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Date: 20060529

Dossier: IMM-6413-05

Référence: 2006 CF 627

Ottawa (Ontario), le 29 mai 2006

En présence de Monsieur le juge Simon Noël

ENTRE :

ABDULLAH SHAH

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]                Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire en vertu de l'article 72 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés L.C. 2001, ch. 27 ( « LIPR » ) d'une décision de la Section de la protection des réfugiés ( « SPR » ) datée du 29 septembre 2005. Par cette décision, la SPR refusait la demande d'asile d'Abdallah Shah ( « demandeur » ). Selon la SPR, le demandeur n'est pas un réfugié au sens de la Convention, ni une personne à protéger au sens des articles 96 et 97 de la LIPR. La décision de la SPR est fondée sur des considérations liées à la crédibilité du demandeur.

I. Questions en litige

[2]                Les questions en litige sont les suivantes :

-                      La SPR a-t-elle commis une erreur de fait en concluant que le demandeur n'est pas crédible?

-                      La SPR a-t-elle erré en décidant que la demande d'asile du demandeur est dénuée de minimum de fondement?

-                      La SPR a-t-elle fait preuve de partialité lors de l'audience?

II. Conclusion

[3]                Pour les motifs qui suivent, je réponds par l'affirmative aux deux premières questions, et il n'est pas nécessaire de répondre à la troisième. De toute façon, le demandeur n'a pas, dans son mémoire, identifié les faits à la base d'un tel reproche. La demande de contrôle judiciaire est donc accueillie et le dossier est renvoyé à la SPR pour être traité par un tribunal différemment constitué.

III. Faits

[4]                Le demandeur est citoyen Afghan. Les faits décrits ci-dessous sont tirés de son Formulaire de renseignements personnels (FRP) et du formulaire « Renseignements généraux » (dossier du tribunal, p.159-160).

[5]                Le demandeur allègue être né dans la région de Panjsher, en Afghanistan, en 1973. En 1980, sa famille a déménagé à Kaboul, à la suite de l'invasion soviétique. À un certain moment, le demandeur est retourné dans la région de Panjsher, pour éviter d'être conscrit. En 1991, il est allé en Iran puis est retourné en Afghanistan en 1993, après avoir reçu de mauvaises nouvelles concernant sa famille demeurée là-bas. Le demandeur a trouvé du travail comme mécanicien et s'est installé de nouveau à Kaboul.

[6]                Les talibans prirent le pouvoir en Afghanistan en 1996. Un jour, le frère du demandeur écoutait la radio sur le toit de la maison, a été repéré par des talibans armés puis aurait été poignardé à mort. À la suite du drame, le demandeur est demeuré deux semaines de plus à Kaboul, puis s'est enfui chez sa tante. De là, il s'est échappé au Pakistan, où il est demeuré jusqu'à son départ vers Moscou, en 1998. Après un an passé en Russie, il a demandé l'asile au Royaume-Uni (R-U) et y a séjourné jusqu'à sa déportation vers l'Afghanistan, en juillet 2003.

[7]                À son arrivée à Kaboul, le demandeur est retourné dans la région de Panjsher. Il allègue y avoir été arrêté en raison de son appartenance imputée au parti Hezb-e-islami, parti duquel son père était membre. Le demandeur a nié appartenir à ce parti, mais n'a pas été cru et a été arrêté et battu par les autorités. Il a ensuite réussi à s'échapper grâce à l'aide de l'un des gardiens de la prison. Le demandeur a ensuite fui au Pakistan, puis a fait escale aux Émirats Arabes Unis et en Italie. Il est arrivé au Canada le 16 janvier 2004 et a fait sa demande d'asile en arrivant.

IV. Analyse

A. Crédibilité

[8]                La SPR a conclu que le demandeur n'était pas crédible pour les raisons suivantes :

-                      Le demandeur a donné des versions contradictoires quant aux raisons qui ont conduit à son expulsion du R-U;

-                      Le demandeur a dit qu'il craignait de retourner dans la région de Panjsher, mais y est retourné lors de son retour en Afghanistan;

-                      Le demandeur dit avoir déjà eu copie du mandat d'arrestation délivré contre lui en 2003 mais prétend l'avoir perdu;

-                      Les documents d'immigration révèlent que le demandeur a déclaré à l'agent d'immigration que sa résidence permanente est au Pakistan mais a dit à l'audience que c'est la première fois qu'il en entendait parler lorsque la SPR a posé des questions à cet égard;

-                      Le demandeur aurait donné des versions contradictoires quant aux raisons de son arrestation en Afghanistan.

