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     T-1939-95

Entre:

         SOCIÉTÉ CANADIENNE DES AUTEURS,

         COMPOSITEURS, ET ÉDITEURS DE MUSIQUE,

     Demanderesse,

     et

         FLAGSHIP BAR AND DISCO LTD.

             et HERMEL LURETTE,

     Défendeurs.

     Rapport sur une Référence

F. Pilon, arbitre

    

     Cette référence a eu lieu à Fredericton, Nouveau Brunswick le 27 février 1997, suite au jugement par défaut rendu par l'honorable Judge Nadon le 29 février 1996. Ledit jugement ordonait en partie que:

(a)      les défendeurs paient à la demanderesse les dommages pour, ou découlant, de la violation par les défendeurs des droits d'auteurs de la demanderesse, et que la question du montant de ces dommages soit déterminée dans le cadre d'une référence;

(b)      en plus des dommages, les défendeurs paient à l'article 35 de la Loi sur le droit d'auteur, les profits faits par le défendeur par leur violation des droits d'auteurs de la demanderesse, et que la question du montant de ces profits soit déterminée dans le cadre de ladite référence;

(c)      les défendeurs paient à la demanderesse des intérêts avant et après jugement sur ces dommages et ces profits; et

(d)      que l'Administrateur de cette Cour, ou tout autre officier de la Cour que celui-ci désignera, soit désigné Arbitre pour les fins de la détermination des dommages et des profits mentionnés ci-haut.

     La demanderesse est une société de gestion collective des droits d'auteur, en vertu de l'article 67 de la Loi sur le droit d'auteur, S.R.C. 1985, Chapitre C-42. En vertu de l'alinéa 67.2(2) de la Loi, la demanderesse a droit de percevoir les droits figurant dans son tarif homologué, ou, à défaut de paiement, en poursuivre le recouvrement en justice. Ces droits ont été approuvés par la Commission du droit d'auteur d'année en année, en application de la Loi. De plus la demanderesse a droit de poursuivre pour violation de droit d'auteur toute personne ou personne morale qui, sans s'être vu accordé une licence, enfreint ses droits exclusifs, en permettant ou autorisant l'exécution en public des oeuvres musicales dont elle détient les droits d'auteurs.

     Le défendeur, M. Hermel Lurette, était pendant la période pertinente, le président, directeur et seul actionnaire, de même que le fondateur de la défenderesse Flagship Bar and Disco Ltd. Pendant la période visée par cette action, M. Lurette a géré l'entreprise en question et, directement on implicitement autorisé l'exécution des oeuvres musicales et la violation des droits d'auteur de la demanderesse.

     Les tarifs homologués pour la musique exécutée en personne, le paiement desquels la demanderesse est en droit d'exiger des établissements, ont été publiés pour 1992, 1993, 1994 et 1995 dans la Gazette du Canada en tant que tarif 3A. En vertu de ce tarif, les droits exigibles chaque année sont calculés en proportion du total de la compensation pour divertissement pendant l'année. Le tarif 3A oblige le détenteur de la licence à soumettre un rapport de la compensation pour divertissement en soumettant son paiement.

     Les tarifs homologués pour l'exécution de musique enregistrée pour danser, le paiement desquels la demanderesse est en droit d'exiger des établissements, ont été publiés pour 1992, 1993, 1994 et 1995 dans la Gazette du Canada en tant que tarif 18. En vertu de ce tarif les droits exigibles chaque année sont calculés en fonction du nombre de places disponibles dans les salles des locaux ou de telles exécutions ont lieu et le nombre de mois pendant lesquels les locaux étaient en opération. Le tarif 18 oblige le détenteur de la licence à soumettre un rapport de la capacité des salles des locaux en soumettant son paiement.

     La demanderesse a, à maintes reprises, avisée les défendeurs que l'exécution en public d'oeuvres musicales pour lesquelles la demanderesse détient les droits d'exécution sans avoir obtenu les licences appropriées était en contravention de la Loi. (pièce 1, aux onglets 4, 10, 12 et 13).

     Les défendeurs ont dument été signifiés d'une copie de la déclaration ainsi que de la convocation fixant l'audition de la rérérence. M. Lurette a choisi de ne pas s'y présenter. Pratiquement toute la preuve documentaire soumise par la demanderesse consiste de documents signifiés aux défendeurs sous couverture d'un avis demandant l'admission de documents en vertu de la règle 468(2). Cette preuve est par conséquent jugée avoir été admise comme authentique. Me Daniel Boivin, le procureur de la demanderesse, a déposé les pièces 1 (volume contenant plusieurs pièces) 2 et 3 et enterrogé de témoin M. Richard Albert.

     La méthode du calcul des dommages (pièce 2) utilisée par M. Albert est une estimation rudimentaire (en anglais, a rough and ready estimate), méthode longuement reconnue par l'industrie et par la jurisprudence canadienne. Le témoin a déclaré avoir visiter les locaux des défendeurs en 1992, 1993 et 1994. En 1995 c'est un inspecteur de la région de Montréal, M. Daniel Lemai, qui rendit visite au Flagship Bar. Lors de chacune de leurs visites les inspecteurs discutent avec le propriétaire ou une autre personne responsable, des droits de la SOCAN et des redevances pour toute exécution publique d'oeuvres musicales et avisent qu'opérer sans une license de la SOCAN constitue une violation de la loi du droit d'auteur. A chaque visites, l'inspecteur laisse des documents en provenance de Consommation et Corporation Canada qui expliquent la nature de la SOCAN et son mandat. Des formulaires de demande pour les licences appropriées sont, à chaque occasion, laissées avec la personne en charge. L'inspecteur rédige une fiche d'inspection qui fait partie de la preuve de la demanderesse et par la suite et à intervalle la SOCAN fait parvenir une lettre au propriétaire de l'établissement lui demandant de remplir une demande de licence. Toutes ces lettres apparaissent en preuve au volume 1 des pièces déposées à l'audition. Au cours des années les défendeurs ont négligé de communiquer avec la demanderesse ou ses représentants. J'ajouterai que dans la présente affaire, M. Albert a témoigné avoir rendu visite au Flagship Bar en 1996 et 1997 et que le propriétaire autorise toujours l'exécution publique d'oeuvres musicales en contravention de la loi.

