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Date : 20231204

Dossier : IMM-6317-21

Référence : 2023 CF 1622

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), le 4 décembre 2023

En présence de madame la juge Heneghan

ENTRE :

OMAR HAMMAD GOBLAN AL-KHATATNEH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS ET JUGEMENT

[1] La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire présentée par M. Omar Hammad Goblan Al– Khatatneh (le « demandeur ») à l’encontre de la décision d’un agent d’immigration, prise conformément aux articles 119 et 120 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le « Règlement »), de clore la demande de résidence permanente du demandeur au motif que sa répondante avait retiré sa demande de parrainage.

[2] Le 9 octobre 2018, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au titre de la catégorie du regroupement familial, en tant qu’époux « parrainé ». Il a reçu une confirmation de résidence permanente (la « CRP ») de l’ambassade de Jordanie le 20 mai 2019.

[3] Les faits et précisions qui suivent sont tirés du dossier certifié du tribunal (le « DCT ») et des notes contenues dans le Système mondial de gestion des cas (le « SMGC ») jointes en annexe à l’affidavit de Mme Linda Splawnski, lequel a été déposé au nom du défendeur. Dans ces notes, le demandeur est parfois désigné comme étant le [traduction] « DP », c’est-à-dire le demandeur principal.

[4] Le demandeur est entré au Canada le 1er octobre 2019, par suite de la demande de parrainage présentée par son épouse. Il devait se présenter à sa première entrevue relative à l’établissement le 12 novembre 2019, mais cette entrevue a été annulée et reportée au 26 mars 2020.

[5] Entre-temps, la pandémie de COVID-19 est survenue et l’entrevue fixée a de nouveau été annulée.

[6] Le document de confirmation de résidence permanente du demandeur a expiré le 25 avril 2020. Un nouveau document de CRP et un visa de résident permanent ont été délivrés le 6 juillet 2021. À ce moment-là, le demandeur ne s’était pas présenté à une entrevue relative à l’établissement.

[7] Les notes contenues dans le SMGC révèlent qu’un courriel a été envoyé par la répondante le 25 juin 2021. Les notes font état d’une [traduction] « demande de renseignements » de la part de la répondante :

[traduction]

Bonjour, Veuillez prendre connaissance du retrait de ma demande de parrainage d’un époux dont le numéro de dossier est FOOO616307. […] Vous trouverez ci-joint une lettre contenant tous les renseignements requis à cet égard. Le retrait est motivé par des différends conjugaux et la planification d’un divorce.

[8] Une entrée datant du 11 juillet 2021 fait état du souhait de la répondante de [traduction] « retirer sa demande, le DP n’ayant pas encore atterri ».

[9] Une entrée datant du 14 juillet 2021 indique qu’un courriel a été envoyé à Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (« IRCC ») [traduction] « en vue d’entreprendre les démarches pour retirer la demande ».

[10] Une entrée datant du 15 juillet 2021 fait état du retrait de la demande et du remboursement à venir des frais de dossier. L’entrée indique également qu’une lettre [traduction] « confirmant le retrait du dossier et le remboursement à venir » a été envoyée à la répondante.

[11] Les notes contenues dans le SMGC font état de la réception, le 27 août 2021, d’un courriel du nouveau représentant du demandeur, dans lequel il demandait que le rendez-vous de [traduction] « réception de sa première carte RP initiale » soit reporté.

[12] Les notes contenues dans le SMGC indiquent qu’un courriel a été envoyé au représentant du demandeur le 7 septembre 2021, l’informant que la demande FOOO616307 [traduction] « est close » et lui suggérant de [traduction] « communiquer avec sa répondante pour obtenir de plus amples renseignements ».

[13] Les notes contenues dans le SMGC font état d’un autre courriel envoyé le 7 septembre 2021 par le représentant du demandeur, demandant une nouvelle confirmation de la date de l’entrevue relative à l’établissement. Le représentant a indiqué que [traduction] « le retrait de la demande à la demande de son épouse est trop tardif et ne saurait avoir d’incidence sur le rendez-vous qu’il a pris pour obtenir sa carte de résident permanent à Edmonton. Veuillez confirmer la date à laquelle il pourra récupérer sa carte de RP à Edmonton. »

[14] Le demandeur affirme maintenant qu’il a été victime d’un manquement à l’équité procédurale parce qu’IRCC a refusé de traiter sa demande de résidence permanente. Il soutient qu’il pouvait raisonnablement s’attendre à ce que les retards de traitement associés à la COVID-19 aient une incidence sur la demande de retrait de parrainage de sa répondante de la même manière que les retards ont eu une incidence sur le traitement de sa demande de résidence permanente.