La SPR a interrogé le demandeur à l'audience quant à chacun de ces éléments mais a rejeté ses explications.

[9]                La norme de contrôle applicable aux conclusions de la SPR concernant la crédibilité d'un demandeur d'asile est celle de la décision manifestement déraisonnable lorsque ce sont des questions de fait qui sont en cause (Thavarathinam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CF 1469, [2003] A.C.F. No. 1866 (C.A.F.), au para. 10; Aguebor c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1993] A.C.F. No. 732 (C.A.F.), au para. 4). Chacun des éléments sur lesquels s'est appuyée la SPR sera traité.

(1) Les motifs d'expulsion du demandeur

[10]            Les circonstances et les motifs ayant mené à l'expulsion du demandeur du R-U sont nébuleuses. Il a écrit dans son récit joint à son FRP qu'il a été déporté parce que son avocat ne l'avait pas informé de la date de sa convocation pour une entrevue, et parce qu'il aurait en conséquence fait défaut de se présenter à cette entrevue. Dans le même document, le demandeur a indiqué que son dossier avait été perdu et que les autorités l'avaient clos (dossier du tribunal, p. 30).

[11]            À l'occasion d'une audience en contrôle de la détention, le demandeur a fourni une version longue et confuse des procédures judiciaires auxquelles il a participé au R-U (dossier du tribunal, p. 60 et suiv.). J'en comprends que le demandeur réitère la version donnée dans son FRP, mais qu'après avoir fait défaut de se présenter à son entrevue, il a eu droit à une audience, au terme de laquelle le décideur lui a accordé un sursis exceptionnel de déportation de 4 ans. Puis, le demandeur aurait entamé un recours devant la High Court, mais n'aurait pas eu l'occasion de faire des représentations, les autorités d'immigration britanniques ayant égaré son dossier. Il aurait ensuite été convoqué à la Cour, où on l'aurait informé qu'il serait déporté prochainement. Le demandeur fût détenu et, malgré ses efforts pour éviter d'être déporté, il prétend que les tribunaux britanniques continuaient de lui envoyer des lettres lui indiquant qu'il ne disposait d'aucun droit d'appel.

[12]            La SPR a noté que la lettre des autorités britanniques datée du 17 juin 2003 (dossier du tribunal, p. 80) contient les faits suivants. Cette lettre indique que le demandeur a demandé l'asile mais que sa demande a été rejetée le 22 décembre 2000. En appel, le demandeur a eu gain de cause le 18 avril 2002. Le Secrétaire d'État aurait ensuite obtenu la permission d'appeler, en date du 28 mars 2003. La lettre datée du 17 juin 2003 indique que le demandeur est à cette date en attente d'une décision en lien avec sa demande de contrôle judiciaire.

[13]            À mon avis, la SPR a fait défaut d'expliquer pourquoi les versions données par le demandeur sont incompatibles entre elles ou incompatibles avec la lettre du 17 juin 2003. Il me semble que les différentes versions sont, ou du moins peuvent être conciliables. De plus, je crois qu'il faut prendre en considération que le demandeur n'est pas juriste et qu'il a une scolarité limitée. Il n'a pas nécessairement une bonne compréhension de son vécu dans les dédales du système judiciaire britannique. Finalement, la lettre du 17 juin 2003 décrit les étapes procédurales de la demande d'asile, alors que le récit du demandeur décrit les motifs pour lesquels le demandeur croit, à tort ou à raison, qu'il a été déporté. Il est normal que ces motifs ne se trouvent pas dans la lettre du 17 juin et à l'inverse, il m'apparaît normal du point de vue d'un justiciable que celui-ci soit incapable de décrire en termes juridiques le processus judiciaire qu'il a traversé. Je constate par ailleurs que les deux lettres du procureur du demandeur datées du 1er avril 2003, qui n'ont pas été commentées par la SPR, expliquent un peu plus clairement la situation juridique du demandeur en Angleterre. Ces lettres ne contredisent pas la lettre du 17 juin 2003.

