Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

Date : 20060728

Dossier : T‑808‑05

Référence : 2006 CF 936

Vancouver (Colombie‑Britannique), le 28 juillet 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE PROTONOTAIRE ROGER R. LAFRENIÈRE

 

ENTRE :

 

VACLAV SROUB

demandeur

 

et

 

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Suivant l’article 309 des Règles des Cours fédérales (Règles), le dossier du demandeur devait être déposé au plus tard le 5 août 2005. Le demandeur a dépassé ce délai sans donner de nouvelles ni prendre de mesures. Le 5 décembre 2005, le juge en chef a signifié un avis d’examen de l’état de l’instance exigeant que le demandeur donne les raisons pour lesquelles la demande ne devrait pas être rejetée pour cause de retard.

 

[2]               Dans ses observations écrites en réponse à l’avis d’examen de l’état de l’instance, le demandeur s’est excusé de sa mauvaise connaissance de l’anglais et a expliqué qu’il n’avait pas compris la procédure. Compte tenu de ces observations, il a été permis que la demande se poursuive à titre d’instance à gestion spéciale dont la protonotaire Roza Aronovitch a été désignée responsable. Dans son ordonnance datée du 14 mars 2006, la protonotaire Aronovitch a fixé un échéancier concernant les autres étapes de l’instance, notamment l’échéance du 26 mai 2006 pour la signification et le dépôt du dossier du demandeur.

 

[3]               Le demandeur a envoyé un document par la poste au greffe le 10 mai 2006, dans le but, apparemment, de se conformer à l’ordonnance de la protonotaire Aronovitch. Le dépôt du document a cependant été refusé au motif que le document n’était pas dans la forme requise par les Règles. Le 18 mai 2006, le protonotaire Lafrenière a ordonné au demandeur de présenter de nouveau son dossier en bonne et due forme au plus tard le 26 mai 2006.

 

[4]               Au début de juillet 2006, aucun dossier n’avait encore été envoyé au greffe et le demandeur n’avait pas donné signe de vie depuis les directives du protonotaire Lafrenière en date du 18 mai 2006. Le 12 juillet 2006, le protonotaire Lafrenière a donc rendu une ordonnance en vertu du paragraphe 385(2) des Règles exigeant que le demandeur présente des observations écrites, qui devaient être signifiées et déposées au plus tard le 28 juillet 2006, afin de donner les raisons pour lesquelles sa demande ne devrait pas être rejetée sans autre avis, au motif que le demandeur avait enfreint l’ordonnance de la protonotaire Aronovitch en date du 14 mars 2006 et les directives qu’il avait lui‑même données le 18 mai 2006.

 

[5]               Dans une lettre envoyée par télécopieur le 14 juillet 2006, le demandeur s’excuse encore une fois de sa mauvaise connaissance de l’anglais et de son manque de familiarité avec la procédure judiciaire. Il ajoute qu’il ne comprend pas pourquoi la Cour ne peut pas rendre jugement à partir de ses arguments fondés sur la Convention de Genève et d’un affidavit joint à ses observations.

 

[6]               En 1998, la Cour fédérale a adopté un système de gestion des instances dans le cadre d’une révision en profondeur de ses règles de procédure. L’objectif visé était d’assurer que les instances soient réglées aussi rapidement que possible et d’éviter ainsi les situations où le litige se prolonge pendant des années sans solution.

 

[7]               Le demandeur a été informé dès la première ordonnance de justification rendue le 5 décembre 2005 qu’il ne s’était pas conformé aux Règles. La Cour lui a également donné des directives pour l’aider à faire avancer l’affaire, sachant bien que les personnes qui se représentent elles‑mêmes peuvent ignorer les rouages des procédures judiciaires et ne pas comprendre le droit et la terminologie juridique. Il est clair que le demandeur a des difficultés linguistiques, mais il reste qu’étant donné qu’il se représente lui‑même, il lui incombe en fin de compte de faire avancer sa cause et, plus précisément, de se conformer aux ordonnances et directives de la Cour. Comme l’a fait remarquer le juge Hugessen dans Scheuneman c. HMQ (2003), 120 A.C.W.S. (3d) 48 (1re inst.), 2003 CFPI 37: « Le manque de formation juridique du demandeur ne lui confère pas de droits additionnels et s’il insiste pour agir pour son propre compte, il doit se soumettre aux mêmes règles qui s’appliquent à tous ».