     Calcul des dommages

     A.      Violation du tarif 3A (musique exécutée en personne)

     Pour chacune des quatre années en question M. Albert calcule la compensation totale pour divertissement basée sur les faits et facteurs suivants:

     le nombre connu de soirs avec groupe

     l'évaluation du cachet

     autres compensations

     Ces montants découlent du tarif des droits à percevoir pour une licence par la Commission du droit d'auteur. Un pourcentage est établi chaque année et est publié dans la Gazette du Canada.

     J'aimerais indiquer ici que le nombre connu de soirs avec groupe est basé sur la publicité apparaissant dans les journaux locaux; que l'évaluation du cachet est établi à $300.00 par soir, ce qui est une somme très conservatrice selon M. Albert puisqu'il est connu que certains cachets peuvent atteindre environ $4,000 par soir; que dans cette présente action le montant de $600.00 par mois est ajouté parce que le propriétaire avait mis à la disposition de l'orchestre un logement gratuit, pratique fort courante dans l'industrie. Les redevances totales en vertu du tarif 3A sont établies à $4,977.90.

     B.      Violation du tarif 18 (musique enregistrée

         (utilisée à des fins de danse)

     Les redevances en vertu de ce tarif sont déterminées par la Commission du droit d'auteur et sont basées sur la capacité de(s) salle(s) de l' établissement et le nombre de mois d'ouverture. Ces redevances sont prouvées pour les quatre années au montant de $3,681.72.

     C.      Calcul des profits relatifs à l'utilisation

         de la musique.

     En premier lieu les revenus bruts pour chaque année sont calculés en multipliant par quatre le montant annuel pour le compensation pour divertissement. Il est bien connu dans l'industrie que les dépenses pour divertissements représentent 25 pour cent des revenus bruts de l'établissement. Le coût total des opérations est obtenu en déduisant les items suivants:

     le coût des ventes (35%)

     salaires et bénéfices (22%)

     pertes (2%)

     fournitures de bar (2%)

     bris (1%)

     Ces items sont déduits du revenu brut et forment le coût des opérations. A ces montants s' ajoute la compensation pour divertissement pour obtenir finalement les dépenses totales. Les profits nets sont obtenus en soustrayant les dépenses totales des revenus bruts. Le témoin a calculé le montant des profits pour les quatre années à $98,904.00

     Les intérêts avant jugement sont de $13,170.75 et la T.P.S. imposée sur les redevances des tarifs 3A et 18 est de l'ordre de $606.17.

     Me Boivin réclame également des dommages exemplaires au montant de $15,000.00. Il allègue qu'il ne faut pas oublier que la SOCAN représente des créateurs, des compositeurs, des gens dont le métier est d'écrire des chansons et créer de la musique. Il est important que ces gens-là soient compensés pour leur énergie créatrice dont les oeuvres bénéficient à tous. Le procureur de la demanderesse soumet que plusieurs autres arbitres, ayant à résoudre des cas semblables, ont alloué des dommages exemplaires. La conduite du défendeur Hermel Lurette démontre, à mon avis, un grave manque de responsabilité envers les demandes répétées de la demanderesse en négligeant d'obtenir les licences appropriées. Il se refuse à toute communication avec cette dernière. Le preuve démontre qu'il continue depuis 1995 à autoriser l'exécution d'oeuvres musicales en contravention de la loi. Dans les circonstances je pense que la réclamation de $15,000.00 en dommages exemplaires est tout-à-fait raisonnable.

     En conclusion je recommande donc à la Cour que la demanderesse soit indemmisée pour les montants suivants:

1.      redevances sous le tarif 3A      $ 4,977.90

2.      redevances sous le tarif 18          $ 3,681.72

3.      T.P.S. pour les items 1 et 2      $ 606.17

4.      profits                  $98.904.00

5.      intérêts                  $13,170.75

6.      dommages exemplaires          $15,000.00

                        

                 total          $136,340.54

                

                     François Pilon

                     arbitre

Halifax, N.É

le 9 avril 1997

     COUR FÉDÉRALE DU CANADA

     AVOCATS ET PROCUREUR INSCRITS AU DOSSIER

No DU DOSSIER DE LA COUR:      T-1939-95

ENTRE:

             SOCIÉTÉ CANADIENNE DES AUTEURS,

             COMPOSITEURS, ET ÉDITEURS DE MUSIQUE,

     Demanderesse,

                         ET

             FLAGSHIP BAR AND DISCO LTD. et

             HERMEL LURETTE,

     Défendeurs.

LIEU DE LA RÉFÉRENCE:      Fredericton (N.B.)

DATE DE LA RÉFÉRENCE:      le 27 février 1997

MOTIF DE L'ARBITRE:          F. PILON

RAPPORT DE L'ARBITRE:      Halifax, le 9 avril 1997

A COMPARU:

Me Daniel Boivin      pour la demanderesse

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER:

Gowling, Strathy & Henderson

Ottawa, Ontario      pour la demanderesse


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