[14]            La conclusion qu'en retire la SPR à l'effet que le demandeur se contredisait sérieusement et que l'explication donnée « ... affecte très sérieusement sa crédibilité » m'apparaît non fondée sur les faits, erronée et exagérée. Une telle conclusion en soi m'apparaît manifestement déraisonnable. Dans le cadre de l'analyse de la SPR, il s'agit de la première détermination faite. Voyons les autres éléments de l'analyse pour voir si cette détermination a vicié la décision de la SPR.

(2) Le retour du demandeur en Afghanistan et les motifs de son arrestation

[15]            La SPR a conclu que le demandeur n'est pas crédible du fait qu'il a adopté un comportement incompatible avec celui d'une personne craignant d'être persécutée. En particulier, la SPR écrit :

Le demandeur a été déporté à Kabul, capitale de l'Afghanistan, le 23 juillet 2003.

Le demandeur a déclaré craindre d'être tué dans la ville de Panjsher, son lieu de résidence, d'où il s'est sauvé en 1998, parce que les autorités croyaient que son père travaillait avec les Talibans.

Pourtant, lors de son retour en Afghanistan, il quitte volontairement Kabul pour aller à la ville de Panjsher, alors qu'il avait déjà été arrêté à cet endroit-là.

[16]            Ce court extrait de la décision de la SPR comporte les trois erreurs de fait importantes suivantes :

-                      Le demandeur ne s'est pas enfui de la ville de Panjsher en 1998. En effet, il a quitté Kaboul, et non Panjsher, à la suite de l'assassinat allégué de son frère, qui s'est produit en 1996 et non en 1998;

-                      Le demandeur allègue qu'il a quitté l'Afghanistan à la suite de l'assassinat de son frère, et non parce que les autorités croyaient que son père travaillait avec les talibans;

-                      Le demandeur n'allègue pas qu'il a déjà été arrêté à Panjsher : en fait, il ressort du dossier qu'il a été arrêté pour la première fois à son retour en Afghanistan, en 2003.

[17]            Il est vrai que ces erreurs de fait rendent cette conclusion de la SPR moins persuasive. Cependant, il faut dire que le demandeur a lui-même contribué à alimenter la confusion à cet égard, puisqu'il a donné des versions contradictoires, ou du moins difficilement conciliables, quant aux éléments suivants :

-                      les raisons de son arrestation;

-                      les raisons de sa crainte de persécution;

-                      le lieu de la fuite.

[18]            D'abord, quant aux raisons de son arrestation en 2003, le demandeur a donné des explications à géométrie variable. Dans son FRP, il a indiqué qu'il a été arrêté en raison de conflits ethniques, politiques et tribaux subsistant dans son pays, et parce qu'il s'est fait reprocher d'appartenir et de travailler pour le parti Hezb-e-islami (dossier du tribunal, p. 30). Dans le formulaire « Renseignements généraux » , des faits nouveaux semblent apparaître. Le demandeur y allègue que des membres du parti Islamic Society Party occupaient sa maison, et qu'il a été arrêté parce qu'il les a sommé de quitter les lieux (dossier du tribunal, p. 159). Je crois que les erreurs sont en partie causées par la preuve et le témoignage du demandeur et dans leur ensemble, elle ne vicie pas la décision de façon irrémédiable. Toutefois, les erreurs doivent être prises en considération lors de l'évaluation de l'ensemble de la décision, ce que nous ferons plus loin.

[19]            Quant aux raisons de sa crainte de persécution, le demandeur a indiqué dans son FRP que son père était membre du parti Hezb-e-islami et qu'il craignait que les Talibans le persécutent pour cette raison (dossier du tribunal, p. 29). Cependant, les notes de l'agent d'immigration indiquent qu'il a déclaré en janvier 2004 que les autorités (le demandeur identifie « [TRADUCTION] le ministre de la défense Fahim, la police, l'armée (Garnezoun) » )croient « [TRADUCTION] que son père travaille toujours avec les Talibans, Al-Quaïda et le Hasbi Ilslami » (dossier du tribunal, p. 174). Il apparaît pour le moins curieux que d'une part, le demandeur craigne d'être persécuté en raison de l'appartenance imputée de son père à Al-Quaïda et que, d'autre part, les agents persécuteurs soient les Talibans.

