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Date : 20060406

Dossier : IMM-5553-05

Référence : 2006 CF 438

Ottawa (Ontario), le 6 avril 2006

EN PRÉSENCE DE Monsieur le juge Shore

ENTRE :

THIERNO MAMADOU BALDE

demandeur

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

INTRODUCTION

[1]                Sans savoir qui est devant elle, comment est-ce que la Commission de l'immigration et du statut de réfugié peut faire autrement que de rejeter la demande d'asile dès qu'elle détermine que l'identité du demandeur n'est pas prouvée.

« Dans le cas où la décision de la formation de jugement est centrée en dernière analyse sur son appréciation de la crédibilité, la charge de la preuve qui incombe à celui qui se pourvoit en contrôle judiciaire est bien lourde, puisque la Cour doit être persuadée que la décision de la formation de jugement est abusive ou arbitraire, ou rendue au mépris des éléments de preuve dont elle dispose. Ainsi donc, dans le cas même où la Cour pourrait tirer une conclusion différente des preuves produites, elle n'interviendra pas à moins que le requérant n'arrive à prouver que la décision de la formation de jugement n'est fondée sur aucune preuve. » (Le juge Andrew MacKay dans Akinlolu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1997] A.C.F. no 296 (QL))

NATURE DE PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]                Il s'agit d'une demande d'autorisation et de contrôle judiciaire d'une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Commission), rendue le 16 août 2005, concluant que le demandeur n'est pas un « réfugié au sens de la Convention » ni une « personne à protéger » .

FAITS

[3]                Le demandeur, monsieur Thierno Mamadou Balde, est un citoyen de la République de Guinée. Il est arrivé au Canada le 26 octobre 2004 et a demandé l'asile un mois plus tard. Les faits qu'il a invoqués à l'appui de sa demande peuvent se résumer comme suit :

(a) En octobre 2002, il aurait ouvert une cafétéria dans la ville de Coyah;

     

(b) Le 10 juin 2003, une manifestation aurait été organisée afin de contester la décision du préfet de Coyah de vendre un terrain qui servait de lieu de rencontre et d'amusement des jeunes de Coyah. Cette manifestation aurait mal tourné, plusieurs jeunes auraient été arrêtés et détenus;

(c) Le 14 juin 2003, il aurait été interpellé afin qu'il dénonce les jeunes responsables de la manifestation. Devant son ignorance, il aurait été torturé par les autorités et détenu sans jugement durant une année pendant laquelle il aurait continué de subir des mauvais traitements;

(d) Le 30 juin 2004, il aurait réussi à s'évader avec l'aide de deux gardiens corrompus payés par son frère. Avec l'aide de son frère, il aurait été amené au village de Keitaya où il aurait reçu des soins médicaux pendant plusieurs jours;

(e) Le 25 octobre 2004, il aurait quitté Conakry muni de l'identité de son frère, pour arriver au Canada le lendemain.

DÉCISION CONTESTÉE

[4]                La Commission a d'abord conclu que monsieur Balde n'avait pas établi son identité puisqu'il n'a pas produit de documents d'identité acceptables au sens de l'article 106 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (Loi).

[5]                D'autre part, la Commission a relevé plusieurs incohérences et contradictions dans le témoignage de monsieur Balde qui l'a amenée à conclure à l'absence de crédibilité de son histoire de persécution.

QUESTION EN LITIGE

[6]                Est-ce que la décision de la Commission est manifestement déraisonnable?

ANALYSE

            Norme de contrôle

[7]                Comme ce cas est basé sur une question de crédibilité, la norme de contrôle relève d'une question du fait et donc cette Cour doit un haut degré de déférence envers la Commission. C'est-à-dire que, pour que la décision soit retournée au tribunal spécialisé, la décision du décideur de faits devrait être jugée comme manifestement déraisonnable.

[8]                Il est bien établi que la personne qui demande l'asile doit d'abord établir son identité. Il est en effet essentiel que le demandeur d'asile puisse démontrer qu'il est bien la personne qu'il prétend être avant que sa demande puisse être considérée. Cette exigence découle d'ailleurs de la règle 7 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002-228 laquelle stipule :

Documents d'identité et autres éléments de la demande

7.      Le demandeur d'asile transmet à la Section des documents acceptables pour établir son identité et les autres éléments de sa demande. S'il ne peut le faire, il en donne la raison et indique quelles mesures il a prises pour s'en procurer.

