Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20060719

Dossier : IMM-3564-06

Référence : 2006 CF 899

Montréal (Québec), le 19 juillet 2006

En présence de monsieur le juge Lemieux

ENTRE :

IMED ABDERRAHMA KAWECH

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

[1]                Il s'agit d'une demande de sursis à l'exécution d'une mesure de renvoi prévue pour vendredi le 21 juillet 2006;

[2]                Cette demande de sursis est greffée à une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire à l'encontre d'une décision en date du 11 octobre 2005 de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) lui refusant sa demande du 8 septembre 2004 de dispense du visa de résident permanent pour des considérations humanitaires. Dans sa demande, il avait nommé, comme son épouse, Myriane Cholette, citoyenne canadienne;

[3]                Cette décision fut remise au demandeur seulement le 21 juin 2006 lorsqu'il s'est présenté au CIC et a été avisé qu'il devait quitter le Canada un mois plus tard. Cette décision mets en doute que le couple cohabite;

[4]                La décision contestée doit être appréciée dans le contexte de l'annonce du 18 février 2005 du Ministre de CIC que la majorité des époux et des conjoints de fait de citoyens et de résidents permanents au Canada pourront, quel que soit leur statut, demeurer au Canada pendant que leur demande d'immigration fera l'objet d'un examen;

[5]                Les événements importants dans le dossier du demandeur, citoyen de la Tunisie, sont les suivants :

(a)           le 9 août 2000, il arrive au Canada; un an plus tard, il revendique le statut de réfugié, mais est débouté le 14 mai 2002;

(b)           sa demande d'évaluation de risques avant renvoi a été rejetée le 21 février 2004 et sa demande de contrôle judiciaire à l'encontre de celle-ci fut rejetée par le juge Teitelbaum le14e jour d'octobre 2005;

(c)           le 12 mars 2005, CIC avise le demandeur que sa demande de dispense a été transmise à CIC Montréal;

(d)           le 19 avril 2005, le demandeur, accompagné de son procureur, a présenté à l'agent des renvois une réservation pour un départ le 28 juin 2005;

(e)           Le 1er juin 2005, il obtient un sursis administratif accordé par l'Agence des services frontaliers valide jusqu'au 14 octobre 2005;

(f)             Le 5 juillet 2005, CIC envoie au demandeur une lettre pour l'informer que sa demande de dispense serait susceptible d'être évaluée en vertu de la Politique sur les conjoints si un engagement de parrainage était déposé dans les 30 jours, ce qui fut accompli le 22 juillet 2005;

(g)           Selon la politique d'intérêt public établie en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, la demande de M. Kawech est traitée selon les règles de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada et il devait satisfaire aux exigences du Québec relatives au parrainage.

(h)           Après un ou deux aléas, le 15 juin 2006, le Ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles du Québec (MICCQ) avise Mme Cholette que sa demande d'engagement a été approuvée;

(i)             Aussi, le 15 juin 2006, le MICCQ envoie à M. Kawech un certificat de sélection l'avisant cependant que la délivrance de ce certificat ne signifie pas la délivrance du visa de résidence permanente;

(j)             Ce jour même, le MICCQ avise CIC Montréal qu'il avait accepté la demande d'engagement de Mme Cholette et avait émis un certificat de sélection à M. Kawech;

[6]                Après avoir entendu les parties, j'ai indiqué aux procureurs qu'un sursis devait être accordé puisque M. Kawech m'avait satisfait de l'existence de questions sérieuses; qu'il subirait un préjudice irréparable et que la balance des inconvénients le favorisait. J'ai cependant fortement suggéré aux parties d'éclairer la question de la cohabitation du couple;

[7]                Sur la question sérieuse, la Cour Suprême du Canada dans l'arrêt RJR- MacDonald Inc. v. Canada (P. G.) (1994) 1 RCS 311, a statué « une fois convaincue qu'une réclamation n'est ni futile ni vexatoire, le juge des requêtes devrait examiner les deuxièmes et troisièmes critères, même s'il est d'avis que le demandeur sera probablement débouté au procès. Il n'est généralement ni nécessaire, ni souhaitable de faire un examen prolongé du fond de l'affaire. »

[8]                À mon avis, la principale question sérieuse découle du fait que la décision négative de sa demande de dispense fut signifiée après que CIC savait ou aurait dû savoir que sa demande de parrainage avait été approuvée par le MICCQ. Est-ce que dans les circonstances en l'espèce la décision négative était périmée ou était devenue caduque.

[9]                Une autre question sérieuse est de savoir si l'agent qui a décidé de refuser la dispense pour des considérations humanitaires a injustement nié au demandeur le bénéfice de l'application de la politique du Ministre ou subsidiairement a agit à l'encontre des principes d'équité procédurale en mettant en doute que le demandeur et Mme Cholette habitaient ensemble sans approfondir la question durant une entrevue;

[10]            Le préjudice irréparable découle du fait que si M. Kawech devait quitter le pays, il perdrait son droit d'invoquer la politique du Ministre de CIC du 18 février 2005 qui n'exige pas qu'il démontre l'existence de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives pour avoir gain de cause à une dispense pour des considérations humanitaires. (Voir Cecilia c. Canada [2005] 2 RCF 483);

[11]            Ayant démontré une ou des questions sérieuses et un préjudice irréparable, la balance des inconvénients favorise le demandeur;


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE un sursis à l'exécution de l'ordre de renvoi jusqu'à ce qu'il soit décidé définitivement de la demande d'autorisation du demandeur d'exercer un contrôle judiciaire et de sa demande de contrôle suite à l'autorisation.

« François Lemieux »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-3564-06

INTITULÉ :                                       IMED ABDERRAHMA KAWECH

demandeur

et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Montréal, Québec

DATE DE L'AUDIENCE :                18 juillet 2006

MOTIFS :                                           monsieur le juge Lemieux

DATE DES MOTIFS :                       19 juillet 2006

COMPARUTIONS:

Me Pierre Langlois

POUR LE DEMANDEUR

Me Thi My Dung Tran

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Pierre Langlois

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.