[15] Le demandeur soutient également que les motifs qui lui ont été fournis sont [traduction] « insuffisants » et [traduction] « illogiques ». Il soutient qu’il a obtenu la résidence permanente « de facto » lorsqu’il est entré au Canada et que son statut s’est [traduction] « concrétisé » lorsque son épouse est revenue au Canada le 22 février 2022.

[16] Le défendeur soutient qu’il n’y a pas eu de manquement à l’équité procédurale. Il soutient que les « instructions relatives à l’exécution du programme » s’appliquent à la situation du demandeur et peuvent être consultées par le public. Selon ces instructions, les répondants ont le droit de retirer leur demande de parrainage. L’article 119 du Règlement vise une telle situation.

[17] Le défendeur soutient par ailleurs qu’une fois la demande de parrainage retirée, il était raisonnable de décider de clore la demande de résidence permanente.

[18] Toute question d’équité procédurale peut faire l’objet d’un contrôle selon la norme de la décision correcte; voir Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, [2009] 1 R.C.S. 339 (C.S.C.).

[19] L’arrêt Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Vavilov, [2019] 4 R.C.S. 653 (C.S.C.) a établi que le contrôle du bien-fondé d’une décision doit être effectué selon la norme de la décision raisonnable.

[20] Pour examiner le caractère raisonnable d’une décision, la Cour doit se demander si la décision examinée « possède les caractéristiques d’une décision raisonnable, soit la justification, la transparence et l’intelligibilité, et si la décision est justifiée au regard des contraintes factuelles et juridiques pertinentes qui ont une incidence sur celle‑ci »; voir Vavilov précité, au para 99.

[21] Je partage l’avis du défendeur selon lequel il n’y a pas eu de violation de l’équité procédurale. Le principe des attentes légitimes porte sur le « processus » et non sur un résultat précis. Je renvoie à l’arrêt Masam c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2018 CF 751 au para 15, dans lequel le juge Walker a formulé la remarque que voici quant à ce principe :

[15] Le principe d’attente légitime dérive des exigences de l’équité procédurale. Si une entité ou un agent public a, par sa conduite, amené un individu à s’attendre à ce qu’un processus soit dirigé d’une certaine manière, la Cour protégera l’attente de l’individu. Il s’agit d’un principe procédural uniquement. Il ne crée pas de droits fondamentaux chez l’individu ni il ne garantit un résultat précis [Renvois omis].

[22] Le demandeur n’a pas démontré l’existence d’une déclaration du défendeur indiquant la façon dont le retrait de la demande de parrainage se déroulerait.

[23] En ce qui concerne la question du caractère raisonnable de la décision, la réponse se trouve selon moi à l’article 119 du Règlement, dont voici le libellé :

Retrait de la demande de parrainage

Withdrawal of sponsorship application

119 Il n’est pas statué sur la demande de visa de résident permanent au titre de la catégorie du regroupement familial si la demande de parrainage a été retirée à l’égard de l’intéressé.

119 A decision shall not be made on an application for a permanent resident visa by a member of the family class if the sponsor withdraws their sponsorship application in respect of that member.

[24] Le Règlement indique expressément qu’une demande de parrainage peut être retirée, à l’initiative du répondant et peu importe qui est la personne visée par la demande de parrainage.

[25] Compte tenu des circonstances de l’espèce, la décision de clore la demande du demandeur est raisonnable.

[26] Le demandeur a proposé que soit certifiée la question que voici :

[traduction]

IRCC a-t-il l’obligation de s’assurer que ses protocoles liés à la COVID-19 et les retards qui résultent de leur application ont une incidence systématique et uniforme sur les demandes individuelles de parrainage d’un époux?

[27] Je souscris au point de vue du défendeur. La décision relative à la présente demande de contrôle judiciaire est fonction des faits présentés et de l’application de la loi. Aucune question ne sera certifiée.

[28] Compte tenu de l’absence de manquement à l’équité procédurale ou d’erreur de droit, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT dans le dossier IMM-6317-21

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.

« E. Heneghan »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER


DOSSIER :

IMM-6317-21

INTITULÉ :

OMAR HAMMAD GOBLAN AL-KHATATNEH c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

AUDIENCE TENUE PAR VIDÉOCONFÉRENCE SUR LA PLATEFORME ZOOM

 

DATE DE L’AUDIENCE :

LE 11 JUILLET 2023

MOTIFS ET JUGEMENT :

LA JUGE HENEGHAN

DATE DES MOTIFS :

LE 4 DÉCEMBRE 2023

COMPARUTIONS :

Shirish P. Chotalia

POUR LE DEMANDEUR

Maria Green

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pundit & Chotalia

Avocats

Edmonton (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

Procureur général du Canada

Edmonton (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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