[20]            Finalement, le demandeur s'est contredit quant au lieu de sa fuite. Dans le formulaire

« Renseignements généraux » (dossier du tribunal, p. 159), il a indiqué qu'il a fui en Iran, alors qu'il indique avoir fui au Pakistan dans son FRP (dossier du tribunal, p. 30).

[21]            Dans ce contexte, les erreurs de fait de la SPR m'apparaissent être plus compréhensibles, puisque le demandeur a en tout temps été confus dans ses explications concernant sa fuite, à la suite de la mort de son frère. Il demeure cependant qu'il n'était pas manifestement déraisonnable de conclure que le demandeur a eu un comportement incompatible avec celui d'une personne qui craint d'être persécutée.

(3) La perte du mandat d'arrestation

[22]            La SPR estime que le demandeur n'est pas crédible quant aux raisons pour lesquelles il a perdu le mandat d'arrestation le visant.    Le demandeur, lors de l'audition, n'a pas contesté cette détermination. Par l'entremise de son procureur, le Ministre a mis l'accent sur le fait que cette conclusion était justifiée. Elle est donc bien fondée.

(4) La résidence permanente du demandeur

[23]            Dans sa décision, la SPR a appuyé sa conclusion concernant la crédibilité du demandeur sur le fait que les notes de l'agent d'immigration indiquent que le demandeur a déclaré à l'agent d'immigration qu'il avait sa résidence permanente au Pakistan (dossier du tribunal, p. 178), et que le demandeur a indiqué lors de son témoignage que c'était la première fois dont il entendait parler de cela (dossier du tribunal, p. 249 à 252). Je note aussi qu'un document du demandeur (à la page 172 du dossier du tribunal) mentionne que l'épouse et les deux enfants du demandeur sont au Pakistan et que leur statut est inconnu. La SPR a indiqué qu'elle préférait la version de l'agent d'immigration à celle du demandeur, en raison du manque de crédibilité du demandeur. La SPR a adopté un raisonnement circulaire à cet égard : selon elle, la crédibilité du demandeur est affectée parce que celui-ci contredit les notes de l'agent d'immigration, dont la version doit être retenue en raison du manque de crédibilité du demandeur. À mon avis, cela est manifestement déraisonnable, puisque les motifs donnés par la SPR pour justifier le manque de crédibilité du demandeur sont insuffisants.

            (5)        Évaluation globale de la preuve concernant la crédibilité du demandeur

[24]            Ce n'est pas dans tous les cas que des erreurs de fait doivent donner lieu au renvoi du dossier à la SPR. Plusieurs erreurs prises ensemble peuvent cependant mener à un tel résultat, même si prises isolément, chacune des erreurs de fait ne permettrait pas d'accueillir une demande de contrôle judiciaire (Salamat c. Canada (Commission d'appel de l'Immigration), [1989] A.C.F. No. 213 (C.A.F.); Horvath c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] A.C.F. No. 1532, au para. 7 (C.F.)). Dans l'affaire Zhuo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 1271 (C.F.), le juge Phelan écrit :

¶ 7 [...] Le défaut d'expliquer comment on en est arrivé à cette conclusion, une appréciation fondamentalement erronée des faits et le poids cumulatif des conclusions contestables sont des facteurs qui donnent ouverture à ce degré de contrôle judiciaire. [...]

[...]

¶ 21       Bien qu'il eût été possible de confirmer l'une ou l'autre des conclusions de la SPR au motif qu'elles sont déraisonnables sans être toutefois manifestement déraisonnables, certaines d'entre elles contredisent de toute évidence la preuve, et l'accumulation d'un nombre aussi important de conclusions déraisonnables, inexpliquées ou inexplicables justifie à elle seule la Cour de conclure que la décision de la SPR est manifestement déraisonnable.

¶ 22       Par conséquent, la décision de la SPR sera annulée et l'affaire sera renvoyée à un tribunal différemment constitué de la CISR pour que celui-ci procède à une nouvelle audition.