Documents establishing identity and other elements of the claim

7.      The claimant must provide acceptable documents establishing identity and other elements of the claim. A claimant who does not provide acceptable documents must explain why they were not provided and what steps were taken to obtain them.

[9]                L'article 106 de la Loi établit d'autre part que la Commission doit tenir compte de l'absence de papiers d'identité acceptables dans son évaluation de la crédibilité du demandeur :

Crédibilité

106.     La Section de la protection des réfugiés prend en compte, s'agissant de crédibilité, le fait que, n'étant pas muni de papiers d'identité acceptables, le demandeur ne peut raisonnablement en justifier la raison et n'a pas pris les mesures voulues pour s'en procurer.

Credibility

106.      The Refugee Protection Division must take into account, with respect to the credibility of a claimant, whether the claimant possesses acceptable documentation establishing identity, and if not, whether they have provided a reasonable explanation for the lack of documentation or have taken reasonable steps to obtain the documentation.

[10]            Puisque la question de savoir si le demandeur possède des documents permettant d'établir son identité est essentiellement une question de fait et de crédibilité, il va de soi que cette Cour n'interviendra que si la décision de la Commission est manifestement déraisonnable : Najam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 425, [2004] A.C.F. no 516 (QL), Gasparyan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CF 663, [2003] A.C.F. no 1103 (QL) ; Mbabazi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 1191, [2002] A.C.F. no 1623 (QL); Adar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1997] A.C.F. no 695 (QL).

[11]            En l'espèce, monsieur Balde a présenté les deux documents suivants pour établir son identité au nom de Thierno Mamadou Balde. Ces deux documents mentionnent que celui-ci est né le 6 décembre 1972 :

(a) Un extrait d'acte de naissance;

(b) Une carte nationale d'identité

[12]            Cependant, la Commission avait aussi en preuve devant elle un passeport de la République de Guinée contenant la photo de monsieur Balde au nom de Alpha Aguibou Balde, né le 6 décembre 1966 et contenant un visa canadien valide du 28 août 2004 au 23 février 2005.

[13]            Confronté à l'existence de ce passeport émis le 30 mars 2004 alors que monsieur Balde était prétendument en prison, celui-ci a confirmé que la demande de visa de résident temporaire déposée au dossier contenait bel et bien sa photo, mais a nié s'être présenté lui-même devant les autorités d'immigration canadiennes prétendant plutôt que c'était son frère, qui lui ressemblait beaucoup, qui avait fait les démarches pour lui.

[14]            Mise en présence de ces documents d'identité contradictoires, la Commission, en tant que juge des faits, devait assumer son rôle de soupeser la preuve et de décider du poids à accorder à ces documents.

[15]            Or, la Commission a décidé d'accorder davantage de poids au passeport guinéen au nom de Alpha Aguibou Balde qu'à l'extrait de naissance et à la carte d'identité en raison de l'incohérence de la preuve et de l'invraisemblance des explications fournies par monsieur Balde eu égard à l'obtention du passeport par son prétendu frère.

[16]            La Commission a noté, dans un premier temps, que dans l'extrait de naissance au nom de Thierno Mamadou Balde, il est inscrit qu'en 1972, son père avait 58 ans et sa mère 42 ans (Dossier du demandeur - p. 83). Toutefois, dans l'extrait de naissance au nom de Alpha Aguibou Balde, qui serait apparemment son frère, il est inscrit que son père est né en 1941 et sa mère en 1947 (Dossier du demandeur - p. 100).

[17]            Comme l'affirme la Commission dans ses motifs, un bref calcul nous indique que les parents de monsieur Balde avaient respectivement 31 ans et 25 ans en 1972 et non 28 ans et 42 ans, tel qu'indiqué dans l'extrait de naissance au nom de Thierno Mamadou Balde.

[18]            La Commission a, par la suite, sérieusement mis en doute qu'un agent des visas ait pu commettre une erreur aussi grossière que de ne pas détecter que la personne devant lui n'était pas la même personne que la détentrice du passeport guinéen et des photos remises en vue de l'obtention du visa.

