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     IMM-1732-96

ENTRE:

     HANUKASHVILI, VALERI

     HANUKASHVILI, RAFAEL

     HANUKASHVILI, MAYA

     HANUKASHVILI, NINO

     HANUKASHVILI, ILANA,

     Partie requérante,

     - et -

     LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION,

     Partie intimée.

     MOTIFS D'ORDONNANCE

LE JUGE PINARD:

     Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire visant la décision rendue par la Section du statut de réfugié le 1er mai 1996 à l'effet que le requérant et sa famille ne sont pas des réfugiés au sens de la Convention.

     Les requérants sont originaires de la Géorgie, qui faisait partie de l'ancienne Union Soviétique. Valeri Hanukashvili est le revendicateur principal, et les autres membres de sa famille se réfèrent au récit déposé par lui en réponse à la question 37 du Formulaire de Renseignements personnels (FRP). D'après les certificats de naissance qui ont été déposés lors de l'audition, le père de Valeri est juif et sa mère russe, tandis que la mère d'Ilana est juive, et son père, géorgien.

     En 1992, dans le contexte d'un mouvement ultra-nationaliste en Géorgie et du déclenchement d'une guerre civile, les requérants ont décidé de quitter ce pays. La famille s'est rendue à Moscou où elle s'est présentée au consulat israélien pour obtenir les papiers nécessaires pour déménager en Israël. D'après le FRP de monsieur Hanukashvili "[A] (sic) Moscou on nous a dit que tous nos papiers étaient en règle et que nous pouvions quitter pour Israël". La famille a quitté la Géorgie pour Israël le 4 août 1992.

     À leur arrivée en Israël, le Ministère de l'intérieur de l'État d'Israël n'a pas reconnu les requérants juifs parce que les documents soumis par ceux-ci n'étaient pas des originaux. Donc, sur leur "teoudat zeut" (carte d'identité émise par le Ministère de l'intérieur), leur nationalité est mentionnée "non-identifiée".

     Les requérants ont quitté Israël pour le Canada le 27 août 1994. Ils ont revendiqué le statut de réfugié le 30 août 1994.

     Les requérants prétendent essentiellement que la Section du statut de réfugié a erré en étudiant leurs revendications seulement en regard d'Israël, alors que le Tribunal a accepté que l'État d'Israël ne leur a pas reconnu la nationalité juive. Ils soumettent que lorsqu'ils ont quitté la Géorgie en août 1992, ils n'avaient pas la citoyenneté de la Géorgie, mais n'avaient que la citoyenneté de l'ex-Union Soviétique. Ils allèguent donc que, suite à la dissolution de l'Union soviétique, ils étaient apatrides lorsqu'ils sont arrivés en Israël.

     La nationalité d'un revendicateur est une question de fait. Il importe de rappeler la définition d'un "réfugié au sens de la Convention", au paragraphe 2(1) de la Loi sur l'immigration:

     2(1) "réfugié au sens de la Convention" Toute personne :         
         a) qui, craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :         
             (i) soit se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,         
             (ii) soit, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ou, en raison de cette crainte, ne veut y retourner;         
         b) qui n'a pas perdu son statut de réfugié au sens de la Convention en application du paragraphe (2).         
     Sont exclues de la présente définition les personnes soustraites à l'application de la Convention par les sections E ou F de l'article premier de celle-ci dont le texte est reproduit à l'annexe de la présente loi.         

     Il ne faut pas confondre le concept de "nationalité" tel que ce terme est utilisé pour décrire un des cinq motifs pour lesquels une personne peut fonder la revendication du statut de réfugié, avec le concept de nationalité tel qu'il est utilisé au sous-alinéa 2(1)a)(i) de la Loi. Bien que "nationalité" n'équivaut pas à la citoyenneté, quand ce mot est utilisé comme un des cinq motifs, par ailleurs, la nationalité équivaut à la citoyenneté aux fins du sous-alinéa 2(1)a)(i) de la Loi. À cet égard, Lorne Waldman écrit ce qui suit, au paragraphe 8.126 de son oeuvre Immigration Law and Practice1:

     " 8.126 The notion of nationality as one of the five grounds for claiming refugee status was discussed at "8.104. While it was suggested there that the context required a broad definition of nationality, such is not the case here. It seems clear that, in the present context, nationality means citizenship. This is so particularly because the definition distinguishes between persons who have a country of nationality, and individuals who do not. The latter must prove their claims with reference to their country of former habitual residence. It is submitted that the country of former habitual residence is intended to provide a country of reference for stateless persons, i.e., persons who are not citizens of any state. This counstruction was adopted by the Supreme Court of Canada in the leading decision of Canada (Attorney General) v. Ward2, where the Court equated "country of nationality" with "country of citizenship".         
     (c'est moi qui mets l'emphase)                 

     En l'espèce, les passeports et les cartes d'identité indiquent que la nationalité/citoyenneté des requérants est israélienne. Ceux-ci n'ont allégué, ni à l'audition, ni dans la présente demande, que ces documents ne sont pas valides ou authentiques. De fait, dans leurs formules de Renseignements personnels, les requérants indiquent clairement avoir la citoyenneté israélienne à l'exclusion de toute autre, précisant en outre ne pas se trouver dans la situation de ne pas avoir de pays de citoyenneté. Enfin, dans les mêmes formules, lorsqu'interrogés sur le pays ou les pays où ils craignent la persécution, ils ont indiqué simplement "Israël".

     Ainsi, n'étant saisi d'aucune revendication à l'encontre de la Géorgie, et ayant en fait déterminé que les requérants étaient tous des citoyens d'Israël, la Section du statut n'avait qu'à considérer la revendication des requérants en regard d'Israël. À cet égard, sa conclusion que les requérants n'avaient pas une crainte bien fondée de persécution dans ce dernier pays n'a pas été contestée.

     En conséquence, la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

     À l'instar des procureurs des parties, je considère qu'il n'y a pas ici matière à certification.

O T T A W A

le 27 mars 1997

    

     Juge

__________________

1      Toronto: Butterworths, 1992.

2      [1993] 2 R.C.S. 689.


COUR FEDERALE DU CANADA SECTION DE PREMIERE INSTANCE

NOMS DES AVOCATS ET DES AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

N º DE LA COUR : IMM-1732-96

INTITULE : HANUKASHVILI, VALERI et al. c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETE ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE : MONTREAL, QUEBEC DATE DE L'AUDIENCE : LE 19 MARS 1997 MOTIFS DE L'ORDONNANCE DU JUGE PINARD EN DATE DU 27 MARS 1997

COMPARUTIONS

Me Michel Lebrun POUR LA PARTIE REQUERANTE

Me Ian Hicks POUR LA PARTIE INTIMEE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

Me Michel Lebrun POUR LA PARTIE REQUERANTE Montreal, Quebec

M. George Thomson POUR LA PARTIE INTIMEE Sous-procureur general du Canada

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