des réponses de suivi aux engagements transmises en octobre et novembre 2021. D’autres réponses ont suivi, à la fin de janvier 2023, en réponse à une directive datée du 29 novembre 2021 et de divers rapports sur l’état de l’instance fournis en 2022. La pandémie de la COVID-19 ayant causé des retards, les observations écrites et orales finales n’ont été présentées qu’en mars 2022. Le PGC a ensuite déposé ses observations en réponse au début d’avril 2022. Les observations orales finales ont été présentées le 12 avril 2022.

[22] Entretemps, j’ai décerné les mandats sollicités en mars 2021 pour une durée plus courte qu’à l’ordinaire, les ai assortis d’une nouvelle condition [la nouvelle condition][3] et apporté d’autres modifications qui ne concernent pas la présente espèce. La nouvelle condition a pour objet (i) de faire en sorte que l’INC recueillie en vertu des mandats soit traitée conformément aux lignes directrices adoptées par la [_ Direction de l’évaluation du renseignement [DER]_], intitulé Divulgation minimale et communication d’information nominative sur un Canadien dans les produits de la DER relatifs à l’article 16, et (ii) de faire en sorte que les demandes de renversement de la divulgation minimale soient approuvées par le DG [_de la division responsable_]. J’ai reconduit les mandats, étant donné les retards mentionnés plus haut.

[23] Au cours d’une audience tenue en l’espèce, l’amicus a produit une copie non classifiée de la Réponse de la direction du CST à l’examen de l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement (OSSNR) portant sur la divulgation d’informations nominatives sur des Canadiens en 2018-2019, datée du 31 mai 2021. Entre autres, le CST y affirme craindre « que les conclusions globales [du rapport d’examen] ne soulignent pas pleinement la mesure dans laquelle notre organisme s’engage à protéger la vie privée ». Le CST y fait également remarquer que le « processus au cas par cas mis en place par le CST pour ce qui est de divulguer l’INC aux destinataires autorisés [du gouvernement du Canada] fait partie de mesures internes rigoureuses et exhaustives visant à protéger la vie privée des Canadiens ». Ces mesures y sont décrites en ces termes :

La dépersonnalisation de [l’INC] dans les rapports est l’une des nombreuses mesures progressives que le CST a mises en place dans son processus de renseignement de bout en bout pour protéger la vie privée. Parmi ces mesures, on retrouve notamment la formation sur l’application des lois et des politiques, le soutien sur site offert aux analystes du renseignement, des évaluations annuelles obligatoires sur la protection de la vie privée pour l’accès aux systèmes opérationnels, l’étiquetage et la suppression automatique de données, un respect rigoureux des périodes de conservation, des directives précises sur le traitement des données, l’approbation ascendante de rapports contenant de l’INC, des vérifications spontanées de la conformité, des processus d’approbation distincts pour la divulgation d’information obscurcie et la prise de mesure à l’égard des rapports de renseignement.

[24] Le 31 mai 2022, le PGC a informé la Cour de manquements à la nouvelle condition et de l’engagement du SCRS à procéder à un examen de la communication d’INC ainsi qu’à informer la Cour de l’issue de l’examen et des mesures correctives adoptées par la suite. Après plusieurs rapports de suivi transmis en 2022 à ce sujet, le PGC a présenté l’affidavit souscrit par [_le déposant_], DG [_de la division responsable_] le 31 janvier 2023.

[25] L’affidavit de [_le déposant_] précise que cet examen porte sur tous les rapports sur les renseignements préparés par le SCRS sous le régime de l’article 16 de la Loi sur le SCRS entre le 1er avril 2021 et le 30 juin 2022. L’examen a permis de recenser 159 manquements à la nouvelle condition. Dans chaque cas, le manquement a donné lieu au renversement de la divulgation minimale d’INC sans l’approbation du DG [_de la division responsable_] exigée par la nouvelle condition. [_Le déposant_] a attribué ces manquements à des problèmes internes de communication de la nouvelle condition, ainsi qu’à une mauvaise compréhension de cette dernière et à des lacunes sur le plan de la technologie qui ont empêché l’organisation d’assurer l’approbation au niveau adéquat. Ayant pris connaissance de chacun de ces manquements, [_le déposant_] a indiqué qu’il aurait néanmoins autorisé la communication de l’INC pour l’une ou l’autre des raisons précisées dans la nouvelle condition.

[26] Selon [_le déposant_], un examen semblable a également porté sur les rapports préparés par le CST sous le régime de l’article 16. Cet examen a révélé [_..._] manquements à la nouvelle condition. De nouveau, [_le déposant_] a indiqué qu’il aurait autorisé la communication de l’INC dans tous ces cas pour l’une ou l’autre des raisons précisées dans la nouvelle condition.

[27] Enfin, après avoir énuméré diverses causes possibles aux manquements, [_le déposant_] a affirmé que des mesures correctives avaient été prises pour remédier à la situation et que d’autres mesures pourraient être adoptées au besoin par suite d’un autre examen.

III. Article 16 de la Loi sur le SCRS

[28] L’article 16 habilite le SCRS à recueillir, dans les limites du Canada, des informations ou des renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités d’un État étranger ou d’un groupe d’États étrangers ou de toute personne qui n’est pas un citoyen canadien, un résident permanent ou une personne morale constituée sous le régime d’une loi fédérale ou provinciale. En procédant à cette collecte, le SCRS a pour objet de prêter assistance au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères dans les domaines de la défense et de la conduite des affaires internationales du Canada.