[19]            Ceci était d'autant plus invraisemblable que l'agent des visas a reçu le candidat en entrevue et qu'il avait devant lui la « carte d'immatriculation d'activités à la direction générale de l'Office de promotion des investissements privés » , contenant la photo du titulaire.

[20]            Il ne peut être conclu en l'espèce qu'il était manifestement déraisonnable pour la Commission d'accorder d'avantage de poids au passeport guinéen au nom de Alpha Aguibou Balde qu'à un extrait de naissance qui était incohérent avec celui de son prétendu frère et à une carte d'identité émise sous la foi de ce même document.

[21]            Les allégations contenues dans le mémoire de monsieur Balde touchent principalement la manière dont la Commission a traité la preuve qui lui a été soumise. Tel qu'exposé précédemment, il incombe à la Commission de décider du poids à être donné aux éléments de preuve et non à une cour siégeant en révision judiciaire.

[22]            Premièrement, monsieur Balde allègue erronément que la Commission aurait usé d'une logique spéculative pour démontrer que l'âge de ses parents apparaissant dans son prétendu extrait d'acte de naissance et celui de son frère était différent.

[23]            Tel qu'exposé précédemment, il est inscrit, dans l'extrait de naissance au nom de Alpha Aguibou Balde (Dossier du demandeur - p. 100), que son père est né en 1941 et sa mère en 1947, ce qui est incohérent avec l'âge des parents apparaissant sur le soi-disant acte de naissance de monsieur Balde (Dossier du demandeur - p. 83).

[24]            Contrairement à ce qu'allègue monsieur Balde, la Commission n'avait pas l'obligation de le confronter à cette incohérence flagrante puisqu'elle résultait des documents personnels de monsieur Balde : Contreras c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration),[2000] A.C.F. no 906 (QL).

[25]            Quoi que tente d'insinuer monsieur Balde, une expertise des documents d'identité n'était pas essentiel à la détermination du dossier puisque la preuve présentée était contradictoire et donc suffisante en soi pour que la Commission en tire ses propres conclusions.

[26]            Dans la décision Culinescu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1997), 136 F.T.R. 241, [1997] A.C.F. no 1200 (QL), repris dans la décision Hossain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no160 (QL), cette Cour a déclaré que la crédibilité est une question de fait qui relève entièrement de la compétence de la Commission, laquelle peut mettre en doute l'authenticité ou la valeur probante d'un document si elle dispose de suffisamment d'éléments de preuve pour justifier une telle conclusion. En l'espèce, la Commission a fondé sa conclusion sur les diverses contradictions et invraisemblances qui ressortaient des documents d'identité qui étaient devant elle.

[27]            Tout compte fait, la Commission n'a pas commis d'erreur manifestement déraisonnable en concluant, sur la base des éléments de preuve qu'elle avait en sa possession et du témoignage du demandeur, que ce dernier n'a pas établi son identité au nom de Thierno Mamadou.

[28]            Cette conclusion de la Commission constitue une lacune fatale et pouvait, à elle seule, entraîner le rejet de la demande d'asile de monsieur Balde. La jurisprudence de cette Cour indique clairement que la demande d'asile doit être rejetée dès que la Commission détermine que l'identité du demandeur n'est pas prouvée : Ipala c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 472, [2005] A.C.F. no 583 (QL); Nwammadu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 107, [2005] A.C.F. no 134 (QL); Ibnmogdad c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 321, [2004] A.C.F. no 327(QL); Najam précité; Husein c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no726 (QL).

[29]            De façon subsidiaire, le Ministre soumet que même si cette Cour en venait à la conclusion que la Commission aurait erré en concluant que monsieur Balde n'a pas établi son identité, une intervention de cette Cour ne serait pas justifiée pour autant vu la conclusion d'absence de crédibilité qu'elle a en outre tirée.

[30]            Malgré sa conclusion négative portant sur l'identité de monsieur Balde, la Commission a néanmoins poursuivi son analyse de la preuve soumise, ce qui lui a permis de relever plusieurs contradictions, incohérences et invraisemblances dans son récit. Elle en a conclu que monsieur Balde n'était pas crédible.

