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Date : 20060802

Dossier : IMM-6088-05

Référence : 2006 CF 946

Ottawa (Ontario), le 2 août 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PHELAN

 

 

ENTRE :

KANDIAH SIVANATHAN

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

[1]               La Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté la demande d’asile du demandeur parce qu’elle avait des doutes au sujet de sa crédibilité et qu’il existait une possibilité de refuge intérieur (PRI). Il s’agit du contrôle judiciaire de la décision de la Commission.

 


II.         Les faits

[2]               Le demandeur est un Tamoul du Nord du Sri Lanka dans la mi-soixantaine. Il a fondé sa demande d’asile sur le fait qu’il craignait d’être persécuté tant par les autorités du Sri Lanka que par les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (TLET ).

 

[3]               Dans son formulaire de renseignements personnels (FRP), le demandeur a déclaré que, pendant des années, les deux groupes l’ont menacé et l’ont extorqué. En conséquence, trois de ses quatre enfants ont quitté le Sri Lanka. Il gardait espoir que la paix revienne dans son pays.

 

[4]               Le demandeur a ajouté que ses problèmes ont recommencé deux ans après qu’il eut embauché dans son restaurant un individu (Mohan) qui était soupçonné d’être lié aux TLET. Le demandeur soutient que, par conséquent, l’armée du Sri Lanka croyait qu’il était un partisan des TLET.

 

[5]               La Commission doutait de la crédibilité de son récit. Elle a conclu qu’il était improbable que le demandeur eût embauché un jeune Tamoul en âge de servir qui pouvait intéresser tant l’armée que les TLET, surtout compte tenu des difficultés qu’il avait eues par le passé.

 

[6]               La Commission a aussi conclu qu’il existait une PRI pour le demandeur à Colombo. Il était un homme d’affaire expérimenté qui avait rétabli ses commerces à de nombreuses reprises. La Commission a conclu qu’il pouvait trouver le financement nécessaire pour partir un nouveau commerce et qu’il n’avait pas prouvé l’existence des autres obstacles à la PRI qu’il avait allégués.

 

III.       Analyse

[7]               En ce qui a trait aux questions de crédibilité, la décision manifestement déraisonnable est la norme de contrôle applicable, comme il l’a été bien établi dans l’affaire Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 N.R. 315. Quant à la question de l’existence d’une PRI viable, il s’agit d’une analyse des faits. La Cour a conclu que, lorsque cette analyse est fondée sur un examen approprié des preuves dont la Commission est saisie, la décision manifestement déraisonnable est aussi la norme de contrôle applicable (voir Sarker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’immigration), 2005 CF 353, [2005] A.C.F. no 435 (QL)).

 

[8]               Le demandeur soutient que la Commission a omis de traiter de sa crainte d’être victime d’extorsion. Il s’appuie également sur la décision que j’ai rendue dans l’affaire Supiramaniam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1264, [2005] A.C.F. no 1525 (QL), dans laquelle un Tamoul dans la mi-soixantaine craignait d’être victime d’extorsion de la part des TLET parce qu’il avait des enfants qui habitaient à l’extérieur du Sri Lanka et que, par conséquent, les TLET croyaient qu’il avait de l’argent et qu’il pouvait leur donner un soutien financier.

 

[9]               Le problème que pose l’argument du demandeur est que sa crainte de persécution n’était pas fondée sur l’extorsion. Sa demande était fondée essentiellement sur le fait qu’il avait embauché un jeune Tamoul et qu’il serait perçu comme un partisan des TLET, et non sur le fait que les TLET tenteraient de lui extorquer de l’argent.

 

[10]           Ce fait est la raison principale pour laquelle l’affaire en l’espèce se distingue de l’affaire Supiramaniam, précitée, dans laquelle l’extorsion était l’élément central de la demande d’asile.

 

[11]           La Commission avait des motifs raisonnables de douter de la crédibilité de la demande d’asile. L’allégation selon laquelle l’ordre inversé de l’interrogatoire avait empêché le demandeur d’établir le bien-fondé de sa demande n’est pas appuyée par les faits. Dès la préparation de son FRP, le demandeur a choisi de mettre l’accent sur sa crainte découlant de l’embauche de Mohan. Il a ensuite souligné ce motif dans son témoignage. Le demandeur ne peut pas remanier sa preuve à l’étape du contrôle judiciaire.

 

[12]           En ce qui a trait à l’existence d’une PRI, le demandeur a tenté de réfuter la présomption relative à l’existence d’une PRI en soutenant qu’il ne pouvait pas obtenir de financement pour s’établir à nouveau à Colombo. La Commission n’a pas accepté cette affirmation compte tenu de l’expérience du demandeur. Il n’a pas fondé ses allégations selon lesquelles il n’avait pas de PRI sur sa crainte d’être victime d’extorsion.

 

[13]           Enfin, le demandeur allègue que la Commission n’a pas effectué une analyse distincte fondée sur l’article 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Bien que la Commission n’ait pas expressément fait référence à l’article 97 (ce qu’elle n’est pas obligée de faire), elle s’est conformée aux exigences de la Loi : elle a tenu compte des motifs prévus à l’article 97. À l’avant-dernier paragraphe de ses motifs, elle a conclu :

Par ailleurs, le tribunal conclut qu’il n’existe pas de possibilité raisonnable ou sérieuse que le demandeur d’asile soit persécuté s’il retourne au Sri Lanka.

 

[14]           Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Aucune question n’a été énoncée pour la certification.

 

JUGEMENT

            LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6088-05

 

INTITULÉ :                                       KANDIAH SIVANATHAN

 

                                                            c.

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 11 juillet 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Phelan

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 2 août 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Kumar Sriskanda

 

POUR LE DEMANDEUR

Judy Michaely

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

KUMAR SRISKANDA

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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