[29] Une des conditions préalables importantes pour l’exercice des pouvoirs conférés par l’article 16 est la demande personnelle au SCRS par le ministre des Affaires étrangères ou le ministre de la Défense nationale. La Cour sait que la plupart des demandes proviennent du ministre des Affaires étrangères. Quoi qu’il en soit, la Cour sait que ces demandes sont généralement transmises par voie de lettre de demande assortie d’une annexe, qui fait état des raisons étayant la demande. Cette partie du document, le « Justificatif » (Rationale), énumère les exigences précises en matière de renseignement du ministre ayant présenté la demande, sous la rubrique « Demandes et instructions précises (Clear Requirements/Tasking) ». Ces exigences, de nature stratégique, décrivent les domaines et matières qui présentent un intérêt pour le ministre particulier soit dans les domaines de la défense ou la conduite des affaires internationales du Canada.

[30] En outre, une deuxième condition préalable pour l’exercice des pouvoirs décrits plus haut est le consentement personnel écrit du ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile.

[31] Ces deux conditions préalables ont été respectées en l’espèce.

[32] L’article 16 est reproduit dans son intégralité à l’annexe 1 des présents motifs.

IV. Observations et conclusions

[33] Examinons les trois conclusions tirées par l’OSSNR et reproduites au paragraphe 15 des présents motifs.

A. Ignorance de la Cour quant à certaines caractéristiques de la communication par le CST d’INC et portée de la communication

(1) Compréhension de la Cour avant la présente instance

[34] Au fil de nombreuses années, la Cour a eu beaucoup d’échanges avec le SCRS et le PGC sur la collecte et la conservation des informations recueillies de manière incidente sur des Canadiens. Bon nombre de ces échanges concernaient les utilisations possibles et la communication d’INC.

[35] La dépersonnalisation de l’INC est appelée « divulgation minimale » au sein du SCRS et « suppression » au sein du SCT.

[36] Avant le rapport d’examen, l’idée que se faisait la Cour de la procédure de communication de l’INC au sein du CST provenait de la preuve par affidavit mentionnée aux paragraphes 90 à 93 du rapport d’examen. Cette preuve avait été produite dans le cadre d’une instance datant de 2013-2014 intéressant l’article 16. Pendant l’instance, la Cour avait exigé :

[traduction]

[…] un compte rendu détaillé, étape par étape, de l’application de [la politique sur la divulgation minimale du SCRS], y compris des personnes qui en sont chargées, au sein du SCRS et du [CST], et des facteurs permettant de décider, au cas par cas, si la communication de l’identité d’un Canadien est nécessaire pour comprendre ou exploiter le renseignement.

[37] Deux affidavits souscrits par [_un déposant du SCRS_], donnaient notamment à la Cour une brève description des éléments suivants :

  1. le contrôle exercé par le SCRS sur la diffusion des rapports de renseignement rédigés par le SCT;

  2. les mises en garde imposées quant à l’utilisation de ces rapports ou des renseignements qu’ils contiennent par les destinataires;

  3. le traitement par le SCT des informations brutes obtenues en vertu de mandats décernés au titre de l’article 16;

  4. la politique du SCRS quant à la divulgation minimale de l’INC dans les rapports de renseignement et la mise en œuvre de cette politique au sein du SCRS et du SCT;

  5. la procédure suivie par le SCRS et le CST dans les cas où les destinataires des rapports demandent la communication de l’identité d’un Canadien, aussi appelé renversement de la divulgation minimale.

[38] Les explications [_du déposant du SCRS_] sur le traitement de l’INC étaient beaucoup moins détaillées à l’égard du CST qu’elles ne l’étaient à l’égard du SCRS. Néanmoins, il a assuré la Cour que le CST [traduction] « applique les mêmes politiques et procédures internes strictes pour protéger l’identité des Canadiens révélée par les renseignements obtenus au titre de l’article 16 conformément à la première condition énoncée dans le mandat » : affidavit [_du déposant du SCRS_] [affidavit no 1 [_le déposant du SCRS_]] [non souligné dans l’original]. Selon l’interprétation de la Cour, par les mots « les mêmes », on entend les politiques et procédures internes du SCRS.

[39] La Cour croyait aussi que le SCRS exerçait un contrôle sur la diffusion de l’INC par le CST en raison des deux passages suivants de l’affidavit [_du déposant du SCRS ]:

[traduction]

  1. 15. Lorsque le CST accepte d’agir à titre de mandataire du Service, il relève du pouvoir de ce dernier et se conforme aux conditions énoncées dans les mandats décernés au titre des articles 16 ou 21 de la [Loi sur le SCRS]. Tant le Service que le CST se conforment aux conditions des mandats et traitent les informations brutes recueillies par suite de l’exécution des mandats.

16. Le traitement des informations brutes s’entend de [_l’élaboration d’outils et de techniques, l’interception des communications cibles, du déchiffrement, la rédaction de rapports et des services de traduction_]. Dans le cas des renseignements obtenus par le CST par suite d’une interrogation, le Service est tenu d’autoriser la diffusion des rapports. Ainsi, l’uniformité et la conformité aux conditions énoncées dans les mandats et aux politiques du Service sont assurées.

Affidavit no 1 [_le déposant du SCRS_], non souligné dans l’original

  1. 26. Le nombre restreint de destinataires [des rapports de renseignement du SCRS et du CST], compte tenu de l’effectif global des ministères et organismes gouvernementaux, témoigne à la fois du haut niveau de sécurité accordé aux rapports externes du SCRS et des efforts que le Service déploie a posteriori pour limiter la communication inutile de renseignements sensibles sur la sécurité nationale. Si l’on tient compte également de la politique de divulgation minimale de l’identité de Canadiens, j’estime que le Service a pris et continue de prendre les mesures nécessaires pour protéger les renseignements personnels des Canadiens.