Cependant, les erreurs prises ensemble doivent être suffisamment importantes pour affecter les conclusions centrales de la SPR : il ne doit pas s'agir de questions de fait périphériques. Dans l'affaire Usta c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 1525, au para. 17, le juge Phelan écrit:

Alors que le demandeur invoque un certain nombre d'erreurs dans la décision de la Commission, notamment la confusion quant aux dates, quant à certain nombre d'incidents et quant à un certain nombre d'explications soumises, aucune de ces erreurs ne touche le coeur de la décision de la Commission. Aucune de ces erreurs (dans la mesure où elles existent) ne constitue un déni de justice naturelle.    

[25]            À mon avis, la conclusion de la SPR concernant la crédibilité du demandeur au sujet des procédures juridiques en Angleterre et de sa résidence permanente au Pakistan s'appuie sur des éléments peu convaincants et ne tient pas compte de l'ensemble de la preuve. De plus, tel que noté auparavant, certaines erreurs de fait ont été commises et je suis d'avis qu'il ressort de la décision que la SPR n'a pas tenu compte de l'ensemble de la preuve et avait une compréhension imparfaite des faits du dossier.

[26]            Le seul élément plus convaincant que la SPR a invoqué pour justifier le manque de crédibilité du demandeur est celui qui concerne les versions contradictoires du demandeur concernant les raisons de son arrestation. Cependant, la décision de la SPR n'a pas expliqué clairement, en renvoyant à la preuve, les raisons pour lesquelles les différentes versions du demandeur sont incompatibles, et pourquoi ces incohérences faisaient perdre au demandeur sa crédibilité. Était-ce parce que le demandeur a ajouté des faits à son récit? Était-ce parce qu'il a été incapable d'identifier clairement les agents persécuteurs?

[27]            En ajoutant à ce contexte que les lettres de l'avocat britannique du demandeur n'ont pas été mentionnées (dossier du tribunal, p. 126-127), je n'ai d'autre choix que de conclure que la décision est manifestement déraisonnable parce qu'elle ne tenait pas compte de l'ensemble du dossier et qu'elle était en grande partie incorrectement motivée. Le défaut de mentionner certains éléments de preuve n'est pas fatal dans tous les cas, mais il s'agit en l'espèce d'un élément qui rend la décision encore moins convaincante.

[28]            Je réponds donc par l'affirmative à la première question, compte tenu des erreurs de fait et des failles dans l'analyse de la SPR.

B. Absence de minimum de fondement

[29]            En principe, lorsque la SPR fait état dans sa décision qu'une demande d'asile est dénuée d'absence de fondement conformément au para. 107 (2) LIPR, il s'ensuit que la demande d'autorisation de contrôle judiciaire n'entraîne pas de sursis automatique de la mesure de renvoi (para. 231(2) du Règlement sur l'immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227). En l'espèce, la décision de la SPR étant entachée d'erreurs et insuffisamment motivée, la conclusion concernant l'absence de minimum de fondement ne saurait être maintenue. Je réponds donc par l'affirmative à la seconde question.

[30]            Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est accordée et le dossier est renvoyé à la SPR pour être traité par un tribunal différemment constitué.

[31]            Les parties furent invitées à suggérer une question pour fin de certification mais elles ont déclinées.

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

-                      La demande de contrôle judiciaire soit accueillie;

-                      Le dossier soit renvoyé devant la SPR pour être traité par un tribunal différemment constitué;

-                      Aucune question ne sera certifiée.

« Simon Noël »

Juge

COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                                                                                           

DOSSIER :                                        IMM-6413-05

INTITULÉ :                                        

ABDULLAH SHAH

Demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

Défendeur

LIEU DE L'AUDIENCE :                       Montréal

DATE DE L'AUDIENCE :                     17 mai 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :                 L'honorable Juge Simon Noël

DATE DES MOTIFS :                            Le 29 mai 2006       

                                                                

COMPARUTIONS:

Me Annie Bélanger

                                                           POUR LE DEMANDEUR

                                                          

Me Sylviane Roy

                                                           POUR LE DÉFENDEUR                     

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

Me Annie Bélanger

Montréal

                                                           POUR LE DEMANDEUR                   

Procureur général du Canada

MinistPre de la justice - Montréal

                                                           POUR LE DÉFENDEUR

                                                          


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