[31]            Cette conclusion d'absence de crédibilité est essentiellement fondée sur les éléments suivants :

(i)          l'incohérence du contenu du contrat de bail (pièce P-3) et le témoignage de monsieur Balde. Dans le contrat de bail, il est mentionné que l'objectif du commerce de monsieur Balde est pour l'implantation d'un bar-café » , ce qui suggère que de l'alcool est servi aux clients. Toutefois, monsieur Balde a témoigné qu'il opérait une cafétéria où il servait du café, des cigarettes, du lait et des sandwichs (Motifs - p. 3, dern. Par.);

(ii)         l'incompatibilité des déclarations contenues dans le rapport médical (pièce P-2) avec le témoignage du demandeur. Dans son rapport, le médecin relate que monsieur Balde lui a déclaré qu'il avait été arrêté et torturé par la police guinéenne alors qu'il participait à une manifestation. Toutefois, monsieur Balde a soutenu avoir été arrêté à son commerce et détenu parce que les autorités voulaient qu'il dénonce les organisateurs de la manifestation à laquelle il n'avait pas participé. Confronté à cette incohérence, monsieur Balde était visiblement dans l'embarras et semblait improviser (Motifs - p. 4, par. 1 à 3)

(iii)        l'invraisemblance que le prétendu frère de monsieur Balde ait entrepris des démarches pour l'obtention d'un visa canadien s'il n'avait pas de quoi payer le prix du billet d'avion et la contradiction entre le témoignage de monsieur Balde et les notes de l'agent d'immigration au point d'entrée concernant ses problèmes de santé. Dans son témoignage, monsieur Balde a expliqué qu'il avait été dans l'incapacité de quitter son pays plus tôt parce qu'il avait les pieds enflés, des plaies sur les pieds et les fesses ainsi qu'une fracture à la clavicule. Pourtant, lorsqu'il lui a été demandé par lagent d'immigration au point d'entrée s'il avait des problèmes de santé physique ou mentale, monsieur Balde a répondu « non » (Motifs - p. 4, dern. Par. Et p. 5, par. 1). (Voir aussi notes de l'agent d'immigration à la page 79 du Dossier du demandeur).

(iv)        le caractère contradictoire de la preuve documentaire avec le témoignage de monsieur Balde. L'article de journal soumis par monsieur Balde n'allait pas dans le même sens que son histoire et contredisait directement certains points de celle-ci (Motifs - p. 5, par. 2-3 et p. 6, par. 1 et 2).

[32]            Monsieur Balde conteste l'incohérence soulevée par la Commission entre le contrat de bail (pièce P-3) et son témoignage. Selon lui, la Commission ne pouvait tirer une telle conclusion puisqu'en Guinée les bars où l'alcool serait vendu s'appelle « Bar-Maki » et non pas « Bar-café » .

[33]            Sans reconnaître le bien-fondé de l'allégation de monsieur Balde, le Ministre soutient que même si la Commission s'était méprise sur la preuve relativement à ce point, ce n'est pas suffisant pour invalider la conclusion d'absence de crédibilité fondée sur d'autres conclusions valables.

[34]            Les déclarations faites par le médecin dans son rapport ne sont pas conformes au témoignage de monsieur Balde à cause du fait, selon monsieur Balde, qu'il n'avait pas d'interprète avec lui lors de sa rencontre avec le médecin.

[35]            Cette contradiction ne peut pas être attribuée au seul fait que monsieur Balde n'avait pas d'interprète avec lui au moment de sa rencontre avec le médecin. Pourtant, il appert des motifs que, lorsque confronté à l'audience à cette contradiction, monsieur Balde a changé son récit pour tenter de faire concorder ce qui était écrit dans le rapport médical avec son témoignage.

[36]            L'explication apportée pour tenter de justifier la contradiction entre le rapport médical et le témoignage de monsieur Balde a même engendré une autre contradiction. Il a témoigné que c'est au cours de la manifestation qu'il avait été accusé alors qu'il soutenait dans son témoignage écrit avoir été arrêté quatre jours après la manifestation du 10 juin 2003.

[37]            Devant ces contradictions et les explications peu convaincantes de monsieur Balde, il était loisible à la Commission de tirer une conclusion négative du fait de l'incompatibilité des déclarations contenues au rapport médical avec le témoignage de monsieur Balde.