[_le déposant du SCRS_] [Affidavit no 2 [_..._]] [non souligné dans l’original].

[40] En outre, la preuve produite sur les restrictions imposées au moment de la diffusion des rapports de renseignement étayait la compréhension de la Cour sur le contrôle exercé par le SCRS. À cet égard, [_le déposant du SCRS_] a affirmé que [traduction] « [T]ous les rapports externes sont assortis de restrictions obligeant les clients à demander l’autorisation du Service pour utiliser à leurs fins les rapports [du renseignement étranger] ou les renseignements qu’ils contiennent » : affidavit no 1 [_le déposant du SCRS_], au para 31 [non souligné dans l’original].

[41] En ce qui a trait à la démarche stricte du SCRS en matière de divulgation minimale de l’INC contenue dans les rapports de renseignement, le témoignage [_du déposant du SCRS_] va dans le même sens que celui de son successeur, présenté en 2017. Il est résumé dans la décision Renvoi relatif à la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, 2020 CF 697, aux para 33 à 42 [Renvoi de 2020]. Il n’est pas nécessaire de le répéter ici. Pour les besoins de la présente affaire, il suffit de signaler que la preuve déposée dans cette instance ne mentionne que brièvement la communication de l’INC par le CST, et ce malgré le fait que la directive ordonnée pour l’instruction de l’instance demandait expressément que la Cour obtienne des précisions sur [traduction] « les pratiques de conservation des communications impliquant des Canadiens interceptées par suite d’une collecte autorisée par un mandat décerné au titre de l’article 16 » : directive du juge Simon Noël, le 20 juin 2017, CSIS-9-17.

[42] Quant au traitement par le CST des demandes de communication de l’identité d’un Canadien (c’est-à-dire si on demande le renversement de la « divulgation minimale »), la preuve dont disposait la Cour avant la présente instance se limitait à l’affirmation suivante :

[traduction]

[_Un cadre supérieur du CST a le pouvoir de diffuser certaines informations personnelles sensibles masquées, puisées dans du renseignement étranger. Afin de simplifier le processus et pour favoriser le soutien du CST envers les ministères et organismes, ce cadre a délégué son pouvoir à une unité spécifique qui valide et diffuse ces informations masquées._].

Affidavit no 2 [_le déposant du SCRS_], au para 20.

[43] Compte tenu de la preuve mentionnée aux paragraphes 37 à 40 des présents motifs, la Cour ne croyait pas que l’affirmation précédente concernait l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16.

[44] L’idée selon laquelle le SCRS exerce le contrôle sur la diffusion de l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 est conforme à l’affidavit déposé par le SCRS en l’espèce. Plus précisément, [_un témoin du SCRS_], à l’époque directrice générale [_de la division responsable_], a indiqué dans son témoignage que le SCRS ne croyait pas que le CST était habilité de son propre chef à communiquer l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 : transcription, 22 juillet 2021, à la p 138 ; voir également aux pp 49 à 50.

[45] De même, suivant les observations écrites présentées en l’espèce par le PGC procureur général du Canada, [traduction] « [l]e [PGC] ne savait pas, avant la tenue de l’examen par l’OSSNR, que le SCRS et le CST avaient des politiques et des pratiques distinctes en matière de communication d’INC et reconnaît qu’il aurait fallu aviser la Cour de ce fait ».

(2) Aspects importants de la démarche du CST en matière d’INC inconnus de la Cour

[46] Le rapport d’examen a recensé des divergences dans les démarches respectives du SCRS et du CST relatives à l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16. Elles sont résumées à l’annexe D du rapport d’examen et sont reproduites ci-après. (Les notes en bas de page et un exemple d’approbation et de diffusion d’un rapport externe sont omis.)

[traduction]

Sujet

SCRS

CST

Publication et accès aux rapports de renseignement étranger obtenus au titre de l’article 16

distribution limitée en fonction du besoin de savoir.

Grosso modo le BCP et AMC

distribution aux destinataires canadiens par le truchement de SLINGSHOT

Au moins sept ministères, outre le BCP et AMC

Approbation de rapports sensibles énumérant en détail les activités d’États étrangers en lien avec des représentants officiels canadiens

approbation requise du directeur ou de la personne qu’il désigne (p. ex. le directeur adjoint) pour accès externe

approbation du pupitre opérationnel du SCRS (analyste ou administrateur)

Procédure de divulgation minimale de l’INC recueillie au titre de l’article 16

le personnel du SCRS suit la politique de ce dernier

le personnel du CST suit la politique de ce dernier

Démarche relative à la divulgation minimale

en règle générale, les destinataires autorisés de rapports externes n’ont pas besoin de savoir l’identité de Canadiens

aucune démarche particulière; or, l’ensemble des 107 identités recueillies au titre de l’article 16 ont été communiquées pendant la période faisant l’objet de l’examen

Communication d’INC en général

Le SCRS [_La division responsable_du SCRS_] reçoit les demandes et les transmet à la direction pertinente pour examen.

le CST reçoit les demandes et les approuve sans savoir que le rapport découle de l’assistance prêtée au SCRS

Pratiques ou exigences en matière de communication

aucune ligne directrice précise, applique la politique relative à la divulgation minimale

les clients doivent justifier d’un pouvoir légitime et d’un motif opérationnel

Communication relative à des représentants canadiens

en règle générale, l’approbation provient de la gestion/ADI

en règle générale, l’approbation provient d’analystes au sein du CST

Respect des conditions dont les mandats sont assortis et des limites relatives à l’article 16

structure mise en place régissant un contrôle serré et cloisonné de l’accès.

le CST dispose de ses propres politiques applicables à la communication de l’INC et à la conformité aux conditions dont sont assortis les mandats, distinctes des politiques du SCRS

[47] Avant de prendre connaissance du rapport d’examen, la Cour ignorait les pratiques du CST en matière d’INC mentionnées plus haut. La Cour ne savait pas non plus que l’INC recueillie en vertu de mandats décernés au titre de l’article 16 était susceptible d’être diffusée à un ensemble de destinataires beaucoup plus important que ce qu’elle croyait.