 

[8]               L’obligation pour le demandeur de déposer un dossier comme le prévoit l’article 309 des Règles a pour but de lui permettre de préparer et de soumettre à la Cour les arguments qu’il entend invoquer à l’appui de sa demande. L’ordonnance du 14 mars 2006 et les directives du 18 mai 2006 sont succinctes et non ambiguës et elles sont rédigées dans une langue claire. Même si le demandeur n’était pas sûr de leur sens, il aurait pu chercher à obtenir des éclaircissements ou des explications sur ce qu’on attendait de lui. Rien n’indique qu’il l’a fait.

 

[9]               Dans Kalevar c. Pari libéral du Canada (2001), 110 A.C.W.S. (3d) 236, 2001 CFPI 1261, le juge Lemieux a dû se prononcer sur le cas d’un demandeur agissant pour son propre compte qui n’avait pas interjeté appel à temps d’une décision d’un protonotaire et qui essayait d’excuser son retard en affirmant qu’il ne savait pas trop à quel tribunal s’adresser. En rejetant la demande de prorogation du délai d’appel et l’appel lui‑même, le juge Lemieux a dit :

 

[23] Je souscris aux remarques que Monsieur le juge Dubé a faites dans la décision Gilling c. Canada, [1998] A.C.F. no 952 (30 juin 1998). Dans cette décision, un plaideur profane comparaissait devant le juge Dubé; voici ce que le juge a dit :

[...] Bien que la Cour prenne toujours soin de s'assurer que d'autres parties ne tirent pas avantage d'une personne qui se représente elle-même, cette personne doit suivre les Règles et n'est pas autorisée à s'en servir de manière à nuire aux autres parties. [Non souligné dans l'original.]

[24] En d'autres termes, le juge Dubé a statué, et je souscris à son avis, que les Règles de la Cour fédérale s'appliquent également à toutes les affaires, et ce, qu'un plaideur profane soit en cause ou que les services d'un avocat aient été retenus; les Règles de la Cour fédérale ne changent pas parce qu'un plaideur profane décide d'agir pour son propre compte dans une demande.

[...]

[30] Je conclurai en disant que le demandeur a de fait le droit d'avoir accès à la justice, mais qu'il doit se conformer aux Règles, qui s'appliquent à tous; en sa qualité de plaideur profane, il n'a pas plus de droits ou de privilèges que d'autres personnes qui ont peut-être eu recours à un avocat.

 

[10]           La décision Kalevar a été portée en appel devant la Cour d’appel fédérale : voir (2002), 115 A.C.W.S. (3d) 358, 2002 CAF 246, autorisation de pourvoi devant la Cour suprême du Canada refusée, [2002] C.S.C.R. no 433. En accueillant la requête du Parti libéral du Canada, qui demandait le rejet de l’appel de Kalevar, le juge Evans a fait les remarques suivantes :

... la Cour est consciente des difficultés auxquelles sont confrontées les parties qui assurent leur propre défense et, le cas échéant, elle s'y adapte. Tel que le juge Lemieux l'a souligné, toutefois, les règles s'appliquent à toutes les parties. Ceux qui persistent à ne pas les observer le font à leurs propres risques.

 

[11]           Le demandeur ne s’est pas montré disposé ou capable de compléter son dossier dans un délai raisonnable. Compte tenu de l’inaction du demandeur au cours de la dernière année et de son omission répétée de se conformer à une ordonnance claire et à des directives ultérieures de la Cour, je conclus que la présente demande devrait être rejetée.

 

ORDONNANCE

 

            LA COUR ORDONNE que la présente demande soit rejetée pour cause de retard.

 

 

                                                                                                            « Roger R. Lafrenière »

Protonotaire

 

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                T‑808‑05

 

INTITULÉ :                                                               VACLAV SROUB c. PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         -

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       -

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                               LE PROTONOTAIRE LAFRENIÈRE

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 28 JUILLET 2006

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Vaclav Sroub

 

LE DEMANDEUR pour son propre compte

 

Bahaa I. Sunallah

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Vaclav Sroub

 

LE DEMANDEUR pour son propre compte

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.