[38]            La contradiction décelée entre le témoignage de monsieur Balde et les notes de l'agent d'immigration au point d'entrée concernant ses problèmes de santé, expliquant qu'il croyait que l'agent d'immigration faisait simplement référence à des problèmes de santé mentale, ne peut pas être conciliée. En l'espèce, il est trop facile pour monsieur Balde de tenter d'expliquer après coup une contradiction dans la preuve qu'il a lui-même soumise.

[39]            Dans ces circonstances, l'explication est nettement insuffisante pour démontrer qu'il était déraisonnable pour la Commission de considérer cette contradiction entre le témoignage de monsieur Balde et les notes au point d'entrée dans l'évaluation de sa crédibilité.

[40]            Concernant la prétendue contradiction par monsieur Balde, relevée par la Commission entre l'article de journal (pièce P-6) et le témoignage de monsieur Balde, la Commission n'a pas fait une analyse erronée de l'article de journal, suite à la logique inhérente de la Commission.

[41]            Une lecture de l'article de journal déposé en preuve par monsieur Balde suite à l'audience, reproduit en page 5 des motifs de la Commission, démontre clairement que cette preuve ne va pas dans le même sens que l'histoire de monsieur Balde et qu'elle contredit directement son témoignage à certains égards.

[42]            Tel que l'a noté la Commission, on ne fait mention dans cet article d'aucune manifestation pacifique pour contester la vente d'un terrain, on parle plutôt que « La révolte qui a conduit aux malheureux incidents de Coyah, est partie d'une rumeur. Selon des témoignages, ces rumeurs qui faisaient état de bavure policière, ayant conduit à une mort et des blessés, étaient fausses. »

[43]            Aussi, contrairement à ce qu'a témoigné monsieur Balde, on ne relate pas que des habitants de Coyah et de Manéah se seraient dirigés vers le commissariat de Coyah afin d'exiger la libération de leurs jeunes. On relate plutôt que c'est un « groupe de jeunes » qui s'est déchaînés et qui a pris pour cible le commissariat de police, la résidence du préfet et l'hôpital préfectoral.

[44]            Plus encore, contrairement au témoignage de monsieur Balde selon lequel les gendarmes auraient tiré sur la foule et blessé plusieurs personnes et tué une fillette, l'article mentionne plutôt que « Les flics sans défense, face à cette foule de manifestants, ont pris leurs jambes à leur coup. »

[45]            De même, l'article mentionne que « une fois le calme revenu, les autorités ont évalué les dégâts et tenté d'apaiser les esprits. » , alors que dans le témoignage de monsieur Balde, il avait affirmé que l'escadron mobile de Conakry était venu disperser la foule.

[46]            Compte tenu de ces incohérences évidentes entre l'histoire de monsieur Balde et la preuve documentaire, il ne peut certainement pas être conclu que la conclusion de la Commission sur ce point est manifestement déraisonnable.

[47]            En l'espèce, par les allégations avancées dans son mémoire, monsieur Balde n'a pas démontré que la Commission aurait commis une erreur manifestement déraisonnable dans l'appréciation de sa crédibilité.

[48]            Il existait suffisamment d'éléments supportant une conclusion d'absence de crédibilité. Devant chacun de ces éléments, ajoutés l'un à l'autre, la Commission, dans sa logique inhérente, ne pouvait faire autrement que de conclure que monsieur Balde n'était pas crédible.

CONCLUSION

[49]            Compte tenu de ce qui précède, la requête de monsieur Balde est rejetée.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que

1.          La requête soit rejetée;

2.          Aucune question grave de portée générale soit certifiée.

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

DOSSIER :                                         IMM-5553-05

INTITULÉ :                                        THERNO MAMADOU BALDE

                                                            c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L'IMMIGRATION

LIEU DE L'AUDIENCE :                  Montréal (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                le 28 mars 2006

MOTIFS DU JUGEMENT :             LE JUGE SHORE

DATE DES MOTIFS :                       le 6 avril 2006

COMPARUTIONS:

Me Lia Cristinariu

POUR LE DEMANDEUR

Me Caroline Doyon

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER:

LIA CRISTINARIU

Montréal (Québec)

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. SIMS C.R.                                                                            POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

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