[48] Vu les différences mentionnées plus haut dans les pratiques respectives du SCRS et du CST en matière d’INC, je souscris à la conclusion de l’OSSNR selon lequel [traduction] « la manière dont le CST a communiqué l’INC, y compris des informations sur des représentants officiels canadiens et d’autres groupes sensibles, ne respectait pas les procédures présentées à la [Cour] à l’appui des mandats obtenus par le SCRS au titre de l’article 16 de la Loi sur le SCRS » : rapport d’examen, sommaire, para 11.

[49] En outre, comme le laisse entendre l’OSSNR, j’estime que, si la Cour avait su que le CST avait son propre régime de communication de l’INC, elle aurait exigé de ce dernier qu’il prenne des mesures semblables à celles adoptées par le SCRS en la matière : rapport d’examen, aux para 99 à 101. Tout particulièrement, je partage l’avis de l’OSSNR suivant lequel la Cour aurait exigé du CST qu’il élabore des lignes directrices relatives à la distribution et au renversement de la divulgation minimale et donne l’occasion à la Cour de les commenter avant leur adoption : rapport d’examen, aux para 98 à 101.

(3) À qui appartient l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16?

[50] Le rapport d’examen soulève une question importante quant à savoir à qui « appartient » l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16. Tout particulièrement, à la note de bas de page 125, le rapport mentionne une Directive du sous-directeur des opérations relatives à l’article 16 de la Loi sur le SCRS préparée par le SCRS en 2014 [la Directive de 2014], suivant laquelle dès lors qu’un rapport final rédigé par le CST a été approuvé par le SCRS, « celui-ci - ainsi que les informations qu’il contient - appartient au [CST] » : Directive de 2014, à la p 12.

[51] Si la Cour a examiné la Directive de 2014 dans le Renvoi de 2020, son importance quant à la propriété de l’information et aux répercussions de cette question sur la communication d’INC par le CST n’avait pas été portée à son attention à l’époque. Par conséquent, pour autant que la Cour le sût, le SCRS exerçait le contrôle sur l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16. En fait, la seule mention de la Directive de 2014 dans le Renvoi de 2020 est muette sur la question de savoir à qui appartient l’INC et qui exerce le contrôle sur cette dernière : Renvoi de 2020, aux para 30 et 34.

[52] Selon l’interprétation qu’a faite l’OSSNR de ce passage de la Directive de 2014, le SCRS [traduction] « transfère la propriété des informations recueillies par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 au CST dès lors qu’il approuve les rapports préparés par le CST lorsqu’il lui prête assistance » : rapport d’examen, au para 91. Or, cette interprétation a été rejetée par les hauts dirigeants du SCRS et du CST qui ont comparu dans la présente instance. Tout particulièrement, [_le témoin du SCRS_], qui témoignait au nom du SCRS, a affirmé que le passage de la Directive de 2014 cité plus haut [traduction] « n’est pas correct » au motif que « le Service possède toujours en réalité l’information » : transcription, 22 juillet 2021, aux pp 118 à 119. De même, à la question de savoir si le CST est propriétaire de l’information recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16, [_..._], le chef adjoint des Politiques et Communications au sein du CST, a répondu en ces termes :

[traduction]

Je dirais non. [_..._] sont réputées appartenir au SCRS. C’est pourquoi il produit un rapport, pas nous. Tout ça, c’est l’information du SCRS, selon les politiques du CST aussi.

Transcription, 28 juillet 2021, à la p 31.

[53] Les témoignages de [_le témoin du SCRS_]et de [_le témoin du CST_] à cet égard vont dans le même sens que la thèse du PGC, qui estime que [traduction] « le CST n’a jamais exercé de contrôle sur l’INC lorsque celle-ci était recueillie par le SCRS ». La seule exception joue lorsque l’INC est susceptible d’être communiquée au CST pour lui permettre de s’acquitter d’un autre des volets de son mandat prévu à l’article 15 de la Loi sur le CST, notamment en matière de renseignement étranger. Dans ses observations écrites, le PGC précise ce qui suit :

[traduction]

96. La communication d’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 constitue un processus distinct. Même si le CST procède à la communication de l’INC qui avait été supprimée dans le cadre de son mandat d’assistance, et malgré les affirmations contradictoires antérieures, il est incontesté que le CST agit à titre de dépositaire des informations recueillies dans le cadre de la mesure prévue à l’article 16 et qu’il n’en est pas propriétaire.

[54] Cette affirmation, qui confirme la thèse voulant que l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 appartienne au SCRS, cadre avec l’énoncé suivant, qui est tiré du paragraphe 4.1.1 de la politique OPS-221 du SCRS, intitulée Traitement des informations recueillies et des communications interceptées en vertu d’un mandat – Article 16 (2014-07-03) : « [l]es renseignements étrangers que le CST traite au nom du Service demeurent la propriété du Service jusqu’à ce que le chef de la Section de liaison ou la personne désignée avec le CST en autorise la communication au ministre demandeur ou à la personne désignée ».

[55] En 2018, M. Dominic Rochon, le chef adjoint du CST, Politiques et Communications, a présenté un témoignage semblable au Comité permanent de la Chambre des communes sur la sécurité publique et nationale. Pour en citer un passage :

Aujourd’hui, comme dans le cas de cette nouvelle loi, si le SCRS s’intéresse à vous, il doit avoir un mandat légal pour s’en prendre à vous, ce qui signifie qu’il doit obtenir un mandat. S’il nous montre qu’il a un mandat, il n’a pas accès à nos systèmes pour autant. Il nous demande d’agir à sa place. Nous utiliserions alors nos capacités pour les aider à recueillir de l’information. Tous les renseignements recueillis sont mais [sic] à part et ils lui sont remis. Ils lui appartiennent. En fait, nous agissons au nom du SCRS.

Chambre des communes, Comité permanent de la sécurité publique et nationale, 42e législature, 1re session, jeudi 22 mars 2018, 12 h 38 [non souligné dans l’original].

[56] Compte tenu de ce qui précède, je suis convaincu que l’INC recueillie par suite des mandats qu’il exécute appartient au SCRS et que les affirmations contraires antérieures étaient erronées.

B. Divergences importantes dans le traitement et la communication d’INC par le CST par rapport aux normes strictes présentées à la Cour par le SCRS

[57] La preuve en l’espèce confirme la conclusion tirée par l’OSSNR, selon laquelle [traduction] « le traitement et la communication par le CST [d’INC] diffère substantiellement des normes strictes présentées à la Cour par le SCRS, tout particulièrement en ce qui a trait à l’information concernant des représentants officiels du Canada » : rapport d’examen, au para 9.

[58] La compréhension qu’avait la Cour des politiques et des pratiques du SCRS relatives à l’INC sont résumées dans le Renvoi de 2020, aux paragraphes 33 à 42. Dans cette décision, la Cour estime qu’il s’agit de politiques et pratiques « généralement adéquates qui concordent avec son mandat [au titre de l’article 16] » : Renvoi de 2020, au para 51. Toutefois, elle convenait avec les amici que le SCRS « devrait se donner des critères et des lignes directrices quant au renversement de la divulgation minimale d’informations permettant de reconnaître des Canadiens » : Renvoi de 2020, au para 51 ; voir également le para 74.

[59] Au fil de la présente instance, la Cour a obtenu des précisions sur les politiques et pratiques du SCRS en matière d’INC. Tout particulièrement, [_le témoin du SCRS_] a affirmé que le SCRS respecte également les Lignes directrices de la DER sur la divulgation minimale dans les produits de la DER (IAB-G01), mises à jour en décembre 2020. Elle a ajouté que le SCRS était en cours d’adoption d’une nouvelle politique directrice, intitulée Divulgation minimale et communication d’information nominative sur un Canadien dans les produits de la DER relatifs à l’article 16. En novembre 2021, on a fourni à la Cour la version finale de ce document [la nouvelle politique en matière d’INC du SCRS].

[60] Pour les fins de ces motifs, il n’est pas nécessaire d’examiner la nouvelle politique en matière d’INC du SCRS en détail. Il suffit de souligner qu’elle a été rédigée en partie pour répondre aux recommandations de l’OSSNR et en partie pour répondre à des questions soulevées en l’espèce. Soulignons qu’aux termes de ce document l’OSSNR et la Cour « ont tous deux reconnu que l’autorisation légale de la production de rapports relatifs à l’article 16 découle exclusivement de la Loi sur le SCRS, que le Service est responsable de son application et qu’il répond directement à la Cour fédérale à cet égard » : nouvelle politique en matière d’INC du SCRS, au para 1.3.

[61] La nouvelle politique en matière d’INC du SCRS prévoit de nouvelles rubriques consacrées aux « Responsabilités » (rubrique 2) et aux « Exigences en matière d’avis et de consultation » (rubrique 5). Dans le droit fil de la nouvelle condition que la Cour impose dans les mandats qu’elle décerne et des affirmations présentées à l’audience, la nouvelle politique en matière d’INC du SCRS précise que « [_la division responsable_] est le responsable de programme en ce qui concerne toutes les questions relatives aux procédures, notamment l’orientation, la mise en œuvre, la surveillance et l’examen » : nouvelle politique en matière d’INC du SCRS, au para 1.10. En outre, elle prévoit que « [l]e DG, [_de la division responsable_], voit à ce que les personnes et les organismes appliquant les procédures de divulgation minimale au titre de l’article 16 les connaissent bien et s’y conforment » : nouvelle politique en matière d’INC du SCRS, au para 2.1. Enfin, le paragraphe 5.1 précise ce qui suit en matière « d’avis et de consultation » :

En cas de non‑conformité avec les présentes procédures, le Service ou tout ministère ou autre organisme qui répond à une demande d’assistance du SCRS au titre de l’article 16 [demande d’assistance] ainsi que le [PGC] sont tenus d’informer pleinement la [Cour], conformément aux conditions énoncées dans les mandats, des mesures prises par le Service ou tout ministère ou autre organisme en vue de communiquer de l’INC. Ils l’informent également des activités connexes découlant de mandats décernés par la Cour, plus particulièrement s’ils concernent [_des fonctionnaires canadiens et d’autres groupes sensibles_].

[62] Vu ce qui précède, il n’est pas nécessaire d’en dire davantage sur les politiques et pratiques actuelles du SCRS en matière d’INC.

[63] Les divergences les plus importantes entre le SCRS et le CST dans le traitement de l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 sont résumées à l’annexe D du rapport d’examen, qui est reproduite au paragraphe 46 des présents motifs. La preuve en l’espèce cadre en grande partie avec l’idée qu’avait l’OSSNR de ces divergences avant de procéder à l’examen. Compte tenu des modifications importantes apportées par le CST à ses politiques et à ses pratiques, il n’est pas nécessaire d’en dire davantage sur ces divergences antérieures.

[64] Il importe de souligner que le CST, par suite des conclusions de l’OSSNR, a apporté des changements, notamment en modifiant le niveau d’approbation des demandes de communication de l’INC préalablement supprimée, dont les demandes relatives aux rapports établis par suite de mandats décernés au titre de l’article 16. À compter du 11 janvier 2021, les demandes de communication de l’INC qui avait été supprimée étaient examinées par un analyste et approuvées par un superviseur. À compter du 15 février 2021, la responsabilité de l’évaluation et de l’approbation de telles demandes a été transférée, à la demande du SCRS, au DG [_de la division responsable_]. Toutefois, le CST a continué d’évaluer et d’approuver les demandes du SCRS jusqu’au 30 avril 2021, date à laquelle le SCRS a précisé que toutes les demandes de communication de l’INC qui avait été supprimée, y compris celles provenant du SCRS, devaient être transmises au DG [_de la division responsable_] pour évaluation et approbation.

[65] Par conséquent, le CST ne procède plus à l’évaluation et à l’approbation des demandes de communications de l’INC qui avait été supprimée figurant dans les rapports établis par suite de mandats décernés au titre de l’article 16. Ces demandes parviennent toujours au CST par le truchement de l’outil web, mais il les transmet dorénavant au DG [_de la division responsable_]. Si ce dernier approuve le renversement de la divulgation minimale de l’INC, l’information est fournie à l’organisme qui en a fait la demande. Il en est ainsi, je crois, car [_..._].

V. Nouvelle condition

[66] La nouvelle condition, dont il est question au paragraphe 22 des présents motifs, dont sont assortis les mandats décernés par la Cour depuis le 31 mars 2021, est ainsi rédigée :

L’information permettant d’identifier un Canadien, conservée conformément à la condition 1, n’est communiquée par le Service ou le Centre de la sécurité des télécommunications, sous réserve de l’approbation du directeur général de la [_division responsable_] du Service ou la personne qu’il désigne à cette fin, que si l’information

  • (a)est nécessaire pour comprendre ou exploiter les renseignements étrangers;

  • (b)concerne des activités pour lesquelles il existe des motifs raisonnables de croire qu’elles constituent une menace envers la sécurité du Canada, au sens de l’article 2 de la Loi sur le [SCRS];

  • (d)est déjà du domaine public.

(c) peut permettre de prévenir, ou servir dans le cadre d’une enquête ou de poursuites en ce qui a trait à un acte criminel;

[67] La Cour estime, vu sa compréhension des pratiques, procédures [et lignes directrices] du SCRS en matière d’INC, que les éléments qui composent la nouvelle condition suffisent pour l’instant.

VI. Obligation de franchise du SCRS

[68] Au cours des dernières années, la Cour a eu beaucoup de discussions avec le SCRS et le PGC sur l’obligation de franchise du SCRS dans les instances tenues ex parte. Certaines discussions sont examinées dans l’affaire Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité (CA) (Re), 2020 CF 616, aux paragraphes 83 à 85, 91 à 100 et 167. Pour ces motifs, il n’est pas nécessaire d’en dire davantage.

[69] Pour les besoins de la présente affaire, il suffit de signaler que cette obligation intervenait dès lors que le SCRS a appris que le CST communiquait de l’INC conformément à ses propres politiques et pratiques, substantiellement différentes.

[70] Dans son témoignage, [_le témoin du SCRS_] a affirmé à plusieurs reprises qu’avant de prendre connaissance du rapport d’examen, le SCRS ne savait pas que le CST recevait des demandes de renversement de la divulgation minimale d’INC dépersonnalisée dans les rapports de renseignement qu’il avait distribués après avoir obtenu l’autorisation du SCRS : transcription, 22 juillet 2021, aux pp 28, 39, 47, 49 à 50 et 74. Selon elle, il s’agissait d’un [traduction] « problème de communication » : transcription, 22 juillet 2021, à la p 47.

[71] Cette preuve diffère quelque peu du témoignage [_du témoin_] du CST. Ayant affirmé ne pas savoir ce dont le SCRS était au courant, il a expliqué qu’il [traduction] « croyait » que « le SCRS, ou du moins une partie de l’organisation » savait que le CST communiquait de l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 : transcription, 28 juillet, à la p 15 et 58. Cependant, il n’a pas identifié les personnes au sein du SCRS qu’il croyait au courant.

[72] Le témoignage [_du témoin du SCRS_] est corroboré par le PGC. Comme il est mentionné plus haut, la Cour a été informée par voie d’observations écrites que le PGC [traduction] « ne savait pas, avant la tenue de l’examen par l’OSSNR, que le SCRS et le CST avaient des politiques et des pratiques distinctes en matière de communication d’INC et reconnaît qu’il aurait fallu aviser la Cour de ce fait ».

[73] Il est à mon avis pour le moins surprenant que le SCRS ignorât que le CST procédait au renversement de la divulgation minimale ou à la suppression d’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16, et ce conformément à ses propres politiques et pratiques, substantiellement différentes. Toutefois, je suis disposé à accepter le témoignage [_du témoin du SCRS_] et les assurances du PGC à cet égard.

[74] Quoi qu’il en soit, le SCRS avait tout de même l’obligation d’informer la Cour au sujet de ce qu’il avait appris sur la communication par le CST, et ce dès le moment où il a été mis au courant. À mon avis, ce moment est arrivé bien avant le 22 janvier 2021, date à laquelle le PGC a transmis le rapport d’examen à la Cour.

[75] Selon la liste des réunions et séances d’information qui figure à l’annexe G du rapport d’examen, l’OSSNR a rencontré le SCRS le 2 décembre 2019, à la suite de sept séances d’information tenues par le CST au cours des mois précédant cette date. J’ai du mal à croire que le SCRS, à ce moment ou par la suite, n’ait pas compris la nature des préoccupations de l’OSSNR quant au fait que le CST procédait au renversement de la divulgation minimale d’INC en fonction de son propre régime de communication, substantiellement différent. Dès que le SCRS a été mis au courant des pratiques du CST à cet égard, son obligation de franchise envers la Cour entrait en jeu.

[76] Étant donné tout particulièrement que la Cour continuait à décerner des mandats au titre de l’article 16, le SCRS ne devait pas attendre que le rapport d’examen de l’OSSNR soit prêt ou presque. Il ne devait pas non plus attendre de saisir parfaitement la nature des préoccupations de l’OSSNR ou la portée exacte des politiques et pratiques du CST.

[77] Le SCRS aurait dû informer la Cour dès qu’il a appris que le CST procédait au renversement de la divulgation minimale de l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16 et communiquait l’information à l’insu du SCRS et conformément à des politiques et pratiques susceptibles de différer de celles que le SCRS avait présentées antérieurement à la Cour. Outre le fait que la Cour continuait de décerner des mandats au titre de l’article 16, cette information aurait pu mener la Cour à réexaminer des mandats qu’elle avait décernés, en fonction de la nature de l’information visée.

[78] Hormis tout ce qui précède, en 2016, le directeur du SCRS s’était engagé, auprès de la Cour, à l’informer « dès qu’une question surgit » dans le cadre d’un examen du Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité (le prédécesseur de l’OSSNR), et ce « même si le rapport n’est pas final » : transcription de l’audience plénière, 10 juin 2016, à la p 55. Il envisageait alors la possibilité que le rapport final et les recommandations diffèrent de ce qui avait été communiqué précédemment à la Cour. Le directeur actuel du SCRS a confirmé l’esprit de cet engagement en 2018. En attendant jusqu’au 22 janvier 2021, le SCRS a manqué à la fois à cet engagement et à son obligation de franchise.

[79] Malheureusement, la situation s’est produite à plus d’une reprise depuis l’engagement pris en 2016. Heureusement, la Cour semble dorénavant être tenue au courant avec célérité.

VII. Conclusion

[80] La preuve produite en l’espèce corrobore la conclusion de l’OSSNR selon laquelle le CST a communiqué de l’INC recueillie par suite de mandats décernés par la Cour au titre de l’article 16 suivant une procédure qui n’est pas conforme aux grands principes que le SCRS avait présentés antérieurement à la Cour. Elle démontre également que le SCRS, du moins ses hauts dirigeants, ignorait la manière dont le CST traitait cette information. Ce fait contredit l’affirmation du SCRS, selon laquelle le CST « applique les mêmes politiques et procédures internes strictes » que le SCRS en matière de communication d’INC : voir le paragraphe 38 des présents motifs [non souligné dans l’original]. Le CST n’appliquait pas les mêmes normes strictes. Ses politiques et pratiques ont mené à la communication d’INC dans des situations qui ne respectaient pas les politiques et procédures internes du SCRS.

[81] Heureusement, la preuve démontre également que même si le CST a appliqué ses propres normes aux demandes d’INC, l’exercice ne s’est en général pas soldé par la communication d’INC dont le SCRS aurait protégé la confidentialité, à quelques exceptions près, qui ont été réglées ou n’étaient pas importante. Ce qui importe davantage, c’est que la Cour a obtenu l’assurance que le CST ne communique plus les INC recueillies en vertu de mandats décernés par la Cour au titre de l’article 16 sans avoir obtenu l’approbation du DG [_de la division responsable_]. En outre, la nouvelle politique en matière d’INC du SCRS a apporté des changements au sein du SCRS dans le traitement de l’INC. À la lumière de la preuve produite en l’espèce, la Cour n’a aucune raison de mettre en doute pour l’instant le traitement par le SCRS de l’INC recueillie par suite de mandats décernés au titre de l’article 16.

[82] Soulignons que le SCRS, à titre de partie qui fait des demandes de mandats entendues ex parte et qui sollicitent des pouvoirs de perquisition intrusive décernés par la Cour, est responsable de tous les renseignements qui en résultent et doit rendre des comptes. Il lui échoit donc d’agir de manière proactive et avec toute la diligence voulue pour faire en sorte que ces renseignements soient traités conformément (i) au mandat et à toute condition dont il est assorti; (ii) à toute affirmation faite à la Cour; et (iii) aux lois du Canada. C’est le cas, et ce même lorsque le SCRS fait appel à des tiers, comme le CST, pour l’exécution des mandats.

[83] Il semble qu’un tel manquement ne soit pas le fait d’une ou plusieurs personnes, mais se soit produit à l’échelle de l’organisation. Il touche au cœur des rapports du SCRS avec la Cour et intéresse la confiance organisationnelle. Il incombe au SCRS de poursuivre ses efforts récents en la matière.

[84] Le SCRS a empiré la situation en négligeant d’informer la Cour des conclusions de l’OSSNR, et ce dès qu’il a su que ce dernier avait soulevé une question qui concerne directement le pouvoir discrétionnaire conféré par la loi à la Cour qui l’habilite à décerner des mandats.

[85] La Cour s’attend à ce que le SCRS l’informe dès qu’il prend connaissance de tout renseignement susceptible de concerner les mandats décernés par la Cour et dont elle peut raisonnablement s’attendre à être informée. Il s’agit notamment de renseignements susceptibles d’avoir trait au cadre dans lequel la Cour a décerné des mandats en vertu de son pouvoir discrétionnaire.

"Paul S. Crampton"

Juge en chef

Traduction certifiée conforme

Marie-Luc Simoneau, jurilinguiste


Annexe I – Dispositions pertinentes

Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité, LRC (1985), ch C-23

Canadian Security Intelligence Service Act, RSC, 1985, c C-23

FONCTIONS DU SERVICE

DUTIES AND FUNCTIONS OF SERVICE

16. (1) Sous réserve des autres dispositions du présent article, le Service peut, dans les domaines de la défense et de la conduite des affaires internationales du Canada, prêter son assistance au ministre de la Défense nationale ou au ministre des Affaires étrangères, dans les limites du Canada, à la collecte d’informations ou de renseignements sur les moyens, les intentions ou les activités :

16. (1) Subject to this section, the Service may, in relation to the defence of Canada or the conduct of the international affairs of Canada, assist the Minister of National Defence or the Minister of Foreign Affairs, within Canada, in the collection of information or intelligence relating to the capabilities, intentions or activities of

a) d’un État étranger ou d’un groupe d’États étrangers;

(a) any foreign state or group of foreign states; or

b) d’une personne qui n’appartient à aucune des catégories suivantes :

(b) any person other than

(i) les citoyens canadiens,

(i) a Canadian citizen,

(ii) les résidents permanents au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés,

(ii) a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, or

(iii) les personnes morales constituées sous le régime d’une loi fédérale ou provinciale.

(iii) a corporation incorporated by or under an Act of Parliament or of the legislature of a province.

(2) L’assistance autorisée au paragraphe (1) est subordonnée au fait qu’elle ne vise pas des personnes mentionnées à l’alinéa (1)b).

(2) The assistance provided pursuant to subsection (1) shall not be directed at any person referred to in subparagraph (1)(b)(i), (ii) or (iii).

(3) L’exercice par le Service des fonctions visées au paragraphe (1) est subordonné :

(3) The Service shall not perform its duties and functions under subsection (1) unless it does so

a) à une demande personnelle écrite du ministre de la Défense nationale ou du ministre des Affaires étrangères;

(a) on the personal request in writing of the Minister of National Defence or the Minister of Foreign Affairs; and

b) au consentement personnel écrit du ministre.

(b) with the personal consent in writing of the Minister.

[…]

Loi sur le Centre de la sécurité des télécommunications, LC 2019, ch 13, art 76

Communications Security Establishment Act, SC, 2019, c 13, s 76

MANDAT

MANDATE

15. (1) 

[…]

15. (1)

(2)  Le mandat du Centre comporte cinq volets : le renseignement étranger, la cybersécurité et l’assurance de l’information, les cyberopérations défensives, les cyberopérations actives et l’assistance technique et opérationnelle.

(2) The Establishment’s mandate has five aspects: foreign intelligence, cybersecurity and information assurance, defensive cyber operations, active cyber operations and technical and operational assistance.

ACTIVITÉS

ACTIVITIES

22. (1) Les activités menées par le Centre dans la réalisa-tion des volets de son mandat touchant le renseignement étranger, la cybersécurité et l’assurance de l’information, les cyberopérations défensives ou les cyberopérations actives ne peuvent viser des Canadiens ou des personnes se trouvant au Canada et ne peuvent porter atteinte à la Charte canadienne des droits et libertés

22. (1) Activities carried out by the Establishment in furtherance of the foreign intelligence, cybersecurity and information assurance, defensive cyber operations or active cyber operations aspects of its mandate must not be directed at a Canadian or at any person in Canada and must not infringe the Canadian Charter of Rights and Freedoms.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

CSIS-3-21

INTITULÉ :

DANS L’AFFAIRE CONCERNANT LA DEMANDE PRÉSENTÉE PAR [_..._] EN VUE D’OBTENIR DES MANDATS AU TITRE DES ARTICLES 16 ET 21 DE LA LOI SUR LE SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ, LRC 1985, C C-23

ET DANS L’AFFAIRE VISANT [_..._]

LIEU DE L’AUDIENCE :

OTTAWA (ONTARIO)

DERNIER ÉLÉMENT DE PREUVE

DATES D’AUDIENCE :

31 JANVIER 2023

31 mars 2021

22 et 28 JUILLET 2021

12 AVRIL 2022

JUGEMENT ET MOTIFS DE JUGEMENT :

LE JUGE EN CHEF CRAMPTON

DATE :

LE 10 OCTOBRE 2023

COMPARUTIONS

Nancie Couture

Christopher Rupar

POUR LE DEMANDEUR

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Christine Mainville

AMICUS CURIAE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Procureur général du Canada

Ottawa, Ontario

POUR LE DEMANDEUR

Henein Hutchison Robitaille LLP

Toronto, Ontario

AMICUS CURIAE

 



[1] Note du traducteur : traduction des extraits du rapport d’examen fournie pour la commodité des lecteurs. En date de la traduction des présents motifs, la version française du rapport d’examen n’est pas disponible.

[2] En février 2023, Me Mainville a été nommée à la Cour de justice de l’Ontario et a commencé à siéger le 9 mars.

[3] Elle est examinée ci-après.

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